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Les

Bonnes Façons
de mourir
Ou fin macabre et lamentable des Lituaniennes

De Gabriel Calderón
Traduction française Marys Aubert

Premier prix au Concours de dramaturgie organisé par l’institut International de


Théâtre 2003.
Mention honorifique au concours de Dramaturgie organisé par le Teatro Circular
de Montevideo et la Junta Departamental de Montevideo à l’occasion du 50e
anniversaire du Teatro Circular.

Cette pièce a été jouée pour la première fois en août 2004 au Teatro Circular de
Montevideo sous la direction de l’auteur et les comédiens de cette institution.

Personnages :

Maître de Cérémonie - Glamour, Majestueux, avec un sourire particulier que l’on devine faux.
Journaliste femme - Voix en off, et si elle décide d’apparaître, alors ce ne sera pas une voix off,
ce sera peut-être une voix on.
Clara - 79 ans, très mauvais caractère. Soeur d’Inès et de Marta
Inès - 77 ans, très bon caractère, toujours contente. Soeur de Clara et de Marta. Elle oublie tout
et se rappelle encore plus.
Marta - 76 ans. Bien qu’elle ne le soit pas, elle a l’air autiste. Soeur d’Inès et de Clara.
Un enfant ou deux ou plus de deux - A la fin il n’y en aura plus qu’un, mais jusqu’à la moitié
de la pièce ils peuvent être plus d’un. Totalement indéfini, ultrasupermultifacécieux. Il
appartient à ce qui est appelé l’Armée des Enfants. Il n’est pas forcément joué par un enfant,
bien qu’il puisse l’être.

Scénografie :

Manège de chevaux de bois qui tourne pitoyablement.

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UN PEU DE PROLOGUE

1. Les titres du journal

Journaliste :

Et dans la chronique policière


On sollicite l’aide de la population
Car Monsieur
Dalmiro Escuder
n’est pas rentré chez lui
depuis 48 heures
Ce sont les voisins qui ont averti la police
car ce Monsieur de 78 ans
vit seul et n’a pas de famille à ce qu’on sait tout du moins.
De plus les crimes
commis à l’encontre des personnes âgées
n’ont pas cessé durant ces dernières semaines.
A la petite vieille de quatre-vingts ans retrouvée
au bord de la rivière de Manga,
s’ajoute aujourd’hui un pensionnaire de soixante-dix-sept ans
qui a été retrouvé mutilé
dans le quartier de l’Union.

Passons à une autre information


nous devons signaler
que la violence domestique ne
paraît pas diminuer
atteignant au cours du mois
son plus fort…

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2. Maître de Cérémonie

Superbe ! Je dirais.
Impressionnant !
je dirais
Je ne
peux pas
le
croire !!!
(rire)

C’est une de ces histoires


que moi j’appellerais
que j’appellerais moi
Je ne peux pas le croire !!
(rire)

D’où ?
De la télé.
Je m’informe de tout à la télé.

Assis dans la salle de TV


appelée ainsi parce que justement
c’est là où
nous pouvons trouver la TV …
J’ai découvert
au cours des années
qu’il n’est pas nécessaire d’avoir sa propre vie
alors que l’admirable TV
peut t’offrir des centaines de vies différentes
en touchant seulement un bouton.

Merveilleux !!!
(rire)

Mais ce n’est pas à ce sujet


Qu’aujourd’hui nous sommes ici
Ainsi donc passons
à ce dont nous voulons parler
Et ne nous amusons pas…
… et ne nous amusons pas
(il pense)
et ne nous amusons pas.

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3. Les Lituaniennes

Inès - Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ma petite Clara !


Joyeux anniversaire ! Hourra ! Hourra !
Qu’est-ce qui t’arrive?
Cela ne te rend pas heureuse, ton anniversaire ?
Soixante-dix-neuf ans ! Qui pourrait le penser ?
La petite sœur aînée…
… allons ma petite Clara… regarde, regarde qui est là (elle montre Marta).
Même Marta s’est levée pour toi.
Cela ne te fait pas plaisir ?
Ma petite Clara ?
(pause)
Dis quelque chose Clara !

Clara - C’était la semaine dernière.

Inès - Comment ?

Clara - Mon anniversaire, c’était la semaine dernière.


(Inès regarde Marta qui approuve avec la tête)

Inès - Bon, euh… Bien sûr ! Bien sûr que c’était la semaine dernière !
Evidemment que c’était la semaine dernière, ce qu’il y a c’est que…

Clara - Tu as oublié !

Inès - Non, non ! Comment pourrais-je oublier ?!

Clara - Tu as oublié !

Inès – Non ! Je te jure que je n’ai pas…

Clara - Tu as oublié !!

Inès – Oui !! J’ai oublié ! Ce qu’il y a c’est que, je ne sais pas pourquoi, mais j’avais à
l’esprit qu’aujourd’hui était un jour important et…

Clara - C’est l’anniversaire de Marta !

Inès – Comment ?

Clara - Je dis que c’est l’anniversaire de Marta !

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(Inès regarde Marta qui approuve de la tête)

PAUSE

Inès- (à Marta)
Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ma petite Marta !
Joyeux anniversaire ! Hourra ! Hourra ! (Elle se laisse tomber dans une chaise).
Ah, pardon ! C’est que je ne sais plus ce qui me passe par la tête… j’oublies de plus en
plus de choses, je mélange tout… c’est que je suis vieille, avec mes cinquante ans
déjà…

Clara - Soixante-dix-sept.

Inès - Soixante-dix-sept ans et chaque fois ça m’est plus difficile.


(PAUSE)
Mais bon, on ne va pas se mettre à déprimer.
Aujourd’hui c’est l’anniversaire de notre petite Marta et il faut fêter ça… ma petite
Marta ! Que veux-tu comme cadeau ?

Marta (elle pense)- Je veux… aller me recoucher.

Inès - (Elle rit)- Qu’elle est drôle, toujours de si bonne humeur, mais bon, non, au lit
non, tu as bien entendu le docteur, il a dit que tu ne pouvais pas passer toute la journée
couchée. Qu’est-ce que tu dirais si on allait au Jardin botanique ?

Clara - Elle n’ira pas au Jardin botanique, elle n’aime pas ça !

Inès - Pourquoi ma petite Marta ? C’est si beau. Je n’y suis jamais allée, ou bien si ? Je
ne rappelle pas, mais une fois j’ai entendu dire que c’était un endroit très joli, il y a des
plantes, des plantes ! Des plantes pour de vrai, pas comme celles qui viennent de
l’humidité qu’on laisse pousser dans la cuisine.
A propos de la cuisine, vous n’avez pas faim ?

