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Thèse
Présentée devant
L’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon
Réalisée à
L’Ecole Nationale des Travaux Publics de l'Etat
Pour obtenir
Le grade de docteur
Par
Véronique CEREZO
Jury MM.
-3-
Janvier 2005
Institut national
des sciences appliquées de Lyon
Directeur : A. STORCK
Professeurs
S. AUDISIO physico-chimie industrielle
J.C. BABOUX GEMPMM*
B. BALLAND physique de la matière
D. BARBIER physique de la matière
G. BAYADA modélisation mathématique et calcul scientifique
C. BERGER (Mlle) physique de la matière
M. BETEMPS automatique industrielle
J.M. BLANCHARD LAEPSI**
C. BOISSON vibrations acoustiques
M. BOIVIN mécanique des solides
H. BOTTA équipe développement urbain
G. BOULAYE informatique
J. BRAU centre de thermique
M. BRISSAUD génie électrique et ferroélectricité
M. BRUNET mécanique des solides
J.C. BUREAU thermodynamique appliquée
J.Y. CAVAILLE GEMPMM*
J.P. CHANTE composants de puissance et applications
B. CHOCAT unité de recherche en génie civil
B. CLAUDEL LAEPSI**
M. COUSIN unité de recherche en génie civil
M. DIOT thermodynamique appliquée
A. DOUTHEAU chimie organique
R. DUFOUR mécanique des structures
J.C. DUPUY physique de la matière
H. EMPTOZ reconnaissance des formes et vision
C. ESNOUF GEMPMM*
L. EYRAUD (Prof. Émérite) génie électrique et ferroélectricité
G. FANTOZZI GEMPMM*
M. FAYET mécanique des solides
-3-
J. FAVREL groupe de recherche en productique et
informatique des systèmes manufacturiers
G. FERRARIS-BESSO mécanique des structures
Y. FETIVEAU génie électrique et ferroélectricité
L. FLAMAND mécanique des contacts
P. FLEISCHMANN GEMPMM*
A. FLORY ingénierie des systèmes d'information
R. FOUGERES GEMPMM*
F. FOUQUET GEMPMM*
L. FRECON informatique
R. GAUTHIER physique de la matière
M. GERY centre de thermique
G. GIMENEZ CREATIS***
P. GOBIN (Prof. émérite) GEMPMM*
P. GONNARD génie électrique et ferroélectricité
M. GONTRAND composants de puissance et applications
R. GOUTTE (Prof. Émérite) CREATIS***
G. GRANGE génie électrique et ferroélectricité
G. GUENIN GEMPMM*
M. GUICHARDANT biochimie et pharmacologie
G. GUILLOT physique de la matière
A. GUINET groupe de recherche en productique
et informatique des systèmes manufacturiers
J.L. GUYADER vibrations acoustiques
J.P. GUYOMAR génie électrique et ferroélectricité
J.M. JOLION reconnaissance des formes et vision
J.F. JULLIEN unité de recherche en génie civil
A. JUTARD automatique industrielle
R. KASTNER unité de recherche en génie civil
H. KLEIMANN génie électrique et ferroélectricité
J. KOULOUMDJIAN ingénierie des systèmes d'information
M. LAGARDE biochimie et pharmacologie
M. LALANNE mécanique des structures
A. LALLEMAND centre de thermique
M. LALLEMAND (Mme) centre de thermique
P. LAREAL unité de recherche en génie civil
A. LAUGIER physique de la matière
Ch. LAUGIER biochimie et pharmacologie
P. LEJEUNE génétique moléculaire
des microorganismes
A. LUBRECHT mécanique des contacts
Y. MARTINEZ ingénierie des systèmes d'information
H. MAZILLE physico-chimie industrielle
P. MERLE GEMPMM*
J. MERLIN GEMPMM*
J.P. MILLET physico-chimie industrielle
M. MIRAMOND unité de recherche en génie civil
-4-
N. MONGEREAU (Prof. Émérite) unité de recherche en génie civil
R. MOREL mécanique des fluides
P. MOSZKOWICZ LAEPSI**
P. NARDON biologie appliquée
A. NAVARRO LAEPSI**
A. NOURI (Mme) modélisation mathématique
et calcul scientifique
M. OTTERBEIN LAEPSI**
J.P. PASCAULT matériaux macromoléculaires
G. PAVIC vibrations acoustiques
J. PERA unité de recherche en génie civil
G. PERRACHON thermodynamique appliquée
J. PEREZ (Prof. Émérite) GEMPMM*
P. PINARD physique de la matière
J.M. PINON ingénierie des systèmes d'information
D. PLAY conception et analyse
des systèmes mécaniques
J. POUSIN modélisation mathématique
et calcul scientifique
P. PREVOT groupe de recherche en apprentissage, coopération et
interfaces multimodales
R. PROST CREATIS***
M. RAYNAUD centre de thermique
J.M. REYNOUARD unité de recherche en génie civil
E. RIEUTORD (Prof. Émérite) mécanique des fluides
J. ROBERT-BAUDOUY (Mme) génétique moléculaire des microorganismes
D. ROUBY GEMPMM*
P. RUBEL ingénierie des systèmes d'information
C. RUMELHART mécanique des solides
J.F. SACADURA centre de thermique
H. SAUTEREAU matériaux macromoléculaires
S. SCARVARDA automatique industrielle
D. THOMASSET automatique industrielle
M. TROCCAZ génie électrique et ferroélectricité
R. UNTERREINER CREATIS***
J. VERON LAEPSI**
G. VIGIER GEMPMM*
A. VINCENT GEMPMM*
P. VUILLERMOZ physique de la matière
-5-
J.F. GERARD matériaux macromoléculaires
M.A. MANDRAND (Mme) génétique moléculaire des microorganismes
J.F. QUINSON GEMPMM
A. ROCHE matériaux macromoléculaires
-6-
REMERCIEMENTS
Ce travail est basé sur une approche expérimentale des propriétés, qui a constitué le
point de départ des réflexions menées sur le comportement du béton de chanvre. Je remercie
donc madame Monique Loriot, technicienne au Laboratoire Géomatériaux, pour sa
contribution à la réalisation de la phase expérimentale, ainsi que madame Véronique Vidal et
monsieur Sébastien Gubian, ouvriers au Laboratoire Géomatériaux, pour l’aide qu’ils m’ont
apporté lors de la fabrication des matériaux testés.
Enfin, j’ai une pensée pour ma famille et mes amis, qui ont dû subir mes moments de
doutes.
-9-
RESUME
- 11 -
ABSTRACT
This thesis deals with the measurement of physical properties (mechanical, thermal,
acoustical) of various formulations of concrete containing vegetable particles. Such material
is made up with hemp shives mixed with lime binders. Shives are very porous considering the
ratio of capillaries. That fact explains that particles are lightweight, sensible to water and they
can be highly strained. The ductile binder is a mixed between hydraulic and aerated lime with
sometimes a volume of sand. Depending on the binder proportion, three microstructures of
concrete are determined. Moreover, this material presents a microscopic porosity (shives) and
a macroscopic porosity. These networks are connected.
Vegetable concrete presents a ductile behavior. . The maximum stress and the Young
modulus are limited as compare to other building materials but the bearable level of strain is
rhigh. A theoretical model made with self-consistent method allows to calculate the Young
modulus as a function of the mixture proportion and the compactness level. A comparison
with experimental measurements shows a good accuracy of the results.
Then, the dry thermal conductivity of vegetable concrete is studied. Considering its
high sensibility to water, the level of sorption and the impact on thermal conductivity are
evaluated. A self-consistent method leads to a model of dry and wet conductivity taking into
account the physical properties (proportions, compactness) and the hygrometry.
Lastly, the sound absorption of vegetable concrete is measured. The values are high.
This first step in the study of the acoustical properties shows a behavior, which can be
compared to materials with a double porosity.
- 12 -
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION _________________________________________________________ 19
CHAPITRE 1 _____________________________________________________________ 23
1. Eléments de bibliographie ____________________________________________ 25
1.1. Classification générale des matériaux de construction ____________________ 25
1.2. Types de granulats légers __________________________________________ 26
1.2.1. Définition d’un granulat léger___________________________________ 26
1.2.2. Origine des granulats _________________________________________ 26
1.3. Propriétés mécaniques des bétons légers ______________________________ 28
1.3.1. Porosités ___________________________________________________ 28
1.3.2. Légèreté____________________________________________________ 31
1.3.3. Comportement et performances mécaniques _______________________ 31
1.3.4. Sensibilité à l’eau ____________________________________________ 34
1.4. Propriétés thermiques _____________________________________________ 41
1.5. Propriétés acoustiques_____________________________________________ 45
2. Caractérisation expérimentale des constituants __________________________ 48
2.1. Le liant ________________________________________________________ 48
2.1.1. Composition chimique ________________________________________ 48
2.1.2. Prise de la chaux _____________________________________________ 50
2.1.3. Cinétique de séchage du liant pur ________________________________ 51
2.1.4. Propriétés mécaniques du liant pur _______________________________ 59
2.1.5. Propriétés thermiques _________________________________________ 61
2.1.6. Propriétés acoustiques_________________________________________ 62
2.2. Les particules de chanvre __________________________________________ 63
2.2.1. Historique sur le chanvre ______________________________________ 63
2.2.2. Processus d’obtention des granulats végétaux ______________________ 63
2.2.3. Caractéristiques physiques des particules végétales __________________ 65
2.2.4. Sensibilité à l’eau de la particule végétale _________________________ 67
2.2.5. Comportement en compression des particules ______________________ 70
2.2.6. Comportement thermique ______________________________________ 72
2.3. Le béton de chanvre ______________________________________________ 74
2.3.1. Caractéristiques générales______________________________________ 74
2.3.2. Propriétés de ce matériau ______________________________________ 75
2.3.3. Caractère évolutif des propriétés ________________________________ 76
2.3.4. Fabrication des échantillons ____________________________________ 76
3. Conclusion _________________________________________________________ 82
- 13 -
CHAPITRE 2 _____________________________________________________________ 83
1. Approche expérimentale du Comportement _____________________________ 85
1.1. Répétabilité dans la fabrication des échantillons ________________________ 85
1.2. Considérations préliminaires _______________________________________ 86
1.2.1. Grandeurs caractéristiques _____________________________________ 86
1.2.2. Hypothèses _________________________________________________ 87
1.3. Préparation des essais _____________________________________________ 90
1.3.1. Surfaçage des échantillons _____________________________________ 90
1.3.2. Dispositif d’essais ____________________________________________ 92
1.3.3. Détermination des paramètres caractéristiques______________________ 93
1.3.4. Cinétique du phénomène de prise ________________________________ 95
1.3.5. Répétabilité et reproductibilité des essais de compression monotone et
cyclique 96
1.4. Courbes expérimentales ___________________________________________ 97
1.4.1. Allure générale des courbes contraintes – déformations ______________ 97
1.4.2. Cas de la formulation faiblement dosée en liant (Toit)_______________ 100
1.4.3. Relation entre maximum de contrainte et cinétique de prise __________ 101
1.5. Résultats des essais sur le béton de chanvre à base de T70 _______________ 102
1.5.1. La contrainte maximale σmax___________________________________ 103
1.5.2. Le module d’élasticité E ______________________________________ 105
1.5.3. La déformation au niveau du maximum de contrainte εσmax __________ 107
1.5.4. Le coefficient de Poisson ν____________________________________ 109
1.5.5. Conclusion ________________________________________________ 109
1.6. Résultats des essais sur l’enduit à base de Tradichanvre _________________ 110
1.7. Influence du compactage sur le comportement mécanique _______________ 112
1.7.1. Valeur limite de la contrainte de compactage______________________ 113
1.7.2. Matériaux testés ____________________________________________ 114
1.7.3. Compositions massiques et volumiques _________________________ 116
1.7.4. La contrainte maximale σmax___________________________________ 119
1.7.5. Le module d’élasticité E ______________________________________ 122
1.7.6. Conclusions________________________________________________ 123
1.8. Utilisation d’un autre liant ________________________________________ 123
1.9. Conclusions____________________________________________________ 124
2. Approche théorique par une méthode d’homogénéisation _________________ 125
2.1. Éléments de modélisation _________________________________________ 126
2.2. Résolution théorique _____________________________________________ 127
2.2.1. Modèle à inclusions simples ___________________________________ 127
2.2.2. Modèle à inclusions bicomposite et tricomposite___________________ 129
2.3. Application des modèles autocohérents ______________________________ 134
2.3.1. Chanvre en vrac ____________________________________________ 134
2.3.2. Béton de chanvre____________________________________________ 135
2.3.3. Conclusions________________________________________________ 135
3. Conclusion ________________________________________________________ 136
- 14 -
CHAPITRE 3 ____________________________________________________________ 137
1. Le transfert de chaleur ______________________________________________ 139
1.1. Généralités ____________________________________________________ 139
1.1.1. Définition des modes de transfert _______________________________ 139
1.1.2. Équation de la chaleur________________________________________ 139
1.1.3. Hypothèses de travail ________________________________________ 140
1.2. Étude de la Conductivité thermique en milieu sec ______________________ 141
1.2.1. Bornes de Voigt et Reuss _____________________________________ 141
1.2.2. Modèles par homogénéisation autocohérente (HAC)________________ 144
1.2.3. Mesures expérimentales ______________________________________ 151
1.2.4. Analyse des résultats_________________________________________ 158
1.2.5. Conclusion ________________________________________________ 160
2. Sensibilité à l’humidité du matériau ___________________________________ 161
2.1. L'eau contenue dans les matériaux __________________________________ 161
2.2. La condensation capillaire ________________________________________ 162
2.3. Résultats expérimentaux __________________________________________ 164
2.3.1. Méthodologie et dispositif d’essais______________________________ 164
2.3.2. Variations de la teneur en eau massique ω ________________________ 164
3. Influence de l’eau sur la conductivité thermique_________________________ 167
3.1. Rappels _______________________________________________________ 168
3.2. Mesures expérimentales de la conductivité du béton humide _____________ 169
3.2.1. Protocole d’essais ___________________________________________ 169
3.2.2. Échantillons testés___________________________________________ 169
3.2.3. Résultats __________________________________________________ 170
3.3. Approche par homogénéisation autocoherente (HAC)___________________ 171
3.3.1. Modèle à quatre phases _______________________________________ 171
3.3.2. Modèles par double homogénéisation ___________________________ 180
3.3.3. Comparaison entre valeurs théoriques et expérimentales_____________ 187
3.4. Conclusion ____________________________________________________ 188
- 15 -
CHAPITRE 4 ____________________________________________________________ 191
1. Rappels sur les ondes acoustiques _____________________________________ 193
1.1. Définitions_____________________________________________________ 193
1.2. Isolation et correction acoustique ___________________________________ 194
1.3. Lien entre porosité, perméabilité et comportement acoustique ____________ 196
1.4. Le comportement acoustique des matériaux à simple porosité ____________ 197
1.4.1. Hypothèse de squelette rigide __________________________________ 197
1.4.2. Effets visco-inertiels pour un fluide guidé dans un cylindre __________ 198
1.4.3. Effets thermiques pour un fluide guidé dans un cylindre _____________ 200
2. Eléménts de métrologie______________________________________________ 201
2.1. Dispositifs expérimentaux ________________________________________ 201
2.1.1. Le tube de Kundt____________________________________________ 201
2.1.2. Le porosimètre _____________________________________________ 203
2.1.3. Le perméamètre ____________________________________________ 205
2.2. Échantillons testés_______________________________________________ 205
3. Résultats expérimentaux ____________________________________________ 207
3.1. Paramètres géométriques du matériau poreux _________________________ 207
3.1.1. Porosité ouverte du béton de chanvre ____________________________ 207
3.1.2. Perméabilité du béton de chanvre _______________________________ 208
3.1.3. Tortuosité α∞ _______________________________________________ 209
3.2. Le coefficient d'absorption α ______________________________________ 210
3.2.1. Influence de l’état de surface __________________________________ 211
3.2.2. Courbes continues d’absorption ________________________________ 213
3.2.3. Caractéristiques des courbes ___________________________________ 216
2.3.3.1. Influence de la formulation à épaisseur constante ________________ 216
2.3.3.2. Analyse dans le cas d’un double poreux________________________ 218
2.3.3.3. Influence de l’épaisseur à formulation fixée_____________________ 219
3.3. Comparaison avec d’autres matériaux de construction __________________ 220
4. Conclusion ________________________________________________________ 223
CONCLUSION___________________________________________________________ 225
- 16 -
GLOSSAIRE
Certaines notations, utilisées localement, ne figurent pas dans la liste ci-dessous. Elles sont
précisées au fur et à mesure de leur apparition dans le texte.
r rayon du capillaire m
Vs volume du squelette solide dans le matériau m3
Vt volume total du matériau m3
Vcapillaires volume des vides contenus dans le granulat m3
Vgranulat volume propre du granulat m3
ρfrais masse volumique du matériau à l’état frais kg.m-3
ρsec masse volumique finale du matériau sec kg.m-3
ρ masse volumique du béton de chanvre sec kg.m-3
ρbc masse volumique du béton de chanvre humide kg.m-3
ρc masse volumique du chanvre en vrac kg.m-3
ρpc masse volumique de la particule végétale kg.m-3
ρl masse volumique du liant kg.m-3
ρliant_grains masse volumique de la poudre de liant (grains) kg.m-3
ρw masse volumique de l'eau kg.m-3
φ porosité totale du matériau -
φouverte porosité ouverte du matériau -
φg porosité totale du granulat -
φl porosité totale du liant -
φmeso porosité mésoscopique du matériau -
φmacro porosité macroscopique du matériau -
- 17 -
a diffusivité thermique m2.s-1
C chaleur massique J.(K.kg)-1
Cp chaleur spécifique à pression p constante J.(K.kg)-1
Cv chaleur spécifique à volume constant J.(K.kg)-1
Pvs pression de vapeur saturante Pa
Pv pression de vapeur Pa
Pc pression capillaire Pa
hc hauteur de remontées capillaires m
HR taux d'hygrométrie de l'air %
Sr taux de saturation %
ω teneur en eau massique %
αm angle de mouillage rad
- 18 -
INTRODUCTION
Un second élément de contexte expliquant l’intérêt pour les bétons allégés, est une
certaine prise de conscience environnementale. Cette dernière s'exprime de deux manières.
Les matériaux allégés sont de bons isolants thermiques compte tenu du volume d'air qu’ils
contiennent. Ils permettent donc de réaliser des économies d'énergie substantielles. De plus,
l'utilisation de granulats végétaux s'inscrit dans une démarche de développement durable. Elle
présente l’avantage d’utiliser une matière première renouvelable, contrairement aux granulats
des carrières dont les ressources s’appauvrissent. Ensuite, ces granulats sont dégradables de
manière naturelle, ce qui n’est pas négligeable dans le contexte actuel de limitation des
déchets. Les récentes recommandations européennes sur les déchets ultimes sont très
restrictives quant au devenir des matériaux lors de la destruction des édifices.
Le travail présenté ici n’a pas de vocation écologiste. Il vise simplement à montrer que
l’emploi de granulats végétaux peut offrir de nouvelles possibilités de développement des
matériaux de construction. Il a été réalisé pour partie dans le cadre d'un contrat de Recherche
CNRS, financé par la Chanvrière de l'Aube (producteur de chanvre), la société Strasservil
(fabricant le liant) et l'ADEME (Agence pour le Développement et la Maîtrise de l'Énergie).
- 20 -
INTRODUCTION
- 21 -
- 22 -
CHAPITRE 1
ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
ET
CARACTERISATION EXPERIMENTALE DES
MATERIAUX
- 24 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
1. ELEMENTS DE BIBLIOGRAPHIE
Les matériaux de construction peuvent être classés en deux grandes catégories : les
matériaux traditionnels d’origine naturelle et les matériaux modernes composites.
Parmi les matériaux récents, le plus employé est le béton, mélange composé de
granulats minéraux rigides, de ciment, de sable et d’eau. Cette formulation de base peut être
agrémentée d’adjuvants (produits rajoutés en faible quantité dans le mélange) de façon à
obtenir des propriétés particulières (fluidité du mélange, prise plus ou moins rapide…), voire
par d’autres constituants (acier pour béton armé ou précontraint, fibres) pour augmenter les
performances mécaniques. Ce matériau présente donc des propriétés structurelles
intéressantes et une bonne durabilité. Cependant, il a une masse volumique élevée d’où la
mise en place de fondations importantes pour supporter le poids des constructions. Par sa
masse synonyme d’une certaine inertie, il bloque la transmission des sons par vibrations
acoustiques et ralentit le transfert de la chaleur. Cet effet tampon compense en partie le fait
que le béton soit un matériau conducteur. Globalement, le béton est donc performant du point
- 25 -
de vue mécanique et du point de vue de l’isolation acoustique (limite la transmission) mais il
est moins intéressant du point de vue de l’isolation thermique.
De nouveaux matériaux sont alors apparus, rassemblés sous l'appellation de bétons
légers. Ces matériaux font référence à des bétons de masse volumique plus faible
(ρ < 1600 kg.m-3) que celle des bétons traditionnels et vise principalement une meilleure
isolation thermique. Ces matériaux sont obtenus par substitution des gravillons traditionnels,
qui peuvent être remplacés :
- par des granulats allégés
- par incorporation de bulles d’air (béton cellulaire).
C’est dans cette gamme de matériau que se situe le béton de chanvre, objet de l’étude.
La suite du chapitre fait une synthèse des caractéristiques et des phénomènes physiques liés à
ce type de matériau.
Les granulats légers se différencient des autres granulats par leur faible masse
volumique. Celle-ci est inférieure à 1200 kg/m3, tandis que celle de la pierre naturelle est de
2700 kg/m3. L’écart de masse volumique s’explique par la porosité élevée du granulat φg,
c’est-à-dire une importante proportion volumique de vides d’air contenus dans le granulat. Cet
air sera appelé dans la suite du mémoire, air intra-particule.
Vcapillaires
φg = (I.1)
V granulat
Un certain nombre de granulats légers existe à l’état naturel, les autres étant obtenus
artificiellement par divers procédés chimiques. Parmi les granulats d’origine minérale
naturellement poreux, les plus fréquemment rencontrés sont les ponces ou les roches
sédimentaires comme les calcaires. Ils sont extraits de gisements et directement utilisables
dans les matériaux de construction.
Les autres granulats naturellement poreux sont d’origine végétale. Il s’agit pour la
plupart des déchets organiques qui trouvent dans la construction un moyen de valorisation
- 26 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
[HERRMANN & al., 98]. On peut ainsi citer le bois, la tige de maïs, la coque de noix de coco
[KHEDARI & al., 03], le bambou [LUIZ DE BARROS SALGADO, 00]. Ce type de produit
représente une production de quelques dizaines de milliers de m3 par an, ce qui reste encore
très faible. Ces granulats contiennent de nombreux capillaires, entraînant une porosité φg
élevée. Cependant, ils contiennent également des matières organiques à base de cellulose qui
les rendent réactifs vis à vis de certains constituants présents dans les liants hydrauliques. Un
traitement préalable est donc indispensable afin de les rendre inertes. Trois méthodes sont
employées [PIMENTIA & al., 94] :
- les traitements physiques : les composés organiques (type hémi-cellulose)
contenus dans le granulat sont isolés du milieu extérieur, soit en imprégnant le
granulat de résine ou de paraffine (imprégnation à cœur), soit en enrobant la
particule. Les fibres de celluloses peuvent également être détruites par un sel de
calcium d’un acide fort, créant d’innombrables microcavités dans le granulat.
- les traitements thermiques : ils détruisent les constituants cellulosiques à une
température de l’ordre de 280°C et limitent en même temps l’hygroscopie du
granulat.
- les traitements chimiques : ils remplacent les groupes hydroxyl (-OH) par des
groupements hydrophobes dans le même but que les traitements thermiques.
Actuellement, la stabilisation des particules végétales s’effectue plutôt par un traitement
chimique suivi d’un traitement thermique. Cependant, des recherches récentes réalisées par
l’E.S.S.T.I.B. (Ecole Supérieure des Sciences et Technologie de l’Industrie du Bois)
s’orientent préférentiellement vers un traitement physique d’imprégnation plus aisé et plus
économique à mettre en œuvre que les traitements thermiques ou chimiques.
D’autres granulats légers sont obtenus par un procédé chimique appelé expansion
(argile expansée…). A une température de l’ordre de 1000°C, la paroi des granulats devient
plastique et gonfle sous l’effet de dégagements gazeux (CO, CO2,O2, SO2, SO3…) générés par
la cuisson. Ceci les rend beaucoup plus légers que les granulats classiques avec une masse
volumique sèche ρgranulat comprise entre 800 et 1200 kg/m3. La gamme de variation de la
masse volumique sèche s’explique par une expansion plus ou moins poussée du granulat
(durée de chauffe, température de cuisson entre 1000 et 1250°C) et par une composition
chimique variable qui prédispose à ce phénomène. Enfin, plus l’expansion sera poussée et
plus le matériau deviendra coûteux à fabriquer compte tenu de l’énergie consommée dans les
fours de cuisson et du temps de la réaction chimique.
- 27 -
Le deuxième type de bétons légers regroupe les bétons cellulaires. Ils sont composés
d’une matrice solide de liant (mélange de chaux, de ciment et de sable) et de bulles d’air. La
phase granulaire contient uniquement des agrégats de taille inférieure à 80 µm. Les bulles
d’air sont obtenues par un phénomène d’expansion ou « levée de la pâte » d’origine chimique
ou mécanique.
Dans le cas d’une expansion chimique [ARNAUD, 93] [VILLAIN, 97], de la poudre
d’aluminium introduite dans le mélange s’oxyde en milieu basique (chaux) et libère de
l’hydrogène à l’origine d’un réseau dense de bulles dans le matériau encore à l’état visqueux.
Dans le cas d’une expansion mécanique, un agent saponifiant est intégré au mortier initial et
au contact de l’eau, il se forme une mousse qui génère des bulles d’air. Cette méthode permet
de gérer le processus de formation des pores en dosant correctement l’agent moussant
[NARAYANAN & RAMAMURTHY, 00a] et de répartir les pores de manière régulière dans
la matrice. Lorsque le matériau a atteint sa taille finale, une étape de cuisson par autoclavage
finit de cristalliser le béton cellulaire. On obtient un produit manufacturé de structure connue
et contrôlée donc de qualité constante malgré un coût énergétique élevé (fours de cuisson).
Le béton cellulaire est utilisé en construction pour la réalisation de murs et de
planchers légers. Il est commercialisé sous forme de panneaux ou de briques préfabriquées de
625 mm de long, 500 mm de large et d’épaisseurs 50, 70, 100 ou 300 mm.
1.3.1. Porosités
- 28 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Vvides
φl = (I.2)
Vliant
avec Vvides : volume des vides contenus dans la matrice de liant (m3)
Vliant : volume total occupé par la pâte de liant (m3)
Enfin, l'arrangement plus ou moins compact des différents constituants entre eux
(empilement de granulats et du liant) crée des vides supplémentaires, à l'origine de la porosité
mésoscopique du matériau.
