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La Triple Enceinte [1]

Article publié par EzoOccult le Webzine d'Hermès et mis à jour le : 28 décembre 2015

Nous avons récolté deux textes parus dans la Revue Atlantis et illustrant la symbolique de la Triple
Enceinte ou, comme nous l’appelons chez nous, le Temple de Salomon.
Le premier texte est de Paul Le Cour et aborde les découvertes relatives à une inscription lapidaire
trouvée dans l’église de Saint-Lubin à Suèvres.
Le second texte, sous forme de lettre, est une réponse donnée par Charbonneau-Lassay au texte de
Le Cour.
Bien que ces deux textes datent quelque peu, il nous semble utile de les reproduire pour le plus
grand plaisir des symbolistes que nous sommes. Voici d’ailleurs ce que nous en dit Jean-Baptiste
Willermot en son Temple et initiation dans le chapitre « Temple et quête initiatique » : « Dans sa
quête initiatique l’homme recherche la parole perdue, car, retrouver cette parole, en l’occurrence le
Nom incommunicable IEOVAH force active de l’ancienne alliance, c’est réunifier et harmoniser en
soi toutes les potentialités, toutes les manifestations de tous les niveaux de l’être: physique,
psychique et spirituel. C’est reconstruire, en “rassemblant ce qui est épars”, l’homme total; c’est la
réédification mystique du temple intérieur (le sanctuaire du Cœur) dans lequel pourra descendre
(puisque devenu “vierge” par les différentes purifications) le Verbe, dont le Nom est IEOCHOUAH
».
Retrouver la Parole perdue, c’est se recouvrir de la puissance de l’Éternel, aller vers l’unification et
l’identification entre la lumière intérieure (celle qui luit dans nos ténèbres) et la lumière universelle
extérieure. Par le Nom, Dieu se révèle à l’homme.
Dans ce contexte, le temple de Salomon, jusqu’à ce jour inégalé sauf par le Christ, est l’image,
l’emblème de l’homme émané de Dieu dans toute sa splendeur et dans ses privilèges originels.
Je vous propose à présent une visite guidée du temple et le but ultime du ‘voyage’ consiste à
découvrir le NOM, au cœur même de l’édifice. Il faut pour cela suivre le ‘labyrinthe de la parole
perdue et franchir la triple enceinte’. Faut-il préciser que ce chemin initiatique est calqué sur les
pérégrinations des Israélites en recherche d’une terre d’accueil, la recherche de la terre
promise ? Pour suivre cet itinéraire et ses étapes cruciales, je tracerai un parallèle schématique entre
le modèle du Temple, les mondes classés selon la tradition kabbalistique et la constitution de
l’homme.
Le schéma parlera de lui-même.
En Franc-Maçonnerie, théoriquement, l’apprenti, lors de son initiation, reçoit la lumière et passe du
parvis dans la première enceinte du temple: le Porche. C’est là que se tient la Loge. Il vient de
mourir au monde profane et de subir sa seconde naissance, naissance à un monde spirituel et
initiatique. Dans le Porche il aperçoit les 4 outils nécessaires à son perfectionnement physique,
moral et intellectuel l’amenant progressivement à la maîtrise et à la connaissance de l’Étoile
flamboyante et de la lettre G. Jusqu’à son élévation au grade de Maître-Maçon il aura à cœur de se
perfectionner dans l’Art Royal, œuvrant toujours et partout, autour de lui comme en lui-même, avec
justice et équité.
Dans le déroulement du rituel du 4e grade du R.É.R, le Maître-Maçon est reçu sur les ruines du
premier temple (celui de Salomon) et, pour accéder à la seconde enceinte, c’est-à-dire le Sanctuaire,
il lui faut passer symboliquement par la mer d’airain et s’y purifier. Cela n’est pas sans rappeler St.
Jean Baptiste baptisant d’eau ceux qui sont appelés à aplanir le sentier et à gravir la montagne pour
entendre la parole vivante du Christ. La conscience de l’initié est dès lors portée sur le monde
psychique, le monde de l’âme (symbolisée par l’eau) et il devient actif sur deux plans
simultanément: le plan terrestre ou hylique et le plan psychique.
Si l’entrée dans le Sanctuaire n’est qu’un passage obligé, c’est maintenant que commence
réellement la carrière de sa régénération, dont le chandelier, l’autel des parfums et la table des pains
de proposition lui indiquent les étapes. L’initié s’attache dès lors au service du Temple et devient
ministre du culte; il accède à la cour des Lévites. Devant lui il aperçoit l’étoile à six branches, le
sceau de Salomon, le sceau de l’union et de l’harmonie.
L’initiation Martiniste au premier degré d’ « Associé » débute à ce niveau, directement, et suppose
que l’Homme de Désir ait accompli, par lui-même, tout le cheminement décrit ci-dessus.
À force de courage, de persévérance et de prières nous découvrons dans toute sa splendeur le Nom
sacré écrit en lettres de feu. Il est la racine de toute chose, la vie de tout l’univers. La vision et la
reconnaissance de ce Nom élève notre conscience jusque dans le plan spirituel ou pneumatique; là
l’homme est délivré à jamais des renaissances mortelles et multiformes puisqu’il est parvenu à
s’identifier à l’esprit immortel universel.
Bientôt peut-être, après cette extraordinaire découverte, l’initié aura-t-il connaissance de la
prononciation du Nom sacré… Celle-ci lui procurera le baptême de l’Esprit, la 3e naissance,
naissance au monde divin et l’entrée dans la troisième enceinte: le Saint des Saints. Là se trouvent
l’arche et la nuée au-delà de laquelle se tient l’Éternel. La 3e naissance, procurée par la
prononciation du NOM central, ouvre la dernière étape conduisant l’être à sa réintégration finale.
LIRE Initiation et rituel (Anonyme)
La découverte du Nom transpose l’homme vers l’état sacerdotal figuré par l’autel des parfums.
Dans cet état aussi, l’homme sera revêtu du corps de lumière et rétabli dans ses premières fonctions
et prérogatives. Le Verbe divin a éclos dans le temple de son cœur.
Mais avant d’aspirer à une si haute destination, attachons-nous d’abord à dégager les sens
symboliques de la mer d’airain, du chandelier, de la table des pains de proposition et de l’autel des
parfums ».
Spartakus FreeMann, Nadir de Libertalia, décembre 2004 e.v.
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La Triple Enceinte
Par Paul Le Cour
Vers l’an 1800 on découvrit, près de l’église Saint-Lubin, à Suèvres (Loir-et-Cher), localité située
au bord de la Loire et aux confins de l’ancienne forêt d’Orléans, un bloc de pierre de 1 mètre 50 sur
0,95 M, grossièrement équarri et dont une face aplanie portait une curieuse gravure et un certain
nombre de cavités ou cupules.