Clara - On vient de manger.

Inès - Toutes les trois ?

Clara - Oui.

Inès - Ah, je ne me rappelle pas… bon, quelle heure est-il ?

Marta -(criant) Midi.

Inès - Hou là midi !... midi… midi, c’est l’heure de la toilette, non ! L’heure de dormir,
non plus ! L’heure de … de…

Clara - Des médicaments.

Inès - Des médicaments ! C’est l’heure des médicaments ! Je savais bien… j’arrive tout
de suite. (Elle sort).

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PAUSE (Marta et Clara se parle sans se regarder).

Clara - Marta. PAUSE

Marta - Oui ? PAUSE

Clara - Bon anniversaire. PAUSE

Marta - Oui ? PAUSE

Inès - (Elle entre avec un plateau plein de médicaments)


Regardez comme c’est délicieux ce que j’apporte là… (Les séparant sur la table). Ces
six-là pour ma petite Clara, ces six-là pour ma petite Marta et ces six autres pour moi.
(Il en reste un) Et celui-ci ? C’est à qui ?... Bon, je me le prends moi !

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4. L’Armée des enfants

Entre un enfant ou deux ou plus de deux (ce qu’on veut ou qu’on trouve).
Leurs vêtements ou leur présence suggèrent, d’une forme ou d’une autre, qu’ils
appartiennent à une armée. Il(s) regarde(nt) le public fixement, attrape(nt) certains
d’entre eux du regard. Il(s) dira(ont) les textes suivants en s’arrêtant chaque fois sur un
spectateur différent, comme s’il(s) lisai(ent) dans ses pensées et que chaque chose
qu’il(s) disai(ent) était ce que le spectateur était en train de penser.

Un enfant ou deux ou plus de deux :

- Qu’il ne me prenne pas moi... Qu’il ne me prenne pas moi …

- J’ai horreur de ces trucs dans lesquelles ils font participer avec le public. Mon coco…
j’ai payé pour que tu joues toi et pas moi.

- Demain il faut que je paye l’électricité, le téléphone et si on me donne l’argent…

- S’il ne me paye pas la prime de Noël lundi, celui-là il va m’entendre, parce que…

- Même si l’espace est petit et même si le petit a déjà grandi…

- J’aurais dû rester à la maison à regarder le câble, aujourd’hui on donnait le meilleur de


la saison de...

- Quand est-ce que je recevrai ma retraite? J’ai besoin absolument de cet argent …

- Vous êtes contente ? Ça vous amuse ? Et si on a envie de partir ?

- Vous êtes content ? Vous aimez le théâtre ? Et si on ne veut pas rester ?

- Et tous nous partons, et nous mourons, et nous disparaissons dans...

- Je ne comprends rien, cela me dépasse, ce genre de choses dépasseraient n’importe


qui…

Il(s) regarde(nt) un dernier spectateur et reste à le dévisager, effrayé(es), jusqu’à ce que


finalement il se mette à parler.

- Et penser que les enfants comme toi sont…


Que nous réserve l’avenir ?
Les vieux représentent le passé.
Les adultes, le présent.
Et vous… vous… ?
Il est temps que tu évolues.
Sur le passé.
Sur le présent.
Que commence le futur !

FIN DE CE PEU DE PROLOGUE

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LA PIECE COMMENCE

5. Les lituaniennes

Les trois soeurs sont assises, Inès compte des pilules.

Inès - 27, 28... 29... ...30... (Elle s’arrête, réfléchit) Qu’est-ce que j’étais en train de
faire ?

Clara - Tu comptais les pilules.

Inès - (elle regarde les plaquettes) Ah... je ne sais plus où j’en suis.
(Elle recommence à compter en silence, et pendant que Marta parle, elle continuera à
s’y perdre et à recommencer en silence)

Marta - Où serai-je à quatre-vingts ans ? A quatre-vingt-dix ans ?


Que sera ma vie alors ?
Cela parait tellement loin et c’est tellement proche.
J’ai toujours rêvé que quand j’arriverai à mes vieux jours, pour ainsi dire, je serais dans
un fauteuil à bascule, assise devant la cheminée, tricotant, avec des petits-enfants et des
arrières petits-enfants.
Un jour j’aurai tout cela.

Inès - 27, 28... 29... ...30... (Elle s’arrête, réfléchit)


Qu’est-ce que j’étais en train de faire ?

Clara - (durement) Tu comptais les plaquettes.

Inès - (Elle regarde les plaquettes) Ah... je ne sais plus où j’en suis.
(Elle recommence à compter à voix basse).

Marta - Je ne demande pas une grande demeure, ni la fortune, pas même la santé, rien.
Seulement ce rêve… et ce n’est pas tellement.
Des petits-enfants, des arrières petits-enfants… j’aime les enfants.
J’ai toujours rêvé…
Qu’en sera-t-il de mes rêves à quatre-vingts ans ? A quatre-vingt-dix ans?

Inès - 31, 32... 33... ... (Elle s’arrête, réfléchit) Qu’est-ce que j’étais en train de faire ?

Clara - (durement) Tu allais te jeter par la fenêtre.

Inès - Ah bon ? Je ne me rappelle pas.

Clara - C’est ce que tu allais faire.

(Inès se dirige vers la fenêtre et s’arrête au beau milieu de la pièce. Elle reste
désorientée)

Marta - J’aime les enfants.


J’aurais toujours aimé en avoir un.

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Même si ce n’était pas le mien… un neveu…
Non ! Un neveu, non !
J’aime les enfants s’ils sont à moi.
C’est drôle comme les choses oscillent pendant un temps et ensuite disparaissent.
J’ai eu l’opportunité et je l’ai laissé passer.

Inès - Qu’est-ce que j’étais en train de faire ?... je ne sais plus où j’en suis …, je ne sais
plus où j’en suis.

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6. Les titres du journal

La journaliste :

Et dans la chronique judiciaire, chers téléspectateurs


On est toujours sans nouvelles du septuagénaire Delmiro Escuder
Qui a disparu depuis le 24 dernier
ce qui fait quatre jours.
Cette après-midi la police a fouillé son habitation
sans résultats significatifs.

Par ailleurs se poursuivent les enquêtes


sur les crimes sanglants touchants
les personnes âgées.
Ces crimes atroces, si on peut s’exprimer ainsi
appellent à la vigilance des personnes âgées.
Aujourd’hui plus que jamais
la police recommande que, si vous êtes une personne âgée
et que vous vivez seule,
vous tachiez de maintenir un contact permanent avec les voisins
ou vos familles
pour éviter tout malheur.
En d’autres termes méfiez-vous.
Méfiez-vous vraiment...