V
φ meso = vides (I.3)
Vt
avec Vvides : volume des vides contenus dans le matériau autres que l'air intra-liant et intra-
particule (m3)
Vt : volume total occupé par le matériau (m3)
Liant
Granulat
Air
mesoscopique
Air intra-
particule
Air
mesoscopique
Air intra-
liant
- 29 -
Constituants
3 ρ (kg/m3) porosité φ Rc (MPa) E (GPa) ε (m/m)
nom masse (kg) volume (m )
granulat minéral (grés, granite...) 2600 < 1% - 60
argile expansée 850 60 à 70% 6à9 -
Granulats -
copeaux de bois en vrac 275 75% -
10 à 12
granulat bois Agresta 600 60% -
1.3.2. Légèreté
- 31 -
granulat va faire de même par contact granulat-mortier. Comme le granulat peut supporter des
niveaux de déformation supérieurs à ceux du mortier, c’est ce dernier qui va fissurer sous
l’effet des contraintes et le granulat, n’ayant pas atteint son seuil de rupture, ne sera pas
détruit. La rupture du béton se fait dans ce cas précis par rupture du mortier et non par rupture
des granulats. Ainsi, les caractéristiques des granulats sont déterminantes dans les
performances des bétons légers, comme le montrent entre autres le travail expérimental et
l’étude statistique de [CHI & al., 03].
Les niveaux de performances des bétons légers sont inférieurs à ceux des matériaux
usuels de construction, puisque les granulats légers possèdent une porosité propre φg, qui les
rend déformables. D’une manière générale, la résistance en compression à 28 jours et le
module d’élasticité E augmentent lorsque la porosité des granulats φg diminue. Des
campagnes expérimentales ont mis en relation performances mécaniques et masse volumique
ρ des bétons légers. Dans le cas de granulats d’argile expansée de type Liapor,
[ARNOULT,76] a obtenu une relation linéaire entre la résistance en compresson et la masse
volumique (Fig.I. 2).
Fig.I. 2: Résistance sur prisme en compression à 28 jours (MPa) en fonction de ρ [ARNOULD, 76]
Dans le cas du béton cellulaire, la grande proportion de vides d’air dans le matériau est
un facteur essentiel dans le niveau de performances. On distingue deux types de pores : les
macropores (diamètre supérieur à 60 µm) et les micropores (diamètre < 60 µm) avec une
répartition de ¾ de macropores pour ¼ de micropores.
- 32 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Fig.I. 3: Répartition de la porosité de trois bétons cellulaires autoclavés en fonction du diamètre des pores
[JACOBS & MAYER, 92]
- 33 -
le volume de granulats devient suffisamment important, ses propriétés piloteront les
caractéristiques du matériau global.
Enfin, il convient de citer quelques travaux récents qui ont permis de concevoir des
bétons légers à hautes performances. [ROSSIGNOLO & al., 03] ont travaillé sur des
mélanges de granulats légers brésiliens (argiles expansées) dosés entre 224 et 293 kg/m3 et
des quantités élevées de ciment variant entre 440 et 710 kg/m3. Un ajout de fumée de silice, à
hauteur de 10 % en masse de ciment, est effectué. On obtient ainsi un matériau de masse
volumique autour de 1500 kg/m3. Les résistances en compression à 7 jours s’étalent entre 40
et 55 MPa et les modules de rigidité de Young varient entre 12 et 15 GPa. D’autres travaux
ont porté sur l’amélioration de la qualité de la matrice [TAMBA & al., 01] et sur des ajouts
d’argile dans les bétons de bois [AL RIM & al., 96], [BOUGUERRA & al., 98] . Les
résistances en compression finales sont comprises entre 7 et 24 MPa pour des masses
volumiques entre 1178 et 1540 kg/m3. Enfin, [SCHINK, 03] rajoute des fibres métalliques
dans les bétons légers afin d’obtenir des Bétons Hautes Performances allégés.
Les granulats, poreux et perméables, permettent les transferts hydriques sous forme
liquide et sous forme vapeur. Dans le cas d’eau liquide, on parle d’absorption et dans le cas
d’eau vapeur, on parle de sorption-désorption.
La perméabilité Πm représente la faculté qu’a un matériau de laisser un fluide
s’écouler en son sein, sous l’effet d’un gradient de pression. Cette propriété de perméabilité
n’existe donc que si le matériau possède une porosité non négligeable et que celle-ci est
connectée. En revanche, un matériau peut être très poreux (i.e. le béton cellulaire) et peu
perméable car les pores, non reliés entre eux, ne constituent pas des chemins continus, dans
lesquels le fluide peut s’écouler. Porosité et perméabilité sont donc liés mais le premier
n’implique pas forcément le deuxième.
1.3.4.1 L’absorption
- 34 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
La pression de vapeur saturante (Pvs) est la pression pour laquelle l’air contient la
quantité maximale de vapeur d’eau à une température T donnée. L’angle de mouillage αm
correspond à l’inclinaison du ménisque le long de la paroi.
AIR
EAU
ANGLE αm
Pour donner une ordre de grandeur, un capillaire de rayon 100 µm a une pression
capillaire de 1440 Pa si on considère que le granulat est parfaitement mouillé (cosαm = 1). Ce
résultat est interprétable en terme de hauteur de remontées capillaires hc avec à l’équilibre :
ρw g hc = Pc (I.5)
2 σ lv cos α m
d’où hc = (I.6)
r g ρw
Une pression de 1 440 Pa correspond alors à une hauteur d’eau de 14,4 cm. Pour un
capillaire de 10 µm de diamètre, la pression atteint 14 400 Pa soit une hauteur d’eau de 1,44
mètres. Ces pressions élevées expliquent la cinétique rapide du phénomène d’absorption
d’eau par les matériaux poreux. De plus, les hauteurs de remontées capillaires laissent à
penser que les pores contenus dans les matériaux se remplissent totalement.
- 35 -
béton cellulaire, on parle de pores occlus. Ces pores ne participent pas au phénomène
d’absorption (Fig.I. 5).
Une étude expérimentale menée par Vaquier dans [ARNOULD chap.7, 76] a mis en
évidence le rôle de la microstructure dans l’absorption en comparant le type et la distribution
par taille des pores de quatre granulats légers (Tab.I. 4) et en analysant les conséquences sur
l’absorption.
Tab.I. 4 : Porosité ouverte des granulats et proportion de capillaires de diamètre supérieur à 2 microns
Il constate que la plus grande partie de l’eau est absorbée en quelques minutes et que
la quantité d’eau absorbée n’est pas corrélée à la porosité ouverte mais à la porosité ouverte
de diamètre supérieur à 2 microns. Ceci est confirmé par la comparaison entre le volume de
liquide maximal absorbé par les granulats et le volume total des capillaires de diamètre
supérieur à 2 microns qui sont quasiment identiques.
- 36 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Sr = 100 %, tous les vides sont occupés par l’eau. La teneur en eau massique ω indique la
quantité d’eau liquide contenu dans un matériau par rapport à la masse sèche de ce matériau.
ω = M eau (I.7)
M sèche
Fig.I. 6 : Variation temporelle du degré de saturation en eau Sr des granulats de ponce dans un mortier
[ARNOULD, 76]
Lorsque le granulat est non saturé, il absorbe l’eau présente dans le mortier et son taux
de saturation augmente pendant 1 à 2 heures. C’est la phase de succion. Après avoir atteint un
maximum, Sr diminue et l’eau quitte le granulat, qui joue donc un rôle de « réservoir d’eau ».
A l’inverse, dans le cas de granulats saturés en eau, la phase de succion n’existe plus. Pendant
quelques heures, Sr reste constant à 100 % (plateau). Puis, Sr décroît car le granulat libère de
l'eau. Il est important de noter que les pentes des courbes représentant la diminution de Sr sont
parallèles, ce qui laisse à penser que c’est l’hydratation du ciment qui pilote l’assèchement des
granulats. Ce comportement vis à vis de l’eau explique le fait que les granulats légers soient
préalablement saturés, de façon à laisser la réaction d’hydratation du liant s’initier avec l’eau
disponible dans le mélange.
- 37 -
des variations inférieures à 0,45 mm/m pour une utilisation en génie civil. Elles peuvent
atteindre 10 mm/m pour des granulats particulièrement hydrophiles. Pour diminuer ces
variations, on peut augmenter le dosage en ciment dans le béton afin d’augmenter la rigidité
de la matrice entourant le granulat et bloquer le gonflement.
Des essais ont permis de d’évaluer les gains massiques et le taux de saturation Sr de
particules de bois AGRESTA seules (épicéa) et d’un béton de bois de masse volumique
600 kg/m3 incluant ces particules (Tab.I. 5). En une minute, les particules AGRESTA sont
capables d’absorber l’équivalent de leur poids sec, ce qui représente plus de la moitié des
volumes de vides disponibles. Le taux d’absorption dépend de la nature des copeaux de bois
mais le niveau reste toujours élevé. De même, les niveaux d'absorption sont importants pour
le béton de bois.
Tab.I. 6 : Variations dimensionnelles dues à l’absorption de l’eau pour du béton de bois Agresta
[PIMENTIA & al., 94]
1.3.4.3 La sorption/désorption
- 38 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
La pression de vapeur (Pv) est la pression pour laquelle un corps pur en phase
condensée (liquide ou solide) est en équilibre avec sa phase vapeur sous une température T
donnée et fixée.
- 39 -
Fig.I. 7 : Courbes de sorption de quelques matériaux [SERADA & FELDMAN, 01]
Fig.I. 8: Courbes de sorption et désorption du béton cellulaire de ρ = 500 kg/m3 à T = 20°C [AAC, 78]
- 40 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
3
Gain massique Veau (m ) pour 1
ρ (kg/m3)
sous HR=50% 3
m de matériau
plâtre - ciment 2500 0,20% 0,005
brique 1800 0,50% 0,009
beton hydraulique 2300 2% 0,046
béton cellulaire 500 3% 0,015
béton de bois 800 8% 0,064
Tab.I. 7 : Gain massique et volumique de différents matériaux sous HR = 50 %
Le tableau I.7 permet de comparer les quantités d’eau effectivement présentes dans les
matériaux sous HR = 50 %. On note l’existence d’un rapport volumique de 12 entre la quantité
d’eau adsorbée par le mélange plâtre-ciment et celle adsorbée par le béton de bois. De même,
on observe un rapport volumique de 3 entre le béton hydraulique et le béton cellulaire, bien
que la teneur en eau massique ω des deux matériaux soit très proche. Ces constatations
permettent de souligner le fait que les courbes de sorption-désorption doivent être utilisées
avec prudence. Il convient de se ramener à des notions de concentrations volumiques afin
d’évaluer la place occupée par l’eau et l’impact sur les propriétés du matériau, principalement
dans le domaine thermique.
- 41 -
matériau contenant un grand nombre de pores occlus comme le béton cellulaire (φ ≈ 80 %) ne
présente pas de convection. Plus de la moitié de l’air est immobile dans les pores occlus et la
conductivité thermique est faible (Fig.I. 9).
Fig.I. 9 : Conductivité thermique λ en fonction de la masse volumique sèche du béton cellulaire [AAC, 78]
a= λ (I.9)
ρc
Ainsi, le pouvoir isolant du matériau dépend non seulement de la valeur de λ mais
également de la vitesse de transfert thermique traduite par a.
- 42 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
a (m .s )
2 -1
ρ (kg/m )
3
porosité φ C (J/kg.K) λ (W/(m.K))
Styrodur 50 - - 0,033 -
Contre-
700 - 1500 0,12 1,1E-07
plaqué
Béton
2330 8% 1050 1,80 à 2,00 7,4 à 8,2E-07
hydraulique
Béton argile
1600 36% 900 0,46 3,2E-07
expansé
Béton
350 à 650 75 à 82% 880 0,16 à 0,33 5,2 à 5,8E-07
cellulaire
Béton de
600 à 900 52% 1200 0,09 à 0,30 1,2 à 2,8E-07
bois
Une synthèse des caractéristiques thermiques de quelques matériaux est faite dans un
but comparatif (Tab.I. 8). On constate par exemple, qu’un béton cellulaire est plus poreux
qu’un béton de bois et possède une conductivité thermique plus faible. En revanche, il diffuse
la chaleur plus rapidement.
Un dernier élément concernant les propriétés thermiques des bétons légers est lié au
pouvoir absorbant de ces matériaux, qui peuvent contenir des quantités d’eau non
négligeables. L’eau étant un excellent conducteur, elle induit une augmentation de la
conductivité thermique du béton, en se substituant à l’air isolant. Divers travaux ont permis de
corréler la conductivité thermique λ et la teneur en eau massique ω des bétons légers par des
formules empiriques. Des mesures expérimentales sur du béton de bois ont montré que la
conductivité thermique augmentait de 40 à 90 % pour des teneurs en eau ω de 30 %.
- 43 -
Cependant, les variations de λ dépendent de la masse volumique sèche puisqu'une teneur en
eau massique ω identique pour deux bétons de bois ne représentera pas le même volume d'eau
dans chaque matériau humide. Ceci permet d'expliquer les écarts observables sur la figure
suivante.
0,5
0,45
0,4
0,35
λ (W/(m.K))
0,3
0,25 1000 kg/m3
0,2 550 kg/m3
0,15
0,1
0,05
0
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30%
Des études similaires à celles réalisées sur les bétons de granulats légers, ont été
menées sur le béton cellulaire, afin d’évaluer les variations de conductivité λ induites par la
présence d’eau liquide.
Fig.I. 11 : Conductivité thermique λ en fonction de la teneur en eau massique ω du matériau [AAC, 78]
- 44 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Lorsqu’un son est émis, une onde acoustique se propage dans l’air jusqu’à atteindre un
obstacle. Lorsque cette onde incidente rentre en contact avec un matériau, deux ondes sont
créées : une onde réfléchie qui se propage dans le même milieu que l’onde incidente, une
onde transmise qui traverse le matériau de part en part. Un traitement acoustique est une
démarche qui va influer soit sur l’onde transmise, soit sur l’onde réfléchie de façon à
améliorer l’acoustique d’un local.
L’isolation acoustique vise à limiter la transmission des sons de part et d’autre d’un
matériau. Cette isolation est généralement réalisée par de matériaux de forte densité car leur
inertie fait qu'ils sont plus difficilement mis en mouvement par les ondes acoustiques. Ils
génèrent donc moins d’ondes transmises par vibrations. Les bétons légers, comme leur nom
l’indique, ne fonctionnent pas par cet effet de masse.
On peut également limiter la transmission du son en imperméabilisant la surface du
matériau. Les ondes sont alors réfléchies et renvoyées vers la source émettrice. Les matériaux
peu perméables sont donc de bons isolants, dans le sens où ils empêchent la transmission du
son entre deux pièces contiguës. Cependant, les ondes réfléchies viennent perturber
l’intelligibilité du discours dans le local, en créant des interférences.
La troisième façon d’agir sur les ondes acoustiques est l’absorption. Les matériaux
amortissement les sons par dissipation visqueuse. Cependant, ce mécanisme de dissipation
d’énergie suppose que les ondes puissent pénétrer dans le matériau et disposer d’un espace
- 45 -
suffisant pour être amorties. Il faut donc une certaine perméabilité et une porosité ouverte
importante.
La perméabilité Π d'un matériau homogène, se définit à partir de la loi de Darcy, qui
relie le débit du fluide traversant à la perte de charge et à la surface traversée. Dans le cas
d’un écoulement non turbulent dans un milieu isotrope, on a :
v = - Π ∇P (I.10)
η
Q = Π S ∆P (I.11)
η ∆l
avec v : vitesse d’écoulement du fluide (m.s-1)
Π : coefficient de perméabilité du matériau (m2)
η : viscosité dynamique du fluide (Pa.s)
Q : débit volumique du fluide
∆l : épaisseur du matériau poreux (m)
S : section de passage du fluide (m2)
∆P = P2 – P1 : différence de pression appliquée sur chaque face de l’échantillon (Pa)
σ = P 2 - P1 S (I.12)
∆l Q
σ varie entre 1 000 et 300 000 Pa.s.m-2 pour les matériaux poreux couramment utilisés en
génie civil. En combinant (IV.11) et (IV.12), on en déduit la relation de passage entre
résistivité à l’air et perméabilité macroscopique :
Π=1 (I.13)
η σ
Le pouvoir absorbant d’un matériau se caractérise par le coefficient d’absorption α.
Quand α = 1, toute l’énergie de l’onde incidente est dissipée donc le son est entièrement
amorti. Quand α = 0, le son n’est pas amorti du tout. Ce coefficient α dépend de la fréquence.
En général, il est mesuré sur toute la gamme de fréquences, puis moyenné sur des bandes de
fréquences appelées octaves. Ceci permet de comparer plus facilement les matériaux entre
eux. Parmi les bétons légers, seul le béton de bois est utilisé actuellement pour ses qualités
acoustiques, car il représente un bon compromis entre une certaine masse volumique et une
bonne capacité d’absorption. La Fig.I. 12 permet de comparer le coefficient d’absorption α du
- 46 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
béton de bois STRUCTA (panneau double faces commercialisé par Béton Bois Système),
celui du béton cellulaire Siporex (mesures LGM), et ceux du béton peint, de la brique, du
contre-plaqué et du plâtre (mesures CEBTP). Au delà de 400 Hz, le béton de bois absorbe
plus de 80 % de l’énergie de l’onde incidente, ce qui traduit une atténuation très importante du
son. Seul 20 % de l’énergie acoustique incidente est réfléchie par le matériau. Le pouvoir
absorbant du béton de bois est deux à trois fois plus élevées que celui des autres matériaux de
construction rencontrés usuellement dans le bâtiment.
1,0
0,9
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
125 250 500 1000 2000 4000
Fréquence (Hertz)
Fig.I. 12: Coefficient d’absorption acoustique α par octave de quelques matériaux (LGM et CEBT)
ρ (kg/m )
3
porosité φ perméabilité Π (m )
2
α
Contre-
700 - - 0,10 à 0,40
plaqué
Béton argile
1600 36% - -
expansé
Béton -14
350 à 650 75 à 82% 1 à 4.10 0,21 à 0,32
cellulaire
Béton de
600 à 900 52% - > 0,55
bois
- 47 -
En conclusion, la porosité globale d’un matériau n’explique pas à elle seule une bonne
ou une mauvaise absorption acoustique. Le béton cellulaire par exemple possède une forte
porosité mais il n’absorbe pas plus de 40 % du son, car il est peu perméable. L’onde sonore ne
parvient pas à pénétrer dans le matériau et ne peut donc pas être amortie. Il en est de même
pour le plâtre et la brique dont les surfaces sont peu perméables. L'étude du comportement
acoustique devra donc prendre en compte ces deux paramètres simultanément, afin d'analyser
les données expérimentales recueillies (chapitre 4).
Le béton de chanvre est un mélange dans des proportions très variables de deux
constituants de nature très différente, à savoir un granulat d’origine végétale et un liant à prise
hydraulique et aérienne. Les caractéristiques de chacun des composants sont exposées dans un
premier temps, avant d’aborder les propriétés du mélange.
2.1. Le liant
Les deux liants utilisés sont composés d’un mélange de chaux hydraulique et de chaux
aérienne. Le premier liant s’appelle le T70 et le second le Tradichanvre, ce qui correspond à
la dénomination commerciale de ces produits. Les compositions massiques et volumiques
sont indiquées ci-dessous (Tab.I. 10). Le signe * dans T70 indique que ce liant contient
environ 10 % en volume de pouzzolanes (inclus dans la chaux hydraulique).
MASSE VOLUME
chaux chaux chaux chaux
sable sable
hydraulique aérienne hydraulique aérienne
T70* 37% 63% - 25% 75% -
Tradichanvre 22% 58% 20% 10% 55% 35%
Tab.I. 10: Composition chimique des liants T70 et Tradichanvre
Les proportions sont de 1/3 de chaux hydraulique pour 2/3 de chaux aérienne. Compte
tenu des mécanismes de prise différents pour les deux types de chaux, ceci laisse présager
d’un durcissement en deux étapes. De plus, le liant contient des ajouts parmi lesquels un
entraîneur d’air, qui explique la porosité observable sur les échantillons après prise (Fig.I.13,
- 48 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
I.14 et I.15). Le T70 entre dans la composition du béton de chanvre et le Tradichanvre est
utilisé pour formuler des enduits.
10 µm
- 49 -
Les trois figures montrent les différentes tailles de pores observables dans le liant pur.
On note l’existence de deux échelles distinctes avec des pores de diamètre de l’ordre du
micromètre (échelle micro), des pores de diamètre de l’ordre du dixième de millimètre
(échelle meso). Ces tailles de pores faibles vont entraîner des pressions de capillarité élevées
donc des hauteurs de remontées capillaires importantes. Le liant T70 possède donc une
sensibilité à l’eau dont il faudra tenir compte dans l’étude. Des conclusions identiques sont
obtenues pour le Tradichanvre.
9-10
8-9
7-8
6-7
5-6
10 4-5
3-4
9 2-3
1-2
8 0-1
6
Hauteur remontées
5 capillaires (m)
3
90
78 2
66
53 1
angle de mouillage (°) 37
0
0 0,001
0,05 0,01
0,5 0,1
1
Fig.I. 16 : hauteur de remontées capillaires pour des pores de diamètre compris entre 1µm et 1 mm
- 50 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
La chaux hydraulique est obtenue par calcination d’un calcaire riche en silice et oxyde
de fer. Cette chaux présente un phénomène de double prise. Dans un premier temps, il se
produit un durcissement à l’eau, relativement rapide (1 mois environ). Puis, dans un second
temps, un durcissement à l’air (dû au CO2), beaucoup plus lent, s’étend sur plusieurs années.
Le liant pur à l’état frais contient une forte proportion d’eau (52,5 % en volume). Une
partie de celle-ci est utilisée pour hydrater la chaux, c’est la prise. L’eau restante se vaporise
progressivement vers le milieu extérieur, ce qui constitue le séchage.
% pertes = ∆M 100 =
M 0 - M(t)
100
(I.14)
M0 M0
La vitesse d’évaporation Vévap. est définie comme la quantité d’eau qui disparaît, rapportée à
la surface de séchage et au temps écoulé.
- 52 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Lors de l’étude du séchage deux aspects doivent être pris en compte : l’état final du
matériau et la cinétique du phénomène. L’état final du matériau, c’est-à-dire lorsqu’il est en
équilibre avec le milieu extérieur, dépend principalement des conditions thermodynamiques
extérieures et de la microstructure du matériau. La cinétique de séchage dépend quant à elle
non seulement des conditions extérieures mais également de la géométrie du matériau, de la
surface de séchage, de la porosité.
Des mesures réalisées à l’aide d’un air-mètre sur du T70 ont mis en évidence une forte
présence d’air au moment de la fabrication (phase fluide). On obtient expérimentalement une
porosité initiale autour de 14 % pour les masses volumiques de liant voisines de 1450 kg/m3.
20%
15%
Porosité
10%
5%
0%
1430 1440 1450 1460 1470
ρ (kg/m ) 3
La composition finale du liant pur est calculée par une approche simplifiée. La masse
volumique des grains de liant ρgrains_liant est prise égale à 2700 kg/m3. Cette valeur correspond
à une phase minérale classique. Elle est vérifiée à partir des mesures à l’air-mètre, en
remontant aux valeurs de la masse volumique de la poudre. De plus, les variations de volume
des échantillons sont négligées car elles sont du même ordre de grandeur que la précision de
la mesure géométrique (Fig.I.18). Ceci revient à considérer que le volume d’eau évaporée est
intégralement remplacé par de l’air.
Des essais de retrait libre ont été réalisés sur des échantillons de béton de chanvre de
formulation A4-1 (19 % de liant en volume). On a suivi l’évolution du déplacement axial et
- 53 -
du déplacement radial sur des éprouvettes cylindriques 16 x 32. On mesure une contraction
radiale de l’ordre de 7 mm/m et un tassement de l’ordre de 16 mm/m.
1800
1600
AXIAL
1400
1200
ε (x1e5)
1000
RADIAL
800
600
400
A4 - 1 / 19 %
200
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50
jours
- 54 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
0 air 0,451
0 air 0,131
1450 1,000 1130 1,000
HR = 0%
M (kg) V (m3)
925 grains liant 0,344
0 air 0,506
1075 1,000
Fig.I. 19 : Composition massique et volumique du T70 à l’état frais et après séchage
à l’air ambiant (HR = 40 %) et à HR = 0 %.
98 eau 0,098
447 eau 0,447
0 air 0,419
0 air 0,070
1747 1,000 1398 1,000
HR = 0%
M (kg) V (m3)
40 eau 0,040
0 air 0,477
1340 1,000
Fig.I. 20 : Composition massique et volumique du Tradichanvre à l’état frais et après séchage à l’air
ambiant HR = 40 % et à HR = 0 %.
- 55 -
Conditions de réalisation des essais
La cinétique de séchage des liants a été étudiée sur 65 échantillons, conservés dans des
moules cylindriques en carton étanche de 11 cm de diamètre et 22 cm de hauteur et stockés
dans une salle maintenue à T = 20°C et HR = 50 %. Le séchage s’effectue uniquement par la
face supérieure des éprouvettes, mesurant 100 cm2. Les pesées sont réalisées en préambule
des essais de caractérisation mécanique. On obtient ainsi les variations de masse des liants,
pour diverses échéances comprises entre 7 jours et 24 mois.
La cinétique du séchage des deux liants est étudiée au travers de quatre courbes,
représentant :
- le pourcentage de pertes massiques en fonction du temps (Fig.I.21)
- la teneur en eau massique ω en fonction du temps (Fig.I.22)
- la vitesse d’évaporation en fonction du temps (Fig.I.23)
- la vitesse d’évaporation en fonction de la teneur en eau massique (Fig.I.24)
Ces courbes permettent de définir les périodes durant laquelle les vitesses de séchage sont
constantes et les teneurs en eau critique pour chaque liant.
25
Liant T70
Liant Tradichanvre
20
% pertes massiques
15
10
0
0 5 10 MOIS 15 20 25
- 56 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
35%
30%
Liant T70
25% Liant Tradichanvre
20%
ω (%)
15%
10%
5%
0%
0 5 10 Mois 15 20 25
Fig.I. 22 : Teneur massique en eau ω du T70 et du Tradichanvre en fonction du temps
600
500
200
100
0
0 5 10 MOIS 15 20 25
- 57 -
600
400
200
100
0
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
ω (%)
Fig.I. 24 : Vitesse d’évaporation de l’eau en fonction de la teneur en eau ω du matériau
- 58 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
cette étape. Les deux vitesses Vévap obtenues, sont très proches, ce qui s’explique par des
conditions hydriques externes identiques pour les deux liants.
La troisième étape s’étend de 4 à 15 mois pour le Tradichanvre et de 9 à 24 mois pour
le T70. Le cœur du matériau ne contient plus assez d’eau pour compenser les pertes de surface
et la vitesse Vévap décroît lentement. Cette étape est plus courte pour le Tradichanvre car la
quantité d’eau disponible est plus faible que pour le T70.
