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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Chapitre 6 – Transport des argiles dans les environnements


continentaux et marins
Introduction
Vu leur taille, les argiles vont rester longtemps en suspension et être transportées sur de plus
longues distances par rapport aux autres minéraux des fractions plus grossières (Fig. 6.1). On constate
un enrichissement progressif des rivières vers les océans ou les lacs. La figure 6.2. illustre les modes
de transport des matériaux argileux à l’océan. Nous allons étudier les assemblages argileux des
minéraux typiques des apports éoliens, des particules en suspension dans les rivières, estuaires, lacs
puis des bassins océaniques.

argile fraction

Figure 6.1 – Transport des argiles et accumulation dans les lacs et les océans (Velde, 1995).

Figure 6.2 – Mécanismes de transport des argiles détritiques dans l’océan (Modifié de Stow, 1994 et
Washner, 1999).

A. Domaine continental
6.1. Apports éoliens
Les poussières éoliennes collectées à proximité des déserts contiennent généralement une
abondante quantité de quartz en association avec des minéraux argileux ou non. Le spectre
minéralogique est assez large et reflète la compositions des régions sources (Tab. 6.1.).

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Table 6.1 – Constituants minéraux majeurs (X) et mineurs (x) d’aérosols


continentaux prélevés entre 1966 et 1985 (Weaver, 1989).

La figure 6.3 présente les résultats d’une étude de la composition minéralogique d’une trentaine
d’échantillons de poussières éoliennes collectées dans le Sahara en mai 1974 à 2000m d’altitude sur
une distance de 500 km. Paquet et al. (1977) observent l’abondance des minéraux argileux (>25%)
avec des espèces très variées (illite, chlorite, interstratifiés I-S et C-S, smectite, kaolinite,
palygorskite). Les minéraux se distribuent en 4 groupes reflétant l’importance des sources locales et
l’érosion de sols et sédiments. L’importance des sources locales diminue avec la distance et avec les
tempêtes qui homogénéisent les produits issus des différentes sources.

Apports éoliens
Figure 6.3 - Assemblages minéralogiques des poussières sahariennes (Chamley, 1989).

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La signatures des poussières éoliennes récoltées au-dessus de différents bassins océaniques est
présentée dans le tableau 6.2. Pour l’Océan Atlantique, de nombreuses données sont disponibles.
L’illite et la kaolinite sont les 2 minéraux argileux les plus abondants. Globalement il existe peu de
variations quantitatives entre les données suite à l’homogénéisation lorsque la distance de transport
augmente. En ce qui concerne le Pacifique, les données sont peu abondantes. La faible concentration
des poussières dans chaque échantillon récolté rend contestable les estimations. Cependant l’illite reste
le minéral argileux le plus important. Des variations minéralogiques assez importantes existent en
fonction des latitudes. Cette zonation reflète principalement les compositions contrastées des régions
sources et la distribution des courants atmosphériques.
Table 6.2 –- Assemblages minéralogiques des aérosols océaniques - Chamley, 1989
(italiques: minéraux argileux exprimés en % relatifs, total des argiles normalisé à 100%;
quartz exprimé en % pondéral de l’échantillon total)

Le transport des particules varie selon la vitesse de l’agent de transport mais aussi du diamètre des
particules (Fig. 6.4). Pour des particules < 80 microns, un transport direct est quasi impossible car les
petites particules deviennent aérodynamiquement lisses et les forces électrostatiques sont trop fortes.
Par conséquent, les argiles sont entraînées suite à l’abrasion et à la fragmentation de particules plus
larges pendant le transport ou suite à l’impact de grains plus grossiers. Les tempêtes de désert
transportent du matériel jusqu’à 3km d’altitude sur des distances de plusieurs milliers de kilomètres.

Figure 6.4 – Vitesse du vent requise pour le transport de particules


selon leur granulométrie (Velde, 1995).

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Exemples de distribution de minéraux argileux


La figure 6.5 montre la distribution de la kaolinite dans les sédiments de surface au large de
l’Australie. Dans le Pacifique Sud, il existe une bande d’enrichissement en quartz, illite et kaolinite qui
s’étend vers le SE depuis l’Australie vers la Nouvelle-Zélande. Cette distribution se corrèle
parfaitement avec la trajectoire des poussières formées dans les déserts australiens. Dans l’Océan
Indien, il y a également une zone enrichie en kaolinite vers l’ouest suite au transport par les vents
depuis les régions désertiques.