D’autre part
le Ministère de l’Intérieur a installé
une ligne spéciale d’aide aux victimes de violences domestiques.
Tandis qu’au parlement, se trouve toujours en discussion la loi
qui doit punir sévèrement de tels agissements…

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7. L’Armée des enfants

Un enfant ou deux ou plus de deux :

J’ai un plan. Une idée. Une bonne idée. Un “Renouveau Générationnel”. Ça sonne bien,
hein ? J’ai trouvé ce titre moi-même “Renouveau Générationnel”. Ça fait sérieux non ?
Et voilà ! C’est bien, parce que ce que j’ai à dire est sérieux. Je continue. Ecoutez.

Les enfants représentent le futur. C’est clair. C’est clair, n’est-ce pas ? Donc d’abord
nous éliminons le passé. Aucune société avec un bon avenir ne peut se baser sur un
mauvais passé. Et notre passé n’est pas joli joli. Il est horrible. Douloureux.
Affreusement triste. Caucasien, dirais-je. Mais peu importe. Il s’écrit d’une main et
s’efface de l’autre. Ou avec le coude. Ou ce que vous voulez.

Le fait est que je pense comme ça. Je ne sais pas si c’est une vérité mais voilà. On
élimine le passé et on s’en invente un bien meilleur. Meilleur. Avec une civilisation
antique genre la Grèce ou Manhattan. Oui. Et après nous être occupé du passé, alors
seulement nous nous occuperons du présent. Voilà ! Une ville d’enfants. Des enfants qui
seront le futur, et le présent et le passé. Tout.

Hein ? ...Non ...je ne sais pas comment nous allons nous organiser. Qu’est-ce que j’en
sais. Qu’importe ! Ces choses-là sont des broutilles. Mineures. Des rainures
insignifiantes. On doit agir sans trop penser. Cela démolit n’importe quelle idée géniale.
Les bonnes idées ne se pensent pas. Elles surgissent. Elles apparaissent tout d’un coup.
Elles émergent des profondeurs obscures du Caucase ou de l’Himalaya. Si, quand s’est
fondé Athènes, on s’était mis à penser à ce qu’on ferait quand on serait conquis par les
Romains, on n’aurait rien fait. Et alors, on aurait été privé de… de… jolis mots comme
Athènes… Internet… et… et d’autres qui viennent aussi de là. Donc, commençons par
le début. Dès maintenant. Détruisons le passé…
Détruisons le passé !

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8. Le Maître de cérémonie

Quelle merveilleuse nouvelle !


A-t-elle déclaré
Quelle merveilleuse nouvelle, c’est ce qu’elle a déclaré
ce qu’a déclaré celle-ci
quand elle a appris que…
… eh bien…
… qu’elle était enceinte…
…pour la première fois.

Lui ?
Non... lui n’était pas si content
Mais c’est naturel
Les hommes contents n’ont pas l’habitude d’être dans ce genre de situation
C’est bon pour les femmes
Pour eux, il est bon de
se troubler et de s’inquiéter
de comment on va entretenir la maison maintenant
avec l’arrivée d’un futur élément supplémentaire

Comment ?
Non, oui, elle aussi travaille.
Dans un centre de massage
Du moins c’est ce qu’elle lui raconte
Ou ce que lui veut croire
Parce que soyons réaliste
Aucune personne qui travaille à faire des massages
ne peut s’acheter une télévision de…
…29 pouces

Lui ?
Lui, il est ouvrier
Il gagne moins d’argent qu’elle
C’est pour ça que parfois il s’énerve et la cogne
Lui !
Oui !
Il la cogne et avec le poing fermé.
Tu sais comment ça fait mal ?
Parce que à moi, qu’il la cogne, ça ne me parait pas mal…
… mais avec le poing fermé…
…je ne sais pas…

Je ne sais pas.
Pour ça il n’y a pas d’excuse.
IL N’Y EN A PAS.

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9. Les lituaniennes

Marta - Dans quelques jours nous allons mourir.

PAUSE

Inès - Qu’est-ce qu’elle a dit ?

Clara - Que dans quelques jours nous allons mourir.

Inès - Quelle est mignonne… toujours aussi affectueuse.

Clara - C’est vrai... ce qu’elle a dit est vrai.

Inès - A propos de quoi ?

Clara - A propos de mourir

Inès - Ah... et quand ?

Clara - Dans quelques jours.

Inès - On va aller à l’hôpital ?

Clara - L’hôpital a fermé.

Inès - Pas possible..., quelle déveine..., et où allons-nous mourir ?

Clara - Je n’en sais rien.

Inès - Moi, je préfère l’idée de mourir dans un hôpital, ça change, ainsi nous sortons un
peu d’ici… personne ne meurt dans un hôpital, c’est disons très romantique.

Clara - Mais l’hôpital a fermé.

Inès - Pas possible..., quelle déveine..., et où allons-nous mourir ?

(Marta commence un minuscule monologue à part)

Marta - Nous allions nous rendre à l’hôpital… ensemble.


Je connaissais déjà le principe.
Hôpital public… tu entres et rarement tu sors.
A notre âge c’était très facile qu’ils nous trouvent un petit défaut pour nous interner.
A plus forte raison si on arrêtait de prendre les médicaments pendant quelques jours.

Inès - C’est l’heure des médicaments ! (elle sort)

Marta - Dans ces lieux, tu entres parce que tu as une tension basse.
Mais ils te découvrent une autre petite chose.
Et sans le faire exprès, ils te donnent un médicament qu’il ne faut pas.

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Et ils se trompent dans le régime.
Et il faut opérer.
Et cette opération qui était simple se complique.
Et on est terriblement désolé.
C’était une petite vieille tellement adorable.
Peut-on discuter au sujet d’un don d’organe ?
Mais…
…comme tout ce qui est public…
C’était un plan presque parfait.
Jamais on n’aurait pensé… Jamais !
On ne naît qu’une fois.
Mais les morts sont si nombreuses !

Inès- (entrant avec un plateau de médicaments)


Et pourquoi l’hôpital a-t-il fermé ?

Clara - Parce qu’il était inhospitalier.