La dernière étape correspond à un état d’équilibre hydrique du liant dans des
conditions thermodynamiques ambiantes. On peut considérer que le séchage des échantillons
est terminé au bout de deux ans.
Les deux liants présentent un comportement à la rupture de type fragile. Pour chaque
échéance, des essais de compression monotone et cyclique sont réalisés pour obtenir les
valeurs de σmax (maximum de contrainte supporté par le matériau), E (module d’Young), ν
(coefficient de Poisson), εσmax (déformation au niveau du maximum de contrainte). Ces
paramètres sont définis précisément dans le chapitre consacré au comportement mécanique du
béton de chanvre.
3
σmax
2,5
2
DISCONTINUITE DUE A
σ (MPa)
LA MICRO-
1,5 FISSURATION
0,5
εσmax
E
0
0 0,002 0,004 0,006 0,008 0,01 0,012 0,014 0,016
ε axial
- 59 -
Au cours d’un essai de compression monotone, des discontinuités associées au
développement de micro-fissurations sont observables en amont du maximum de contraintes
admissibles (Fig.I. 25). La détermination du module d’Young E des liants sera donc faite pour
des déformations de l’ordre de 0,4 % de façon à toujours se positionner avant l’apparition des
discontinuités dans la monotonie de la courbe. Cette micro-fissuration est systématique sur le
Tradichanvre compte tenu de la forte présence de sable dans les échantillons. En revanche, ce
comportement est peu observable sur le T70.
De plus, le comportement du liant est évolutif avec une hydratation progressive de la
chaux lors de la prise, qui permet une amélioration progressive de la résistance mécanique
(σmax) et de la rigidité du matériau (E), et une réduction de la déformation à la rupture (εσmax).
L’absence de résultats sur la durée de prise de ces liants a nécessité la mise en place d’un
suivi temporel des caractéristiques mécaniques (Fig.I. 26 et Fig.I. 27). Les essais sur le T70
montrent que la prise n’est pas tout à fait terminée à 15 mois. Des essais supplémentaires sont
en cours afin de confirmer l’hypothèse selon laquelle le niveau final de caractéristiques est
proche. Les essais sur Tradichanvre montrent deux paliers dans l’évolution des
caractéristiques avec une stabilisation vers 3 mois et une autre vers 6 mois. Le niveau final de
performances semble atteint.
15 mois
5
12 mois
6 mois
4
2 mois 14 jours
TEMPS
σ (MPa)
0
0 0,005 0,01
εaxial 0,015 0,02
Fig.I. 26 : Essais de compression sur liant T70 pur entre 14 jours et 15 mois
- 60 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
3,5
9 mois
3
12 mois
2,5
6 mois
TEMPS 1 mois
2
σ (MPa)
4 mois
3 mois
1,5
0,5
0
0 0,002 0,004 0,006 0,008 0,01 0,012 0,014 0,016 0,018 0,02
ε axial
Les essais de compression réalisés sur le liant pur ont permis de mettre en évidence
des résistances mécaniques modérées en comparaison de celles des autres liants. En revanche,
les niveaux de déformations supportés sont plus importants, ce qui devrait permettre au liant
de mieux s’adapter à la compressibilité du granulat végétal que ne le ferait un liant comme le
ciment par exemple.
Des mesures de conductivité thermique λ ont été effectuées sur du liant T70
préalablement séché à l’étuve à T = 60°C. Les résultats montrent que ce liant est un
conducteur moyen par rapport aux autres matériaux du génie civil. Pour des valeurs de masse
- 61 -
volumique ρ = 1050 kg/m3, on mesure des conductivités λ = 0,24 W/(m.K). Des essais
identiques menés sur du Tradichanvre par [SAMRI, 04], donnent une conductivité
λ = 0,28 W/(m.K) pour ρ = 1400 kg/m3.
Le liant T70 possède une porosité non négligeable une fois la prise terminée
puisqu’elle avoisine les 44 %. Des mesures du coefficient d’absorption α sont réalisées dans
la gamme de fréquences 100 à 2000 Hz à l’aide d’un tube à ondes stationnaires (tube de
Kundt). Les valeurs obtenues sont de l’ordre de 0,25 c’est-à-dire que 25 % du son environ est
absorbé par les échantillons de liant pur. Ces faibles niveaux de performances peuvent
s’expliquer par une perméabilité peu élevée du liant. Le réseau poreux est constitué de micro-
bulles d’air occlus à la manière de celui du béton cellulaire. Les ondes sont donc réfléchies sur
la surface peu perméable des échantillons et ne peuvent pas pénétrer dans le matériau pour
s’amortir. Le liant Tradichanvre a un coefficient d’absorption α variant entre 0,15 et 0,20.
Ceci pourrait s’expliquer par la présence de sable dans le mélange qui rendrait le
Tradichanvre plus imperméable que le T70.
0,45
0,40
0,35
0,30
0,25
α
0,20
Siporex (5cm)
0,15 T70 - 10 cm
T70 - 20 cm
Tradichanvre - 10 cm
0,10
Plâtre
Briques
0,05
0,00
125 250 500 1000 2000
Hertz
- 62 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
La plante de Cannabis est constituée en deux parties : les graines, la tige. Les graines
ou chènevis sont utilisées dans l’alimentation animale, dans la fabrication d’huile siccative
destinées aux peintures ou pour des produits pharmaceutiques.
EPIDERME
CORTEX
BOIS
MOELLE
- 63 -
La tige quant à elle se décompose en quatre zones [GARCIA-JALDON, 95] :
- l’épiderme : couche de cellules à paroi cellulosique
- le cortex : zone contenant les fibres corticales regroupées en faisceaux servant
à la fabrication des fibres de chanvre
- le bois ou xylème : cellules du parenchyme, fibres et vaisseaux conducteurs
assurant la conduction de la sève montante et servant à la fabrication des
granulats végétaux
- la moelle :parenchyme médullaire
Le bois est utilisé pour la fabrication des particules végétales de chanvre.
Historiquement, ces dernières étaient un simple sous-produit de la fibre de chanvre alors que
maintenant elles sont considérées comme un élément essentiel de la plante.
- 64 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Les particules végétales ainsi obtenues sont des matières naturelles au même titre que
les granulats de bois. Elles possèdent donc une certaine variabilité de leurs propriétés en
fonction du lieu de production, de la nature de la plante (variété) et du processus de
fabrication. A titre d’exemple, l’utilisation d’un défibrage mécanique au lieu d’un séjour dans
l’eau a nettement amélioré les qualités de ce produit.
Dans le cadre de ce travail, les particules de chanvre proviennent d’une source unique,
la Chanvrière de l’Aube (chaîne de production et de transformation identique) et d’une variété
de plante de chanvre unique – le cannabis sativae – dont la culture est la seule autorisée en
France compte tenu de son faible taux de tétrahydrocannabinol (substance psychotrope).
Les particules végétales ont une forme géométrique du type parallélépipédique. Elles
ont pour dimensions moyennes 2*0,5*0,2 cm3. Une analyse de la granulométrie d’un
échantillon de chènevotte (particules en vrac) montre une répartition serrée de la taille des
particules.
100%
90%
80%
% tamisats cumulés
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
0,01 0,1 Maille tamis (mm) 1 10
Ces particules étant d’origine végétale, elles présentent une forte porosité due aux
nombreux capillaires présents dans leur structure interne qui permettent à la sève de circuler
tout le long de la tige (Fig.I.31). La photo d’une particule a été grossie 200 fois au microscope
- 65 -
à balayage électronique pour visualiser ces capillaires. Elle montre la structure tubulaire de la
particule qui peut se modéliser comme un assemblage de cylindres creux accolés les uns aux
autres. Ceci explique la légèreté des particules avec ρpc = 320 kg/m3. La taille des pores dans
la particule est également évaluée sur cette photo. Leur diamètre varie entre 10 et 40 µm.
De plus, des mesures ont montré que la masse volumique de la chènevotte se situe aux
alentours de 130 kg/m3, ce qui signifie que l’arrangement est peu dense. Pour la suite de
l’étude, on pose les trois définitions suivantes. L’air inter-particules représente le volume d’air
situé entre les granulats végétaux et l’air intra-particule est l’air contenu dans la particule
végétale. Le bois fait référence à la partie végétale de la particule.
100 µm
- 66 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
air inter-
air intra- 0 0,594
0 0,784 particules
particule
130 bois 0,088
air intra-
320 bois 0,216 0 0,318
particule
320 1,000 130 1,000
Fig.I. 32 : Composition massique et volumique d’une particule et de la chènevotte
En premier lieu, les particules étant fortement poreuses comme l’ensemble des
granulats légers, il se pose la question de leur comportement vis à vis de l’eau. Connaissant la
taille des capillaires de la particule végétale, on applique les relations (I.4) et (I.5), puis on
calcule de manière théorique, la hauteur de remontées capillaires en fonction du diamètre des
capillaires et de l’angle de mouillage du liquide sur la surface (Fig.I. 33).
3,0
2,50-3,00
2,00-2,50
2,5 1,50-2,00
1,00-1,50
0,50-1,00
0,00-0,50
2,0
1,5
Hauteur remontées
capillaires (m)
1,0
0,5
0,0
40
34
28
0 26 37 46
22
53 60 66
16
73 78 84 90
10
- 67 -
Le graphique ci-dessus permet de voir que les hauteurs de remontées capillaires sont
supérieures à la taille caractéristique des particules (de l’ordre du centimètre). L’eau va donc
saturer les particules végétales et la cinétique du phénomène sera rapide.
Pour confirmer ces hypothèses, deux séries de mesures distinctes ont été réalisées,
l’une en 1998 [COUEDEL, 98] et l’autre en 2003 afin d’évaluer la reprise en eau liquide des
particules végétales. Le but était de déterminer le taux de saturation du volume de vides de la
particule et d’avoir un ordre d’idée de la cinétique du phénomène de reprise en eau. Pour cela,
des granulats végétaux entièrement séchés à T = 80°C pendant deux jours sont immergés dans
de l’eau, et le gain de masse en fonction du temps est mesuré. A partir de ces valeurs brutes,
on calcule le pourcentage de gain massique comme étant le gain de masse divisé par la masse
sèche de particules végétales.
M(t) - M 0 (I.16)
Gain massique % = × 100
M0
avec M(t) :masse de l’échantillon à l’instant t
M(t0) :masse sèche de chanvre
On calcule également le taux de saturation Sr des granulats et on obtient les graphiques
suivants :
250% 100%
Gain massique (%)
200% 80%
Sr (%)
150% 60%
Cerezo - 2003
100% Couedel - 1998 40%
50% 20%
minutes minutes
0% 0%
0 2 4 6 8 10 0 2 4 6 8 10
Fig.I. 34 : Gain massique et taux de saturation Sr pour des particules de chanvre sec
([COUEDEL, 98] et CEREZO)
Les deux séries de mesures donnent des résultats cohérents et des valeurs élevées de
gain massique et de taux de saturation. On conclut donc à un fort pouvoir absorbant de la
chènevotte vis à vis de l’eau liquide.
De plus, les granulats sont quasiment saturés au bout de quelques minutes puisque la
quantité d’eau liquide absorbée par les particules sèches est presque équivalente au volume
théorique de vides contenus dans le granulat séché (Sr > 95 % au delà de 5 minutes). Des
pesées ont également été faites au bout d’une heure et la masse des échantillons ne variaient
plus entre 10 minutes et 60 minutes. Concernant la cinétique de ce phénomène de reprise en
eau, on peut considérer que les granulats sont en état de quasi-saturation au-delà de 5 minutes
- 68 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
d’immersion. Cette conclusion prend son importance lorsque seront abordés les problèmes de
formulation et de mise en œuvre du béton de chanvre à la fin de ce chapitre (§ 2.3.4.1). Il faut
noter que les calculs de Sr et de gains massiques sont réalisés en négligeant la fine pellicule
d’eau présente à la surface des granulats et les ménisques d’eau entre deux granulats
consécutifs. Les granulats ont été légèrement secoués pour limiter l’existence de ces
ménisques et pouvoir négliger leur présence dans les calculs. Ainsi, les mesures permettent
d’avoir un ordre de grandeur correct de la cinétique du phénomène.
La sensibilité à l’eau liquide des particules végétales amène à se poser la question du
comportement des granulats vis à vis de la vapeur d’eau présente dans l’air en quantité
variable selon l'hygrométrie du milieu extérieur. Les isothermes de sorption et désorption à
T = 20°C ont donc été déterminées par [GARNIER, 00].
40%
35%
20%
15%
10%
5%
0%
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
Humidité relative HR (%)
Fig.I. 35 :Isothermes de sorption et désorption des particules de chanvre à T=20°C [GARNIER, 00]
En se basant sur ces courbes expérimentales, on constate des valeurs de teneur en eau
massique non négligeables pour des ambiances de HR supérieur à 50 %. Elles dépassent 10 %.
Cette eau devra donc être prise en compte notamment dans le cadre de l’étude des propriétés
thermiques, puisque l’eau est un excellent conducteur de chaleur. Le fait de ne considérer que
la conductivité sèche λsec des matériaux représente une grosse approximation, peu réaliste
dans le cas des matériaux à base de particules végétales.
- 69 -
2.2.5. Comportement en compression des particules
Les particules végétales possèdent une forte cohésion intergranulaire à sec. Des
éprouvettes cylindriques (320 mm de haut et 160 mm de diamètre) contenant uniquement des
particules sèches légèrement compactées ont ainsi pu être testées dans le cadre de cette étude
(Fig.I.36). Des chargements monotones et cycliques d’amplitude croissante ont été imposés
aux échantillons. Les courbes représentant la force appliquée en fonction de ∆h/h0 sont tracées
et se superposent parfaitement pour les deux types de sollicitations, montrant la parfaite
reproductibilité de ce type d’essai. On a ∆h = h0 – h(t) avec h0 représentant la hauteur initiale
de l’échantillon (m) et h(t) la hauteur de l’éprouvette au fur et à mesure de l’essai (m).
- 70 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
vaut 0,25 MPa environ et à la fin de l’essai elle est de l’ordre de 4,5 MPa soit une
multiplication par 18 de la valeur.
De plus, les cycles de charge-décharge font apparaître des boucles d’hystérésis dont la
surface augmente à chaque cycle. Le chemin de décharge est curviligne, ce qui pourrait
s’expliquer par un retard de réponse de l’échantillon dû à la viscosité de l’air, qui circule
difficilement dans et entre les particules. En revanche, le chemin de charge est linéaire et la
pente de la courbe de chargement augmente à chaque cycle, indiquant un raidissement du
matériau sous l’effet de la compression.
30
h0 = 320 mm
25
h = 256 mm
20 h = 192 mm
Force (kN)
h = 128 mm
15
10
0
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70%
∆h / h0 (%)
- 71 -
diminue. Les granulats se « coincent » peu à peu, expliquant un raidissement global de la
structure.
Ce nouvel empilement subit alors un cycle de rechargement, qui va agir
simultanément sur l’élasticité des particules et sur celle de l’arrangement granulaire dans cette
nouvelle configuration (pente linéaire de la charge).
Fig.I. 38 : Schématisation du comportement du chanvre en vrac lors d’un essai cyclique de compression
- 72 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
0,065
0,060
λ (W/(m.K))
0,055
0,050
Modèle
0,045 Expérience
0,040
100 120 140 160
ρ -3
chanvre en vrac (kg.m )
- 73 -
2.3. Le béton de chanvre
Fig.I. 41 : Béton de chanvre contenant une faible quantité de liant (formulation Toit1)
Lorsque le dosage en liant est fort, les particules sont noyées dans une matrice de liant
continue (Fig.I. 42). Le comportement du matériau se rapproche de celui du liant pur.
1
Les caractéristiques de cette formulation seront détaillées dans le § 2.3.4.4
- 74 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Fig.I. 42 : Béton de chanvre contenant une grande quantité de liant (formulation A3-2)
Entre ces deux dosages extrêmes, la structure du béton de chanvre s’apparente à celle
d’un empilement d’éléments, constitués d’une particule végétale entourée d’un mince film de
liant (Fig.I. 43). Les propriétés de ce type de matériau sont donc intermédiaires entre celles du
liant et celles des particules végétales.
Les propriétés sont étroitement liées à la structure et vont donc être assez variables.
Cependant, il est possible de donner quelques indications générales, afin de voir la gamme des
performances, dans laquelle le béton de chanvre se situe.
La résistance en compression et le module de rigidité sont globalement faibles
(plafonnées par les caractéristiques du liant) et ne permettent pas pour l’instant d’en faire un
matériau porteur. Actuellement, une solution avec structure porteuse en bois apparente ou
noyée est employée (Fig.I. 44).
- 75 -
Fig.I. 44 : Murs en briques préfabriquées avec structure porteuse en bois (Mens, Isère - 2002)
La prise du liant s’étale sur plusieurs années (chaux aérienne) comme le montrent les
essais réalisés sur le T70 et le Tradichanvre. Cette prise lente se répercute sur les
caractéristiques du béton de chanvre qui varient dans le temps. Les essais de caractérisation
des propriétés mécaniques sont donc réalisés à des intervalles de trois mois en moyenne, pour
une période de conservation comprise entre 21 jours et 24 mois.
- 76 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
L’eau introduite dans le mélange frais est divisée en deux parties, l’eau de pré-
mouillage et l’eau de gâchage. L’eau de pré-mouillage a pour rôle d’humidifier les granulats
poreux de façon à neutraliser leur fort pouvoir absorbant et éviter qu’ils ne perturbent par la
suite la prise du liant. L’eau de gâchage sert à l’hydratation de la chaux hydraulique contenue
dans le liant. Les composants sont introduits dans l’ordre suivant :
- chanvre
- eau de pré-mouillage des particules
- liant
- eau de gâchage
Ce choix de mise en œuvre présente un double avantage. Tout d’abord, les particules pré-
mouillées ne monopolisent pas l’eau utile à l’hydratation du liant et ne perturbent donc pas la
prise. Elles jouent également un rôle de réservoir en eau au cours de la prise. Ensuite, elles
deviennent moins sensibles à un écrasement potentiel lors du mélange avec le liant dans le
malaxeur, puisqu’elles sont remplies d’eau. En effet, les particules doivent conserver leur
volume initial donc leur porosité pour jouer un rôle du point de vue thermique et acoustique.
Le mélange se fait dans un malaxeur à train valseur de 80 litres afin d’obtenir une
bonne homogénéisation des composants, sans les abîmer. Les durées des différentes étapes de
malaxage doivent être suffisamment longues pour permettre une bonne homogénéisation et
suffisamment courtes pour éviter de laisser trop d’eau s’évaporer dans l’air ambiant. On
distingue ainsi :
- 77 -
d’épaisseur supérieure à 8 cm car cela entraînait une perte d'homogénéité des échantillons sur
la hauteur de l’éprouvette. En effet, les frottements du matériau contre les parois du moule
sont importants et entraînent un tassement non homogène des couches trop épaisses de
matériau frais. De plus, dans un souci de reproductibilité, les échantillons sont tassés à l’aide
d’une presse electromécanique de type M.T.S. sous une contrainte de compactage de 0,05
MPa, ce qui correspond à une force de1 kN pour une surface de 200 cm2. Ceci permet
d’arranger les particules sans les endommager. Le processus de réalisation des éprouvettes
peut donc se résumer en trois étapes que l’on répète autant de fois que nécessaire pour remplir
les moules.
- Verser du béton de chanvre dans le moule sur une épaisseur de 7 à 8 cm
- Réarranger les granulats grossièrement à la main
- Compacter avec la presse MTS sous 0,05 MPa
Dans le cadre de cette thèse, plusieurs moules ont été utilisés selon le type d’essais à
réaliser. En ce qui concerne les aspects mécaniques, des moules cylindriques en carton sont
utilisés (hauteur 320 mm et diamètre 160 mm). En thermique, des dalles de 27 cm de côté et 5
cm d’épaisseur sont fabriquées. En acoustique, des prismes de hauteur 10, 20 et 30 cm et de
côté 8,5 cm sont utilisés. Ces différentes tailles d’échantillons sont liées aux dispositifs de
mesures (boîtes thermiques, tube de Kundt) dont les dimensions sont imposées. Toutefois, on
s’est attaché à chaque fois à ne pas choisir de moule de taille trop petite vis à vis de la taille
des hétérogénéités (i.e. les particules dont la taille caractéristique est de l’ordre du
centimètre). On a ainsi des échantillons représentatifs des propriétés globales du béton de
chanvre. L’utilisation du même procédé de fabrication, quel que soit le moule, permet de
travailler sur le même matériau (structure microscopique comparable).
Les éprouvettes testées en mécanique sont conservées dans leur moule dont le fond a
été retiré afin de reproduire les conditions de séchage symétriques, réellement rencontrées
dans un mur. En effet, une carotte de béton de chanvre séchant dans un mur est soumise à une
circulation d’air entre ses deux faces mais les surfaces latérales ne sont pas en contact avec le
milieu extérieur. En disposant les éprouvettes horizontalement sur des étagères, on se retrouve
dans une configuration identique avec les côtés isolés de l’ambiance extérieure.
En revanche, les dalles des mesures thermiques sont démoulées au bout de 24 heures
et elles sèchent ainsi jusqu’au moment des essais. La cinétique du phénomène de séchage n’a
guère d’importance dans ce cas, car la mesure porte sur la valeur finale de la conductivité
thermique (i.e. après prise du liant et après séchage de l’échantillon).
- 78 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
Pour des raisons techniques, il n’a pas été possible de démouler les prismes testés en
acoustique comme cela a été fait en thermique. Ceux-ci sèchent donc dans leur moule, ce qui
ralentit le phénomène et décale d’autant les mesures expérimentales. En effet, il est
indispensable que les échantillons adhèrent parfaitement aux parois pour éviter les vides d’air
qui perturbent les mesures d’absorption au tube de Kundt. L’inconvénient inhérent à ce
dispositif de mesure concerne le rôle de la structure dans le comportement acoustique. On
mesurera l’absorption du béton de chanvre sur un support (le moule) infiniment rigide
(structure multicouche), au lieu de déterminer l’absorption du matériau seul.
Les différents essais effectués au cours des années précédentes ont montré qu’une
exposition à un air trop sec provoquait un séchage trop rapide de l’éprouvette empêchant le
liant de faire prise correctement. La surface durcissait (effet de peau) grâce à la carbonatation
et l’intérieur de l’échantillon perdait complètement sa cohésion (phénomène de farinage).
L’air plus sec contient moins de vapeur d’eau, qui véhicule le CO2 nécessaire à la
carbonatation de la chaux. La prise est donc interrompue. A l’inverse, des conditions de
conservation à HR = 100 % ont été testées. La prise durait alors beaucoup plus longtemps et
les moules en carton se dégradaient.
- 79 -
Composition massique (kg) Pourcentages massiques initiaux
Chanvre Liant A Eau Chanvre Liant A Eau
A4-1 110 190 335 17,3% 29,9% 52,8%
A4-1,5 110 285 370 14,4% 37,3% 48,4%
A3-0,75 110 198,75 342,7 16,9% 30,5% 52,6%
A3-1 110 265 368,6 14,8% 35,6% 49,6%
A3-1,5 110 397,5 420,4 11,9% 42,8% 45,3%
A3-2 110 530,8 472,2 9,9% 47,7% 42,4%
Tab.I. 14 : Formulations de béton de chanvre initiales
Dans un second temps, trois formulations nommées Toit, Mur et Dalle ont été plus
particulièrement choisies car les caractéristiques de ces matériaux répondaient à des demandes
précises sur les chantiers de construction. Le nom de chaque formulation indique l’usage qui
est fait du matériau dans le cadre d’une habitation. La formulation Toit contient une forte
proportion de chanvre et peu de liant. Elle sert à isoler thermiquement les toitures. Les
formulations Mur et Dalle contiennent une quantité de liant plus importante et possèdent donc
de meilleures caractéristiques mécaniques tout en conservant un bon pouvoir isolant. La
figure I.45 indique les compositions volumiques initiales et finales du béton de chanvre. Les
proportions des différentes phases confirment l’hypothèse initiale de l’existence de structures
différentes pour le béton de chanvre. Les compositions volumiques sont calculées en
considérant qu’il n’y a pas de variation globale de volume du béton au cours de la prise et du
séchage. On considère également que les particules sont quasiment saturées à l’état initial et
sèches à l’état final.
En plus du béton de chanvre, un enduit est fabriqué à partir des particules végétales et
du liant Tradichnavre. Une formulation contenant 51 % de liant en masse est donc testée dans
le cadre de cette étude.
- 80 -
CHAPITRE 1 : Eléments bibliographiques et caractérisation expérimentale des matériaux
100%
Air macroscopique
Air intra-liant
90%
Eau
Liant
80%
Air intra-particule
Eau particules
70%
Concentration volumique
Matière végétale
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Toit A4-1 A3-0,75 Mur Dalle A3-1 A4-1,5 A3-1,5 A3-2 Enduit
100%
Air macroscopique
Air intra-liant
90%
Eau
Liant
80%
Air intra-particule
Eau particules
70%
Concentration volumique
Matière végétale
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Toit A4-1 A3-0,75 Mur Dalle A3-1 A4-1,5 A3-1,5 A3-2 Enduit
Fig.I. 45 : Composition volumique initiale (a) et finale (b) du béton de chanvre sous T = 20°C et HR = 50 %
- 81 -
3. CONCLUSION
- 82 -
CHAPITRE 2
COMPORTEMENT MECANIQUE
DU BETON DE CHANVRE
Le béton de chanvre présente des originalités qui nécessitent des études spécifiques,
que ce soit du point de vue de la fabrication ou de la caractérisation de son comportement
mécanique.
En premier lieu, les particules végétales peuvent interférer avec le processus de prise,
compte tenu de leur pouvoir absorbant. L’absence de point de repère sur les interactions
possibles entre le chanvre et la chaux, a nécessité de mener un travail expérimental
exploratoire pour répondre à ces interrogations.
En second lieu, la grande déformabilité des particules nous a amené à définir une
procédure de fabrication qui permette de garantir une bonne homogénéité des échantillons et
la répétabilité des mesures. De même, les caractéristiques non classiques dont la grande
déformabilité et le faible module nous ont conduit à mettre en place des essais reproductibles
adaptés au comportement du matériau.
En troisième lieu, le béton de chanvre possède une variabilité de sa microstructure,
liée à la formulation du matériau. Trois microstructures ont été isolées à la fin du chapitre 1.
Or, la microstructure influence directement le comportement mécanique. Cette étude va donc
tenter de mettre en relation ces structures avec des comportements types et des gammes de
performances.
Enfin, se rajoute à ces éléments la multiplicité des facteurs influençant les
caractéristiques mécaniques finales du matériau. On va s’intéresser en particulier à l’influence
de la formulation (dosage en liant et en particules) et du compactage.
- 84 -
1. APPROCHE EXPERIMENTALE DU
COMPORTEMENT
Les échantillons de béton de chanvre sont fabriqués en plusieurs gâchées. Une gâchée
contient 60 litres de matériau frais environ et permet d’obtenir entre 6 et 8 éprouvettes de
béton. Ce volume, inférieur au volume critique du malaxeur dont dispose le laboratoire, reste
suffisamment grand pour que le mélange préparé soit homogène après malaxage.