Figure 6.5 –- Abondance relative de la kaolinite dans les sédiments de surface


au large de l’Australie - Chamley, 1989

La figure 6.6 présente la carte de distribution des argiles fibreuses. Dans les bassins océaniques, la
Mer d’Arabie par exemple, l’abondance de la palygorskite reflète le trajet des vents associés à la
mousson.

Figure 6.6 – Distribution des argiles fibreuses en domaine continental et océanique (Velde, 1995).

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6.2. Apports fluviatiles


Les études dans les années 50 ont démontré la bonne correspondance entre la composition des
sédiments de rivières et les formations géologiques et pédologiques adjacentes soumises à l’érosion.
L’analyse des particules en suspension, dans les années 80, a ensuite confirmé le parallélisme avec la
minéralogie des bassins versants. De nombreuses études ont été menées pour caractériser la
composition minéralogique moyenne des particules en suspension des grandes rivières (Fig. 6.7).
Globalement, les argiles constituent le composant principal des particules en suspension et reflètent
principalement la composition des sols du bassin versant. L’illite est abondante dans les rivières des
hautes latitudes (e.g., Mackenzie, Saint-Laurent), dans des régions drainant des zones montagneuses
(e.g., Indus, Gange, Brahmapoutre) ou très arides (Orange). La kaolinite est importante dans les
rivières des régions tropicales où la chlorite est généralement absente (Niger, Congo, Nil, Orange). La
smectite se rencontre dans des rivières des zones tropicales et subtropicales (Caroni, Niger, Nil,
Orange). En plus de ces tendances générales, on constate parfois une certaine saisonnalité, par
exemple un changement minéralogique suite à une tempête.

Apports par les rivières

Figure 6.7–- Distribution des minéraux dans la fraction particulaire de


différentes rivières – Weaver, 1989

En plus de l’influence des conditions climatiques ou topographiques (Fig. 6.8), la composition


minéralogique des apports fluviatiles est fortement influencée par la taille des particules (Fig. 6.9): les
minéraux argileux se concentrent dans les fractions fines. Parmi les argiles, la forme des particules et
la distribution des charges de surface jouent sur la distribution minéralogique. La kaolinite sédimente
généralement plus rapidement que les particules de smectites de plus petite taille en général. La
distribution des argiles dans les fleuves Mississippi et Amazone est comparée à la figure 6.9. Pour le
Mississippi par exemple (Fig. 6.10), la composition minéralogique moyenne du fleuve reflète le
mélange des différents apports, avec une contribution relative à la charge en suspension de chacun des
affluents.

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Figure 6.8 – Distribution minéralogique et granulométrique de la matière


particulaire collectée dans différentes rivières : Influence du relief et du climat (Weaver, 1989).

Figure 6.9 – Distribution minéralogique et granulométrique de la matière particulaire collectée


dans l’Amazone et le Mississippi (Chamley, 1989).

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Figure 6.10 – Assemblages minéralogiques de la matière


particulaire dans les affluents du Mississippi (Weaver, 1989).

6.3. Sédimentation lacustre


Les sédiments lacustres comprennent la majorité des minéraux, argileux et non argileux, issus des
différents types de roches. Les illites et les smectites sont les minéraux argileux dominants,
accompagnés éventuellement de chlorite, kaolinite et/ou palygorskite selon l’environnement.
Généralement il existe une correspondance entre la composition des sédiments lacustres et la
composition minéralogique moyenne des roches et sols des bassins versants. Notons que la
minéralogie est très différente selon qu’il s’agit d’un lac salé ou non.

Environnements salins
Les lacs salés se développe uniquement dans des conditions exceptionnelles, lié à une évaporation
importante ou à des apports d’eau salée. Leur répartition est inégale, ces lacs pouvant être importants
dans certaines régions du monde (Ouest USA, Est Afrique). Les sédiments lacustres comprennent des
assemblages argileux généralement variés, incluant des minéraux détritiques et authigènes.