Inès - (Elle rit d’abord puis s’apaise peu à peu. Ensuite elle répartit les médicaments)
Six pour toi… six pour toi…

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10. L’Armée des enfants

Un enfant ou deux ou plus de deux :

En consultant le cours 16. Version 3.1


“Comment devenir kamikaze et mourir dans l’attentat”

Bonsoirs mesdames et messieurs. En cette occasion où notre fanatisme nous interpelle


à nouveau, profitons-en pour nous former à un thème tout à fait d’actualité et qui, n’en
doutons pas, tourne chaque jour dans le crâne de chacun d’entre nous.

Comment devenir une bombe humaine.


Avant tout nous devons préciser que, ce qui est important ici n’est pas la bombe
humaine en soi, pas plus que la mort même de l’individu explosif, mais tout le contraire.
Notre objectif, dans ces cas-là, doit être uniquement centré sur la destruction de
l’ennemi… mais attention ! Ces ennemis ne sont pas ceux que nous croyons, mais
d’autres qui sont totalement dissimulés à notre regard rageur. (Pause exprimant un
« regard rageur ». Fin de la pause)
Supposons que nous voulons obtenir quelque chose d’un dirigeant ennemi, alors
supposons que nous le séquestrons et que… Je ne sais pas… nous le torturons un petit
moment. Celui-ci ne dit pas un mot. On lui donne un peu des coups, plus quelques
brûlures aux fers incandescents. Il ne dit rien. On lui arrache quelques dents et ongles
lentement. Il crie !... mais ne dit pas un mot. Avec un scalpel on pourrait lui couper les
testicules… sans anesthésie et au cas où ce serait un homme bien sûr, mais l’imbécile
est disposé à souffrir les feux de l’enfer plutôt que de céder face à nous. Personne
n’arrive à obtenir ce qu’on cherche. Echec ! (Pause)
Mais supposons alors, qu’au lieu de le séquestrer lui, nous séquestrons sa femme. Alors
comme démonstration de notre intérêt à le voir coopérer, nous lui faisons passer une
vidéo qui montre comment dix soldats de nos bataillons, violent un par un ou deux par
deux et même à trois, sa petite femme tant chérie (Pause exprimant un petit rire
baveux. Fin de la pause). Cela suffirait sûrement pour qu’il nous livre, d’un bout à
l’autre, ce que nous lui demandons. Vous voyez ce que je veux dire, n’est-ce pas.
Alors… Qu’est-ce qui est important au moment où on devient un homme explosif ? …
le choix de l’ennemi… Voyons ça tous ensemble… (Pause. On attend une réponse. Fin
de l’attente. Fin de la pause).
Bon, laissez tomber. Il est d’une importance capitale que vous prêtiez attention aux
données suivantes… Si ce qu’on veut obtenir, avec l’explosion, est une simple
vengeance, il suffit de s’approcher de n’importe quel centre commercial ou arrêt
d’autobus, où l’échantillon des victimes ne dépend pas de nous mais de notre Dieu
Suprême qui sait parfaitement qui est appelé à souffrir la justice divine. Si le but est de
libérer certaines de nos troupes capturées par l’ennemi, il faut choisir une école ou
quelqu’endroit où il y a assez d’enfants, car il est bien connu que la mort de dix
hommes ne vaut pas la souffrance d’un enfant. Maintenant si ce qu’on réclame est de
première urgence et que l’ennemi ne cède pas dès les premières revendications, il est

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recommandé de s’approcher d’un centre de maternité quelconque, car plutôt que de tuer
une personne adulte ou bien un enfant, mieux vaut tuer les deux à la fois. (Pause)
Mais observons ceci. La société est disposée à croire qu’un homme a pu tuer un certain
nombre d’enfants. Bien sûr que cela provoquerait de la douleur et beaucoup de choses
amusantes, mais si nous voulons les écrabouiller, il faut leur offrir quelque chose à quoi
ils ne sont pas préparés. Quoi ? Vous demandez-vous (Pause). Que diriez-vous d’un
enfant tuant un groupe de personnes. Un enfant innocent massacrant la société. Qui
mettrait en pièces la compagnie avec des balles, des bombes et des soucoupes volantes.
Et encore mieux, que diriez-vous d’un enfant se tuant pour tuer les autres ? Un enfant
bombe cherchant à exploser là où il y a du monde. Evidemment cela va détruire non
seulement ceux qui sont près de l’enfant, mais cela va détruire toute la société. Personne
ne va pouvoir l’admettre. Jolie manière de se défaire à la fois du passé, du présent et du
futur. (Pause). Jolie manière, non ?

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11. Les Lituaniennes

Inès - Marta ? Pourquoi n’as-tu pas eu d’enfants ? Je veux dire que tu aimes les enfants,
non ? Tu t’entends bien avec eux. Moi, je m’entends bien avec eux. Moi, j’aurais aimé
que tu aies des enfants.

Marta - Des enfants…

Inès - Oui, c’est ça, des enfants ! Moi, j’aurais aimé avoir des enfants. Non. Je mens.
J’aurais aimé que toi tu aies des enfants. De ceux qui viennent tout petit tu vois, et se
mettent à grandir et à grandir. Mais moi je les aime tout petit, quand ils grandissent je ne
les aime plus, parce que quand ils grandissent ils cessent d’être des enfants et moi, c’est
les enfants que j’aime.

Marta - Des enfants…

Inès - Clara m’a dit, il y a longtemps, que je ne pouvais pas en avoir. Elle me l’a dit
avec une figure très triste, mais à moi, cela ne m’a pas paru si mal, parce qu’imagine
s’ils avaient été à moi, j’aurais dû les avoir pour toujours, alors que si ce sont ceux des
autres, non. Tu comprends ? S’ils sont à quelqu’un d’autre je les aime quand ils sont
tout petits et après, quand ils grandissent, que d’autres les aiment.

Marta - Des enfants…

Inès - Oui, moi je ne peux pas en avoir. Mais j’ai demandé à notre petite Clara si je
pouvais quand même les aimer, et elle m’a dit que pour ça il n’y avait pas de problème.
Clara… elle pleurait, je n’ai jamais compris pourquoi elle pleurait autant. Non. Je dis
des mensonges. Je n’ai pas compris, mais j’ai su quelque chose… c’était à cause de ce
qui lui est arrivé, tu vois ?

Marta - Des enfants…

Inès - Oui c’est ça. Elle ne s’en est jamais remise. Et dire qu’elle aurait pu avoir tous les
enfants qu’elle voulait, mais non, après cela elle n’a pas pu… peut-être elle a eu peur, je
ne sais pas. A un moment, j’ai pensé que c’était toi qui lui faisait peur, mais non, tu ne
peux rien lui faire, je veux dire, après cela tu n’as jamais plus fait de mal à personne,
non ? Mais bon, la question est que maintenant nous sommes déjà vieilles… tu veux que
je te raconte un secret ?