Cette pierre recouvrait l’orifice d’un puits. Elle a été transportée à Blois et on peut la voir
actuellement dans la cour de l’ancien évêché devenu musée d’archéologie.
M. Florance, président de la Société d’Histoire naturelle et d’Anthropologie du Loir-et-Cher, auteur
de nombreux travaux sur la préhistoire de ce département, la considère comme une pierre à
sacrifices d’époque gauloise 2, elle serait un vestige d’un antique sanctuaire gaulois remplacé par
un temple consacré à Apollon, puis par une église chrétienne et ce sanctuaire gaulois, pense-t-il,
pourrait être celui dont parle César, lieu de réunion annuelle des druides aux confins du pays des
Carnutes.
Les cupules sont au nombre de cinq, aucune explication ne semble en avoir été fournie jusqu’ici. Je
signale, sans y insister, qu’elles sont disposées de telle sorte que l’on pourrait y voir les trous
produits par une main droite géante dont les doigts s’y seraient enfoncés comme dans la glaise. Il
est à remarquer, en effet, que le trou correspondant au pouce est le plus grand, et celui
correspondant au petit doigt, le plus étroit. Or, on sait quelle importance joue la main dans le
symbolisme archaïque.
Quant à la gravure, qui a 0,20m environ de côté, elle représente trois carrés concentriques reliés
entre eux par quatre lignes à angle droit. L’attention de M. Florance fut attirée sur la valeur de ce
dessin par la description d’un cachet d’oculiste romain trouvé vers 1870 à Villefranchesur-Cher
(Loir-et-Cher) portant le même signe. Il est décrit dans les Etudes sur la Sologne du Docteur
Bourgoin. Un moulage figure au musée d’archéologie de Blois.
Les oculistes romains se servaient de ces cachets, portant des caractères en creux, pour marquer les
collyres qu’ils vendaient à leurs clients, collyres constitués par une pâte qui durcissait à l’air et que
l’on faisait dissoudre dans divers liquides selon le cas.
Le cachet de Villefranche-sur-Cher est en stéatite, il mesure 0,4 m de longueur et de largeur, sur
0,12 d’épaisseur. Ses tranches portent les inscriptions suivantes : Cromstephan Adrescentescic
Cromstephani Addiatesistol qui voudraient dire (collyre) de Caïus Romanus Stéphanus pour les
cicatrices récentes et (collyre) pour enlever les maladies des yeux (diathésis tol lendas) .
À quels sentiments a obéi l’oculiste romain en mettant le signe en question sur son cachet ? N’a-t-il
pas voulu lui conférer quelque mystérieuse puissance ou par une association d’idées facile à
concevoir, a-t-il voulu rapprocher le pouvoir de guérir les maladies des yeux, de celui d’ouvrir à la
compréhension de certains mystères. Dans toutes les initiations, en effet, le futur initié a d’abord les
yeux bandés et l’on va, en lui enlevant son bandeau, lui conférer symboliquement la lumière.