La répétabilité dans la fabrication des échantillons a été contrôlée par mesures des
masses volumiques des échantillons (Tab.II. 1). Un nombre d’éprouvette compris entre 12 et
29 a été fabriqué pour chaque formulation, ce qui représente un volume total de matériau
variant entre 100 et 200 litres de béton frais par formulation. La distribution des masses
volumiques pour chaque formulation est homogène avec des écarts types représentant un écart
relatif situé entre 1,5 % et 3,5 % par rapport à la masse volumique moyenne. On peut donc
considérer que les séries présentent une faible dispersion de leurs masses volumiques. Le
procédé de fabrication semble donc répétable et rend possible les comparaisons
3
Nombre ρinitial (kg/m ) ρfinal_moyen
3 3 3 3
d'échantillons ρmin (kg/m ) ρmax (kg/m ) ρmoyen (kg/m ) écart type (kg/m ) (kg/m )
3
Tab.II. 1: Données statistiques sur les formulations de bétons de chanvre servant à l’étude des
caractéristiques mécaniques
- 85 -
Contraintes de compactage (MPa)
C1 C2 C3
A4-1 0,050 0,075 0,100
Mur 0,025 0,050 0,100
A4-1,5 0,025 0,040 0,050
Tab.II. 2 : Contraintes de compactage appliquées au béton de chanvre
3 3
ρinitial_moyen (kg/m ) ρfinal_moyen (kg/m )
3 3 3 3 3 3
ρc1 (kg/m ) ρc2 (kg/m ) ρc3 (kg/m ) ρc1 (kg/m ) ρc2 (kg/m ) ρc3 (kg/m )
A4-1 670 750 830 366 430 510
Mur 593 669 764 348 390 476
A4-1,5 737 811 840 437 469 490
Tab.II. 3 : Masses volumiques correspondantes aux contraintes de compactage
- 86 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
autoclavé, les essais sont effectués après la période de cuisson en autoclave qui permet de
finaliser la prise de la pâte de béton cellulaire. En fait, selon la cinétique de prise, des temps
« caractéristiques spécifiques » sont définis afin d’avoir des mesures représentatives des
performances finales de chaque matériau. La détermination d’échéances de temps
représentatives des caractéristiques du béton de chanvre constitue un des objectifs du présent
mémoire.
1.2.2. Hypothèses
Pour tout corps matériel se déplaçant dans l’espace, on peut définir un champ de
déplacements u dans un repère orthonormé fixe donné et un tenseur H = grad u. Le tenseur
de déformations ε représente la variation relative de mesures d’un solide (longueur, volume,
aire) par rapport à sa mesure d’origine. Il s’exprime de la manière suivante :
ε = 1 × (Η + tΗ + tΗ . Η ) (II.1)
2
Dans le cas de petites déformations, on néglige le terme en tH.H Les déformations
s’expriment alors sous la forme d’un tenseur linéaire en u.
Les premiers essais réalisés sur du béton de chanvre, ont montré des niveaux de
déformations avant rupture élevés par rapport aux autres matériaux du génie civil (variations
de hauteur des éprouvettes ∆h/h0 de l’ordre de 10-1 au niveau du maximum de contraintes
admissibles). On considérera que cette valeur est à la limite des petites déformations
géométriques (ce qui revient à négliger le terme tH.H). Cette simplification permet de définir
dans le cadre de cette étude, la déformation axiale εaxial = ∆h/h0.
- 87 -
1.2.2.2 L’élasticité linéaire orthotrope
Lors des essais mécaniques, le matériau est soumis à un champ de contraintes σ axial
(compression). L’éprouvette se déforme et ce champ de déformations ε est lié au champ des
contraintes σ appliquées sur le matériau. On observe sur la figure II.1 que le matériau répond
de manière instantanée à la sollicitation appliquée.
0,002
0,0018
0,0016
0,0014
0,0012
εaxial
0,001
0,0008
0,0006
0,0004
0,0002
0
0 10 20 30 40 50 60
Temps (s)
Fig.II. 1 : Déformations en fonction du temps lors d’un essais de compression cyclique (formule A4-1,5)
- 88 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
axiale εaxiale. Il faut noter qu’une phase de mise en place peut exister lors des essais
(cf. §.1.3.1). Dans ce cas, le module E correspond à la pente de la courbe après cette mise en
place.
0,50
0,45
0,30 pente de
chargement initial
σ (MPa)
0,25
0,20
6 mois
0,15 3 mois
21 jours
0,10
0,05
0,00
0 0,002 0,004 0,006 0,008 0,01 0,012
εaxial (m/m)
0,12
0,10 6 mois
3 mois
21 jours
0,08
σ (MPa)
0,06
0,04
0,02
0,00
0 0,0002 0,0004 0,0006 0,0008 0,001 0,0012 0,0014 0,0016 0,0018 0,002
εaxial (m/m)
- 89 -
1.3. Préparation des essais
- 90 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
10
6 PHASE DE MISE
F (kN)
5 EN PLACE
0
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
d (mm)
Fig.II. 4 : Courbe Force / déplacement pour une éprouvette avec surfaçage à base de laine
Dans un second temps, les faces des éprouvettes ont été surfacées par sciage. On
réalise des passages successifs sur les faces extérieures des éprouvettes en retirant à chaque
fois quelques millimètres de matériau. Cette opération est réitérée jusqu’à ce que les surfaces
de l’échantillon ne présentent plus d’aspérités mais au contraire un aspect lisse (Fig.II. 5).
On laisse ensuite reposer les échantillons pendant vingt quatre heures, pour que ceux-
ci retrouvent un état d’équilibre thermique avec l’extérieur. En effet, la scie a tendance à
échauffer au point de brûler les particules de chanvre situées à la surface du béton lors des
passages successifs. Cependant, cet effet est jugé négligeable compte tenu de la faible
épaisseur sur laquelle la particule est brûlée et de la faible concentration en particules à la
surface. Les courbes obtenues pour des essais effectués sur des échantillons de béton de
chanvre surfacés par sciage ne présentent alors plus la phase de mise en place (Fig.II.6).
- 91 -
0,5
0,45
0,4
0,35
0,3
σ (MPa)
0,25
0,2
0,15
0,1
0,05
0
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06
εaxial
automatique permet d’obtenir les valeurs de d, F, dr1, dr2 et dr3 en fonction du temps. A partir
de ces mesures, on peut déterminer les valeurs des paramètres mécaniques.
Capteur de force
Capteur sans
Échantillon contact latéral
- 93 -
0,3
σmax
0,25
0,2
σ (MPa)
0,15
0,1
0,05
MODULE E εσmax
0
0 0,05 0,1 0,15 0,2
ε (m/m)
- 94 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
0,5
σmax
0,45
0,4
0,2
0,18 CYCLES DE
0,35 PENTES DE
0,16 DECHARGE
PARALLELES
0,3 0,14
σ (MPa)
0,12
M
σ (MPa)
0,25 O 0,1
D 0,08
0,2 U 0,06
L
0,04
E Cycle 3
0,15 0,02
E Cycle 2 0
0 0,0005 0,001 0,0015 0,002 0,0025 0,003 0,0035 0,004 0,0045 0,005
0,1 Cycle 1 εaxial
0,05
εσmax
0
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05
εaxial
εaxial
0 0,002 0,004 0,006 0,008 0,01 0,012 0,014 0,016 0,018 0,02
0,0000
-0,0005
εradial
εaxial
-0,0010
εradial
-0,0015
-0,0020
-0,0025
-0,0030
Dès les premiers essais menés par [COUEDEL, 98], il est apparu que le béton de
chanvre possédait une cinétique de prise relativement lente. Or, cette étude porte à la fois sur
le côté évolutif des caractéristiques mécaniques et sur le niveau final de performances. Ne
disposant pas d’étude préliminaire sur la durée de la prise de ce type de matériau, les essais
- 95 -
sont réalisés sur une base de temps définie à partir des essais sur liant pur. Des échéances de
tests sont fixées à 21 jours, 3 mois, 6 mois, 12 mois et 24 mois pour l’ensemble des
formulations. Des essais supplémentaires sont ensuite effectués à 9 mois, 15 mois et 18 mois
pour quelques formulations de façon à affiner les résultats.
- 96 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
0,45
σmax
0,4
0,35
0,3
MODULE E
σ (MPa)
0,25
Compression monotone
0,2 Compression cyclique
0,15
0,1
0,05
εσmax
0
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06 0,07 0,08
εaxial
Dans un premier temps, l’allure générale des courbes est exposée, afin de définir les
grandes lignes du comportement du matériau. Dans un second temps, une étude paramétrique
permet d’évaluer la sensibilité des grandeurs caractéristiques (résistance à la compression,
module d’élasticité E…) en fonction de la formulation, de la durée de prise et du compactage.
- 97 -
On peut distinguer deux zones situées de part et d’autre du maximum (Fig.II. 11) :
- Zone pré-pic de contrainte
- Zone post-pic de contrainte
0,45
σmax
0,40
0,30
MODULE E
0,25 PIC DE
σ (MPa)
CONTRAINTE
0,20
0,15
0,10
0,05
εσmax
0,00
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06 0,07 0,08
εaxial (m/m)
- 98 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
repérable par rapport à la formulation Toit, riche en particules végétales. La courbe de cette
dernière présente un plateau au niveau du maximum de contraintes, que l’on peut rapprocher
d’un comportement ductile.
0,9
0,8
A3-2
0,7 DOSAGE A4-1.5
EN Dalle
0,6 LIANT Mur
Toit
σ (MPa)
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0 0,02 0,04 0,06 0,08 0,1 0,12 0,14 0,16 0,18
εaxial
Le comportement de ce matériau est non fragile. Lorsque la matrice de liant est trop
fissurée pour jouer un rôle mécanique, les particules végétales prennent le relais. Le matériau
conserve une certaine cohésion qui lui permet de reprendre des efforts même lorsqu’il est très
endommagé (zone post-pic).
- 99 -
- Au-delà d’un certain niveau de fissuration, la matrice n’a plus de rôle
mécanique. Les particules reprennent les efforts et s’écrasent. Les niveaux
de déformations εaxial sont élevés (> 5 %) et les niveaux de contraintes σ
diminuent car les particules sont moins résistantes que le liant.
Une exception dans l’allure des courbes est toutefois observable pour la formulation
peu dosée en liant. Celle-ci varie avec la prise du matériau, ce qui semble indiquer une
profonde modification du fonctionnement structurel du matériau au bout de trois mois de
prise (Fig.II. 13).
0,3
0,25
0,2
σ (MPa)
0,15
Toit - 12 mois
0,1
Toit - 6 mois
Toit - 3 mois
0,05 Toit - 22 jours
Chanvre vrac
0
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5
εaxial
Au cours des trois premiers mois de prise, la courbe σ = f(ε) ne présente pas de pic de
contrainte, même pour des déformations élevées (>30 %). En revanche, une inflexion de la
courbe est observable lorsque les déformations deviennent voisines de 15 %. Pour une
déformation axiale inférieure à 15 %, la courbe présente une allure similaire à celle des autres
courbes avec un comportement élasto-plastique et un maximum de contrainte. Pour une
déformation axiale supérieure à 15 %, la courbe recommence à augmenter après avoir subi
une inflexion. Son allure est identique à celle de la courbe du chanvre en vrac avec une
augmentation de la pente, qui indique un raidissement de l’échantillon. Après trois mois de
- 100 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
prise, les courbes redeviennent comparables à celles des autres formulations de béton de
chanvre.
Cette évolution des courbes contraintes-déformations montre le rôle de chacun des
constituants dans le comportement mécanique.
Lorsque la prise est peu avancée, le liant possède une rigidité faible. Ses
caractéristiques sont relativement proches de celles de la particule. Lorsque les déformations
sont faibles, les deux constituants influent sur la rigidité globale du matériau. Le
comportement initial est intermédiaire entre celui du liant et celui de la particule. Dés que les
déformations deviennent plus importantes, le liant se détériore et n’a plus de rôle mécanique.
L’échantillon se comporte alors comme du chanvre en vrac. Les particules s’écrasent et
entraînent une rigidification du matériau. L’absence de pic s’explique par le faible contraste
entre les deux constituants. Le matériau se comporte comme une coquille souple qui se
déforme de manière régulière.
Au bout de trois mois, la prise est suffisante pour que le contraste entre les propriétés
du liant et celles des particules soit notable. Le liant impose la rigidité et la résistance du
matériau. Le pic de contrainte est observable car le comportement est comparable à celui
d’une coquille rigide entourant un matériau souple. Le pic correspond à la rupture de la
coquille rigide et la décroissance de la courbe est imputable à la reprise des efforts par
l’élément souple de la structure (i.e. la particule).
- 101 -
0,9
0,8
0,7
0,6
σ (MPa)
0,5
0,4
0,3 24 mois
15 mois
0,2 9 mois
6 mois
0,1 3 mois
21 jours
0
0 0,02 0,04 0,06 0,08 0,1 0,12 0,14
εaxial (m/m)
Les résultats des essais sont analysés en tenant compte de deux paramètres, à savoir la
formulation et la durée de prise du matériau. Chaque paramètre caractéristique est étudié
séparément. Une synthèse finale est ensuite réalisée afin de définir des familles de
comportement.
- 102 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
1,2
40%
1 40%
29%
27%
28%
0,8
σmax (MPa)
22%
22%
19%
0,6
10%
0,4
0,2
0
0 5 10 15 20 25
MOIS
- 103 -
La deuxième hypothèse est basée sur l’existence d’interactions chimiques entre les
hémicelluloses des particules végétales et l’hydratation du liant. Lors de la transformation de
la tige de chanvre en particules, un nettoyage naturel est réalisé (rouissage). Des
hémicelluloses peuvent cependant subsister dans les particules. Ces composés étant des
retardateurs de prise (cf. béton de bois), ils expliqueraient les résultats obtenus sur le béton de
chanvre. Pour l’instant, nous ne disposons pas d’informations suffisantes pour pouvoir
privilégier un des deux raisonnements.
1,4
1,2
21 jours
3 mois TEMPS
1,0 6 mois
9 mois
15 mois
σmax (MPa)
0,8
24 mois
0,6
0,4
0,2
0,0
5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45%
Cvolumique en liant
- 104 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
pour les forts dosages, elle vaut 1,15 MPa. Ce matériau doit donc être utilisé avec une
structure porteuse afin de répondre aux exigences structurelles.
Concentration volumique
Particules Liant Air
Toit 38,2% 9,9% 51,9%
A4-1 36,5% 19,0% 44,5%
A3-0,75 37,2% 22,1% 40,7%
Mur 35,9% 21,7% 42,4%
Dalle 36,4% 27,8% 35,8%
A3-1 37,2% 26,5% 36,3%
A4-1,5 39,5% 29,1% 31,4%
A3-1,5 35,2% 40,7% 24,1%
A3-2 33,3% 39,2% 27,5%
Tab.II. 5 : Composition volumique du béton de chanvre après la prise du liant
1
A3-2
0,9 A3-1,5
0,8
0,7 A4-1,5
A3-1
0,6 DALLE
σ (MPa)
MUR
0,5 A3-0,75
A4-1
0,4
0,3
0,2
TOIT
0,1
0
0 0,01 0,02 0,03 0,04 0,05 0,06 0,07 0,08 0,09 0,1
εaxial
Fig.II. 17 : Essais de compression au bout d’un an de prise sur diverses formulations de béton de chanvre
Les observations réalisées pour σmax restent valables pour le module d’élasticité E.
L’allure des courbes est similaire avec une évolution en trois temps. Entre 0 et 3 mois, le
module augmente rapidement car la prise de la chaux crée une coquille solide autour du
granulat compressible. Entre 3 mois et un an, la matrice de liant se développe et augmente
progressivement la rigidité du béton, donc la valeur du module E. Au-delà de un an, la valeur
du module semble se stabiliser (Fig.II. 18).
- 105 -
180
40%
160
40%
29%
140 27%
28%
120 22%
22%
100 19%
E (MPa)
10%
80
60
40
20
0
0 5 10 15 20
MOIS
Fig.II. 18 :Évolution du module E en fonction du temps pour différents concentrations volumiques en liant
180
24 mois
160
18 mois
15 mois
140
12 mois
TEMPS
9 mois
120
6 mois
3 mois
100
E (MPa)
21 jours
80
60
40
20
0
5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45%
Concentration volumique en liant
- 106 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
dosages, le module passe de 100 à 160 MPa. Ces valeurs finales de module restent modestes
au regard d’autres matériaux de construction usuels (Tab.I.3). L’emploi d’une structure
porteuse est donc préférable pour garantir une rigidité globale à l’édifice.
Enfin, ces constatations expérimentales vont être réutilisées dans le cadre de la
modélisation par homogénéisation autocoherente du module E. L’emploi d’un motif
générique de type particule entourée d’une coquille de liant va être testé. Il présente
l’avantage d’imposer la continuité du liant, ce qui est vérifié dans la réalité. La démarche
complète de modélisation est exposée dans la deuxième partie du chapitre.
Dès les premiers essais, il est apparu que ce matériau présentait trois types
comportement en terme de déformabilité (Fig.II. 20). Dans le cas des faibles dosages en liant,
il n’est pas possible de mesurer des valeurs de εσmax avant trois mois car le comportement des
échantillons est atypique par rapport à celui des autres formulations. Il n’y a pas de pic de
contraintes donc εσmax n’est pas défini. Au-delà de trois mois, εσmax est stable et relativement
élevée (≈ 15 %). Dans le cas des forts dosages en liant, εσmax est peu élevé et sa valeur se
stabilise en quelques semaines. Entre ces deux extrêmes, εσmax évolue de manière
exponentielle. La déformation diminue de moitié entre 0 et 3 mois, puis baisse à nouveau de
30 à 50 % entre 3 mois et un an. Au-delà d’un an, εσmax semble stable.
0,30
0,25 10%
19%
22%
0,20 22%
28%
εσmax
27%
0,15 29%
40%
40%
0,10
0,05
0,00
0 5 10 15 Mois 20 25 30 35
- 107 -
Pour toutes les échéances de temps considérées, la déformation au maximum de
contrainte εσmax décroît lorsque la concentration volumique en liant augmente. La prise du
liant crée une coquille rigide autour du granulat déformable. L’effet de ce constituant est
d’autant plus visible qu’il est en grande proportion.
Pour les faibles dosages en liant, la quantité de liant est insuffisante pour enrober les
granulats et imposer la rigidité globale du matériau. La déformabilité est donc principalement
due à la déformation des particules, d’où une faible dépendance temporelle de ce paramètre,
qui passe de 0,17 m/m à 0,14 m/m en deux ans.
Dans le cas des forts dosages en liant, le liant enrobe les particules avec une épaisseur
suffisante pour imposer la rigidité globale du matériau dès le début de la prise.
0,18
0,16 21 jours
3 mois
0,14 6 mois
9 mois
0,12
12 mois
15 mois
0,10
εσmax
18 mois
0,08 24 mois
0,06
0,04 TEMPS
0,02
0,00
5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45%
Cvolumique en liant
Les niveaux de déformation relevés sur ce type de matériau sont importants quelle que
soient la formulation et l’échéance considérées. Les valeurs obtenues au bout de deux ans de
prise sont indiquées dans le tableau ci-dessous :
Concentration volumique en liant (%) εσmax
Faibles dosages 10 % 0,150
Dosages intermédiaires 19 % - 29 % 0,050 – 0,060
Forts dosages 40 % 0,040
Liant pur 100 % 0,012
- 108 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
Ce matériau présente donc un grand intérêt dans le cas d’une structure soumise à des
tassements différentiels car il est capable de se déformer d’une manière non négligeable avant
de fissurer et de rompre. Cette propriété est originale au regard des matériaux usuels affichant
des niveaux de déformations inférieurs à 1 %, ce qui pose des problèmes en terme de
durabilité des ouvrages (fissuration…) et d’esthétique. Le dosage en liant des matériaux
classiques est étudié de façon à fournir une résistance en compression et un module capables
de répondre à des exigences structurelles. Par conséquent, ils deviennent plus rigides donc
moins déformables et plus sensibles aux tassements.
1.5.5. Conclusion
- 109 -
Pour une concentration volumique en liant de l’ordre de 10 %, le matériau se comporte
comme un empilement de particules compressibles, reliées entre elles par des « ponts »
rigides de liant. En début de prise, le comportement mécanique est piloté essentiellement par
le comportement de la particule (absence de pic…). Ensuite, le liant fait prise et stabilise la
structure en limitant l’écrasement des granulats. Le matériau présente alors une résistance
mécanique faible.
Le tableau ci-dessous fait la synthèse des résultats pour chacun des paramètres testés :
Dosage Concentration
ρ (kg/m3) σmax (MPa) E (MPa) εσmax ν
en liant volumique liant
Faible 10 % 250 0,25 4 0,15 0,05
0,05 à 0,08 à
Intermédiaire 19 % à 29 % 350 à 500 0,35 à 0,80 32 à 95
0,06 0,16
Fort 40 % 600 à 660 1,15 140 à 160 0,04 0,20
Une formulation d’enduit a été testée dans le cadre de cette étude. Cet enduit est
réalisé en utilisant le Tradichanvre, qui contient du sable en plus de la chaux hydraulique et de
la chaux aérienne. Les deux graphiques suivants montrent l’évolution temporelle des quatre
paramètres mécaniques étudiés (σmax, E, εσmax, ν).
Le module d’élasticité E augmente linéairement au cours des 18 premiers mois
(20 MPa à 110 MPa) puis la courbe s’infléchit indiquant un ralentissement de la prise. La
contrainte σmax présente une progression quasi-linéiare de sa valeur sur les 30 premiers mois
de prise. Elle passe de 0,40 à 0,75 MPa. Ces valeurs sont moins élevées que celles obtenues
- 110 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
pour du béton de chanvre à base de T70, malgré la forte concentration volumique en liant.
L’explication réside dans la composition du Tradichanvre. Ce liant contient 10 % de chaux
hydraulique au lieu de 35 % comme dans le T70. Les performances à court terme du
Tradichanvre sont donc moins bonnes.
0,80 130,0
0,70
110,0
0,60
90,0
0,50
70,0
σ (MPa)
E (MPa)
0,40
50,0
0,30
Contrainte maximale
Module d'Young 30,0
0,20
10,0
0,10
0,00 -10,0
0 5 10 15 20 25 30
MOIS
0,070 0,50
0,45
0,060
0,40
0,050
0,35
0,30
0,040
εσmax
0,25
0,030
0,20
0,15
0,020
Déformation au niveau du pic
Coefficientde Poisson 0,10
0,010
0,05
0,000 0,00
0 5 10 15 20 25 30
MOIS
- 111 -
Le coefficient de Poisson présente une évolution similaire. La valeur finale de ν se
situe autour de 0,35. La déformation au niveau du maximum de contrainte présente un
découpage temporel identique avec une décroissance linéaire sur les 18 premiers mois, puis
une inflexion. La valeur de εσmax au bout de 30 mois est de l’ordre de 0,15. L’enduit présente
donc une déformabilité importante, qui lui permet de s’adapter aux déformations du matériau
qu’il recouvre. Cette propriété est intéressante en terme de durabilité des ouvrages de
construction car l’enduit de surface à base de béton de chanvre ne fissurera a priori pas et
protégera le matériau support.
Le compactage est une sollicitation imposée à un matériau à l’état frais qui entraîne un
réarrangement de la structure interne de la phase solide (empilement granulaire) et de la phase
fluide (diminution de la quantité de bulles d’air microscopique et macroscopique). Cette
modification de microstructure a pour conséquence une diminution de la porosité du matériau.
Or, l’air joue un rôle fondamental du point de vue mécanique et ce, à trois niveaux :
- la prise
- le séchage
- les performances mécaniques finales
En ce qui concerne la prise du liant, la présence de l’air permet la réaction de
carbonatation entre le Ca(OH)2 et le CO2. Cette prise dite aérienne est donc favorisée lorsque
le matériau présente un réseau de pores nombreux et connectés (i.e. une forte porosité ouverte
entraînant une bonne perméabilité à l’air). De même, la présence d’un réseau poreux ouvert
favorise l’évacuation de l’eau vers le milieu extérieur par transferts en phases liquide et
gazeuse. Enfin, la porosité influe sur le niveau de performances mécaniques d’un matériau.
Les bulles d’air représentent les points faibles d’un matériau, car elles n’ont pas de rôle
mécanique. La résistance en compression et le module d’élasticité varient donc de manière
inverse à celle de la porosité.
On s’intéresse donc à l’évolution des propriétés de trois formulations de béton de
chanvre en fonction de la contrainte de compactage initialement appliquée. Cette contrainte de
compactage va modifier la microstructure du matériau et en particulier la porosité. Cependant,
la compressibilité de la particule pose certaines questions quant à la valeur maximale de
contrainte de compactage applicable sans déformer notablement les particules. L’étude se
décompose en deux phases. Dans un premier temps, la limite de compactage est déterminée
- 112 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
ainsi que les compositions volumiques des bétons de chanvre testés. Dans un second temps,
les résultats expérimentaux sont exposés et commentés.
350
3
ρ particule = 320 kg/m
300
ZONE OU
LA
250
ρ (kg/m3)
PARTICULE
EST
COMPACTAGE CHOISI NECESSAI-
200 σ =0,05 MPa REMENT
ECRASEE
100
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7
Contrainte de compactage (MPa)
- 113 -
Sachant qu’une particule de chanvre a une masse volumique propre de 320 kg/m3, on
en déduit qu’au-delà de 0,6 MPa la particule est forcément écrasée puisque la masse
volumique du chanvre en vrac devient supérieure à la masse volumique d’une particule seule.
En dessous de cette valeur de compactage, on peut simplement affirmer que de l’air est chassé
du matériau.
Les chemins de charge et de décharge lors d’un essai cyclique de compression sont
comparés (Fig.II. 24). Lorsque la sollicitation est faible (σc < 0,1 MPa), les deux chemins sont
quasiment confondus. Pour des contraintes supérieures, des boucles d’hystérésis apparaissent,
indiquant un changement dans la réponse du matériau. Ce dernier est lié à une modification de
l’empilement granulaire et à un écrasement des particules, qui rendent plus difficile le
déplacement de l’air dans les pores. La force de compactage a donc été limitée à 0,1 MPa
pour se situer avant ce changement.
Trois formulations (A4-1, Mur et A4-1,5) sont utilisées dans le cadre de cette étude.
Le choix s’est porté sur ces trois bétons car ils sont situés aux frontières avec le domaine des
faibles dosages d’une part (A4-1) et le domaine des forts dosages d’autre part (A4-1,5). Mur,
quant à lui, présente une composition intermédiaire entre ces deux extrêmes. Le tableau ci-
dessous indique la composition massique de ces formulations, ainsi que la valeur des rapports
Liant/Chanvre et Eau/Liant.