Tab. 6.3 –- Minéralogie de la fraction argileuse dans les sédiments lacustres:


Exemple du lac Kineret - Chamley, 1989

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Le tableau 6.3 donne les assemblages minéralogiques de la fraction argileuse des sédiments d’un
lac israélien. L’association des smectites, kaolinite et palygorskite reflète la composition des roches et
des sols du bassin versant. Les smectites, par exemple, sont issues de l’altération des roches
basaltiques et des profils pédologiques associés. Ce lac se caractérise pas peu de minéraux authigènes.
Le lac Chad (Fig. 6.11a), par contre, se distingue par l’abondance de minéraux authigènes (e. g.,
smectite Mg). Les apports des principales rivières au sud du lac ont une composition minéralogique
différente de la majorité des sédiments du lac. Les apports fluviatiles comprennent de la kaolinite
dominante avec de l’illite, du quartz et des feldspaths. Cet assemblage reflète les apports détritiques du
substrat précambrien. Les sédiments de surface du lac montre une zonation de la composition des
smectites. Des smectites Fe-Al, ayant la même composition que les vertisols adjacents, dominent dans
la partie sud du lac. Vers le nord, les conditions d’évaporation sont plus importantes et ce sont des
smectites Mg (stevensite) qui dominent. Des nontronites sont observées au niveau du delta de la
rivière Chari. La figure 6.11b présente la position de la composition des eaux de la rivière et du lac
dans un diagramme d’équilibre.

Figure 6.11a –- Composition des smectites dans les sédiments du lac Chad,
Afrique Centrale - Chamley, 1989

Figure 6.11b –- Diagramme de stabilité et compositions des smectites des sédiments du Lac Chad -
Chamley, 1989

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Environnements non salins


Dans les lacs récents, l’association minérale reflète principalement les conditions d’altération
(climat, relief, tectonique..) du bassin versant (cf. Chapitre 5). Les argiles lacustres sont donc utilisées
comme un outil paléoclimatique. Notons qu’il existe parfois un mimétisme de composition entre les
minéraux formés dans les sols et les minéraux authigènes du lac. Cela complique l’identification de
l’origine des minéraux argileux. Il faut généralement une étude complète des assemblages
minéralogiques des bassins versants pour interpréter les assemblages lacustres.

A. Du continent à l’océan
Estuaires et delta
Les estuaires constituent une transition entre le continent et l’océan. Les argiles qui constituent la
majorité des particules en suspension des rivières vont donc passer d’un environnement pauvre en ions
dissous à un environnement plus concentré suite au changement de salinité, parallèlement au pH. Les
argiles vont être particulièrement sensibles vu leurs propriétés de surface (cf. Chapitre 4). La figure
6.12a montre la distribution des minéraux argileux dans les sédiments du delta de la Guadalupe (Golfe
du Mexique, USA). La smectite tend à diminuer vers le large alors que chlorite et illite augmentent.
Grim & Johns (1954) interprètent ce changement par la transformation des smectites lors de leur
contact avec des environnements salins.

Rôle des estuaires

Figure 6.12a – Variation de la composition des minéraux argileux selon la position par
rapport à l’embouchure de la Rivière Guadalupe , Golfe du Mexique –- Weaver, 1989

En 1972, Morton a élargi cette étude à plus de 80 échantillons prélevés selon un transect du delta
vers le golfe (Fig. 6.12b): il ne note pas de différence entre l’abondance des smectites, illite et
kaolinite entre les 2 environnements, la chlorite n’est pas observée au niveau du delta. La similarité
dans l’assemblage de la rivière et de la baie ainsi que l’absence locale de chlorite démontrent que
l’assemblage minéralogique dans l’environnement marin est sous le contrôle dominant des apports
détritiques et ne résulte pas de modification chimique in situ. La distribution s’explique plutôt par un
processus de sédimentation différentielle.

Zone étudiée par Grim & Johns, 1954

Figure 6.12b – Variation de la composition des minéraux argileux selon la position par
rapport à l’embouchure de la Rivière Guadalupe , Golfe du Mexique –- Chamley, 1989

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Des expériences ont montré qu’à la transition rivière/océan, il pouvait se produire un transport et
une sédimentation sélectifs des minéraux argileux. Whitehouse & Carter (1958) ont observé la
sédimentation préférentielle de la kaolinite et de l’illite par rapport à la smectite dans des eaux de
faible salinité où les argiles ont tendance à flocculer suite à l’adsorption de cations. Les figures 6.13a
et b illustrent la répartition des charges à proximité de la surface des argiles selon la concentration en
cations des eaux. Au niveau d’un estuaire, l’illite et la kaolinite vont sédimenter tandis que la smectite
aura tendance à rester en solution. Le processus de sédimentation différentielle dépend de nombreux
paramètres: pH, T°, turbulence des eaux, % matière organique, concentration en ions dissous…En
moyenne, selon les expériences menées par Whitehouse et al. (1960) sur des suspension mono-
minérale et sans déplacement, le taux de sédimentation pour la smectite est de 1.3m/j ; 11.8m pour la
kaolinite et 15.8m pour l’illite pour une température de 26°C et une salinité de 18/1000. Globalement
la smectite sédimente donc moins rapidement que les autres argiles suite à ses propriétés de taille,
forme et d’interaction avec l’eau.