Cherchant ce que pouvait signifier cette gravure venue ainsi deux fois à sa connaissance. M.
Florance émit l’idée qu’elle représentait peut-être une triple enceinte sacrée. Il semble, en effet,
qu’il ait raison d’attacher une signification à cette gravure. Je l’ai trouvée, en effet, en d’autres lieux
: à Rome et à Chinon.
À Rome, on peut la voir, ainsi que d’autres graffites à caractère symbolique, sur le petit mur
supportant les colonnes du cloître de Sao Paulo (XIII siècle). A Chinon, les Templiers enfermés
dans le donjon l’ont tracée également, ainsi que bien d’autres signes.
Mais que représente ce dessin dont la persistance à travers les siècles est si curieuse ?
Il s’agit à notre avis d’un emblème en rapport avec la grande doctrine coulant comme un fleuve
souterrain à travers le monde depuis des temps lointains. Dans son symbolisme, les trois cercles
sont parfois enlacés de telle manière que si on les suppose constitués par des disques, leur
entrecoupement reproduit les sept couleurs du prisme.
LIRE Le Silence de l’Apprenti
L’idée trinitaire est la grande richesse de la pensée métaphysique occidentale, on la trouve figurée
de bien des façons depuis de longs siècles, en elle se résume et se concrétise l’ensemble des
phénomènes du monde physique et du monde moral. Dante, entre autres, l’a bien compris.
Les trois cercles de l’existence appartiennent d’ailleurs à la tradition gauloise et celtique. On les
retrouve sous une autre forme dans le Paradis, l’Enfer et le Purgatoire chrétiens et dantesques.
On ne saurait donc être surpris de voir figurer sur un monument druidique le symbole des trois
enceintes, des trois cercles de l’existence Keugant, Abred, Gwynfyd. En Angleterre, un monument
druidique situé à Abury paraît avoir représenté, au moyen de pierres levées, ces trois cercles.
Toutefois, la reconstitution qui en fut publiée en 1853 dans le Magasin Pittoresque montre deux
cercles placés côte à côte renfermés dans un troisième et ayant au centre un dolmen.
La présence d’un puits sous la pierre de Suèvres ne nous étonne pas.
Bien des lieux de pèlerinage remontant au passé sont édifiés sur ou près de puits sacrés. N’est-ce
pas du puits que sort la vérité ? Et ne devons-nous pas voir dans cette phrase que nous répétons sans
y réfléchir, le sens profond qu’elle contient ?
Et maintenant, signalons que dans le Critias, Platon parlant de la métropole des Atlantes décrit le
palais de Poséidon comme édifié au centre de trois enceintes concentriques séparées par des canaux.
L’île intérieure avait un diamètre de 5 stades, l’enceinte extérieure de 26 stades. Nous empruntons à
une brochure parue en Angleterre le dessin ci-après. Les trois enceintes et les quatre lignes ou
canaux les reliant à angle droit s’y retrouvent exactement.

La forme ronde ou carrée n’a d’ailleurs aucune importance, une croix dans un carré a la même
signification qu’une croix dans un cercle (la croix dans un carré se trouve sur l’omphalos de
Kermaria, la croix dans un rond figure dans toutes nos églises chrétiennes où on la trace sur les
murs au moment de leur consécration au culte).
Dans le récit de Platon, les trois enceintes du temple de Poséidon, reliées par des canaux, sont
construites en pierres noires, jaunes et rouges.
Tout cet ensemble symbolique est en rapport avec l’idée trinitaire et avec le Grand-Œuvre
alchimique où se retrouvent Poséidon et les trois couleurs, par lesquelles doit passer successivement
la matière au cours de ses transformations. La couleur noire (ou bleu foncé) correspondant à la
première enceinte est en rapport avec le Père ou le Soufre; la seconde qui est jaune (ou blanche)
avec le Fils ou le Mercure; la troisième qui est rouge avec le Saint-Esprit ou le Sel.
Les vieux alchimistes cachaient sous ces symboles une connaissance toute particulière des
phénomènes de la vie universelle, une science toute intuitive mais synthétique et cohérente que
nous ne faisons que retrouver par l’expérience et par la précision des procédés modernes.
N’est-il pas émouvant en tout cas de découvrir un peu partout, gravés sur la pierre en une langue
universelle s’adressant directement à l’entendement, ces signes par lesquels des hommes ont
communié depuis des siècles et des siècles en une même foi dans la grandeur des lois de l’univers et
dans la confiance en l’évolution éternelle de la vie ?
Par une coïncidence assez curieuse, au moment même où paraissait notre article sur l’emblème des
trois enceintes. M. le curé de Conan (Loiret-Cher), qui ignorait cet article, découvrait et signalait à
M. Florance le même symbole gravé sur une grosse pierre du soubassement du contrefort droit de
l’entrée de l’église de Sainte-Gemme (monument historique) près d’Oucques (Loir-et-Cher).
Comme le graffite est à demi engagé dans la maçonnerie (voir croquis), M. le curé de Conan pense,
avec juste raison, que cette pierre a une provenance antérieure à la construction de l’église et se
demande si elle ne remonterait pas au druidisme.
Ce graffite mesure 25 centimètres de diamètre extérieur.
D’autre part, lors de mon récent passage à l’Acropole d’Athènes, j’ai relevé sur les dalles du
Parthénon côté est, et sur celles de l’Erecthéion, un certain nombre de fois le même emblème qui
m’avait échappé deux ans auparavant. À l’Acropole, la plupart portent un point central.
En Colombie, nous apprend le Journal des Américanistes, 1925, on a découvert les vestiges du
Temple du soleil de Sogamozo brûlé en 153. Il comportait des colonnes cylindriques en bois de 0,80
à 0,90 mètre de diamètre, disposées en 3 cercles concentriques, le cercle extérieur mesurait environ
36 mètres de diamètre. Sous les poteaux, on découvrit des ossements humains, la tradition rapporte
en effet que, lors de la construction, des esclaves furent enterrés vivants sous chaque colonne de
l’édifice sacré.
LIRE Rituel au Grade de Maître selon le REAA 1804
Dans la Revue numismatique, 1862, M. Hucher signale qu’un jour il lui arriva une charmante
rouelle d’or à 8 rayons de provenance gauloise, la jante était composée de trois cercles
concentriques, le moyeu n’était pas percé à ce jour.
Nous avons donc là, non pas une arme, mais l’emblème des trois enceintes en Gaule, de forme
circulaire cette fois, reliées par 8 et non plus par 4 lignes droites rayonnantes. Cette modification qui
donne naissance à un autre symbole très fréquent: celui de l’étoile à 8 branches trouvée en maints
endroits: Grèce, Crète, forum romain, etc., dont j’aurai l’occasion de reparler.