- 114 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
900
ρfrais (kg.m )
-3
800
700
A4-1,5
600 A4-1
Mur
500
0 0,02 0,04 0,06 0,08 0,1 0,12
σ de Compactage (MPa)
Fig.II. 25 : Masse volumique du béton de chanvre à l’état frais en fonction de la contrainte de compactage
- 115 -
A4-1 Mur A4-1,5
670 kg/m3 750 kg/m3 830 kg/m3 583 kg/m3 669 kg/m3 764 kg/m3 737 kg/m3 811 kg/m3 840 kg/m3
21 jours x x x x
3 mois x x x x x
6 mois x x x x x x x
9 mois x x
12 mois x x x
15 mois x x x x
18 mois x
24 mois x x
48 mois x
Les compositions volumiques du matériau frais et du matériau après prise dans des
conditions de conservation standard (T = 20°C et HR = 50 %), sont indiquées ci-après. Ces
compositions sont évaluées en faisant quatre hypothèses simplificatrices :
- le volume total du matériau avant et après prise reste le même
- le volume des particules reste constant, quelle que soit la contrainte de
compactage appliquée
- les particules sont initialement quasi-saturées en eau (Sr > 90 %)
- l’eau disparaît totalement des particules à l’état final
- 116 -
100% Air mésoscopique
Air intra-liant
90% Liant
Eau
80% Air intra-particule
Eau particules
Concentrations volumiques
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
670 kg/m3 750 kg/m3 830 kg/m3 593 kg/m3 669 kg/m3 764 kg/m3 737 kg/m3 811 kg/m3 840 kg/m3
A4-1 MUR A4-1,5
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
366 kg/m3 430 kg/m3 510 kg/m3 348 kg/m3 390 kg/m3 476 kg/m3 437 kg/m3 469 kg/m3 490 kg/m3
A4-1 MUR A4-1,5
- 117 -
100%
90% Eau
Liant en poudre
80% Particules végétales
70%
Compositions massiques
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
670 kg/m3 750 kg/m3 830 kg/m3 593 kg/m3 669 kg/m3 764 kg/m3 737 kg/m3 811 kg/m3 840 kg/m3
A4-1 MUR A4-1,5
100%
90%
80%
Eau
70%
Compositions massiques
Liant en poudre
Particules végétales
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
366 kg/m3 430 kg/m3 510 kg/m3 348 kg/m3 390 kg/m3 476 kg/m3 437 kg/m3 469 kg/m3 490 kg/m3
A4-1 MUR A4-1,5
- 118 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
Les compactages différents induisent des propriétés mécaniques finales variables. Des
différences sont également observables tout au long de la prise. L’évolution de la contrainte
maximale supportée σmax est présentée pour chacune des trois formulations en fonction du
temps et des niveaux de compactage. La légende indique la masse volumique du matériau
frais compacté et la contrainte de compactage appliquée.
1
0,9
0,8
0,7
σmax (MPa)
0,6
0,5 830 kg/m3 - 0,100 MPa
0,4 750 kg/m3 - 0,075 MPa
0,3 670 kg/m3 - 0,050 MPa
0,2
0,1
0
0 10 20 30 40
MOIS
Fig.II. 28 : Evolution de σmax en fonction du temps pour trois compactages de A4-1
0,9
0,8
764 kg/m3 - 0,100 MPa
0,7
669 kg/m3 - 0,050 MPa
σmax (MPa)
0,6
0,5 583 kg/m3 - 0,025 MPa
0,4
0,3
0,2
0,1
0
2 4 6 8 10 12
MOIS
Fig.II. 29 : Evolution de σmax en fonction du temps pour Mur
- 119 -
0,9
0,8
0,7
0,6
σmax (MPa)
0,5
0,4
840 kg/m3 - 0,050 MPa
0,3
811 kg/m3 - 0,040 MPa
0,2
737 kg/m3 - 0,025 MPa
0,1
0,0
0 5 10 15 20
MOIS
Fig.II. 30 : Evolution de σmax en fonction du temps pour trois compactages de A4-1,5
- 120 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
(Mur, A4-1 et A4-1,5) atteignent des résistances mécaniques de 0,82 MPa pour ρsec variant
entre 437 kg/m3 et 490 kg/m3 et des concentrations volumiques en liant comprises entre 16 et
19 %. On peut noter que ces échantillons possèdent des porosités mésoscopiques
comparables, de l’ordre de 38 % (Tab.II. 11). La porosité mésoscopique joue donc un rôle
prépondérant dans les performances mécaniques du béton de chanvre. De même, ces trois
formulations ont des résistances mécaniques autour de 0,5 MPa lorsque la porosité
mésoscopique est de l’ordre de 44 %. Ces quelques résultats montrent qu’il est possible de
compenser du point de vue mécanique un faible dosage en liant par un niveau de compactage
supérieur, afin d’atteindre des résistances équivalentes σmax. Cependant, ce compactage élevé
jouera sur les performances thermiques et acoustiques du matériau en augmentant la
conductivité thermique et en réduisant la perméabilité (cf. chapitres 3 et 4).
0,8
0,7
0,6
σmax (MPa)
φmeso = 44%
0,5
0,4
0,3
A4-1
Mur
0,2
A4-1,5
0,1
0
320 370 420 470 520
ρsec (kg/m3)
Fig.II. 31 : σmax des trois formulations de béton de chanvre après un an prise en fonction de sa masse
volumique finale ρsec et de la porosité mésoscopique φmeso
- 121 -
φmeso_finale
ρfrais (kg/m3) ρsec (kg/m3) A4-1 Mur A4-1,5
583 348 51,6%
670 366 43,8%
670 390 45,4%
737 437 40,8%
750 430 38,0%
764 476 37,6%
811 469 36,0%
830 510 30,4%
840 490 33,0%
Tab.II. 11 : Porosité mésoscopique finale des échantillons
Comme pour σmax, la valeur du module d’élasticité E augmente pour une formulation
donnée, lorsque le niveau de compactage augmente, puisqu’il fait diminuer la quantité d’air
mésoscopique présente dans le matériau. De plus, le module d’élasticité E augmente avec la
concentration volumique en liant, à masse volumique constante. Ce résultat est logique
compte tenu du fort contraste de propriétés existant entre les particules végétales et le liant.
Ce dernier possède un module de l’ordre de 500 MPa contre 1 MPa pour les particules. Le
liant commande donc la raideur globale du béton de chanvre. Plus sa concentration est élevée
et plus le module E est grand. On peut noter qu’un dosage en liant plus faible, peut être
compensé par un niveau de compactage plus élevé du matériau frais (Fig.II.31).
100
90
80 A4-1,5
70 Mur
E (MPa)
60 A4-1
50
40
30
20
10
0
330 380 430 480
ρ sec (kg/m3)
Fig.II. 32 : Module d’Young E du béton après la fin de la prise en fonction de sa masse volumique initiale
après compactage et de la formulation
Ainsi, A4-1,5 et Mur ont des modules équivalents pour un écart de masse volumique
sèche de l’ordre de 50 kg/m3. De même, Mur et A4-1 ont des modules d’élasticité équivalents
pour des écarts de masse volumique sèche allant de 20 à 40 kg/m3. En comparant les
- 122 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
1.7.6. Conclusions
- 123 -
poudre. L’eau était visiblement en quantité insuffisante. Dans un second temps, la quantité
d’eau dans le mélange a donc été augmentée pour que le ciment puisse être hydraté. Mais,
l’eau contenue dans les granulats ne s’évacuait plus puisque la pâte de ciment contenait
suffisamment d’eau. Les particules n’avaient plus de rôle de réservoir à jouer. Le séchage
s’est trouvé fortement ralenti. En conséquence, la prise du liant a été lente et l’intérieur des
éprouvettes de béton de chanvre est resté humide même après 1 an et demi de conservation en
atmosphère contrôlée avec une température de 20°C et une humidité relative de 50 %. Les
caractéristiques mécaniques du béton de chanvre après 18 mois de séchage correspondaient
aux caractéristiques du matériau avec un liant à base de chaux au bout de quelques semaines.
Le ciment s’avère peu compatible avec l’usage d’une grande quantité de particules
végétales. Une étude plus poussée aurait peut-être permis d’optimiser le dosage en eau par
rapport à la quantité des autres constituants. Il n’en reste pas moins que la cinétique de prise
du ciment semble très perturbée par la présence des granulats et leur rôle de réservoir d’eau.
1.9. Conclusions
- 124 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
- 125 -
comportement de chaque constituant. On détermine de manière exacte tous les coefficients de
la loi, ainsi qu’un domaine de validité pour la modélisation. Toutefois, cette démarche
nécessite des simulations numériques pour déterminer les paramètres macroscopiques.
L’homogénéisation autocohérente permet d’accéder directement à une estimation des
grandeurs mécaniques du matériau hétérogène. L'hypothèse fondamentale est de considérer
que le matériau au niveau macroscopique et les constituants suivent la même loi de
comportement. Les calculs quasi-analytiques conduisent à exprimer les grandeurs
macroscopiques comme une fonction explicite des caractéristiques de chaque constituant et de
leurs concentrations volumiques.
Deux éléments ont amené à choisir l’homogénéisation autocohérente (HAC) comme
technique de modélisation. En premier lieu, l’étude expérimentale a porté sur le module
d’élasticité du béton de chanvre. C’est donc la valeur de cette grandeur mécanique que nous
souhaitons déterminer au cours de l’étude théorique, ce que permet la HAC. En second lieu,
nous disposons d’un nombre réduit d’informations sur la microstructure, ce qui limite l'intérêt
d'une analyse précise par homogénéisation périodique. Cependant, nous avons pu constater la
variabilité du comportement en fonction de la concentration volumique en liant. La HAC
permet d’exprimer cette dépendance de manière directe.
Dans un premier temps, un rappel bibliographique expose les bases théoriques des
principaux résultats de la HAC en élasticité, ce qui constitue le cadre de notre étude. Dans un
second temps, deux modèles sont mis en œuvre et les résultats obtenus sont commentés.
La première étape de la modélisation porte sur le choix d’un VER. Compte tenu de la
nature du matériau, on parlera plutôt de motif générique qui représente le comportement du
VER. En effet, le concept de VER prend tout son sens dans le cadre d'une structure
périodique, ce qui n'est pas le cas de notre matériau.
En ce qui concerne la géométrie du motif élémentaire, des inclusions sphériques
simplifient la résolution du problème analytique en introduisant des symétries. Les travaux de
[HASHIN, 62] et [CHRISTENSEN & LO, 79] ont utilisé des motifs génériques de type
inclusions sphériques simples et bicomposite (Fig.II.33a et b). Cette géométrie, qui peut être
étendue à des inclusions tricomposite, ne semble pas trop éloignée des observations
expérimentales (particules de type ellipsoïdal).
- 126 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
2 3
2
1 1 1
K= E (II.3)
3 (1 − 2υ )
soit 3µ (II.4)
E=
µ
1+
3K
et
3K − 2 µ (II.5)
υ=
6 K + 2µ
- 127 -
On obtient une équation du second degré en µ :
(1-β)2µ2 – [(1-β)(θ1µ1+θ2µ2) + β(θ1µ2 + θ2µ1)]µ - βµ1µ2 = 0 (II.6)
La résolution de cette équation permet de déterminer le module de cisaillement µ du
milieu homogène équivalent en fonction des caractéristiques des constituants et des
concentrations volumiques de chacun.
On pose ∆1 = (1-β)2(θ1µ1+θ2µ2)2 + β2(θ1µ2 + θ2µ1)2 + 2β(1-β)(θ1µ1+θ2µ2)(θ1µ2 + θ2µ1)
+ 4β(1-β)2µ1µ2 > 0 (II.7)
On obtient alors le module de cisaillement :
µ = ((1-β)(θ1µ1+θ2µ2) + β(θ1µ2 + θ2µ1) + ∆11/2 ) / 2(1-β)2 (II.8)
Fig.II. 34: Limite de connexité des phases d’un milieu composé d’inclusions simples de deux types
- 128 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
R1 R2 R3
Dans le cadre de notre étude, un des trois constituants est de l’air pour lequel µair ≈ 0.
Si on pose que le constituant 3 est de l’air, l’équation précédente se ramène à un polynôme du
second degré :
(1-β)2µ3 - (1-β)[β(µ1 + µ2) - θ1µ1 - θ2µ2] µ2 - β[βµ1µ2 - (θ1 + θ2)µ1µ2] µ = 0 (II.11)
soit µ[(1-β)2µ2 - (1-β)(β(µ1 + µ2) - θ1µ1 - θ2µ2)µ - β(β – θ1 + θ2)µ1µ2] = 0 (II.12)
On pose ∆2 = (1-β)2[β(µ1+µ2) - θ1µ1 - θ2µ2]2 + 4β(1-β)2(β - θ1 + θ2)µ2µ1 > 0 (II.13)
On obtient alors le module de cisaillement :
µ = ((1-β)[β(µ1 + µ2) - θ1µ1 - θ2µ2] + ∆21/2 ) / 2(1-β)2 (II.14)
Dans le cas des modèles à inclusions simples, la connexité des phases dépend
uniquement des concentrations volumiques θi des constituants. Or, en utilisant des
hétérogénéités élémentaires de type bicomposite, la connexité de la phase 2, externe est
imposée quelles que soient les concentrations. Ce modèle a été développé par
[CHRISTENSEN & LO, 79] dans le cas d’inclusions sphériques et cylindriques puis repris
par [HERVE & ZAOUI, 90]. Chaque milieu i est caractérisé par un coefficient de Poisson νi
et un module de rigidité Ei. La résolution est exposée en Annexe 2. On obtient ainsi une
équation du second degré en (µ / µ2).
2
⎛ µ ⎞ ⎛ µ ⎞
A⎜⎜ ⎟⎟ + B⎜⎜ ⎟⎟ + D = 0 (II.15)
⎝ µ2 ⎠ ⎝ µ2 ⎠
avec A,B et D dépendant des caractéristiques des constituants et de la concentration
volumique du milieu 1. La résolution de cette équation du second degré permet d’exprimer µ
du milieu équivalent en fonction des paramètres des constituants.
- 129 -
Un raisonnement basé sur le même principe amène à la détermination du module de
compressibilité K :
(II.16)
θ1 (K1 - K 2)
K = K1 +
1 + (1 - θ1 ) K 2 - K1
4 µ1
K1 - 3
La démarche exposée dans le cas d'une inclusion bicomposite peut être étendue à n
constituants successifs [BOUTIN, 96]. [HASHIN & MONTEIRO, 02] a notamment utilisé
une inclusion sphérique tricomposite pour modéliser le comportement de l'interface entre un
granulat rigide et du ciment hydraté. Dans le cadre de cette étude, un motif élémentaire
constitué de trois phases est utilisé. La phase 1 correspond à l’air de paramètres (K1, µ1, R1).
La phase 2 contient les particules végétales de paramètres (K2, µ2, R2). La phase 3 est
constituée du liant de paramètres (K3, µ3, R3).
AIR (1)
PARTICULES (2)
LIANT (3)
La résolution analytique est faite d'une manière similaire à celle employée dans le
cadre d'inclusions bicomposite. On écrit la continuité des contraintes et des déformations aux
frontières entre les différents milieux et on obtient un système de 12 équations à 11
inconnues, qui n’a de solution que si le système est lié. On pose les conventions d’écriture
suivantes :
N i = 1 - 12 (II.17)
νi
2ν (II.18)
N i - 1 = 1 - 2i
νi
2 (1 + ν ) (II.19)
3N i - 1 = 1 - 2 i
νi
- 130 -
CHAPITRE 2 : Comportement mécanique du béton de chanvre
5 − 4ν (II.20)
3N i + 2 = 1 - 2 i
νi
7 − 4ν (II.21)
5N i + 2 = 1 - 2 i
νi
7 + 2ν (II.22)
8N i − 1 = 1 - 2 i
νi
λi = 2υi = - 1 (II.23)
µi 1 − 2υi N i
µi (II.24)
τ ij =
µj
λi = ( - 1)τ ij
(II.25)
Ni
µj
3
⎛ R1 ⎞ (II.26)
θ1 = ⎜ ⎟
⎝ R2 ⎠
3
⎛ R2 ⎞ (II.27)
θ 2 = ⎜⎜ ⎟⎟
⎝ R3 ⎠
µ (II.28)
x=
µ3
On écrit le système sous la forme d’une matrice carrée de taille 12 x 12, on obtient M
(Fig.II.37). Les lignes 1,2, 5, 6, 9, 10 de la matrice correspondent aux équations de continuité
de déplacements en r = R1, R2 et R3. Les autres équations correspondent à la continuité des
contraintes en r = R1, R2 et R3. La nullité du déterminant de M conduit à une équation du
second degré en x, dont la résolution permet de déduire le coefficient de cisaillement µ du
milieu équivalent. A partir de µ et de K, on déduit le module d'élasticité E du matériau
homogénéisé par (II.4).
Le coefficient de compressibilité K se détermine simplement car le bicomposite
constitué des milieux 1 et 2 peut être remplacé par un milieu dont la compressibilité K12 est
celle du bicomposite 12 homogénéisé, sans modifier le champ de contrainte élastique dans le
matériau 3. Ce milieu de compressibilité K12 peut ensuite être homogénéisé avec le milieu 3
par un procédé itératif :
- 131 -
(II.29)
θ 1 (K 1 − K 2 )
K 12 = K 2 +
(1 − θ 1) (K 1 − K 2)
1+
4
K2− µ
3 2
(II.30)
θ 2 (K 12 − K 3)
K = K3+
(1 −θ 2) (K 12 − K 3)
1+
4
K3− µ
3 3
- 132 -
1 -3N1+3 -1 3(N2-1)θ12 -3/θ15 -(3N2+2)/θ13 0 0 0 0 0 0 A1 = 0
1 -5N1-2 -1 (5N2+2)θ12 2/θ15 -2/θ13 0 0 0 0 0 0 A2 0
2τ12 3τ12(N1-1) -2 -3(N2-1)θ12 24/θ15 (18N2+2)/θ13 0 0 0 0 0 0 B1 0
τ12 -τ12(8N1-1) -1 (8N2-1)θ12 -8/θ15 -(3N2-1)/θ13 0 0 0 0 0 0 B2 0
0 0 1 -5N2-2 -2 2 -1 (5N3+2)θ22 2/θ25 -2/θ25 0 0 B3 0
0 0 1 -3N2+3 3 3N2+2 -1 3(N3-1)θ22 -3/θ25 -(3N3+2)/θ23 0 0 B4 0
0 0 2τ23 3(N2-1)τ23 -24τ23 -2(9N2+1)τ23 -2 3N3θ22 24θ25 (18N3+2)/θ23 0 0 C1 0
0 0 τ23 -(8N2-1)τ23 8τ23 (3N2-1)τ23 -1 (8N3-1)θ22 -8θ25 -(3N3-1)/θ23 0 0 C2 0
0 0 0 0 0 0 1 -3N3+3 3 3N3+2 -1 -3 C3 0
0 0 0 0 0 0 1 -5N3-2 -2 2 -1 2 C4 0
0 0 0 0 0 0 2 3N3-3 -24 -18N3-2 -2x 24x D1 0
0 0 0 0 0 0 1 -8N3-1 8 3N3-1 -x -8x D3 0
Fig.II. 37 : Matrice de résolution du problème pour une inclusion tricomposite
2.3. Application des modèles autocohérents
Air
Particule
Les résultats numériques obtenus pour la particule sont comparés aux valeurs
mesurées pour le chanvre en vrac.
Chanvre Vrac Particule Air
3
ρ (kg/m ) 130 320 0
E (MPa) 0,25 0,93 -
ν 0,1 0,1 0,5
K (MPa) 0,10 0,39 0,14
µ (MPa) 0,11 0,42 0
Tab.II. 12 : Caractéristiques mécaniques du chanvre en vrac, de la particule et de l’air
- 134 -
2.3.2. Béton de chanvre
Les résultats numériques obtenus avec ce modèle à inclusion tricomposite sont fournis
dans le tableau suivant. Ils donnent un ordre de grandeur correct pour les formulations de
concentration volumique en liant supérieure à 19 %. En revanche, les faibles dosages en liant
ne peuvent pas être modélisés avec ce type de motif générique car il impose la continuité de la
matrice de liant, ce qui n’est pas vérifié pour la formulation Toit.
2.3.3. Conclusions
- 135 -
3. CONCLUSION
- 136 -
CHAPITRE 3
COMPORTEMENT THERMIQUE
ET HYDRIQUE
- 138 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
1. LE TRANSFERT DE CHALEUR
1.1. Généralités
( ∂t
λ ∆T + grad T ⋅ grad λ + m = ρ C ∂T + U ⋅ grad T ) (III.1)
- 139 -
avec λ: conductivité thermique du matériau (W/(m.K))
C : chaleur massique
m : terme source
T : champ de température dans le matériau (° K)
U : champ des vitesses du solide
Elle est obtenue en écrivant la conservation de l’énergie dans le milieu.
- 140 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
1.2.1.1 Notations
Soit un matériau poreux composé d’une phase solide et d’une phase fluide. La phase
solide de conductivité λs et de taux volumique θs correspond à la matrice solide sans air
(particules, liant). La phase fluide contient la totalité de l’air du matériau. Elle a une
conductivité λf et un taux volumique θf. On a par définition θf = 1 - θs.
- 141 -
1.2.1.2 Modèle en série
Le modèle série correspond au cas de figure où le flux de chaleur traverse les deux
phases de manière parallèle à la normale n à leur surface de contact.
FLUIDE 1- θs
FLUX
SOLIDE θs
λsérie = 1 (III.4)
θs + 1 - θs
λs λf
Dans le cas où la conductivité du fluide λf tend vers 0, la conductivité totale λ tend aussi vers
0. La couche de fluide isole le matériau global et crée une rupture dans le chemin de
propagation de la chaleur. Ce schéma fait jouer un rôle prépondérant à l’air qui va imposer la
conductivité globale du matériau.
Le modèle parallèle correspond au cas de figure où le flux de chaleur traverse les deux
faces de manière perpendiculaire à la normale n à leur surface de contact.
FLUIDE 1- θs
FLUX
SOLIDE θs
Lorsque la conductivité du fluide devient négligeable devant celle du solide (λf << λs), la
phase solide impose la conductivité totale et λ tend vers θsλs. Il en est de même lorsque la
phase fluide a une conductivité très faible comme c’est le cas pour l’air. Dans ce type de
configuration, on néglige le rôle de l’air sur la conductivité.
- 142 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
La conductivité thermique λ réelle du milieu est bornée par ces deux modèles. Ceux-ci
permettent donc de déterminer une zone dans laquelle la conductivité se situe obligatoirement
quel que soit le matériau considéré :
0,250
Modèle série
Modèle parallèle
0,200
BETON DE CHANVRE
0,150
λ (W/(m.K))
0,100
0,050
0,000
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1
θsolide
Une autre technique basée sur de la HAC a donc été employée. Le principe est
d’assimiler un matériau hétérogène à un matériau homogène équivalent dont on doit
déterminer les caractéristiques. On réalise ainsi un passage de l’échelle microscopique (les
- 143 -
constituants) à l’échelle macroscopique (le matériau), en exprimant la conductivité thermique
globale du matériau comme une fonction des caractéristiques de chaque constituant
(conductivité, concentration volumique).
Dans le cas d’un milieu constitué d’inclusions simples, le problème se traite en deux
étapes. Tout d’abord, le champ des températures dans le milieu constitué d’une inclusion
sphérique de rayon R1 et du milieu homogène soumis à un gradient G unitaire à l’infini est
déterminé. Le champ de températures solution de l’équation (III.2) est de la forme :
(i = 1, eq) (III.7)
Ti = ⎛⎜ Ai r + B2i ⎞⎟ cosθ
⎝ r ⎠
Les conditions aux limites imposent que:
En r = 0 T1 est finie donc B1 = 0
En r = ∞ (grad T)eq tend vers G donc Aeq = 1
Beq + R1 = A1 R1
En r = R1 T est continue donc R12
⎛ ⎞
En r = R1 le flux Φi est continu donc λeq ⎜1 - 2 B3eq ⎟ = λ1 A1
⎝ R1 ⎠
- 144 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
λ1 R1
λeq
A1 = 3 λeq (III.8)
λ1 + 2 λeq
B1 = λeq - λ1 (III.9)
R1 λ1 + 2 λeq
3
Supposons ensuite que le milieu est constitué de deux types d’inclusions simples 1 et 2
de concentrations volumiques θ1 et θ2 telles que θ1 + θ2 = 1.
La conservation du flux dans l’ensemble du matériau s’écrit :
La dernière équation est obtenue en considérant que les deux inclusions sont soumises au
même gradient de température à l’infini :
On en déduit finalement:
soit λ eq (θ 1 A 1 + θ 2 A 2 ) = λ 1 θ 1 A 1 + λ 2 θ 2 A 2 (III.13)
λ1 - λ eq λ 2 - λ eq
d’où θ1 + (1 - θ 1 ) =0 (III.14)
λ1 + 2λ eq λ 2 + 2λ eq
2 X 2 + X [3 θ1 - 2 ] = 0 (III.17)
3
soit λ eq = (1 - θ1 ) λ 2 (III.18)
2
Dans ce cas, la connexité de la phase externe est imposée (milieu 2 dans Fig.III.5). On
considère donc un constituant 1 modélisé par une sphère de rayon R1, de conductivité λ1 et de
masse volumique ρ1, entouré d’un constituant 2 de caractéristiques R2, λ2 et ρ2. Cette
inclusion bicomposite est entourée d’une matrice de matériau homogène équivalent de
- 146 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
λ2 R2
G λ1 R1 G
Dans la méthode autocohérente, la conductivité λeq doit être telle que sous le même
gradient de température à l’infini G, il y ait identité entre les énergies thermiques contenues
dans le milieu homogène équivalent sans inclusion et dans le milieu avec l’inclusion
composite. Ceci équivaut à dire que la moyenne du gradient de température dans la sphère
composite est égale au gradient G d’où Beq = 0. On obtient ainsi un système de 4 équations à 3
inconnues. Ce dernier n’aura une solution que si le système est lié donc son déterminant est
nul. On obtient ainsi la conductivité λeq du milieu homogénéisé bicomposite [HASHIN, 68]:
⎡ ⎤
λeq = λ 2 ⎢1 + θ ⎥ (III.20)
⎢ 1-θ + 1 ⎥
⎢⎣ 3 λ 1/ λ 2 - 1 ⎦⎥
La même méthode peut être appliquée au cas d’une inclusion sphérique tricomposite
avec les milieux 1, 2, 3.
- 147 -
λ2 R2
λ1 R1
G
λ3 R3
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
λ eq = λ 3 ⎢1 + θ ⎥ (III.23)
⎢ (λ 1/λ 2 - 1) δ ⎥
⎢ 1+ ⎥
⎢ 1 - θ + 3 ⎥
⎢ 3
λ1 - 1- δ (λ 1 / λ 2 - 1) (2λ 2 / λ 3 + 1) ⎥
⎢⎣ λ3 3 ⎥⎦
Quelques remarques peuvent être faites quant aux comportements limites induits par
ces deux formules. Concernant les inclusions bicomposite, quand θ tend 0, λéq tend vers λ2.