Marta - Des enfants…

Inès - L’autre jour quand le docteur est venu, je lui demandé comme ça en secret… je
lui ai demandé si toi tu pouvais avoir des enfants… et lui m’a répondu quelque chose
que je ne sais pas si je dois te le raconter, mais après y avoir bien réfléchi je pense que le
mieux est que tu saches la vérité. Le docteur m’a dit que tu avais une chose appelée
Ménopause, je ne sais pas grand-chose là-dessus vois-tu, mais il semble que tu ne peux
pas avoir d’enfant toi non plus, comme moi.

Marta - Des enfants…

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Inès - Oui, je sais, je sais. Je te comprends, j’ai ressenti la même chose, mais regarde
sait-on jamais, peut-être qu’un de ces jours nous ouvrirons la porte, et dans un panier
apparaîtra un enfant, comme dans les films, tu vois ?

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12. Titres du journal

Journaliste :

Un homme tue à coup de marteau sur la tête, sa femme


et ses deux filles de quatre et cinq ans.

Un foetus mort et en état de décomposition


Est trouvé, enveloppé de compresses
Dans une poubelle à côté d’un restaurant

Trois enfants tombent dans la fosse au tigre du Bengale, au jardin zoologique.

Une fillette tombée dans une bouche d’égout, a été dévorée par les rats.

On a retrouvé les restes de seize bébés


Dans un cimetière clandestin, derrière une maison abandonnée.

Un bus scolaire se renverse - son conducteur en état d’ébriété a pris la fuite –


Causant la mort de sept enfants, et une dizaine de blessés.

Trois garderies de la ville ont été affectées par des aliments avariés.
Les enfants de ces institutions sont en observation.

Et pour ce qui est de la météo, nous vous informons que demain le ciel sera nuageux,
avec peu de changement de température et si il y a…

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13. Maître de Cérémonie

Lui se lève à cinq heures du matin


Certains jours, lui se lève et elle ne s’est pas encore couchée
Il pense
« Maudit travail de masseuse »
Il pense
Voilà des mois qu’entre elle et lui il ne se passe rien… rien… rien de rien.
Il a envie
Des fois ou presque toujours
Il a envie
Mais elle est trop fatiguée
D’après elle
« Elle passe toute la nuit à masser et il ne lui reste aucune force pour quoi que ce soit »
D’après elle
Elle lui promet toujours qu’ils le feront après
Ah, ah, ah,
Quel idiot !...
… Pardon.

Enfin
Lui se lève à cinq heures
Et part travailler
Si on peut appeler ça comme ça
Dix heures à lever des murs, faire du crépi et supporter les amis
Si on peut les appeler comme ça
Eux qui ont pris la charmante habitude de jacasser dans son dos sur son épouse
en racontant que c’est une…
- pardon mais il faut que je le dise -
Une pute.
- pardon mais il fallait que je le dise -
Lui sait bien que ce n’est pas vrai
Que ses amis ont toujours été jaloux
Lui sait bien que ce n’est pas vrai
Et que sa femme en serait incapable
Lui sait bien que ce n’est pas vrai
Qu’on s’aime une fois pour toute
Qu’on est un homme une fois pour toute

A sept heures il rentre du travail


Et il la croise
A sept heures

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Elle lui dit qu’elle n’a pas pu faire le dîner mais qu’il reste un peu du gratin d’hier, qu’il
le prenne et se le réchauffe parce qu’elle doit y aller.
Un baiser.
Chao.

Et il reste là
A neuf heures du soir
Il reste là
Assis
Il reste
A manger le gratin rassis
Lui
En regardant.
Une chaîne de télévision ?
Une vidéo ?
Un journal ?
Non.
En regardant passer sa vie
Eh, eh, eh
Si on peut appeler ça la vie.
Eh, eh, eh

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14. L’armée des enfants

DECLARATION DE GUERRE

ETANT DONNE LES ZEVENEMENTS OUTRANSIERS QUI ONT ETE REVELES


A L’OPINION PUBLIQUE ET PRIVEE AU JOUR D’HIER, CE QUE L’ON
CONSIDERE COMME L’ATTENTAT LE PLUS BRUTAL ENVERS LES
NOUVELLES GENERASIONS, CES FAITS QUI ONT NON SEULEMENT
ATTEIND LES LIMITES DE NOTRE PASIENSE MAIS AFFECTE AU PLUS
PROFOND NOTRE ESPRIT DE TOLERANSE, NOUS NOUS VOYONS ACCULES
ET REDUIT A UNE SEULE ISSUE.

AUJOURD’HUI A 25 HEURES 36 SE 29 JUIN DE L’ANNEE EN COURS, LES


FORSES ICI PRESENTES, CONSTITUEES PAR L’ARMEE DES Z’ENFANTS ET
AUTRES CREATURES ANALOGUES, NOUS DECLARONS LA GUERRE
TOTALE ET MASSIVE SUR TOUTE LA SPHERE TERRESTRE A SEUX QUI ONT
MAL USE DE SE QU’ILS DEVAIENT BIEN USER.

C’EST AINSI QUE L’EXTERMINACION, LIBERATRICE, JUSTICIERE, DIVINE,


COMMENSERA AU JOUR DE DEMAIN, SANS TREVE JUSQU'A CE QUE TOUS
LES ZENNEMIS QUE CETTE FORSE ICI PRESENTE ESTIMERA NECESSAIRE
D’ELIMINER, SOIENT ELIMINES ET TOUT CA.

IL EST EVIDENT QUE LES VIEILLES GENERACIONS SE SONT ACHARNEES A


DETRUIRE LES NOUVELLES GENERACIONS. NON SEULEMENT
PHISIQUEMENT MAIS AUSSI D’AUTRES FASSONS TELLES QUE LE LAVAGE
DE CERVEAU, LES TRAUMATISANT, LES CHOQUANT, LES SOUMETTANT A
DES SITUACIONS HUMILIANTES ET PIRE ENCORE. DES CHOSES BIEN PIRES
QU’IL SERAIT, DE NOTRE PART, EXCESSIF D’ENUMERER.

NOUS TREPASSONS TOUS D’UNE MANIERE OU D’UNE AUTRE. C’EST JUSTE


QUE MAINTENANT VOTRE TOUR EST ARRIVE.

SALUTACIONS DISTINGUEES.

NOUS-MEMES.