Graffite de Sainte-gemme
Enfin, j’ai reçu de M. Héring, maître de conférences à l’Université de Strasbourg, deux documents
imprimés concernant l’un des signes rupestres relevés par M. Georges Courty sur les roches du bois
de la Grande Beauce, commune de Lardy (Seine-et-Oise), l’autre des signes gravés dans la grotte de
Vatersthal (Moselle). Ici et là, on trouve un graffite composé non de trois, mais de deux carrés
concentriques seulement traversés par deux lignes en croix.
Il apparaît bien qu’il ne s’agit ni du hasard, ni d’un jeu comme celui de marelle, car il en est qui se
trouvent tracés sur des parois verticales ou sur des objets trop petits (cachet d’oculiste) et il ne
semble pas douteux que ce symbole se rapporte aux concepts antiques concernant les trois principes
(les trois carrés) et les quatre éléments (les deux lignes en croix). La croix a souvent représenté en
effet les quatre éléments.
Il reste également acquis que le temple de Poséidon est conçu sur les mêmes bases dans le récit de
Platon et que Poséidon est en rapports étroits avec l’antique alchimie, synthèse explicative des
mystères de la vie et de la création.
Par deux fois déjà nous avons parlé de ce curieux emblème d’une triple enceinte formée de carrés
ou de ronds concentriques reliés par des lignes en croix qui semblent appartenir au symbolisme le
plus lointain et s’être transmis de siècle en siècle. Notre érudit correspondant, M. Charbonneau
Lassay nous faisant part de ses réflexions à ce sujet nous écrit : « Avant le christianisme, ce dessin
des trois enceintes devait avoir un sens symbolique précis; il est possible que les deux premières
lignes soient des enceintes, les lignes droites en croix qui y aboutissent, des avenues et le plus petit
carré un autel ou un “saint des saints”, un hiéron plus sacré que les autres. Je ne serais pas surpris
que les chrétiens en aient fait une image de la Jérusalem céleste… »
Aujourd’hui, nous donnons une autre image de la triple enceinte avec cette fois l’« arus », le foyer
du centre. Il s’agit d’un document concernant le druidisme et cette gravure qui figure dans un
curieux ouvrage sur la cathédrale d’Autun par le chanoine Edme Thomas (1846) est donnée comme
représentant la cité gauloise des Eduens.
Dans cet ouvrage, l’auteur s’occupe longuement de cette partie de la Kabale qui s’appelle la
Gématrie, c’est-à-dire de la valeur numérale des mots. C’est ainsi qu’il rappelle que le nom du soleil
Belenus (dont nous avons parlé à propos de saint Babolein) vaut 365, nombre des jours de l’année
solaire.
Les mots inscrits sur ce dessin se rapportent à la hiérarchie druidique. Edme Thomas ne donne
malheureusement aucun renseignement pouvant permettre de savoir ce que représente cette gravure
et quelle est sa provenance. Néanmoins, elle s’associe singulièrement à l’idée de faire de la pierre
de Suèvres une pierre druidique comme le pense M. Florance.
M. Charbonneau-Lassay nous fait observer que des menhirs ont été décorés au temps chrétien, mais
cette observation ne peut s’appliquer qu’à des sculptures en creux et non à des sculptures en relief,
or la triple enceinte figure en relief sur les dolmens d’Aveny (Eure) et de Boury (Oise).
Tout ceci semble donner à l’idée de la triple enceinte une origine druidique. Nous pensons
cependant que cette origine est antérieure au druidisme et, pour tout dire, qu’elle est atlantéenne. On
en trouverait peut-être une confirmation dans la façon dont était construite la ville de Mexico. Elle
était en effet entourée de trois canaux concentriques rappelant la description de la capitale des
Atlantes dans Platon. Ce symbole semble donc appartenir à cette métaphysique lointaine à laquelle
le druidisme emprunta et l’idée trinitaire et celle de la dualité du médiateur représenté tantôt par des
emblèmes masculins, tantôt par des emblèmes féminins, tantôt sous la forme androgyne, qui était
surtout utilisée dans les centres initiatiques.
Cette idée de la triple enceinte, nous la retrouverons chez Dante et nous verrons en divers pays les
trois cercles disposés de manière différente en tramant tout un symbolisme particulier.
La Triple Enceinte 2e partie