En revanche, pour θ tendant vers ∞, on retrouve λéq ≈ λ1. De plus, un fort contraste entre les
deux milieux simplifie (III.20) en :
- 148 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ θ ⎥
λ = λ ⎢1 + ⎥ (III.26)
c pc 1−θ 1
⎢ + ⎥
⎢ 3 λ / λ −1 ⎥
⎣ a pc ⎦
⎛ ⎞
3 ρc ≈
θ = ⎜⎜ Ra ⎟⎟ =1 - 1
avec ⎝ R pc ⎠ ρ pc 2 (III.27)
- 149 -
La masse volumique moyenne de la particule est ρpc ≈ 320 kg/m3. De plus, pour
ρc = 155 kg.m-3, on a mesuré λc = 0,058 W/(m.K). En intégrant ces valeurs dans (III.26), on
déduit la conductivité de la particule seule λpc = 0,102 W.(m.K). Finalement, on peut
exprimer la conductivité du chanvre en vrac en fonction de sa masse volumique en remplaçant
les valeurs numériques dans (III.26):
1 − ρ c / 320
λc = 0,102 + 0,102 (III.28)
− 1,342 + ρ c / 960
Les résultats fournis par ce modèle théorique sont cohérents avec les mesures
expérimentales (Tab.I.11) fournies par le C.S.T.B. et l'E.N.T.P.E. .
λ c Rc
λ a Ra
G
λ l Rl
- 150 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
λ = λ l ⎢ 1+ θ ⎥ (III.29)
⎢ ⎥
⎢ δ ⎛ λa ⎞ ⎥
1+ ⎜ − 1⎟
⎢ 1-θ + 3 ⎝ pc ⎠
λ ⎥
⎢ 3 ⎥
⎢ λ ⎛ λ ⎞ ⎛ 2 λ ⎞
+ 1⎟ ⎥
a −1− δ a − 1 pc
⎜ ⎟ ⎜
⎢⎣ λl 3 ⎝ λ pc ⎠ ⎝ λl ⎠ ⎥⎦
3 3
⎛ R pc ⎞ ⎛ Ra ⎞
avec θ =⎜ ⎟ δ =1-⎜ ⎟ (III.30)
⎝ R l ⎠ ⎜ ⎟
⎝ R pc ⎠
On pose mpc = k.ml (III.31)
avec mpc : masse particules
ml :masse de liant en poudre dans la formulation de béton
On en déduit :
ρ
θ =1- 1 (III.32)
k + 1 ρl
et ρ k 1 (III.33)
δ=
ρ pc (k + 1)
1-
ρ 1
ρl k + 1
Cette définition de k est basée sur l’hypothèse que les variations de propriétés entre le
liant en poudre et le liant hydraté sec n’entraînent pas de variation notable de la conductivité
thermique du béton de chanvre. Ceci a été vérifié par [CORDIER, 99] sur 6 formulations
différentes (utilisant deux liants distincts) pour lesquelles la variation de λ n’excédait pas 2%
entre les deux approches.
Les campagnes de mesures expérimentales sont menées à l’aide d’un dispositif appelé
boîtes thermiques [MENGUY & LAURENT, 86]. Elles permettent de déduire la conductivité
thermique des matériaux en régime permanent en réalisant un bilan énergétique du système.
- 151 -
1.2.3.1 Description du dispositif expérimental
- 152 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
- 153 -
1.2.3.2 Résolution de l’équation de la chaleur dans le cas d’une plaque
Tsup
Tinf
x
FLUX
dΦ = - λ
dT S (III.35)
dx
En considérant qu’il n’y pas de fuites par les parois latérales de l'échantillon, le flux de
chaleur émis par la face supérieure se retrouve intégralement sur la face inférieure. Par
intégration en tenant compte des conditions aux limites, on obtient :
- 154 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
Les échantillons étant très poreux, des échanges convectifs peuvent se produire et
perturber les mesures. Des mesures ont été réalisées sur des échantillons enfermés entre deux
plaques de cuivre et sur des échantillons sans plaque. On observe que pour des valeurs de
masses volumiques inférieures à 400 kg/m3, il existe un écart entre les mesures réalisées sur
ces deux configurations (Fig.III. 11). De plus, l’écart entre les mesures avec et sans plaques
diminue lorsque la masse volumique des échantillons augmente. Cette différence de
comportement des échantillons peut s’interpréter par un rôle non négligeable de la convection
lorsque la masse volumique du béton de chanvre est inférieure à 400 kg/m3. Lorsque
l’échantillon est testé sans plaque et que la perméabilité du matériau est suffisamment
importante, des transferts thermiques par déplacement d’air au travers du béton de chanvre
deviennent possibles. Ces échanges convectifs s’additionnent aux transferts thermiques par
conduction. Lorsque l’échantillon est placé entre deux plaques, les échanges convectifs sont
limités car on réduit la surface de contact entre l’air extérieur et la phase solide. L’écart de
mesures entre les deux configurations d’essais correspond donc aux échanges convectifs dans
le matériau.
Comme l’étude porte sur la conductivité thermique du béton de chanvre, les
échantillons sont placés entre deux plaques de cuivre de conductivité très élevée par rapport à
- 155 -
celle des échantillons λ ≈ 400 W/(m.K), pour ne mesurer que les échanges conductifs et
éliminer les échanges convectifs (Fig.III. 12).
0,12
0,11
CONVECTION + CONDUCTION
0,10
λ (W/(m.K))
0,09 CONVECTION
PREPONDERANTE
0,08
0,07 CONDUCTION
Sans les plaques thermiques PREPONDERANTE
Avec plaques thermiques
0,06 Conductivité théorique
0,05
200 250 300 350 400 450
ρ (kg/m3)
Fig.III. 12 : Échantillon de béton de chanvre préparé pour les mesures à la boîte thermique
- 156 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
les caractéristiques sont connues. On obtient alors par ces deux approches, les valeurs
numériques suivantes :
Boîte 1 Boîte 2
Approche théorique 0,160 0,150
Approche expérimentale 0,179 0,160
Tab.III. 1 : Coefficients de déperdition thermique D des boîtes
Les plaques de béton de chanvre sont séchées dans un four à T = 60°C pendant une
semaine, de façon à stabiliser leur masse en éliminant l’eau libre présente dans le matériau. Le
tableau suivant indique le nombre de plaques testées pour chaque formulation, ainsi que les
masses volumiques maximale et minimale des échantillons secs. L’écart entre ces deux
extrêmes varie entre 41 et 210 kg/m3. Le but est d’étudier la conductivité thermique à la fois
en fonction de la formulation et de la masse volumique du matériau.
La quasi-totalité des échantillons a été testée successivement dans les deux boîtes, qui
ont des coefficients de déperdition différents, afin de vérifier l’indépendance des résultats vis
à vis du dispositif de mesures et la cohérence des résultats entre eux.
3
Nombre ρf inal (kg/m )
d'échantillons ρmin (kg/m ) ρmax (kg/m3)
3
- 157 -
1.2.4. Analyse des résultats
Les résultats des essais effectués sur du béton préalablement séché sont fournis sur la
figure III.13. Chaque symbole correspond à une formulation définie dans le chapitre 1. Pour
chaque formulation, différentes masses volumiques sont testées.
La conductivité thermique augmente lorsque la concentration volumique en liant
augmente. On remplace de l’air, excellent isolant naturel, par du liant, bon conducteur
thermique.
On note également que dans la gamme considérée, la conductivité thermique varie de
manière quasi-linéaire avec la masse volumique (Fig.III.14). La densité suffit donc à
caractériser le comportement thermique. Ce résultat n’est vérifié que pour des masses
volumiques comprises entre 200 et 800 kg/m3, car les formulations dans cette zone sont
voisines. Lorsque la masse volumique devient trop faible, les échanges thermiques par
conduction deviennent petits devant les échanges thermiques par convection et le coefficient
λ mesuré ne correspond plus à de la conduction pure mais à l'association
conduction/convection. La valeur de λ pour ρ = 0 dans la loi empirique λ = 0,0002ρ + 0,0194
devrait correspondre à la conductivité de l’air seul (λ = 0,026 W/(m.K)), ce qui n’est pas tout
à fait vérifié. Pour retrouver cette valeur, il serait nécessaire de faire un modèle plus élaboré.
0,19
A3-2
A3-1,5
0,17 A4-1,5
A3-1
DALLE
0,15
MUR
Conductivité (W/(m.K))
A3-0,75/A4-1
0,13 TOIT
0,11
0,09
0,07
0,05
200 300 400 500 600 700 800
ρ (kg/m3)
- 158 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
0,2
0,18
0,12
λ (W/(m.K))
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
200 300 400 500 600 700 800
ρ (kg/m3)
Pour chaque formulation, diverses masses volumiques ont été testées en faisant varier
le niveau de compactage des échantillons. La conductivité thermique augmente lorsque la
masse volumique augmente, car on diminue la proportion de vides dans le matériau.
- 159 -
la détermination de la conductivité thermique expérimentale dépend de l’épaisseur réelle de
l’échantillon. Or, la présence des particules rend difficile le surfaçage des échantillons et
génère des différences locales d’épaisseur. On utilise une valeur moyenne de l’épaisseur en
réalisant deux mesures sur chaque face latérale de la plaque. En second lieu, la conductivité
thermique est calculée à partir du coefficient de déperdition thermique D de la boîte. Or,
celui-ci est obtenu par calage expérimental et en considérant qu’il est indépendant de la
température d’essais, ce qui n’est pas tout à fait exact.
0,19
A3-2 (k = 0,207)
A3-1,5 (k = 0,276)
0,17
A4-1,5 (k = 0,386)
A3-1 (k = 0,415)
DALLE (k = 0,409)
0,15 MUR (k = 0,489)
A3-0,75/A4-1 (k = 0,553)
TOIT (k = 1,019)
λ (W/(m.K))
0,13
0,11
0,09
0,07
0,05
200 300 400 500 600 700 800
ρ (kg/m3)
1.2.5. Conclusion
Cette première partie du chapitre fait le bilan des recherches menées à l’E.N.T.P.E. sur
la conductivité thermique du béton de chanvre sec. Les essais complémentaires réalisés au
cours de cette thèse ont confirmé les premiers résultats obtenus par [CORDIER, 99] sur deux
points principaux. Le premier point concerne les excellentes performances du béton de
chanvre en tant qu’isolant thermique avec des conductivités variant entre 0,06 et 0,19
W/(m.K) pour des masses volumiques allant de 200 à 840 kg/m3.
Le deuxième point concerne la bonne représentativité du modèle théorique basé sur la
HAC. Le motif générique est constitué d’une inclusion sphérique tricomposite, qui impose la
- 160 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
continuité du liant. Ce dernier permet de tenir compte du dosage des matériaux dans le béton
de chanvre (concentrations volumiques variables des constituants selon la formulation). Les
écarts entre la conductivité théorique et les résultats expérimentaux sont inférieurs à 10 %. On
peut donc considérer que ce modèle HAC possède un caractère prédictif de la conductivité du
béton de chanvre sec satisfaisant.
La suite de ce travail va maintenant aborder l’influence de l’eau sur la conductivité
thermique et le choix d’un motif générique qui donne des résultats théoriques cohérents avec
les valeurs expérimentales.
2. SENSIBILITE A L’HUMIDITE DU
MATERIAU
Le béton de chanvre possède une sensibilité à l’eau qui a des conséquences quant à
son comportement thermique. En effet, sous des variations de conditions hydriques
ambiantes, le béton de chanvre absorbe de la vapeur, qui se condense sous forme d’eau
liquide. Ceci se traduit par un gain de masse dans le matériau. Or, l’eau liquide présente une
conductivité thermique trente fois supérieure à celle de l’air sec. Sa présence va donc modifier
la conductivité thermique globale du matériau.
Cette deuxième partie du chapitre vise deux objectifs majeurs. Le premier objectif est
de définir les principales notions liées à la présence d'eau dans les matériaux. Cette partie
introduit le phénomène de condensation capillaire, qui explique les transferts de masse
observables dans les matériaux poreux lorsque la température T reste constante et que
l'hygrométrie ambiante HR fluctue. Le deuxième objectif est de quantifier ces transferts
hydriques dans le béton de chanvre. Pour ce faire, des courbes de sorption/désorption sont
déterminées pour chaque constituant et pour cinq formulations de béton de chanvre. Ces
courbes expriment la teneur en eau du matériau sous diverses hygrométries extérieures. Elles
sont indispensables à la suite de l'étude car elles permettent de connaître la quantité d'eau
liquide reprise par le béton de chanvre par rapport à son état de référence (i.e. sec) en vue de
modéliser l'impact de l'eau sur la conductivité thermique.
L’eau est présente dans un matériau sous trois états. Chacun de ces états correspond à
un mode de liaison de l’eau. Ainsi, on rencontre :
- L’eau liée (hydratation)
- 161 -
- L’eau attachée par des liaisons mécaniques (forces de capillarités)
- L’eau libre dans le matériau
Notre étude ne tient compte que de l’eau libre et de l’eau attachée par la pression dans les
capillaires. Selon la quantité d’eau présente dans le matériau, on distingue trois répartitions
des phases liquide et gazeuse (Fig.III. 16).
Fig.III. 16 : Répartition des phases liquide et gazeuse dans un milieu poreux saturé (a),dans le cas d’une
fixation funiculaire (b) et dans le cas d’une fixation pendulaire (c) [GARNIER, 00]
Dans le cas d’un milieu saturé ou quasi-saturé, la phase liquide occupe la quasi totalité
du réseau poreux. Les quelques bulles d’air persistantes sont collées le long des parois de la
phase solide. La phase liquide est connexe, contrairement à la phase gazeuse. Dans le cas où
la phase liquide et la phase gazeuse seraient présentes toutes les deux d’une manière non
négligeable, on parle de fixation funiculaire. Ceci signifie que des anneaux de liquide
entourent les grains. Les deux phases (liquide et gazeuse) sont connexes. Dans le cas où la
phase gazeuse occuperait un espace très nettement supérieur à la phase liquide, on parle de
fixation pendulaire. La phase liquide sert de contact entre les grains et de nombreux
ménisques sont observables. On considère que la phase gazeuse est non connexe.
- 162 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
un changement de phase s’opère et de l’eau se condense le long des parois formant des
ménisques [RESTAGNO, 00]. Le rayon limite en-dessous duquel l’eau se condense dans les
capillaires se calcule à partir de la loi de Kelvin :
2σ cos α
- lv m
RTr ρ
Pv w
= (III.39)
Pvs e
avec σlv : tension de surface liquide/vapeur de l’eau ( = 0,075 kg.s-2)
αm : angle de mouillage (< π/2)
R : constante des gaz parfaits ( = 8,314 J.mol-1.K-1)
ρw : masse volumique de l’eau liquide
r : rayon du capillaire
On obtient donc la relation suivante :
2σ cos α m
r =- lv (III.40)
H R RT ρw
HR (%)
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
10
1
Rayon du pore (µm)
0,1
0,01
angle 0°
0,001
angle 45°
angle 60°
angle 75°
angle 89°
0,0001
Fig.III. 17 : Rayon du capillaire en dessous duquel se produit la condensation capillaire pour T = 20°C
- 163 -
HR = 50 %, la condensation capillaire apparaît pour des rayons inférieurs à 0,1 µm. La
question est maintenant de connaître la répartition de ces micropores entre les particules et le
liant, pour savoir lequel de ces constituants est le plus sensible au phénomène de
condensation. Notre démarche a alors été de déterminer les courbes de sorption/désorption de
chaque constituant, de les comparer et d’en déduire quelques informations sur la répartition
de la taille des pores dans chaque constituant.
Les plaques de béton de chanvre sont placées dans une enceinte climatique maintenue
à température constante T = 20°C. L’hygrométrie HR dans l’enceinte est contrôlée. Cinq
ambiances sont successivement imposées : HR = 25 %, 40 %, 50 %, 75 % et 95 %. Dans un
premier temps, les échantillons sont séchés dans un four durant une semaine à T = 60°C, afin
d’éliminer l’eau libre présente dans le matériau. On considère que l’échantillon est sec
lorsque trois pesées journalières consécutives donnent des masses équivalentes (variation de
masse inférieure à 1 %). On introduit alors les échantillons dans l’enceinte. Des pesées
journalières permettent de suivre la variation de masse de l’échantillon, donc la quantité d’eau
adsorbée par le matériau sec sous HR fixée. Lorsque les masses des échantillons sont
stabilisées, l’hygrométrie est modifiée pour atteindre le palier suivant. On définit ainsi les
courbes de sorption. Une fois HR = 95 % atteinte, on effectue le chemin inverse pour revenir à
HR = 0 %. On obtient alors la courbe de désorption.
2.3.2.1 La chènevotte
Des essais ont été menés par [GARNIER, 00] sur des particules de chènevotte seules.
Les courbes de sorption- désorption montrent une teneur en eau massique ω de l’ordre de 0,35
sous HR = 95 %.
2.3.2.2 Le liant
Le liant T70 présente un fort caractère hydrophile avec des teneurs en eau massiques
allant de 0 en ambiance sèche jusqu’à 0,55 en ambiance quasi-saturée (HR = 95 %). Selon la
valeur de HR, le phénomène de sorption devient prépondérant dans le liant ou dans les
- 164 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
0,60
0,50
0,30
0,20
0,10
0,00
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
HR (%)
Fig.III. 18 : Courbes de sorption et désorption du liant T70 pur et des particules végétales
On peut donc déduire quelques informations quant à la taille des pores des
constituants et leur répartition. Tout d’abord, il semble que les particules possèdent plus de
capillaires de taille inférieure à 0,1 µm que le liant, puisque la quantité d’eau qui y apparaît
est supérieure sous HR = 50 %. Ensuite, la condensation capillaire est beaucoup plus forte
dans le liant que dans les particules lorsque HR = 95 %. Ceci signifie donc que la quantité de
pores de diamètre compris entre 0,1 µm et 10 µm est plus important dans le liant que dans les
particules. Ces résultats sont cohérents avec les tailles caractéristiques de pores définies au
chapitre 1. En effet, les particules ont des pores compris entre 10 et 40 µm de diamètre tandis
que ceux du liant sont compris entre quelques centièmes de microns et quelques millimètres.
- 165 -
masse importante se produit dans les 24 heures suivant le changement d’hygrométrie (environ
40% du gain massique total), puis le phénomène ralentit jusqu’à atteindre l’équilibre.
500
50% 95%
480
75% 75%
460
50%
440
420
Masse (g)
400
380
360
340
320
300
0 50 100 150 200 250 300
JOURS
Fig.III. 19 : Reprise en eau du béton de chanvre (formulation Mur) en enceinte climatique à T = 20°C
0,45
0,40
0,35 Mur
Dalle
0,30 Toit
A3-2
A3-1,5
(kg/kg)
0,25
0,20
ω
0,15
0,10
0,05
0,00
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%
HR (%)
Les teneurs en eau mesurées au cours de cette expérience sont relativement élevées.
Elles mettent en lumière le fait que la présence d’eau dans le matériau poreux est loin d’être
- 166 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
- 167 -
Après quelques rappels bibliographiques, différents modèles permettant d’exprimer la
conductivité thermique en fonction de la quantité d’eau présente dans le béton de chanvre
sont exposés. Ensuite, ces modèles sont validés par des campagnes de mesures
expérimentales.
3.1. Rappels
- 168 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
Dans un deuxième temps, [BOUTIN, 96] réalise une homogénéisation en deux étapes. Tout
d’abord, il crée un milieu homogène constitué du matériau solide et de l’eau, dont l’échelle
caractéristique est intermédiaire entre « micro » et « macro ». Puis, il homogénéise ce milieu
fictif avec l’air pour parvenir au matériau global, c’est-à-dire le béton cellulaire humide. Dans
cette configuration, on considère que les pores de petite taille du matériau solide sont saturés,
ce qui est proche de la réalité. Les résultats numériques permettent de valider cette
configuration comme étant la plus représentative du matériau humide.
En conclusion, il est important de retenir que l’homogénéisation permet d’exprimer la
conductivité thermique globale d’un matériau hétérogène pour toutes les teneurs en eau en
fonction des caractéristiques de chaque constituant et de leurs concentrations volumiques sans
réaliser de calages expérimentaux. Cependant, il faut vérifier la séparation d’échelle et choisir
un motif générique basé sur l’observation du matériau et des phénomènes physiques dont il
est le siège.
Le protocole d’essais est identique à celui des mis en place pour les bétons secs. Les
tests sont réalisés sur les mêmes prismes en conditions sèches, puis humides. Chaque
échantillon est humidifié en étant placé dans une enceinte climatique dont la température est
fixée à T = 20°C et l’hygrométrie HR successivement à 50 et 75 %. Les échantillons sont
conservés dans l’enceinte jusqu’à stabilisation de leur masse. Ils sont ensuite isolés de
l’extérieur par deux plaques en cuivre et introduits dans la boîte thermique pendant 24 heures
afin d’établir un régime permanent d’écoulement. Après la mesure, les échantillons sont
repesés afin de vérifier que la quantité d’eau dans le matériau n’a pas évolué de manière
sensible (variation de masse < 0,1 %).
- 169 -
Nombre d'échantillons
Nom
HR = 50% HR = 75%
Toit 3 5
Mur 6 -
Dalle 16 3
A4-1,5 2 -
A3-1 2 -
A3-1,5 2 3
A3-2 2 -
3.2.3. Résultats
0,20
0,18
0,16
0,14
λ (W/(m.K))
0,12
0,06
200 300 400 500 600 700 800
ρsec (kg/m3)
On note que pour les faibles masses volumiques la conductivité augmente de 40 % par
rapport à la conductivité sèche en passant de 0,60 à 0,85 W/(m.K) entre HR = 0 % et
HR = 50 %. La conductivité thermique dépasse même les 0,100 W/(m.K) pour HR = 75 %.
Pour les masses volumiques intermédiaires (ρ autour de 450 kg/m3), la conductivité
thermique augmente de 10% entre HR = 0 % et HR = 50 % passant de 0,10 à 0,11 W/(m.K).
- 170 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
Elle atteint 0,13 W/(m.K) pour HR = 75%. Enfin, pour des masses volumiques fortes (ρ autour
de 700 kg/m3), la conductivité augmente de 15 % environ entre HR = 0 % et HR = 50 %.
Ces mesures expérimentales montrent que l’impact de l’humidité relative ambiante est
non négligeable puisque la conductivité sèche du matériau augmente de 0,2 W/(m.K) en
moyenne entre HR = 0 % et HR = 75 %. Un écart équivalent existe également entre HR = 50 %
et HR = 75 %.
Dans l’étude par HAC, nous avons pris en compte plusieurs configurations de motif
générique dans lesquels la position de l’eau varie. Ces motifs génériques conduisent à
différents modèles d’intégration de l’eau et traduisent donc des interactions différentes entre
l’eau et les constituants du béton de chanvre. Deux approches sont utilisées.
La première approche fait appel à un motif générique de type inclusion sphérique
constituée de quatre phases, dans lequel l’eau joue un rôle équivalent à celui des trois autres
constituants. La deuxième approche est basée sur une double homogénéisation. L’eau et la
phase solide (liant ou particule) sont homogénéisés lors d’une première étape de calcul. Puis,
ce constituant « humide » est lui-même inclus dans un autre modèle de façon à être vu comme
une phase homogène par les constituants restants.
Les modélisations théoriques par chacune des deux approches et les implications
structurelles qu’elles ont, sont abordées dans les paragraphes suivants. Une confrontation
avec les mesures expérimentales sera par la suite réalisée afin de valider l’un ou l’autre des
points de vue.
La résolution de l’équation (III.2) dans le cas d’un milieu à quatre phases est identique
à celle d’un milieu tricomposite. On considère une cellule élémentaire constituée de quatre
inclusions sphériques successives (Fig.III.22). On précisera par la suite l’ordre des phases
dans cette cellule générique. Les conditions aux limites (continuité aux interfaces) et la
conservation de l’énergie ramènent le problème à la résolution d’un système de 8 équations à
- 171 -
7 inconnues, qui a une solution lorsque le système est lié. La résolution du système se ramène
alors au calcul du déterminant de la matrice suivante, qui doit être nul.
- 172 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
R2 λ2
G R3 λ3
R1 λ1
R4 λ4
On a det(M) = det( ⎡
⎢
1 ⎤
0 ⎥⎥
)
⎢ 1 -1 − 0 0 0 0
⎢ 3 ⎥
⎢ R1 ⎥
⎢ ⎥
⎢ λ2 ⎥
⎢ λ1 −λ2 2 0 0 0 0 0 ⎥⎥
⎢
⎢ R1
3 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ 1 1 ⎥
⎢ ⎥
⎢ 0 1 -1 − 0 0 0 ⎥
⎢ 3 3 ⎥
⎢ R2 R2 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ λ2 λ3 ⎥
⎢ 0 λ2 −2 −λ3 2 0 0 0 ⎥⎥
⎢ 3 3
⎢ R2 R2 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ 1 1 ⎥
⎢ ⎥
⎢ 0 0 0 1 -1 − 0 ⎥
⎢ 3 3 ⎥
⎢ R3 R3 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ λ3 λ4 ⎥
⎢ 0 0 0 λ3 −2 −λ4 2 0 ⎥⎥
⎢ 3 3
⎢ R3 R3 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ 1 ⎥
⎢ 0 0 0 0 0 1 1 ⎥⎥
⎢
⎢ R4
3 ⎥
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢ λ4 ⎥
⎢ ⎥
⎢ 0 0 0 0 0 λ4 −2 λ ⎥
⎢ 3 ⎥
⎣ R4 ⎦
- 173 -
3.3.1.2 Définition des paramètres de calcul
ω = mw (III.42)
m l + m pc
m pc (III.43)
k =
m l
- 174 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
qui couperait la phase liquide des autres constituants. La conductivité globale du béton de
Milieu équivalent
λeq
POSITION 1
POSITION 2
POSITION 3
chanvre ne varierait alors plus de manière sensible avec la présence d’eau liquide.
- 175 -
0,210
0,200
0,190 CW
LW
0,180
Mixte
0,170 Position 2
Position 3
λ (W/(m.K))
0,160 Position 1
0,150
0,140
0,130
0,120
0,110
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
ω (kg/kg)
Milieu équivalent
AIR (A) - R1
λeq
EAU (W) - R2
CHANVRE (C) - R3
LIANT (L) - R4
- 176 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
3 2 1 [
3 4 3
3 3 2 ]
4π ρ w (R 3 - R 3 ) = ω 4π ρl (R 3 - R 3 ) + 4π ρ pc (R 3 - R 3 ) (III.49)
Les équations (III.48) (III.50) et (III.52) forment un système de trois équations à trois
inconnues. La résolution permet d’exprimer θ, δ et ξ en fonction des masses volumiques des
constituants et des rapports massiques k et α. Des calculs similaires sont réalisés pour les
configurations ACWL et ACLW. L’ensemble des résultats obtenus est fourni dans le tableau
III.4.