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15. Les Lituaniennes

Inès - Vous savez ce que j’ai toujours voulu avoir ?

Clara - Non. C’est l’heure des médicaments ?

Inès - Non, pas encore.

Clara - C’est dans combien de temps ?

Inès - Pour l’heure des médicaments ?

Marta - Un tigre ! PAUSE

Inès - Oui ! C’est ça que j’ai toujours voulu avoir !

Clara - Oui !

Inès - Oui quoi ?

Clara - Oui ! C’est dans combien de temps l’heure des médicaments?

Inès - Je ne sais pas, mais c’est pas encore, pourquoi ? Tu veux quelque chose ?

Marta - Mourir ! PAUSE

Clara – Mourir ! PAUSE

Inès – Ah ! Mourir ! PAUSE

Inès - Je te comprends parce que moi aussi l’anxiété me tue. J’attends minute après
minute qu’arrive l’heure des médicaments ; et chaque fois elle tarde un peu plus, non ?

Clara - Je ne sais pas !

Inès - Avant pour moi, une heure avait 27 minutes, comme pour tout le monde, et
maintenant je ne sais pas, j’ai l’impression qu’elle a quelque chose comme 57 et même
59 je dirais… je te dirais même plus… je souffre, mon cœur souffre…

Clara - Cela m’importe peu.

Inès - Et qu’est-ce qui t’importe ?

Marta - Mourir !

Clara - Mourir !

Inès - Ah ! Mourir ! PAUSE


Voulez-vous que je vous dise un secret ?

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Clara - Non.

Inès - Vous savez ce que j’aurais toujours aimé avoir ?

Clara et Marta - Un tigre !

Inès - Ahi ! Comment vous le saviez ?

Clara - Peu importe.

Marta - C’est l’heure des médicaments !

Inès - C’est l’heure des médicaments ! Ahi quelle émotion… je pensais ne rien vous
dire, mais je vais quand même vous raconter… j’ai une surprise pour vous. (Elle sort)
PAUSE

Clara - Un tigre du…?

Marta - Bengale. PAUSE

Inès - (Elle entre)


Et voilà! Je les ai séparés par couleurs pour chacune de vous. Les bleus clairs avec cette
ligne verte pour… pour… ahi c’était pour qui ?
PAUSE
Je vous ai raconté ce que j’aurais toujours voulu avoir ?

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16. Titres du journal.

Journaliste :

Public respectable
Déjà va savoir si vous êtes tant respectable
donc je dois vous informer que Monsieur
Delmiro Escuder a finalement été retrouvé voilà quelques heures… mort.
Le vieux monsieur a été découvert dans une fosse septique.
Nu.
Pendant que s’effectue une autopsie détaillée
les premières informations semblent
révéler que la victime
a été brutalement violée et assassinée.
Elle n’avait plus ni les yeux ni la langue.
Voilà le genre d’information que l’on déteste rapporter.
Mais c’est ainsi, respectable public.
Et l’assassin peut bien être l’un de vous autres respectables.
Ou peut-être pas si respectable.
Vous public.
Et permettez-moi de prendre cette liberté…
Ce n’est pas la première fois que je dois annoncer une
« mauvaise nouvelle »
… au début c’était difficile
désagréable
Ça me retournait l’estomac
Je vomissais.
Je n’aurais jamais pensé que c’était si compliqué
Que cela me coûterait tant de faire mon travail.
Il fallait que je change mon état d’esprit.
Je devais trouver le moyen de ne pas souffrir
que les atrocités quotidiennes glissent sur moi.
C’est ainsi que j’ai changé.
A partir de ce moment-là je me suis réjoui.
Je me réjouis de ce que les atrocités que je dois révéler
ne m’atteignent pas moi-même.
Des assassinats, je ressens
une félicité infinie
des viols, une excitation.
Mais bon, revenons à nos moutons
avec une nouvelle plus réjouissante heureusement.
Emotion dans l’opinion publique. Un enfant portant les initiales TNT, a explosé en mille
morceaux devant ses petits camarades de classe, provoquant la mort instantanée de
quinze d’entre eux. L’enfant avait une bombe attachée à son petit corps… (Il se tait).

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17. Les Lituaniennes

Clara - Auto élimination tu sais ? C’est ce qu’ils ont dit à la télé… tu ne trouves pas ça
amusant ? Ce qu’il y a c’est que tu ne l’as pas vu, c’était très drôle.
Dans quelle émission ? Qu’est-ce que j’en sais, je ne me rappelle plus, mais ce n’est pas
ça qui était drôle, ce qui était amusant c’était la dame, celle qui l’a rapporté.
Cette dame, blonde, décolorée, maquillée habilement, ornée de bijoux et avec un
tailleur… un tailleur… Psychologue Claudia Groiovich… tu te rends compte ? Déjà
avec ce nom… PAUSE
…Que pourrait bien savoir cette femme de “l’Auto élimination” ?
Si, alors qu’elle entrait à peine à l’université, elle était déjà morte !
quand elle se mariait avec son infidèle de mari, elle était déjà morte !
quand elle a eu son premier enfant, elle était déjà morte !
Ça fait des années qu’elle est morte, personne ne lui a encore dit, personne ne lui a
annoncé (Elle rit malicieusement). Elle croit que d’avoir un sourire sur des dents
blanches et une peau étirée fortement – sûrement fixée avec des bâtonnets dans son dos-
est une raison suffisante pour se croire vivante.
Son cœur entretient toujours ces pulsations typiques pompant ce qui s’est transformé en
un liquide noir et visqueux qui maintiennent au strict minimum une morte vivante.
Elle est enterrée, sous une terre oubliée, entre fleurs et rameaux de roses séchées.
Marionnette macabre d’un Dieu triste et ennuyeux, qui monte son médiocre spectacle
pour divertir uniquement les spectateurs aveugles.
(Maintenant elle ne rit plus malicieusement mais diaboliquement)

Inès - Dieu ?