Article publié par EzoOccult le Webzine d'Hermès et mis à jour le : 21 janvier 2016

La Triple Enceinte 2e partie par Louis


Charbonnay-Lassay
La Triple Enceinte dans l’Emblématique Chrétienne
Le point de départ de la courte étude de L. Charbonneau-Lassay sur La Triple-enceinte dans
l’emblématique chrétienne se trouve en des articles publiés par Paul Le Cour et par René Guenon,
respectivement dans les revues Atlantis et Le Voile d’Isis. Sous le titre L’emblème symbolique des
Trois Enceintes, Paul Le Cour signalait, dans le n° de juillet-août 1928 d’Atlantis l’existence d’un
curieux symbole gravé sur une pierre druidique, découverte vers 1800, à Suèvres (Loir-et-Cher).
Cette pierre avait été étudiée par È. C. Florance, président de la Société d’Histoire Naturelle et
d’Anthropologie du Loir-et-Cher. Celui-ci y voyait une pierre à sacrifices, vestige d’un antique
sanctuaire gaulois ; il fut frappé par le fait que le même signe se trouve également sur un cachet
d’oculiste gallo-romain, trouvé à Villefranche-sur-Cher (Loir-et-Cher), vers 1870. M. Florance émit
alors l’idée que ce signe pouvait représenter une triple enceinte sacrée, car il est formé de trois
carrés concentriques, reliés entre, eux par quatre lignes à angle droit.
Paul Le Cour, dans son article de juillet-août 1928, rappelait ces deux faits et la difficulté qu’avait
rencontrée M. Florance pour faire accepter son interprétation. Il ajoutait qu’il était d’autant plus
légitime de rechercher la véritable signification de ce signe que celui-ci se retrouvait en d’autres
lieux, notamment à Rome, dans le cloître de San-Paulo (XIIIe siècle), et, sous deux formes
différentes, sur les murs du donjon de Chinon, gravé vraisemblablement par les Templiers qui y
furent enfermés. D’après Paul Le Cour, il fallait voir, dans le dessin en question, un symbole des t
trois cercles de l’existence 1 de la tradition celtique.
Dans une étude, publiée en juin 1929, par le Voile d’Isis, sous le titre La Triple-Enceinte druidique,
René Guenon prenait occasion de l’article de Paul Le Cour pour apporter une interprétation plus
complète du symbole en lequel, sans rejeter l’explication proposée par ce dernier, il voyait avant
tout la représentation des trois degrés principaux d’initiation. C’est alors que, sur la demande de
Paul Le Cour, Charbonneau-Lassay rédigea l’étude, en forme de lettre, qu’on va lire ci-après.
R.M.
Figure 1 – La Pierre de Suèvres
La triple Enceinte
J’aurais vraiment, cher Monsieur, bien mauvaise grâce à me dérober devant la question dont vous
voulez bien m’honorer, relativement à la signification que la pensée chrétienne a jadis attachée à
l’antique emblème de là Triple-Enceinte.
Le sens de ce symbole, sur les menhirs de Suèvres (Orléanais) et de Kermaria (Bretagne), ainsi que
sur tous autres mégalithes, nous échappera sans doute toujours ; pour les époques druidique et gallo-
romaine, avec prolongement sur les siècles suivants, ce que vous en avez dit dans Atlantis (I), ce
que M. R. Guenon en a dit de son côté, dans Le Voile d’Isis (2), à savoir, notamment, que ces
enceintes, avec leurs avenues d’accès, représentaient une succession de trois principaux degrés
d’initiation, me semble parfaitement acceptable.
II ne me paraîtrait même aucunement surprenant de constater des traces de ce symbolisme, en
marge du sens spécifiquement chrétien, dans te] ou tel milieu de la société catholique, durant tout le
Moyen-Age. En effet, pendant cette période, la vie de tout l’organisme social n’a-t-elle pas reposé
sur des initiations successives, souvent marquées, à chaque échelon, par des cérémonies rituelles ?
Ainsi, le sacerdoce, le monachisme, la chevalerie, les universités, les cénacles d’alchimistes, les
groupements d’hermétistes chrétiens, plus ou moins orthodoxes, les corporations artisanales,
industrielles ou agricoles, la batellerie, voire la truanderie le môme, étaient ritualisés.
Tous ces groupements divers, qui ont vécu aux plus beaux temps de l’idéalisme, ont eu leurs
emblèmes figurés, leur héraldique, dont l’origine fut presque toujours d’ordre religieux. Le
Christianisme créa beaucoup de ces emblèmes, comme il avait fait, dès sa naissance, pour exprimer
mystérieusement ses dogmes et sa doctrine ; mais, pour l’un et l’autre usage, il accepta
préalablement, et adapta à ses croyances et à ses mœurs, tous les symboles des cultes qui l’ont
précédé et qui pouvaient permettre cette adaptation, soit par leurs significations déjà acquises, soit
par de nouveaux sens que leurs formes se prêtaient à exprimer.
Pourquoi le symbole de la Triple-Enceinte, que vous avez relevé sur les mégalithes des Gaules et
sur le Parthénon, sur des objets romains usuels, aurait-il été mis au rebut par l’emblématique
chrétienne ? En fait, nous savons qu’il n’en fut rien, puisque la Triple-Enceinte existe sur des églises
séculières ou monastiques et sur des objets religieux ; disons seulement qu’elle entre dans cette
catégorie de symboles que la « nescience » actuelle ne comprend plus, ou qu’elle ignore totalement.
LIRE Occultistes & Francs Maçons
Le dessin de la Triple-Enceinte que vous avez relevé sur le Parthénon et celui de la gravure que
vous avez reproduite (3), qui prétend représenter le temple de Poséidon, rappellent à ma pensée le
Tableau de la vie humaine que le philosophe grec Cébès, l’ami de Platon, nous a tracé, au Ve siècle
avant notre ère, et qui débute ainsi :
« Nous nous promenions dans le temple de Saturne, et nous considérions divers présents qu’on y
avait offerts. Il y avait, à l’entrée du temple, un tableau qui représentait des fables toutes
particulières, et dont le dessin était étrange. Nous ne pûmes jamais comprendre ce que c’était, ni
d’où on les avait tirées. Ce tableau ne représentait proprement ni une ville, ni un camp. C’était une
espèce d’enceinte qui en renfermait deux autres, l’une plus grande, l’autre plus petite. Il y avait une