- 177 -
PARAMETRES POUR LES TROIS CELLULES GENERIQUES TESTEES EN
HOMOGENEISATION AUTOCOHERENTE
1- 1 ρ 1- 1 ρ 1- ω
ρ
θ
(1 + ω ) (1 + k ) ρ l (1 + ω ) (1 + k ) ρ l 1+ ω ρ w
( 1 - 1) k
ρl ( 1 - 1) 1 ρw
δ ω ( 1 - 1) (1 + k ) ρ l
θ ρ pc θ ρw θ ω (1 + k ) ρ l
θ δ ρ pc + ρ l (1 - θ) - ρ
ξ θ (1 - δ) + θ (1 - δ) - ρ l k (1 - θ) θ ⎡(1 - δ) - ρ l k δ ⎤
ρw ρ pc ⎢⎣ ρ pc ⎥⎦
Tab.III. 4 : θ, δ et ξ en fonction des masses volumiques des constituants et des rapports massiques ω et k
- 178 -
3.3.1.5 Résultats numériques
Les valeurs expérimentales obtenues pour les différents échantillons stabilisés sous
HR = 50% sont comparées aux valeurs théoriques calculées avec les trois modèles présentés
précédemment (Fig.III. 26). Les séries de valeurs sont présentées en fonction de la masse
volumique du béton de chanvre humide. Les symboles pleins représentent les valeurs
expérimentales et les symboles évidés correspondent aux résultats obtenus par HAC avec les
trois motifs génériques.
0,22
0,20
Mesures expérimentales
Modèle ACWL
Modèle ACLW
0,18
Modèle AWCL
0,16
λ (W/(m.K))
0,14
0,12
0,10
0,08
0,06
0,04
200 300 400 500 600 700 800 900
ρhumide (kg/m3)
Les valeurs de conductivité thermique obtenues avec les trois modèles sont proches et
d’un ordre de grandeur correct par rapport aux résultats expérimentaux. On peut considérer
que ces modèles sont performants pour des masses volumiques humides comprises entre
350 kg/m3 et 600 kg/m3. La proximité des résultats des trois modèles était prévisible car sous
HR = 50 % la teneur en eau des matériaux est de l’ordre de 0,05. En se reportant aux courbes
de la figure III.23, on constate que les valeurs de conductivité thermique sont proches.
De part et d’autre de ces deux bornes, les modèles semblent moins adaptés. Les
valeurs expérimentales et théoriques présentent des écarts de l’ordre de 30 %. Ceci peut
s’expliquer par la microstructure variable du béton de chanvre selon le dosage en liant
(chapitre 1). En effet, la microstructure influe sur la distribution de l’eau dans le matériau.
Celle-ci ne sera pas répartie de la même manière selon la taille des capillaires et la continuité
- 179 -
des phases. Elle n’aura donc pas le même impact sur la conductivité thermique globale du
béton de chanvre.
En ce qui concerne les faibles dosages en liant, les modèles donnent des valeurs de
conductivité inférieures aux valeurs expérimentales. Ce type de cellules génériques ne permet
donc pas de représenter la structure du matériau d’une manière satisfaisante. En effet, les
modèles ACWL et AWCL imposent la connexité du liant, ce qui n’est pas vérifié dans la
réalité.
En ce qui concerne les forts dosages en liant, ces motifs génériques ne sont plus
représentatifs car le volume d’eau contenu dans le matériau sous HR = 50 % est supérieur au
volume d’air disponible dans la cellule générique en dehors de l’air intra-particule et de l’air
intra-liant. Ceci semble donc confirmer le fait que l’eau se positionne dans les pores du liant
ou ceux des particules végétales.
Enfin, les courbes théoriques présentent des pentes (δλ/δρ) supérieures à la pente de la
courbe expérimentale. Ceci semble confirmer le fait que le modèle d’inclusions à quatre
phases ne représente qu'imparfaitement la structure du matériau.
3.3.1.6 Conclusions
Les simulations numériques réalisées sur les modèles à quatre phases ont montré que
ceux-ci avaient tendance à sous-estimer l’influence de l’humidité sur la conductivité
thermique. Ceci peut provenir de l’hypothèse faite dans la description du modèle. Celle-ci
revient à considérer que chaque cellule élémentaire présente la même concentration
volumique en eau. Autrement dit, tous les pores absorbent de l’eau dans les mêmes
proportions, quelle que soit leur taille. On néglige dans ce cas l’influence de l'effet capillaire
qui est plus élevé dans les pores de petite taille qui se remplissent en général les premiers. Ce
modèle semble donc très approché.
Toutefois, les résultats sont satisfaisants lorsque la masse volumique du matériau varie
entre 350 et 600 kg/m3 mais ils restent éloignés de la réalité pour les faibles et les forts
dosages en liant. De plus, ces trois modèles donnent des résultats relativement proches car les
teneurs en eau ω testées sont faibles et l’impact sur la conductivité thermique est modérée.
Enfin, certains matériaux de masse volumique élevée posent problème pour des
valeurs élevées de HR ambiant. En effet, le choix d’une géométrie à base de couches
concentriques était basé sur l’hypothèse que l’eau remplaçait progressivement l’air
macroscopique du béton de chanvre. Or, il s’est avéré que pour la formulation A3-2 sous
HR > 50 %, le volume d’eau absorbé était supérieur au volume d’air macroscopique
- 180 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
m pc = 1 +k k m 0 (III.53)
m l = 1 +1 k m 0 (III.54)
- 181 -
3.3.2.2 Modèle « particules + eau »
AIR (A)
EAU (W)
MILIEU HOMOGENE (CW)
PARTICULES CHANVRE (C)
LIANT (L)
Fig.III. 27 : Modèle de double homogénéisation autocohérente (particules végétales + eau)
- 182 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
⎡ ⎤
⎢ ⎥
λ cw = λ pc ⎢1 + θ' ⎥ (III.56)
⎢ 1 - θ ' + 1 ⎥
⎢ 3 λ w - 1⎥
⎣ λ pc ⎦
⎛ ⎞
3 ⎜ ⎟ (III.59)
δ = 1 - ⎛⎜ R 3 ⎞⎟ = k 1 ρ l ⎜ 1 - 1⎟
⎝ R4 ⎠ ρ cw ⎜1 - 1 ρ bc ⎟
⎜ 1+ k ρl ⎟
⎝ 1 ⎠
avec R3 : rayon de la bulle d’air
R4 : rayon de l’inclusion intermédiaire (milieu homogène = eau + particule)
R5 : rayon extérieur de la cellule élémentaire (liant)
On en déduit alors la conductivité du béton de chanvre humide λh de masse volumique
humide ρbc :
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ ⎥
λ h = λ l ⎢1 + θ ⎥
(III.60)
⎢ 1+ (δ λ a - 1) ⎥
⎢ 1 - θ + 3 λ cw
⎥
⎢⎣ 3 λ a - 1 - δ ( λ a - 1) (2λ cw + 1)
⎥⎦
λl 3 λ cw λl
- 183 -
AIR (A)
EAU (W)
PARTICULES CHANVRE (C)
LIANT (L)
MILIEU HOMOGENE (LW)
Fig.III. 28 : Modèle de double homogénéisation autocohérente (liant + eau)
Le modèle fait intervenir les paramètres θ’, θ, et δ dont l’expression en fonction des
caractéristiques des constituants est synthétisée dans le tableau III.5 . On définit k2 :
m pc (III.61)
k2 = = 1
ml + m w 1 + 1+ 1
k k
( ) mm w
0
⎡ ⎤
⎢ ⎥
λ lw = λ l ⎢1 + θ ' ⎥ (III.62)
⎢ 1 - θ ' + 1 ⎥
⎢ 3 λ w -1
⎥
⎣ λl ⎦
On exprime ensuite la conductivité du béton de chanvre humide :
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ ⎥
λ h = λ lw ⎢1 + θ ⎥ (III.63)
⎢ δ λ
1 + ( - 1)a ⎥
⎢ 1 - θ + 3 λ c ⎥
⎢ 3 λ a δ λ a
- 1 - ( - 1) ( 2λ c
+ 1) ⎥
⎣ λ lw 3 λc λ lw ⎦
Le troisième modèle est issu de la comparaison entre la quantité d’eau absorbée par le
béton de chanvre sous certaines hygrométries et la quantité d’eau absorbée par chacun des
constituants pris seuls sous la même ambiance hydrique. En effet, la quantité d’eau réellement
captée par le matériau est supérieure à la quantité d’eau théoriquement contenue dans les
particules ou dans le liant seul en se basant sur les courbes de sorption-désorption. L’idée de
- 184 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
répartir l’eau liquide entre les deux phases s’est donc imposée (Fig.III. 29). La démarche mise
en œuvre est également une double homogénéisation. La première étape permet de définir les
deux milieux homogénéisés correspondant au liant saturé en eau (milieu LW) et aux
particules saturées en eau (milieu CW). Les calculs sont strictement identiques à ceux exposés
au § 3.3.2.2 et au § 3.3.2.3. La difficulté est de répartir de manière correcte l’eau entre le liant
et les particules. Pour ce faire, on utilise une fonction de répartition basée sur les teneurs en
eau massique de chaque constituant.
On a ωl (x %) : teneur en eau massique du liant pour HR = x %
ωpc (x %) : teneur en eau massique des particules de chanvre pour HR = x %
Donc la masse d’eau dans les particules de chanvre vaut :
mwc = ωpc mpc (III.64)
et celle dans le liant vaut :
mwl = ωl ml (III.65)
Il faut vérifier que mw = mwl + mwc, ce qui est globalement vrai sur l’ensemble des essais.
- 185 -
La conductivité thermique du béton de chanvre humide vaut alors :
⎡ ⎤
⎢ ⎥
⎢ ⎥
⎢
λ h = λ lw 1 + θ ⎥ (III.66)
⎢ δ
1+ ( λ a
- 1) ⎥
⎢ 1 - θ + 3 λ cw ⎥
⎢ 3 λ a δ
- 1- ( λ a
- 1) (2 λ cw
+ 1) ⎥
⎣ λ lw 3 λ cw λ lw ⎦
Comme pour les modèles précédents, un comparatif des résultats obtenus est réalisé
dans le cas d’une formulation de béton de chanvre donnée (Dalle) et une masse volumique
sèche ρsec = 500 kg/m3. On observe que les trois modèles donnent des résultats équivalents
pour de faibles teneurs en eau (ω < 0,1 HR < 60 %). Pour des teneurs en eau supérieures à
0,10 le modèle mixte (i.e. eau contenue à la fois dans le liant et dans les particules) conduit à
des valeurs de conductivité inférieures à celles des deux autres modèles. Ceux-ci renvoient
des valeurs numériques de conductivité proches car ils donnent tous deux un rôle
prépondérant à l’eau, qui dicte la valeur finale de conductivité thermique humide.
0,210
0,200
0,190
0,160
0,150
0,140
0,130
0,120
0,110
0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35
ω
- 186 -
PARAMETRES POUR LES TROIS MODELES DE DOUBLE HOMOGENEISATION
AUTOCOHERENTE
1 ρ bc 1 ρ bc 1 ρ bc
1- 1- 1-
θ 1 + k1 ρ l 1 + k 2 ρ lw 1 + k3 ρ lw
⎛ ⎞ ⎛ ⎞ ⎛ ⎞
⎜ ⎟ ⎜ ⎟ ⎜ ⎟
k1
ρl ⎜ 1 - 1⎟ k2
ρ lw ⎜ 1 - 1⎟ k3
ρ lw ⎜ 1 - 1⎟
δ ρ cw ⎜1 - 1 ρ bc ⎟ ρ pc ⎜1 - 1 ρ bc ⎟ ρ cw ⎜1 - 1 ρ bc ⎟
⎜ 1+ k ρl ⎟ ⎜ 1 + k ρ lw ⎟ ⎜ 1 + k ρ lw ⎟
⎝ 1 ⎠ ⎝ 2 ⎠ ⎝ 3 ⎠
- 187 -
3.3.3. Comparaison entre valeurs théoriques et expérimentales
0,20
Mesures expérimentales
Chanvre+Eau
0,18
Liant+Eau
Mixte
0,16
0,14
λ (W/(m.K))
0,12
0,10
0,08
0,06
0,04
200 300 400 500 600 700 800 900
3
ρ hum ide (kg/m )
0,20
Mesures expérimentales
0,18
Chanvre+Eau
Liant+Eau
0,16 Mixte
0,14
λ (W/(m.K))
0,12
0,10
0,08
0,06
200 250 300 350 400 450 500 550 600 650 700
3
ρhumide (kg/m )
- 188 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
Les figures III.30 et III.31 montrent une cohérence entre les valeurs expérimentales et
les valeurs théoriques pour des masses volumiques humides supérieures à 350 kg/m3. En
dessous de cette valeur seuil, un écart de 30 à 40 % est constaté sur la valeur de la
conductivité thermique.
Sous HR = 50 %, les trois modèles donnent des résultats similaires. La conductivité
thermique semble donc peu sensible aux modifications morphologiques induites par les
différentes cellules génériques. Ceci peut s’expliquer par le volume d’eau relativement faible
adsorbé sous cette hygrométrie. Les concentrations volumiques de liquide sont donc petites
par rapport à celles des autres constituants. Leur impact sur la conductivité thermique est
alors limité. Sous HR = 75 %, les écarts entre les différents modèles sont plus marqués, tout en
conservant le même ordre de grandeur. Il semble que le modèle mixte donne les résultats les
plus proches de l’expérimental. Les résultats obtenus par la double homogénéisation
apportent une légère amélioration du point de vue numérique par rapport aux modèles à
quatre phases développés au § 3.3.1. Toutefois, l'intérêt de la double homogénéisation reste
modéré au regard des résultats obtenus précédemment. Ces modèles peuvent donc être
considérés comme des raffinements par rapport aux autres mais ils présentent l’avantage de
décrire une structure en meilleur accord avec la physique. En effet, la double
homogénéisation suppose implicitement que les pores saturés sont de petites taille devant les
pores secs (séparation d’échelle) pour que le milieu saturé (liant ou particules végétales)
puisse être considéré comme un milieu homogène par les pores secs. Cette hypothèse est en
accord avec les phénomènes de remontées capillaires, qui se produisent prioritairement dans
les petits pores des matériaux et les saturent.
En revanche, une question demeure en suspens quel que soit le modèle utilisé. La
pente δλ/δρ de la courbe expérimentale est moins forte que celle issue des modèles
théoriques. Ceci signifie donc que les modèles surestiment l’influence de l’eau sur la
conductivité thermique du matériau.
3.4. Conclusion
- 189 -
lente (plusieurs semaines), ce qui se révèle être une contrainte expérimentale forte. La
deuxième difficulté est liée à la conservation de l’état hydrique du matériau. Il faut vérifier
que l’eau adsorbée par le béton de chanvre ne disparaît pas en cours de mesure. Des plaques
de cuivre ont été employées pour isoler le matériau de l’air ambiant et des vérifications par
pesées avant et après mesure ont été faites.
Les campagnes de mesures expérimentales ont été suivies d’une modélisation par
homogénéisation autocohérente. Le motif générique utilisé est issu des travaux antérieurs sur
le béton de chanvre sec. En effet, la présence d’eau ne modifie pas la structure du matériau.
Deux approches de modélisation ont été testées successivement.
Dans un premier temps, un motif générique constitué de quatre phases concentriques
est employé. L’eau occupe une place équivalente à celle des autres constituants. On se trouve
alors dans la configuration traitée par Hashin, dans laquelle la concentration volumique en
eau est identique quelle que soit la taille des pores. L’ordre de grandeur des conductivités
obtenues par ce biais est correct mais le modèle montre des limites dans le cas d’hygrométries
élevées. Les échantillons de masse volumique supérieure à 750 kg/m3 absorbent un volume
d’eau supérieur au volume d’air macroscopique contenu dans le béton de chanvre. Ceci
confirme l’impression selon laquelle l’air intra-liant et l’air intra-particules est remplacé par
de l’eau (lié à la condensation capillaire).
Dans un deuxième temps, une technique de double-homogénéisation a été utilisée.
Ceci permet de simuler la saturation des pores de petite taille contenus soit dans le chanvre
soit dans le liant et d’intégrer ce matériau saturé dans un motif générique à trois phases. Ces
modèles permettent d’obtenir des valeurs de conductivité légèrement meilleures que celles
obtenues par le modèle à quatre phases, mais l’écart entre les deux approches reste modeste.
L’intérêt de cette démarche réside dans le fait qu’il permet de mieux prendre en compte la
saturation des petits pores du matériau et le comportement en sorption de chacun des
constituants. En effet, il semble approprié de répartir l’eau entre le chanvre et le liant, tous
deux étant fortement hydrophiles.
- 190 -
CHAPITRE 3 : Comportement thermique et hydrique
- 191 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
CHAPITRE 4
COMPORTEMENT ACOUSTIQUE
Les différents éléments dont nous disposons à ce stade de l’étude montrent que le
béton de chanvre est un matériau doté d’une porosité importante. Partant de ce constat et
compte tenu des similitudes avec le béton de bois, l’étude des propriétés acoustiques a été
orientée vers le comportement en absorption. Ce chapitre présente les résultats de notre
démarche exploratoire dans ce domaine. Celle-ci est basée sur un travail essentiellement
expérimental et n’a pas donné lieu à une modélisation théorique contrairement aux propriétés
mécaniques et thermiques.
La première phase de notre travail s’est attachée à définir les paramètres pertinents du
point de vue acoustique et à les évaluer pour les différents constituants (cf. chapitre 1) et pour
les formulations variables de béton de chanvre. La perméabilité est immédiatement apparue
comme un paramètre clé du comportement acoustique. Son rôle a été effleuré dans le
chapitre 1 et sera plus amplement détaillé dans la première partie de ce chapitre. La nature de
la porosité du matériau a également été considérée compte tenu de ses répercussions sur le
comportement en absorption. A partir de ces deux paramètres caractéristiques, l’évolution du
coefficient d’absorption du béton de chanvre en fonction de la fréquence, de la formulation et
de l’épaisseur des échantillons est analysée.
Cette analyse des résultats expérimentaux a conduit à une réflexion sur le
comportement acoustique du matériau. Pendant des années les acousticiens ont travaillé sur
des matériaux possédant une porosité simple, ce qui signifie que les pores macroscopiques
- 191 -
participant au fonctionnement acoustique possédaient une seule taille caractéristique. Le
poreux est alors assimilable à un fluide équivalent, à partir duquel on modélise les propriétés.
Ce concept sera développé dans la première partie du chapitre. Plus récemment, les
acousticiens se sont intéressés à des matériaux à double porosité [AURIAULT &
BOUTIN, 92], [BOUTIN & al., 96] et [BOUTIN & OLNY, 99]. Ces derniers possèdent deux
échelles distinctes de pores (une de taille microscopique et l'autre de taille mésoscopique). La
pression entre ces deux types de pores n'est pas uniforme et des phénomènes de diffusion
doivent alors être pris en compte. Le comportement du matériau devient beaucoup complexe à
modéliser. Les difficultés liées à ce type de microstructure seront détaillées dans ce dernier
chapitre.
Le chapitre est structuré en deux parties. Dans un premier temps, différents rappels
théoriques sur l'acoustique sont faits et les principaux paramètres sont définis. Dans un second
temps, les résultats expérimentaux sont présentés. Une analyse est effectuée et quelques
hypothèses sont émises quant au comportement en absorption du béton de chanvre.
- 192 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
1.1. Définitions
L’oreille humaine est sensible aux ondes dont la fréquence est comprise entre 20 et
16 000 Hz. On définit alors trois domaines de fréquences :
- 20 à 400 Hz : GRAVES ⇒ λ compris entre 0,85 et 17 m
- 400 à 2000 Hz : MOYENNES ⇒ λ compris entre 0,17m et 0,85m
- Au-delà de 2000 Hz : AIGUËS ⇒ λ inférieur à 0,17m
- 193 -
fréquences permet de faciliter la représentation du son et la comparaison des performances
acoustiques des matériaux. Dans le domaine du bâtiment, on utilise la plage de fréquences
allant de 100 à 4 000 Hz. Le tableau suivant donne la correspondance entre octaves et tiers
d’octave dans cette gamme.
Fréquences (Hz)
1/3 d’octave
100
125
160
200
250
315
400
500
630
800
1000
1250
1600
2000
2500
3150
4000
5000
octave 125 250 500 1000 2000 4000
La propagation du son est perturbée lorsque des obstacles se dressent sur son passage.
L'onde incidente génère une onde réfléchie sur la surface du matériau et une onde transmise
au travers de celui-ci.
onde
incidente (Ei)
onde transmise
(Et)
onde
réfléchie (Er)
Fig.IV. 1 : Comportement d’une onde en incidence oblique à la surface d’un matériau
- 194 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
- 195 -
2000 Hz à l’aide d’un appareil nommé tube à impédance ou tube de Kundt. Ce dispositif
possède la particularité de limiter la transmission des ondes (Et ≈ 0) et de se placer en
incidence normale (ondes incidente et réfléchie ont même direction de propagation). On
calcule alors la valeur de α par octave afin de comparer les matériaux entre eux.
La masse volumique du béton de chanvre, après prise, est inférieure à 800 kg/m3.
Cette valeur est trop faible pour que le matériau puisse réaliser de l’isolation acoustique par
effet de masse. Un panneau de béton de chanvre aura tendance à transmettre les ondes par
phénomène vibratoire. Cependant, ce matériau possède une forte porosité ouverte, l’onde
incidente pénètre dans le matériau et s’amortit le long des capillaires par effets visqueux. Ceci
explique que cette étude se focalise sur le caractère absorbant du matériau.
Un matériau peut être qualifié de milieu poreux s’il est constitué à la fois d’une phase
solide et de vides appelés pores. Ces pores sont saturés par de l'air. Il existe deux familles de
pores dans un matériau, influant de manière différenciée sur le comportement acoustique :
- Pores connectés
- Pores occlus
Tout d'abord, un matériau possédant une forte porosité est léger. Il aura donc tendance
à vibrer sous l'effet des ondes incidentes. Ce type de matériau ne peut donc pas être employé
tel quel pour de l'isolation acoustique.
Ensuite, l'absorption acoustique est due aux frottements visqueux existant entre le
fluide et le squelette solide, car ils ont des vitesses de déplacement différentes. Cet
amortissement n'existe donc que si l'onde acoustique peut pénétrer dans le réseau poreux et il
est d'autant plus fort que la surface de contact entre le fluide et le solide est grande.
L'absorption acoustique est donc favorisée lorsque le matériau possède une porosité ouverte
φouverte élevée et une perméabilité Π suffisante. Ainsi, l'onde pénètre facilement dans le
matériau et dispose d'un large espace pour s'amortir. C’est pourquoi les matériaux absorbants
sont employés pour régler les problèmes d'écoute à l'intérieur d'un local en limitant la
réverbération des sons (réflexion négligeable). Ils dissipent une partie de l'énergie acoustique
incidente et transmettent l'autre partie de par leur perméabilité.
Cependant, un phénomène de diffraction peut se produire si la longueur d'onde λf est
du même ordre de grandeur que la taille des pores en surface. Dans le cadre de cette étude, la
fréquence de l'onde excitatrice varie entre 100 et 2000 Hz, ce qui correspond à des longueurs
- 196 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
d'ondes comprises entre 0,17 et 3,42 mètres. La taille des pores est au maximum de quelques
millimètres. Les conditions sont donc remplies pour éviter le phénomène de diffraction.
Le dernier élément à considérer concerne la taille caractéristique des pores. Si le
matériau possède une seule taille caractéristique de pores, le milieu est dit à simple porosité.
L'écoulement du fluide peut se caractériser par l'équation de Navier-Stokes et on peut calculer
en tout point du réseau la pression du fluide. En revanche, l'existence de deux tailles
caractéristiques de pores modifie le comportement acoustique global du matériau. On
distingue alors les macropores et les micropores. Or, la pression dans les deux types pores est
différente. Des phénomènes de diffusion de pression entre les deux réseaux se superposent
donc aux phénomènes de propagation d'ondes. Ceci influe en particulier sur l'absorption
acoustique. Dans le cas d’un simple poreux, α augmente avec la fréquence d’une manière
régulière. Dans le cas d’un double poreux, des pics d’absorption sont observables.
Les matériaux poreux sont constitués d’une phase fluide et d’une phase solide. Dans le
cas général, on considère que le squelette est un solide élastique donc déformable et pouvant
être mis en mouvement. [BIOT, 56] a alors démontré que trois ondes se propagent dans le
milieu poreux, deux ondes de compression et une onde de cisaillement générées par les
déplacements du solide et du fluide. Cependant, les mouvements du squelette peuvent parfois
être négligeables. Dans ces conditions, seule une onde de compression se propage dans le
fluide dont les mouvements sont découplés du solide considéré comme rigide. Il existe une
fréquence fd dite de découplage, définie par Zwikker et Kosten en 1949, au-delà de laquelle
cette hypothèse est vérifiée :
σφ 2
fd =
2πρ (IV.10)
Des mesures expérimentales ont été réalisées sur différentes formulations de béton de
chanvre. Les résultats des mesures de σ et Φ seront détaillés ultérieurement. Cependant, un
calcul de fd est réalisé pour trois formulations afin d’obtenir un ordre de grandeur de fd :
Nom fd (Hz)
A3-0,75 1,66
Dalle 0,60
Enduit 0,78
Tab.III. 1: Fréquence de découplage de quelques formulations de béton de chanvre
- 198 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
de fluide à partir de la paroi sur laquelle l’écoulement est perturbé par des effets visqueux. δv
est fonction de la fréquence. On a :
η
δv =
ωρ 0
(IV.12)
Basses Hautes
Rc Fréquences Fréquences
(OZ)
Fig.IV. 2: Profil du champ des vitesses dans un tube cylindrique selon la fréquence
L’épaisseur de couche visqueuse a été calculée pour des fréquences variant entre 100
et 2000 Hz :
-1
f (Hz) ω (rad.s ) δv (µm)
100 628 154
2000 12566 35
4000 25133 24
En plus des effets visco-inertiels, des phénomènes thermiques entrent en jeu lors de la
sollicitation du fluide. En effet, le squelette solide et le fluide avant sollicitation sont
maintenus à une température d’équilibre T0. Lors de la propagation de l’onde acoustique, l’air
présent dans les pores subit des cycles de compression / détente donc des variations de
température, tandis que le solide reste à température T constante. Ceci entraîne un
déséquilibre thermique entre les deux phases et des modifications de la température
acoustique du fluide τ dans les pores. Lorsque le fluide est au repos, τ = 0. Les perturbations
thermiques subies par l’air sont régies par l’équation de la chaleur linéarisée :
λ∆τ − jωρ 0 C pτ = - jωp
(IV.13)
avec τ : température acoustique de l’air (K)
λ : coefficient conductivité thermique de l’air
Cp : chaleur spécifique de l’air à pression p constante
Par un raisonnement similaire à celui effectué pour les effets visco-inertiels, on définit
l'épaisseur de couche thermique δt. Elle caractérise l’épaisseur de fluide à partir de la paroi
sur laquelle le champ des températures est perturbé. δt varie en fonction de la fréquence. On
a:
δt = λa =
a (IV.14)
ω ρ a c0 ω
- 200 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
Lorsque δt >> r (cas des basses fréquences), le cycle de sollicitation est suffisamment
lent pour que la transformation soit isotherme.