Figure 6.13a – Floculation des argiles (Velde, 1995).

Figure 6.13b – Flocculation des argiles –- Velde, 1995

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De nombreuses études ont par la suite confirmé le processus de sédimentation différentielle dans les
environnements estuariens. Les figures 6.14, 6.15 et 6.16 présentent la distribution des minéraux
argileux selon des transects de l’estuaire vers l’océan pour différents fleuves (Loire en France,
Guadalquivir en Espagne, St James, aux USA).

Figure 6.14 –
Sédimentation
différentielle des
argiles: Exemple
de l’Estuaire de la
Loire, France –-
Chamley, 1989

Figure 6.15–
Sédimentation
différentielle des
argiles: Exemple de
l’Estuaire du
Guadalquivir,
Espagne - Chamley,
1989

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Figure 6.16 – Sédimentation


différentielle des argiles:
Exemple de l’estuaire de la
rivière St James , USA
- Chamley, 1989

C. Apports à l’océan
Introduction
Globalement, on observe une variation granulométrique et minéralogique de la côte vers le large
(Fig. 6.17) : la proportion d’argile dans le sédiment augmente vers le large et l’assemblage
minéralogique évolue suite au processus de sédimentation différentielle: la kaolinite sédimente
d’abord puis illite, chlorite, smectite et palygorskite. Peu d’études ont tenté d’expliquer le mécanisme
détaillé responsable de la sédimentation différentielle des minéraux argileux dans le milieu marin. Le
mécanisme de sédimentation par floculation sélective est le plus fréquemment cité, lié aux nombreux
travaux de Whitehouse & McCarter (1958) et Whitehouse et al. (1960). Les évidences de floculation
ne concernent que les environnements estuariens.

Apports à l’océan

Figure 6.17a – Accumulation sédimentaire et classement des sédiments à


l’embouchure d’une rivière - Weaver

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Figure 6.17b – Variation latérale de la minéralogie des argiles selon la


distance de transport – Eslinger & Peaver, 1988

Gibbs en 1977 a étudié les facteurs contrôlant la ségrégation de minéraux argileux en milieu marin
dans l’Atlantique ouest équatorial au niveau de l’embouchure de l’Amazone, sur une distance de
1400km (Fig. 6.18). De l’embouchure vers le NW le long de la côte, la smectite évolue de 27 à 40%
dans la fraction argileuse, la kaolinite diminue légèrement de 36 à 32% et l’illite chute de 28 à 18%.
Ces tendances sont parallèles à la côte mais il existe une tendance similaire à travers la plateforme.

Figure 6.18 – Etude de la ségrégation


des argiles en milieu marin au large
de l’Amazone - Weaver, 1989

Gibbs a envisagé 3 causes pour expliquer les variations minéralogiques observées :


(1) un processus de transformation chimique ;
(2) un processus de sédimentation différentielle ;
(3) une ségrégation physique des particules.