Clara - Triste, émacié, raté (Elle regarde un moment vers le haut.) PAUSE
Je le vois et je ne sais s’il faut rire ou pleurer pour lui. Il est à genoux face à nous,
regardant vers le bas… et il prie… il prie nous demandant pitié.
Son nom lui va trop grand. (Elle rit)
Il pleure et Il pleure sans savoir quoi faire.
Il pleure et Il pleure depuis longtemps
Blessé par la solitude… seul (Elle rit et peut-être elle commence à pleurer, émue)
Enfant éternel dans un château de cristal vide.
Ne touche pas petit, ne touche pas !
Ne touche pas capricieux ! Capricieux !
Que veux-tu ? Que veux-tu de nous ? (Elle éclate en colère).
Nous ne voulons pas voir ton misérable chef-d’œuvre. Il nous ennuie ton spectacle de
marionnettes. On connait déjà tous tes personnages, on les a vus encore et encore,
révisant leurs textes et leurs gestuelles décadents. Tu nous ennuies. Nous crachons sur ta
grâce divine !
Qu’est-ce que tu veux ?
Pour quelle raison veux-tu nous maintenir sur cette scène, dans ce parterre de morts ?
Laisse-nous sortir de cette petite pièce de théâtre pathétique que tu as montée.
Laisse-nous mourir !!! (Elle se calme instantanément)

Inès - Et quand est-ce que tu as vu la télé, toi ?

Clara - Hier.

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18. Interrogatoire

Journaliste :
Emotion dans l’opinion publique. Un enfant portant les initiales TNT, a explosé en mille
morceaux devant ses petits camarades de classe, provoquant la mort instantanée de
quinze d’entre eux. L’enfant avait une bombe attachée à son petit corps… (Il se tait).

Maître de Cérémonie - Votre nom ?

L’enfant - Vous le savez déjà.

Maître de Cérémonie - Pour les caméras, pour elles.

L’enfant - (Il regarde les caméras) Tri Nitro Toluène.

Maître de Cérémonie - Très amusant. J’espère que vous avez compris que vous n’avez
ici aucune obligation, j’espère que vous comprenez…

L’enfant - Je le sais.

Maître de Cérémonie - Vous êtes ici de votre plein gré, et vous pouvez partir quand
vous voulez, vous pouvez vous en aller…

L’enfant - Je le sais.

Maître de Cérémonie – Mais si vous vous soumettez à cet interrogatoire…

L’enfant - Je le sais, je le sais.

Maître de Cérémonie - Il faudra que vous compreniez.

L’enfant - Je le sais.

Maître de Cérémonie - Bien. (Il consulte des feuilles de notes) 97. Noël 97…

L’enfant - Quoi ?

Maître de Cérémonie - Noël 97, votre père, encore en vie à ce moment-là vivant, se
lève à 6 heures du matin pour déposer les cadeaux au pied de l’arbre pour déposer les
cadeaux… de Noël. (Il le regarde) Qu’est-ce qu’il vous a offert ?

L’enfant – Quoi ? De quoi vous parlez ?

Maître de Cérémonie - S’il vous plait, répondez à la question je vous prie.

L’enfant - Mais qu’est-ce que ça a à voir avec…

Maître de Cérémonie - Répondez à la question si vous voulez qu’on arrive à quelque


chose répondez à la question.

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L’enfant - Je suis venu me livrer, non à…

Maître de Cérémonie - Vous êtes venu vous mettre volontairement à disposition de ce


tribunal. Volontairement à disposition.

L’enfant - Quel tribunal ?

Maître de Cérémonie - Ici c’est moi qui pose les questions.

L’enfant - Je suis venu me rendre ! Vous ne vous rendez pas compte, je suis…

Maître de Cérémonie – Le cerveau de tous les crimes commis durant les derniers jours
contre les personnes âgées, l’auteur intellectuel, bla, bla, bla. Oui, oui, nous avons déjà
entendu tout ça nous avons déjà entendu et je vous répète que vous êtes venu de votre
plein gré.
Si vous n’aimez pas la façon de mener ce processus vous n’aimez pas, vous êtes libre de
partir maintenant, sinon commençons une fois pour toute.

L’enfant - Je ne veux pas m’en aller, je veux me livrer.

Maestro - Vous devez savoir que les affaires du passé sont des choses curieuses qui
oscillent, ondulent et habitent notre vie là où la raison n’est plus. Cela vous surprendrait
la pertinence de certains d’entre eux. Continuer je peux continuer ?

L’enfant - Allez-y.

Maître de Cérémonie – Pouvez-vous répondre à la question pouvez-vous ?

L’enfant - Je peux, je peux, je peux.

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19. Les Lituaniennes et les Titres

Journaliste :
Les informations de ces derniers jours
Malheureusement se répètent
Les crimes commis envers les personnes âgées
Malheureusement continuent.
PAUSE
Malheureusement pour les personnes âgées

Marta - On sonne !

Inès - On quoi ?

Clara - Je dis que ça a sonné !

Inès - Ça a sonné ? Je n’ai pas entendu…


(On sonne à la porte)

Marta - On sonne !

Clara - Ça a sonné !

Inès - Oui, oui, j’arrive, j’arrive…(Sonnerie à la porte) Qu’est-ce c’est que ça ?

Marta - On sonne !!!

Journaliste :
Les services de police rappellent à ces personnes âgées qui vivent seules
Qu’elles doivent prendre les précautions suivantes
Ne pas sortir
Ne parler à personne
Ne pas regarder
Ne pas écouter
Ne pas manger
N pas respirer
Ne pas déféquer… ah, ah, ah
Quel mot spirituel

Clara – Attendez !

Inès - Quoi ?

Clara - Attendez, n’ouvre pas !

Inès - Non ? Pourquoi ?

Clara - Personne ne vient jamais. Pourquoi quelqu’un sonne à notre porte ?

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Inès - Peut-être que c’est une visite, ça fait tellement longtemps que personne ne vient
nous rendre visite.

Clara - Personne ne veut nous rendre visite.

Inès - Eh bien, justement, peut-être que quelqu’un se souvient de nous.

Clara - Beaucoup de gens se souviennent de nous, et c’est justement pour ça qu’ils ne


viennent pas.

Inès - Mais et si c’était quelqu’un qui nous regrettait, c’est possible, ça fait si longtemps
que personne ne vient, ça me manque tellement les visites des autres.

Clara - Personne ne nous rend visite. (Sonnerie)

Marta - On sonne !!

Inès - J’arrive !

Clara- N’ouvre pas ! !

Inès - Je t’en prie, ça peut être le docteur.

Clara - Impossible, il appelle toujours avant.

Inès - S’il te plait, s’il te plait, s’il te!!?

Clara - ...

Inès – S’il te...

Clara - C’est bon.

Journaliste :
La police observe qu’il est important
De ne pas ouvrir la porte à des inconnus.
Et de prendre toutes les mesures de sécurité possibles.
Demandez qui c’est ?
Ne soyez pas stupide
Ce peut être un assassin brutal
Un assassin et violeur en série
Le facteur qui abuse des femmes sans défense
Le jardinier déséquilibré
L’agent névrosé d’EDF qui donnerait tout
Pour arracher des langues et des yeux à domicile.
Ne soyez pas stupides

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Inès - Qui c’est ?... qui c’est ?
(Sonnerie)

Marta - On sonne !!