L’épaisseur de couche thermique dans l'air est déterminée pour des fréquences variant
entre 100 et 4000 Hz :
-1
f (Hz) ω (rad.s ) δt (µm)
100 628 183
2000 12566 41
4000 25133 29
2. ELEMENTS DE METROLOGIE
La caractérisation des propriétés acoustiques du béton de chanvre est basée sur une
approche expérimentale. Des paramètres représentatifs tels que la perméabilité, la porosité et
le coefficient d’absorption sont mesurés. Les différents dispositifs employés au cours de
l’étude sont donc décrits dans cette partie, ainsi que les principes de mesure.
- 201 -
De plus, l’échantillon est placé sur un support rigide imperméable, ce qui supprime les ondes
transmises.
onde
incidente (Ei)
onde transmise
(Et)
onde
réfléchie (Er)
Fig.IV. 3 : Comportement d’une onde en incidence normale à la surface d’un matériau
L’appareil est constitué d’un tube rigide fermé de section carrée de 85 mm de côté et
1,20 m de long (Fig.IV.4). Les parois sont les plus réfléchissantes possibles. La fréquence de
coupure correspond à cette taille de tube est de 2020 Hz. Le signal utilisé a une fréquence
allant de 100 à 2000 Hz, ce qui est inférieur à la fréquence de coupure. On mesure en deux
points le champ de pression acoustique dans le tube aux abords de l’échantillon sous l’effet
d’ondes stationnaires. On connaît alors les fonctions de transfert des signaux émis et réfléchi
donc le coefficient d’absorption α du matériau.
Analyseur
Haut-parleur 2 1
s
x l
0 3
Echantillon
Terminaison rigide
- 202 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
L’échantillon à tester est placé à une des extrémités du tube. A l’autre extrémité du
conduit est placée la source (haut-parleur à membrane carrée et plate) créant le champ plan de
pression acoustique. On mesure la pression acoustique à l’aide d’un microphone dont on fait
varier manuellement la position. Le microphone est fixé sur le tube par un système de vis
creuses permettant un démontage facile et de sorte que la membrane affleure à l’intérieur du
tube. La mesure est réalisée en deux fois au lieu d’une mesure en deux points simultanément
car l’utilisation d’un seul microphone que l’on déplace permet d’éviter les problèmes de
calibration entre les capteurs [OLNY, 99].
Chaque échantillon est placé dans un moule étanche. Les parois du moule sont collées
les unes avec les autres par des joints en silicone. De plus, il est souhaitable que l’échantillon
adhère le plus possible aux parois afin d’éviter les parasites crées par l’action des ondes sur
d’éventuelles poches d’air qui seraient présentes le long des faces du moule. Les échantillons
sont donc conservés dans leur moule d’origine pendant la prise et de séchage. Enfin,
l’étanchéité entre les pièces du système (moule, tube, haut-parleur) est assurée par des joints
élastiques de robinetterie. On évite ainsi les fuites d’air, qui auraient tendance à augmenter le
coefficient d’absorption mesuré par le dispositif.
Chaque éprouvette de matériau est testée avec deux gammes d'échantillonnages de
fréquences successifs. Une première série de mesures est faite à l’aide d’un signal hautes
fréquences. Une deuxième mesure est réalisée en utilisant un signal en basses fréquences. Ce
double échantillonnage permet d’augmenter la précision des résultats.
2.1.2. Le porosimètre
Ce dispositif permet d’évaluer la porosité ouverte φouverte d’un matériau. La mesure est
effectuée en déterminant le volume d’air contenu dans une enceinte, avec et sans
l’échantillon. Cette enceinte est conçue pour être adiabatique. Elle est munie d’un piston
permettant de faire varier son volume intérieur. En déplacant ce piston et en mesurant
l’augmentation de pression qui en résulte, on accède au volume d’air dans la cavité.
On suppose pour cela que la transformation est isotherme, et que l’air suit la loi de
Boyle-Mariotte. Dans ces conditions, on a :
0 0 = ( P0 + ∆P )(V0 + ∆V )
PV (IV.15)
d’où l’on peut déduire V0 .
En mesurant successivement le volume d’air de l’enceinte avec et sans échantillon, on
détermine le volume Vs occupé par le squelette du matériau, et on en déduit la porosité
correspondant à l’air non occlus (air dans les pores connectés) :
- 203 -
-
φ ouverte = V t V s (IV.16)
Vt
où Vt est le volume total de l’échantillon.
Vis micrométrique
et piston
Capteurs différentiels de pression
DP1
Réservoir d’air
Echantillon
- 204 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
2.1.3. Le perméamètre
Débitmètre massique
Débitmètre laminaire
Echantillon
air comprimé
Q Rc Rx
DP1 DP2
- 205 -
4,6 cm de diamètre et 20 cm de haut sont fabriqués pour les mesures de perméabilité et de
porosité.
Couche de
compactage
Support rigide
Compte tenu de la durée du plan expérimental lié aux conditions de fabrication des
échantillons, les propriétés acoustiques vont être évaluées sur quelques formulations
judicieusement choisies. Les échantillons de matériau sont conservés dans leur moule pour
des problèmes d’étanchéité, ce qui ralentit le séchage (faible surface d’évaporation). Cinq
formulations de béton de chanvre, de concentration volumique en liant Cliant variable, sont
étudiées :
- Toit (Cliant = 9 %)
- A3-0,75 / Mur / Dalle (Cliant = 20, 21 et 26 %)
- A3-2 (Cliant = 40 %)
A ces formulations de béton de chanvre sont ajoutés des échantillons Enduit, utilisés
en tant que revêtement de surface (Cliant = 51 %). Il aura donc un rôle important à jouer dans
le comportement acoustique du béton de chanvre in-situ, étant donné le lien existant entre les
propriétés acoustiques et l’état de perméabilité de la surface.
Certains problèmes expérimentaux exposés plus loin, n’ont pas permis de tester tous
les échantillons sur tous les appareils. Les tableaux suivants font la synthèse des essais
réalisés :
- 206 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
Nom 10 cm 20 cm 30 cm
Toit x x x
A3-0,75 x x x
Mur x x x
Dalle x x
A3-2 x x
Enduit x x
Tab.III. 2: Nature des échantillons testés en absorption au tube de Kundt
3. RESULTATS EXPERIMENTAUX
- 207 -
Mesures Calcul
Ecart (%)
expérimentales théorique
Toit 0,80 0,85 5,9%
A3-0,75 0,79 0,82 3,7%
Mur 0,77 0,79 2,5%
Dalle 0,77 0,79 2,5%
A3-2 - 0,67 -
Enduit - 0,59 -
Tab.III. 4 : Comparaison entre les valeurs expérimentales de φouverte et les valeurs calculées de manière
théorique φestimée
- 208 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
-4 2
σ (N.s.m ) Π (m )
A3-0,75 5900 3,1E-09
Dalle 2800 6,6E-09
Enduit 10800 1,7E-09
Tab.III. 5: Résistance au passage de l’air et perméabilité du béton de chanvre
Les valeurs de Π sont très élevées pour ce type de matériau en comparaison d’autres
matériaux de construction. Le béton cellulaire par exemple est peu perméable avec des
valeurs de l’ordre de 10-14 m2 (Tab.I.9) On obtient les mêmes ordres de grandeurs que ceux de
laines minérales, du type des laines de roche Rockwool, fortement perméables
(≈ 10-9 m2 pour une porosité φ = 90 %).
- 209 -
3.1.3. Tortuosité α∞
- 210 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
équivalent ρéq de ce matériau et de la compressibilité Kéq n'a donc pas été possible, empêchant
le calcul par analyse inverse de la tortuosité.
Le coefficient d’absorption est influencé par la nature du support sur lequel est posé
l’échantillon. Ce dernier se comporte donc comme un matériau multicouches, constitué d’un
matériau poreux et perméable, et d’un support rigide et imperméable. Les problèmes liés à la
différence d’impédance entre les deux éléments sont donc abordés dans un premier temps. Un
autre élément à considérer pour la validité des mesures est l’état de surface du matériau, qui
modifie son pouvoir absorbant. Son impact sur les signaux est démontré dans (§ 3.2.1).
Ensuite, les courbes continues d'absorption sont présentées afin d'étudier l'influence des
différents paramètres sur le pouvoir absorbant. Enfin, une comparaison des coefficients
d'absorption par octave est effectuée pour évaluer le pouvoir absorbant global du matériau et
le comparer à celui d’autres matériaux du génie civil.
L'absorption étant liée aux caractéristiques de surface, des essais préalables ont été
effectués sur les échantillons, compte tenu des différences d'aspect observées entre la face
supérieure et la face inférieure des prismes. La face supérieure a été talochée lors de la mise
en oeuvre. Son aspect n'est donc pas parfaitement lisse de par la présence des granulats
végétaux. En revanche, la face inférieure des échantillons présente un aspect lisse car du liant
semble s'être accumulé au fond du moule. Les granulats sont mieux enrobés et sont moins en
contact avec le milieu extérieur. Cette face semble donc moins perméable que la précédente.
Pour vérifier cet écart de perméabilité, des échantillons sont testés successivement dans deux
sens. La direction de propagation de l'onde est perpendiculaire aux faces supérieure et
inférieure. Le sens 1 correspond au cas où la face la plus perméable est traversée par l'onde
incidente (l'autre face est donc en contact avec le support rigide). Le sens 2 correspond au cas
où la face la moins perméable est traversée par l'onde incidente. Une formulation riche en
liant (A3-2) et une intermédiaire (Dalle) sont testées.
- 211 -
Fig.IV. 9: Aspect de la face supérieure (a) et de la face inférieure (b) des échantillons
- 212 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
0,7
0,6
0,5
0,4
α
0,3 Sens 1
Sens 2
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
Fig.IV. 10: Coefficient d’absorption selon le sens de propagation de l'onde incidente pour A3-2 (e=10 cm)
1.0
0.9
0.8
0.7
0.6
Sens 1
α
0.5 Sens 2
0.4
0.3
0.2
0.1
0.0
100 1000 10000
Fréquence (Herz)
- 213 -
3.2.2. Courbes continues d’absorption
Les graphiques sont fournis par formulation pour les trois longueurs testées. Les
courbes d'absorption sont obtenues en moyennant les résultats recueillis sur plusieurs
échantillons.
1,0
0,9
0,8
0,7 Toit-20 cm
0,6
Toit-30 cm
Toit-10 cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
1,0
0,9
0,8
0,7 A3-0,75-30 cm
A3-0,75-20 cm
0,6
A3-0,75-10 cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
- 214 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
1,0
0,9
0,8
0,7 Mur-10 cm
0,6
Mur-20 cm
Mur-30 cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
1,0
0,9
0,8
0,7 Dalle-10cm
0,6
Dalle-20cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
- 215 -
1,0
0,9
0,8
0,7 A3-2-20cm
0,6
A3-2-10 cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
Fréquence (Hertz)
1,0
0,9
0,8
0,7
ENDUIT - 20 cm
0,6
ENDUIT - 10cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
HERTZ
- 216 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
1,0
0,9
0,8
0,7 Toit-10 cm
Mur-10 cm
Dalle-10cm
0,6 A3-0,75-10 cm
α
Enduit -10cm
0,5 A3-2-10 cm
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
HERTZ
- 217 -
moyennes (600 - 900 Hz). Les variations sont quasiment identiques à celles observées sur les
échantillons de 10 centimètres, si ce n’est que les pics sont plus difficiles à distinguer.
On note une diminution de l’amplitude des pics lorsque la concentration volumique en
liant augmente, ainsi qu’un décalage vers les basses fréquences.
1,0
0,9
0,8
Toit-20 cm
0,7
A3-0,75-20 cm
Mur-20 cm
0,6 Dalle-20cm
Enduit - 20 cm
A3-2-20cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
HERTZ
1,0
0,9
0,8
0,7 Toit-30 cm
A3-0,75-30 cm
0,6
Mur-30 cm
α
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
100 1000 10000
HERTZ
- 218 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
Le béton de chanvre n’a pas le comportement d’un matériau à simple porosité d’après
§ 3.1.3. En couplant ce résultat avec le fait que le matériau possède plusieurs tailles
caractéristiques de pores, on peut supposer que ce matériau est un milieu à double porosité.
En partant de cette hypothèse, il est alors possible d’expliquer certaines observations
expérimentales concernant les pics d’absorption, leur position et leur amplitude.
Les modifications de l’amplitude, de la position et de la largeur de bandes
fréquentielles des pics sont liées au matériau et à la géométrie de l'échantillon. Trois
paramètres interviennent :
- la mésoporosité φméso
- la taille des pores
- la résistivité des matériaux
L’augmentation de la concentration volumique en liant se traduit par :
- une diminution de la porosité ouverte du matériau donc de φméso (car le
volume des capillaires reste constant)
- une diminution de la perméabilité (i.e. une augmentation de σ).
- 219 -
16π P0 (IV.19)
f diffusion =
φ méso σ M Λ
avec P0 : pression de l’air à T = 20°C
M : facteur de forme dépendant de la géométrie
Cette fréquence de diffusion détermine la limite à partir de laquelle les phénomènes de
diffusion de pression entre les mésopores et les micropores se produisent. Lorsque la taille
des pores augmente, Λ augmente donc fdiffusion diminue. Le pic d’absorption en basses
fréquences se décale alors vers les hautes fréquences et la largeur de bande de fréquences du
pic augmente.
Le décalage des pics vers les basses fréquences est un des effets de l’augmentation
d’épaisseur des échantillons.
La stabilisation du niveau d’absorption vient du fait qu’il existe une épaisseur limite
au-delà de laquelle les ondes ne pénètrent plus dans le matériau et ne peuvent donc plus être
amorties. Le niveau d’absorption devient constant. Il faut noter que cette valeur d’épaisseur
limite de 30 cm correspond à une configuration particulière d’un matériau poreux sur un
support rigide et imperméable, pour laquelle il n’y a pas d’ondes transmises.
- 220 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
dosages intermédiaires 350 – 500 19% - 29% 0,70 - 0,79 3.10-9 à 6.10-9 0,50 - 0,90
- 221 -
1
0,9
0,8
0,7
TOIT (10%)
0,6
MUR (28%)
DALLE (29%)
α
0,5
0,4
A3-0,75 (22%)
A3-2 (39%)
0,3 ENDUIT
0,2
0,1
0
100 600 1100 1600
Hertz
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
α
TOIT (10%)
0,4
A3-0,75 (22%)
0,3 MUR (28%)
DALLE (29%)
0,2
A3-2 (39%)
0,1 ENDUIT
0
100 600 1100 1600
Fréquence (Hertz)
- 222 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
α
TOIT (10%)
0,4
A3-0,75 (22%)
0,3 MUR (28%)
0,2
0,1
0
100 600 1100 1600
Fréquence (Hertz)
0,9
0,8
0,7
0,6
α
0,5
0,4
0,3
Panneaux Béton Bois Système - Mur double face STRUCTA - e=13cm
TOIT (25%)
0,2 A3-0,75 (30%)
MUR (33%)
DALLE (34%)
0,1 ENDUIT
A3-2(47%)
Béton Cellulaire Siporex (e=5cm)
0
100 600 1100 1600
Fréquence (Hertz)
Fig.IV. 24 : Comparaison des coefficients d’absorption par octave de différents matériaux du génie civil
- 223 -
4. CONCLUSION
Les propriétés acoustiques du béton de chanvre ont été abordées du point de vue
expérimental au cours de cette thèse. Le but était de déterminer si ce matériau présentait un
intérêt quelconque en tant qu'isolant acoustique et le cas échéant dans quelle mesure. Compte
tenu de la grande porosité du béton de chanvre, l'étude du comportement en absorption a été
privilégiée. Ainsi, les valeurs des porosités, des perméabilités et du niveau d'absorption ont
été déterminées pour différentes formulations de matériau. On a ainsi pu tirer quelques leçons
concernant ce matériau. Tout d'abord, l'essentiel pour ne pas dire la totalité de la porosité du
matériau est ouverte. En conséquence, la perméabilité du béton de chanvre est de l'ordre de
10-9 m2 et le coefficient d'absorption varie entre 0,3 et 0,9 selon le dosage et la fréquence.
De plus, des pics d'absorption en basse fréquence (f ≈ 400 Hz) et en moyenne
fréquence (f ≈ 1200 Hz) sont observables tant que l'épaisseur de matériau est inférieure à
20 cm. Ces valeurs sont élevées par rapport à d'autres matériaux du génie civil testés dans des
conditions équivalentes. Il faut cependant rester prudent avec ces niveaux de α car ils sont
mesurés avec le tube de Kundt, pour un échantillon placé sur un support rigide et
imperméable. Les ondes transmises à travers le matériau sont minimisées, contrairement à ce
qui se passerait dans le cas d'un mur séparant deux pièces.
Ensuite, une difficulté expérimentale est apparue compte tenu de la sensibilité du
coefficient d'absorption à l'état de surface des échantillons. Selon le mode de surfaçage, la
perméabilité de surface varie, ce qui modifie le coefficient d'absorption. Nous avons choisi de
travailler sur des échantillons dont la surface a été talochée avec soin afin de se rapprocher de
la réalité.
Enfin, le béton de chanvre présente un comportement acoustique plus proche d'un
double poreux que d'un simple poreux. Ce résultat ne pourra être confirmé qu'en réalisant une
caractérisation complète des grandeurs acoustiques. Ce travail expérimental devrait faire
l'objet d'un futur travail de thèse.
- 224 -
CHAPITRE 4 : Comportement acoustique
- 225 -
CONCLUSION
Cette étude est basée sur une approche globale des propriétés physiques du béton de
chanvre. Elle visait deux objectifs majeurs. Dans un premier temps, un travail expérimental a
été mis en place de façon à comprendre et à évaluer les performances de ce matériau en
fonction de divers paramètres tels que la formulation, la contrainte de compactage ou les
conditions de conservation. Dans un second temps, une étude théorique est menée et une
modélisation par homogénéisation autocohérente est proposée en mécanique et en thermique.
Enfin, en ce qui concerne les propriétés acoustiques, cette étude a permis de découvrir
quelques pistes concernant le comportement du béton de chanvre. En effet, ce matériau
semble fonctionner comme un double poreux avec une taille caractéristique des capillaires du
chanvre (de l’ordre du micromètre) et une taille caractéristiques des pores du liant (de l’ordre
du millimètre). Les capillaires joueraient le rôle de micropores dans lequel les effets visqueux
- 226 -
CONCLUSION
sont prépondérants et le régime d’écoulement isotherme. Les pores du liant joueraient le rôle
de macropores dans lesquels le régime d’écoulement est adiabatique.
Les niveaux d’absorption obtenus sont élevés et présentent des pics en basses
fréquences qui pourraient s’expliquer par des phénomènes couplés.
En conclusion, cette étude a permis d’obtenir des précisions quant aux performances
du béton de chanvre. Des gammes de variations des propriétés en fonction du dosage et du
compactage ont pu être déterminées (cf. tableau 1). L’approche globale de ces propriétés a
permis de voir le côté polyvalent de ce matériau qui peut servir à la fois d’isolant thermique et
acoustique tout en conservant des propriétés mécaniques correctes. Toutefois, ces
performances mécaniques ne sont pas suffisantes pour permettre un usage sans structure
porteuse. Les travaux devraient se poursuivre en développant un modèle acoustique
satisfaisant et en affinant les résultats thermiques et mécaniques.
- 227 -
3
ρsec (kg/m ) Rc (MPa) E (MPa) εσmax ν
chanvre en vrac 130 - 0,25 - 0,1
-4
T70 1040 5 500 100x10 0,2
-4
Tradichanvre 1400 3 300 100x10 0,2
faibles dosages 250 0,25 4 0,15 0,05
dosages intermédiaires 350 – 500 0,35 – 0,80 32 - 95 0,05 – 0,06 0,08 – 0,16
forts dosages 600 - 800 1,15 140 – 170 0,04 0,2
Enduit 780 0,75 125 0,18 0,35
2
λsec (W/(m.K)) λ50% (W/(m.K)) λ75% (W/(m.K)) porosité perméabilité (m ) α
chanvre en vrac 0,048 - - 0,59 - -
T70 0,24 - - 0,45 - 0,25
Tradichanvre 0,28 - - 0,42 - 0,13 - 0,20
faibles dosages 0,07 0,09 0,11 0,80 - >0,60
-9
dosages intermédiaires 0,08 - 0,11 0,10 - 0,13 0,13 - 0,18 0,70 - 0,79 3x10 0,50 - 0,90
forts dosages 0,13 - 0,18 0,14 - 0,20 - 0,67 - 0,30 - 0,55
Enduit 0,13 - - 0,24 - 0,30 - 0,60
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- 234 -
- 235 -
ANNEXES
ANNEXE 1
Modélisation par homogénéisation autocohérente
dans le cas de deux inclusions simples
MILIEU 1
MILIEU 2
- 236 -
uΦ = UΦ(r).sinθ.sin2Φ
avec Uθ = -UΦ et θ, Φ : angles classiques en coordonnées sphériques
avec dans le milieu homogène :
Ur = B1.r - 6.ν.B2.r3 + 3.B3 + (5-4ν).B4
(1-2ν) r4 (1-2ν).r²
Uθ = B1.r – (7-4ν).B2.r3 - 2.B3 + 2.B4
(1-2ν) r4 r²
La détermination des constantes A1, A2, A3, A4, B1, B2, B3 et B4 se fait par continuité des
contraintes et des déplacements.
Quand le rayon r tend vers 0, le champ de déplacements doit être défini dans l’inclusion donc
A3 = A4 = 0
Le champ de déplacement imposé à l’infini peut s’écrire :
ux∞ = -γ.x/2
uy∞ = γ.y/2
uz∞ = 0
soit en coordonnées sphériques :
ur∞ = γ.r/2.sin²θ.cos2Φ
uθ∞ = γ.r/2.sinθ.cosθ.cos2Φ
uΦ∞ = - γ.r/2.sinθ.sin2Φ
On doit donc retrouver dans la matrice à l’infini Ur(∞) = γ/2 = Uθ(∞) d’ou les valeurs
suivantes :
B2 = 0 et B1 = γ/2
Enfin, la continuité des contraintes et des déplacements à l’interface entre l’inclusion et la
matrice homogène mène à un système de quatre équations à quatre inconnues :
- - -
- 237
2µ1[A1 + 3.ν1.A2.a2 ] = 2µ [γ/2 - - 12.B3 – 2(5-4ν).B4 ]
(1-2ν1) a5 (1-2ν). a3
- 238 -
(1-β)2µ2 – [(1-β)(θ1µ1+θ2µ2) + β(θ1µ2 + θ2µ1)]µ - βµ1µ2 = 0
- - -
- 239
ANNEXE 2
Modélisation par homogénéisation autocohérente
dans le cas d'une inclusion bi-composite
Milieu
R2 E2 équivalent E ν
R1 E1
Fig.A.3 : Équivalence entre une inclusions sphériques bi-composites et le milieu homogène associé
Les fonctions Ui sont données par la résolution des équations d’équilibre (de Love -
1927) dans le domaine élastique. Pour chacune des trois régions de l’espace (milieu 1, milieu
2 et milieu homogène équivalente), il existe des Ur et Uθ différents. On obtient donc :
- 240 -
• pour r < R1 (milieu 1)
Ce problème revient donc à déterminer 9 constantes A1, A2, B1, B2, B3, B4, D1, D3 et
D4 à partir des conditions de continuité aux deux interfaces. Les conditions portent à la fois
sur la continuité des déplacements (ur, uθ et uΦ) -6 équations- et des contraintes (σr, τrΦ, τrθ ) -
6 équations- . On a 8 équations indépendantes sur les douze fournies par les conditions de
continuité.
La continuité des déplacements aux interfaces donne les relations suivantes :
• en r = R1
• en r = R2
• en r = R1
- - -
- 241
µ1[A1 – (7+2ν1).A2.R1 2 ] = µ2[B1 – (7+2ν2).B2. R1 2 + 8.B3 + (5-4ν2).B4 ]
(1-2ν1) (1-2ν2) R1 5 (1-2ν2)R1 3
• en r = R2
- 242 -
- - -
- 243
FOLIO ADMINISTRATIF
Prénoms : Véronique
TITRE : Propriétés mécaniques, thermiques et acoustiques d’un matériau à base de particules végétales : approche
expérimentale et modélisation théorique
RESUME :
Ce mémoire de thèse est consacré à l'étude des propriétés mécaniques, thermiques et acoustiques du béton de
chanvre. Ce matériau est obtenu en mélangeant un liant à base de chaux, des particules végétales et de l’eau. Ces
dernières possèdent une porosité intrinsèque importante, du fait de la présence de capillaires. Ceux-ci rendent les
particules légères, compressibles et sensibles à l'eau. Le liant contient un mélange de chaux hydraulique et aérienne.
Le mélange de ces deux constituants de nature et de caractéristiques très différentes conduit à un matériau dont les
propriétés seront variables en fonction des concentrations volumiques de chaque constituant. De plus, ce matériau
se distingue par un double réseau de pores, l'un de taille microscopique (10 à 40 µm) et l'autre de taille
mésoscopique (< 1 mm). On montre expérimentalement que ces deux réseaux sont connectés.
Du point de vue mécanique, le béton de chanvre se caractérise par un comportement élasto-plastique. La résistance
en compression varie entre 0,25 et 1,15 MPa. Le module d'élasticité est compris entre 4 et 170 MPa. Ces valeurs
sont modestes par rapport à celles des autres matériaux de construction. En revanche; ce matériau peut supporter
des niveaux de déformations élevés (0,04 < εσmax < 0,15). En s'appuyant sur les observations expérimentales, une
modélisation par homogénéisation autocohérente est réalisée. Celle-ci permet d'obtenir un modèle prédictif de la
valeur du module d'élasticité pour des formulations et des niveaux de compactage variables.
Ensuite, une étude des transferts de chaleur et de masse au sein du matériau sous diverses hygrométries est menée.
On a quantifié expérimentalement la sensibilité du matériau à l’hygrométrie ambiante HR. Des campagnes de
mesures ont déterminé la conductivité thermique sèche et humide du béton de chanvre pour des formulations et des
compacatges différents. Un modèle autocohérent est également mis en œuvre en utilisant deux types de motif
générique. Il permet de retrouver les résultats expérimentaux avec une bonne fiabilité.Enfin, une caractérisation de
l'absorption acoustique du béton de chanvre est initiée. Elle montre des niveaux d'absorption élevés sur toute la
gamme de dosages étudiés (α > 0,5). Ce travail exploratoire met également en lumière un comportement proche de
celui d'un milieu à double porosité.
Laboratoire (s) de recherche : Laboratoire GéoMatériaux (Ecole Nationale des Travaux Publics de l’Etat)