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Le premier processus est trop lent (> 5 ans) et n’est pas confirmé par des différences entre les
sédiments récents et plus anciens. De plus, ce processus conduirait à la transformation des vermiculites
et chlorites en illites, des smectites en illite et chlorites alors que l’on observe plutôt une augmentation
des smectites et une diminution des illites. L’augmentation de la smectite vers le large pourrait
s’expliquer par la sédimentation différentielle. Cependant illite et kaolinite floculent rapidement dès
qu’il se produit un changement de salinité de 2/1000, elles sédimentent donc rapidement dans des eaux
légèrement salées. La smectite sédimente plus lentement mais elle aura floculé à quelques dizaines de
kilomètres de l’embouchure où la salinité approche la valeur de l’eau de mer. Gibbs a calculé
l’assemblage théorique des sédiments en appliquant les vitesses de sédimentation déterminées par
Whitehouse pour différentes salinités dans le delta de l’Amazone. Ses résultats indiquent un dépôt
rapide des illites et kaolinites à proximité de l’embouchure et un assemblage quasi pur en smectite en
aval. Ce schéma est très différent des observations. Même si il existe un biais lié à l’extrapolation de
données expérimentales à des conditions naturelles plus complexes (turbulence, mélange
minéralogique..), la différence entre le modèle théorique et les observations implique que la
floculation ne peut à elle-seule expliquer la ségrégation minéralogique observée. Par conséquent,
Gibbs envisage une influence de la ségrégation des particules due à leur taille : les particules les plus
fines (i.e., smectite 0.1 à 0.9 microns, 0.4 de moyenne dans l’Amazone) seraient transportées plus loin
par rapport aux particules plus grossières (illite: 0.4-80 microns, moyenne 2 à 4 microns; kaolinite :
0.4-10 microns, moyenne 1-2 microns). Gibbs a testé cette hypothèse en mesurant la surface sous la
courbe de distribution pour chaque espèce argileuse et en calculant un assemblage minéralogique
moyen pour une gamme granulométrique (courbe en traits sur Fig. 6.18b). Il existe une bonne
correspondance entre la composition actuelle des sédiments et la composition prédite par le modèle.
De plus, Gibbs a également réalisé des essais de ségrégation de suspensions de l’Amazone mises à
décanter dans un bècher : ces simulations confirment les observations. En conclusion, la ségrégation
physique semble le mécanisme le mieux adapté pour expliquer la différenciation minéralogique dans
l’Atlantique Ouest. Ceci ne signifie pas que c’est le mécanisme dominant dans tous les cas. Il faudrait
répéter l’étude de Gibbs pour d’autres régions du globe avec d’autres assemblages minéralogiques, des
conditions hydro-dynamiques différentes…Enfin, des observations au microscope électronique à
balayage ont mis en évidence l’existence de particules de kaolinite beaucoup plus petites que les
smectites. Ceci implique que d’autres propriétés que la taille interviennent (e.g., forme, charge
électrostatique).

Distribution des argiles en milieu océanique


Les données concernant la distribution des minéraux argileux dans les océans ont été acquises par
différents auteurs (Biscaye, 1965 ; Griffin et al., 1968, Rateev et al., 1968). Ces données ont été
compilées et synthétisées par Window (1976) sous la forme de carte de distribution (Fig. 6.19). Les
données sont moyennées pour les sédiments de surface des grands bassins océaniques (Tab. 6.4, Fig.
6.20). Elles constituent une référence à large échelle même s’il existe de nombreuses imprécisions
locales.

Table 6.4 – Composition minéralogique moyenne des sédiments de surface dans


différents bassins océaniques –- Chamley, 1989

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Atlantic Indian Pacific


100%
90%
Relative clay mineral abundance

80%

70%

60%
50%

40%
30%
20%

10%
0%

Indian Ocean
North Atlantic

Carrabian Sea
Gulf of Mexico

Bay of Bengal
South Atlantic

Arabian Sea

North Pacific

South Pacific
Oceanic basins
chlorite illite smectite kaolinite
Fig. 6.20 – Assemblage minéralogique moyen des sédiments de surface des différents bassins océaniques.

Parmi les minéraux argileux, les illites et les smectites sont les plus répandues, elles peuvent
représenter jusqu’à 50 à 70% de la fraction argileuse. Chlorite et kaolinite sont moins abondantes,
elles dépassent exceptionnellement 50% et sont fréquemment inférieures à 10.
- La kaolinite est un minéral abondant dans les sols des régions intertropicales. La distribution
océanique de la kaolinite reflète un contrôle climatique dominant. L’abondance de la kaolinite
augmente vers l’équateur dans tous les bassins océaniques et montre un contrôle par l’intensité de
l’hydrolyse.
- La chlorite montre une augmentation vers les hautes latitudes, elle est principalement issue de
l’érosion physique des roches magmatiques et métamorphiques en conditions d’altération chimique
limitée. La chlorite varie souvent en antagonisme avec la kaolinite.
- L’abondance de l’illite augmente vers les hautes latitudes parallèlement à la chlorite. Sa
distribution reflète le ralentissement de l’hydrolyse et l’augmentation de l’altération physique.
- La distribution des minéraux fibreux reflète souvent la trajectoires des courants atmosphériques
(e.g., Mer d’Arabie).
- La distribution de la smectite est plus confuse, liée à leur double origine (altération,
authigenèse). Ceci démontre que le contrôle climatique peut être accessoire par rapport à d’autres
facteurs (e.g., apports volcaniques).