porte au-devant de la première enceinte, une foule de peuple entourait cette porte, et l’on voyait, mi-
dedans de l’enceinte, une grande multitude de femmes » {4).
Cébès et son compagnon ne comprenaient pas le sujet du mystérieux tableau, mais un vieillard
vénérable, « disciple de Pythagore et de Parménide », leur dit que ces trois enceintes étaient les
images de la vie humaine, et, successivement, il leur expliqua que les personnes représentées dans
chacune d’elles figuraient les vertus et les vices des hommes.
Dans la première étaient ; l’Imposture, l’Erreur, l’Ignorance, les Opinions, les Convoitises, les
Voluptés, la Fortune. Dans la seconde enceinte : l’Incontinence, la Débauche, l’Avidité, la
Flatterie ; dans un autre groupe, la Punition, le Châtiment, la Tristesse, le Chagrin, la Douleur, les
Lamentations, la Désolation ; mais, après ce piteux cortège, se présentaient enfin le Repentir et la
Pénitence, qui conduisaient vers la Volonté, la Croyance, l’Instruction, le Savoir, la Continence, la
Patience.
Et, dans la dernière enceinte, on rencontrait la Vérité, la Persuasion, la Confiance, la Sécurité, la
Science, la Force, l’Honnêteté, la Tempérance, la Modestie, la Liberté, et la Douceur. Et ces vertus,
pour lui présenter les hommes sages, entouraient leur mère, la Félicité, qui trônait au centre de ce
séjour de la Véritable Doctrine.
Ce n’est là, sans doute, que l’extériorisation d’une méditation personnelle de Cébès, à moins que ce
ne soit un écho des dissertations de l’entourage de Platon, dont il était l’un des intimes. Ce, n’est
certainement pas le sens primitif de l’emblème.
Une autre conception, relative à la Triple-Enceinte, dont le point de départ peut être bien ancien
aussi, et qui ne se rattache à celle, plus philosophique, de Cébès, que par son application à
l’existence humaine, fait du vieil emblème, non l’image de la vie morale de l’homme, mais celle de
sa vie physique : la plus grande enceinte était l’image de sa jeunesse, la seconde, celle de son âge
mûr, la troisième figurant la vieillesse, et le point central, sa mort. Ainsi, la vie s’en va, se
rétrécissant toujours, jusqu’à ce que l’âme soit libérée de sa gaine charnelle.
Vous avez, beaucoup trop élogieusement pour moi, reproduit dans Atlantis le passage de la lettre,
dans laquelle je vous disais que je ne serais pas surpris d’apprendre que les premiers chrétiens
avaient fait de la Triple-Enceinte l’une des images de la Jérusalem Céleste, encore que cette idéale
Cité de Paradis ait reçu; dans l’iconographie chrétienne, un autre symbole linéaire précis, que de
doctes auteurs du premier millénaire de notre ère nous ont fait connaître. Mais l’emblème – qui
nous occupe a eu, dans la mystique d’autrefois, de tout autre signification. Les présentes lignes ne
vous apprendront pas que de singulières circonstances m’ont permis d’avoir, sur plusieurs
groupements hermético-mystiques du Moyen-Age, et sur leurs doctrines et pratiques symboliques,
une source d’information qui ne relève pas de l’ordinaire domaine de la bibliographie et qui est,
pour le moins, tout aussi sûre.
Or, la Triple-Enceinte s’y présente, tout d’abord, comme l’idéogramme de la portée, de la
Rédemption sur le plan universel.
Chacun sait que, dans l’hermétique générale de l’Occident et dans la symbolique chrétienne des
figures géométriques, le Carré représente le Monde, qu’il est littéralement la Mappa mundi, la «
nappe du monde », notre « mappemonde », le planisphère terrestre et céleste. Cela étant, trois carrés
inscrits l’un dans l’autre, avec centre unique, c’est-à-dire formant un seul et même ensemble,
représentent les trois Mondes de l’Encyclopédie du Moyen-Age, le Monde terrestre où nous vivons,
le Monde firmamental où les astres promènent leurs globes radieux sur d’immuables itinéraires de
gloire, enfin le Monde céleste et divin où Dieu réside et, avec Lui, les purs Esprits.
LIRE Rituel au Grade de Maître selon le REAA 1804
Or, dans les siècles qui suivirent la paix que Constantin donna, en 313, à l’Église du Christ, la
question se posa, parmi les théologiens chrétiens, de savoir quelle est, dans le Cosmos universel, la
portée efficace de l’effusion du Sang divin répandu pour le monde, au sommet du Calvaire ; et
l’opinion presque unanimement admise par eux fut que, si Dieu a créé, sur d’autres planètes que la
nôtre, des êtres vivants, intelligents et raisonnables, donc responsables, la Passion du Christ a dû
mériter pour eux un afflux de grâces divines, qui leur sont départies selon le mode, inconnu de nous,
qu’il plaît à Dieu d’adopter.
Nous avons un reflet de cette théorie dans un hymne célèbre de l’évêque-poète de Poitiers, saint
Fortunat (VIe siècle) le Pange lingua gloriosi lauream certaminis, que l’Église latine a fait entrer
dans sa liturgie officielle du Vendredi Saint :
Felle potus, ecce languet ;
Spina, clavi, lancea
Mite corpus perfotarunt ;
Unda manat et cruor,
Terra, pontus, astra, mundus,
Quo lavantur flumine.
(IL a langui, abreuvé de fiel ;
Les épines, les clous, la lance,
Ont percé son corps.
L’eau et le sang coulent de son côté.
La Terre, la Mer, les Astres, le Monde,
Sont lavés dans ce Fleuve).
L’antique emblème des Trois-Enceintes se prêtait admirablement au symbolisme de la portée
rédemptrice: 1a croix, qui la traverse aux deux-tiers, y figure l’efficacité directe du sacrifice du
Calvaire pour le monde terrestre et sur, le monde astronomique, mais s’arrête au seuil du monde
angélique et divin, qui n’a pas eu besoin de rédemption (Fig; IIB).
Quand les trois, enceintes concentriques sont orbiculaires, le symbolisme reste le même ; seulement,
au lieu d’être assis sur la forme angulaire de la Mappa mundi, il est basé sur la sphéricité du globe
terrestre et sur le développement circulaire de la ligne d’horizon, qui ferme, pour nous, le monde
des astres ; le monde divin, lui, peut s’accommoder de toutes les formes régulièrement tracées.