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Illite

smectite

kaolinite

chlorite

Figure 6.19 – Distribution des minéraux argileux dans les sédiments de surface
des différents bassins océaniques – d’après Windom, 1976 (in Velde, 1995).

Globalement, les apports détritiques dominent les apports minéralogiques à la sédimentation


océanique. La distribution des argiles montre une zonation latitudinale, cette distribution zonale
reflète la distribution des zones d’altération chimique sur les continents. Les argiles peuvent être
divisées en 2 groupes : (1) les minéraux des climats froids et tempérés, i.e., illite et chlorite, qui
diminuent vers l’équateur; (2) les minéraux des climats tropicaux et équatoriaux, i.e., kaolinite, une
partie des smectites. Par conséquent les minéraux argileux des sédiments marins reflètent les
conditions d’hydrolyse dans le bassin versant.

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Le tableau 6.5 présente une compilation des données sur la distribution minéralogique et
granulométrique du matériel sédimentaire apporté à l’océan. Les résultats montre la dominance des
argiles (67 %) sur les silts (26 %) et les sables (7 %). En considérant les surfaces différentes
correspondant aux zones climatiques, les différences de drainage et la composition minéralogique, on
peut déterminer la contribution de chaque zone climatique dans l’apport à l’océan pour différentes
fractions granulométriques. Les fractions silto-sableuses sont majoritairement issues des régions
équatoriales humides: 3.8 millions de tonnes (soit 57 % de la masse délivrée à l’océan). La fraction
argileuse représente 15.2 millions de tonnes (soit > 90 %). Ces données montrent que la quantité et la
granulométrie du matériel apporté à l’océan changent d’une zone climatique à une autre mais aussi
que les assemblages minéralogiques peuvent changer.

Table 6.5a – matériel sédimentaire apporté à l’océan : minéralogie, flux annuel Lisitzin, 1996.

Table 6.5b - Matériel sédimentaire apporté à l’océan: granulométrie - Lisitzin, 1996

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

Cependant des études récentes montrent de nombreuses exceptions, ce qui montre que le climat
n’est pas le seul facteur. La pétrographie de la région source devient le paramètre essentiel lorsque
l’altération chimique est faible. Ceci explique pourquoi la kaolinite, les smectites et autres minéraux
de basse latitude, se retrouvent dans les bassins arctiques et péri-antarctiques. De plus les courants
océaniques interviennent dans la distribution des minéraux argileux des sédiments océaniques et
altèrent la zonation climatique idéale (Fig.6.20). Des apports advectifs longues distances, via les vents
ou les courants marins, peuvent également perturber le schéma idéal. Les apports terrigènes peuvent
être complétés ou remplacés par des formations authigènes dans des environnements marqués par une
activité hydrothermale et/ou volcanique ainsi que dans des domaines de faibles apports continentaux.

Fig. 6.20 – Exemples d’évolution de la composition des assemblages argileux des sédiments marins en
relation avec la profondeur: relation entre minéralogie des argiles, circulation océanique profonde et
et masses d’eau. Données de Fagel et al. 1996 (A) ; Melguen et al. 1978 (B) ; Petschick et al. , 1996 (C).

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Géologie des argiles Chapitre 6 Environnements sédimentaires

En conclusion, des études complémentaires sont souvent nécessaires pour interpréter les
assemblages argileux complexes des sédiments marins. Par exemple, les signatures isotopiques des
argiles peuvent permettre d’identifier les régions sources (e.g., Fig. 6.21).

Fig. 6.21 – Signature isotopique en Sr (composition 86Sr/87Sr) des sédiments holocènes collectés dans les
bassins est Atlantique le long de trois transects perpendiculaires à la ride médio-océanique MAR (Clauer
et Chaudhuri, 1995).

Fig. 6.22 – Evolution parallèle de la signature isotopique en Nd de la fraction fine des sédiments marins
et la minéralogie des argiles, Mer du Labrador. Illustration du concept de traçage isotopique des masses
d’eau. Données de Fagel et al. (1996) et Innocent et al. (1997).

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