Figure 2 – Disque funéraire en os,


provenant d’une sépulture mérovingienne d’Amailloux (Deux-Sèvres).
Sur un disque funéraire, en os, de l’époque mérovingienne, recueilli par M. l’abbé Courteau, curé
d’Adilly, la croix, au contraire, s’étend sur le petit cercle du milieu et sur le second, mais non sur le
troisième, plus vaste que les deux autres. Il semble que le symbolisme soit ainsi plus logique, la
terre étant petite, le firmament beaucoup plus grand qu’elle, et l’un et l’autre, l’un contenant l’autre,
n’étant que comme des grains de poussière dans la main du Tout-Puissant, dont la demeure est
l’Immensité sans fin (5). Plus logique, en effet, cette forme, qui opère au rebours de la première, est
plus rare aussi pourtant, dans l’iconographie, parce qu’aux yeux de nos pères une tare grave la
disqualifiait, si l’on peut dire : c’est qu’elle n’est pas, dans son intégralité linéaire, le traditionnel et
multi-séculaire emblème de la Triple – Enceinte. Elle n’est que l’une de ses diverses variantes ou
dégénérescences, plus compréhensible toutefois que certaines autres, que celle, par exemple, du
château de Chinon, que vous avez reproduite dans Atlantis, d’après ma notice sur les graffites des
Templiers, et dont je ne comprends pas absolument les traits curvilignes (Fig. 3 A).

Figure 3 – La Triple-Enceinte, graffites des Templiers,


au donjon du château de Chinon, 1308.
Il y a trois ans, les cultivateurs qui habitent les ruines de l’Abbaye de Seuilly, en Touraine, — où
Rabelais demeura —, mirent à jour les dernières assises d’une chapelle du xrve siècle, je crois,
située derrière les bâtiments actuellement habités ; sur l’une des pierres de cet édifice, j’ai relevé le
graffite très net des Trois-Enceintes, établies sur un plan octogonal qui rappelle beaucoup celui de
plusieurs baptistères antiques (6) ; et, chose remarquable, les « avenues » du vieux symbole
préchrétien sont, cette fois, nettement remplacées par la croix (Fig. 3).
LIRE Rituel d’initiation du 66e Degré - Patriarche Grand Consécrateur

Figure 4 – La Triple-Enceinte,
graffite de l’Abbaye de Seuilley (Indre-et-Loire) (XIVe et XVe s.)
C’est bien l’apposition du thème chrétien sur le motif antique. Le point qui en occupe le centre, et
que l’on trouve parfois remplacé par un petit carré ou par une minuscule croisette, hiéroglyphes de
l’autel, c’est l’idéogramme du Siège de la Présence et de la Paix divine. Ici, les traditions
d’Occident concordent avec celles de l’Orient ; le Christianisme a joint à cette symbolique une idée
plus spéciale d’amour et de miséricorde : la liturgie catholique latine ne fait-elle pas officiellement
sienne cette parole de la Bible : Suscepimus, Deus, misericordiam tuam in medio templi, lui, « Nous
avons senti, ô Dieu, ta miséricorde au centre de ton temple » (7)
Et cette théorie,- qui est aussi celle de la Schekhina, de la « Présence réelle de Dieu », dans la
mystique hébraïque; est singulièrement parente de ce que certaines confréries hermético-mystiques
du Moyen-Age ont appelé le « Grand Refuge », qu’enveloppe l’imperturbable Paix divine, et le «
Royaume de Bénédiction » , au centre duquel trône le Dieu de Vie, Celui, que, deux siècles avant
notre ère, le Livre d’Hénoch a nommé : « d’Eternellement Béni » (8).

Figure 5 – Décoration d’une des pierres de l’ancienne église d’Ardin (Deux-Sèvres),


collection Gabriel de Fontaines à St-André-iur-Shires.
Il se peut aussi que la même idée de la «Présence ineffable » soit mystérieusement enclose, au
centre des trois carrés dont s’orne une pierre de ,1’ancienne église mérovingienne ou carolingienne
d’Ardin (Deux-Sèvres), aujourd’hui démolie (Fig. 5). Voilà donc tout au moins l’un des sens que la
pensée chrétienne a donnés à l’antique emblème des Trois-Enceintes. En lui faisant manifester ainsi
la portée effective de la Rédemption sur le monde terrestre et sur le monde firmamental, mais non
sur le monde divin, le Moyen-Age en faisait, par là, application au Macrocosme, ou « monde
universel » des anciens.
Peut-être, et cela me paraît assez vraisemblable, l’a-t-il, selon sa méthode coutumière : d’analogie,
au Microcosme humain, au « petit monde » individuel; que ses hermétistes et ses philosophes
appelaient « le monde rabrégé » (9) ?
Ce n’est là qu’une hypothèse, ou, si l’on veut, une déduction, qui peut expliquer une autre variante
médiévale de la Triple-Enceinte, laquelle est, peut-être bien, plus qu’une simple dégénérescence du
type ancien, et dans laquelle la croix traverse les trois carrés de l’emblème. Elle est tracée, par
exemple, dans un ensemble de graffites, sur une des pierres prélevées au revêtement intérieur de la
base de l’ancien donjon rond de Loudun, construit en 1206 par Philippe-Auguste, et démoli par
Richelieu (Fig. 6). Ces graffites sont du XIVe siècle.

Figure 6 – Les Trois Enceintes, sur une pierre de l’ancien donjon rond de Loudun (Vienne).
Collection lapidaire M or tau delà Ronde.
Dans le microcosme humain, les méditatifs du Moyen-Age ont discerné trois parties bien
distinctes :
1. L’élément charnel, gouverné par l’un des quatre tempéraments : le ‘Cholérique’, le Sanguin, le
Flegmatique et le Mélancolique, et qui procure la force corporelle.
2. L’élément intellectuel, gouverné par l’Intelligence, dirigé elle-même par la Foi, et qui procure la
Connaissance.
3. L’élément moral des choses de l’âme, gouverné par la Conscience servie par la Volonté, et qui,
bien ou mal dirigé, détermine l’état éternellement heureux ou maudit.
Le comprenant ainsi, les penseurs chrétiens d’autrefois ont pu fort bien, ce me semble, assimiler,
selon leur méthode habituelle, le microcosme individuel au macrocosme universel, et le symboliser,
comme le second, par trois carrés ou trois cercles, figurant chacun l’un des éléments humains. La
domination de la croix figurative du Christ sur eux trois se justifie très bien.
Sur le terrain de la pensée chrétienne, je ne vois guère d’autre explication possible à donner, au sujet
de cette variante de la Triple-Enceinte ; mais, je le répète, ce n’est là qu’une déduction hypothétique
– vraisemblable, je crois – de ce que j’ai dit plus haut, relativement au type traditionnel de
l’emblème de la Triple-Enceinte, pris par la mystique chrétienne comme idéogramme de la portée
rédemptrice de la mort du Christ.

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