Clara - Ouvre veux-tu, tu ne vois pas qu’ils ne t’entendent pas !


(Inès va ouvrir)

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20. Interrogatoire

Maître de Cérémonie - Je vous écoute vous

L’enfant - On m’a offert… un régiment de soldat.

Maître de Cérémonie - De plomb ou de…

L’enfant - De bois.

Maître de Cérémonie - En bois intéressant… en bois.

L’enfant - Oui, en bois.

Maître de Cérémonie - Et pourquoi avez-vous demandé un régiment?

L’enfant - Non, moi je n’ai pas demandé un régiment… j’avais demandé deux ou trois
soldats, mais ils m’ont donné un régiment entier, je ne l’ai pas demandé, ils me l’ont
donné.

Maître de Cérémonie - En bois.

L’enfant - Oui, en bois.

Maître de Cérémonie - …Et où se trouve ce régiment ?

L’enfant - Comment où il se trouve ? C’était des jouets, qu’est-ce que j’en sais où ils
sont. On a dû les donner…

Maître de Cérémonie - Vous savez bien à quoi je me réfère.

L’enfant - Non.

Maître de Cérémonie - Qu’est-il arrivé au régiment ?

L’enfant - Rien.

Maître de Cérémonie - Qu’est-il arrivé au régiment ?

L’enfant - Rien, qu’est-ce que j’en sais moi merde.

Maître de Cérémonie - (PAUSE) Laissez-moi vous aider laissez-moi.

L’enfant - Excusez-moi mais je ne comprends pas en quoi ça peut servir à quelque


chose, si ce que je veux…

Maître de Cérémonie - Taisez-vous !! Ne fuyez pas la question ! Et je ne veux pas


vous répéter de la fermer.

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L’enfant - (PAUSE)
Je ne sais pas quelle connerie est arrivée à cette saloperie de petit régiment.

Maître de Cérémonie - Vous ne savez pas ?

L’enfant - Non.

Maître de Cérémonie - Vous n’avez pas éliminez ce régiment vous-même ?

L’enfant - Non.

Maître de Cérémonie - Peut-être en jouant innocemment peut-être…

L’enfant - Non !

Maître de Cérémonie - Vous avez assassiné ce régiment ?

L’enfant - (en riant) Non, bien sûr que non.

Maître de Cérémonie - (Il rit également)


Oui c’est drôle non ? C’est curieux je dirais moi… voyez comme c’est curieux voyez…
il y a un certain… Alexis qui ne pense pas la même chose non.

L’enfant – (PAUSE) Qu’est-ce que vous avez dit ?

Maître de Cérémonie - Alexis.

L’enfant – (PAUSE) Comment putain connaissez-vous ce nom ?

Maître de Cérémonie- Alexis nous l’a dit…

L’enfant - Fermez-là !... (nerveux) comment savez-vous…


Comment putain vous savez ça…

Maître de Cérémonie - Calmez-vous.

L’enfant - Fermez-la !

Maître de Cérémonie - Ferme-la toi-même ! Ferme-la connard de merde !


(L’enfant essaie de continuer à parler mais le Maître de Cérémonie tente de lui fermer
la bouche. Il y a une mêlée jusqu’à ce que le Maître lui fasse une clé et lui ferme la
bouche)
Mais putain de salaud, tu ne vois pas que tout ce que nous voulons c’est t’aider !
Qu’est-ce que ça peut foutre comment on sait pour Alexis, on sait et basta. C’est ça le
problème avec les gens comme toi, ils ne se rendent pas compte que tout ce qu’on veut
c’est les aider. Tu es un connard de merde, et nous autres nous voulons te démontrer que
tu peux être un gentil connard, mais toi comme une bonne merde tout ce que tu sais
faire c’est t’enfoncer un peu plus… connard de merde !

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21. Maître de Cérémonie

Superbe !
je dirais.
Impressionnant!
je dirais.
Je ne
peux pas
le
croire !!!
(Rires)

C’est une de ces histoires


Que je dirais
Que je dirais moi
Je ne peux pas le croire !!
(Rires)

L’enfant
De demander… demande
Pour Noël
De recevoir… reçoit
Pour Noël
Reçoit ce qu’il demande ?
Non
L’enfant demande une paire de petits soldats
L’enfant reçoit un bataillon de petits soldats

Et eux sont là

L’esprit assassin
Psychopathes
Ils sont là
À guetter
À guetter

C’est un chromosome mal formé


Un gène mal placé
Qui attend
Qui attend

Il suffit de quelque chose hors du commun


Pour que l’esprit assassin
Psychopathe
Se réveille

Les parents aiment tellement l’enfant


Tellement

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Ils veulent lui prouver leur amour
L’impressionner
Alors au lieu de lui offrir une paire de petits soldats
Ils lui offrent … un bataillon !!!
Un bataillon entier
Qui impressionne réellement l’enfant
L’impressionne tellement
Tellement
(Rires)

C’est une étrange réaction quelque part dans le corps


Une étrange réaction chimique
Alors un gène qui était inhibé
Devient actif
Un psychopathe endormi
Se réveille
Un assassin paisible
Entre en fureur

Alexis naît !
Qui à partir de ce moment-là
L’aidera à être un bon garçon
Naît celui que personne ne reconnaîtra à travers de
Ses yeux enfantins de cristal pleins et vides d’innocence
Jusqu’à ce qu’un jour ensoleillé d’hiver
Une chaude nuit étoilée d’été
L’enfant et Alexis commettent le premier crime
L’enfant
Assassine
(Rires)

Tout d’abord
Il réunit le régiment de petit soldats
De bois
Et il les ligote !
Et il les imbibe
D’essence
Et il les brûle tellement
Tellement !
(Rires)

Et une heure plus tard


Il réunit ses parents
Et il les ligote !
Et il les imbibe
D’essence
Et il les brûle tellement
Tellement !
(Il rit. Cesse de rire. S’offusque. Se remet à rire.)
Le bois brûlé n’a pas la même odeur que la peau brûlée.

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22. Les Lituaniennes avec L’enfant, pendant que se poursuit
l’interrogatoire mené par le Maître de Cérémonie, tout en
découvrant peut-être un bref instant que celui-ci est une autre
personne.

Inès- (De dehors) De la visite !

Clara- Qui c’est ?

Inès (En entrant) De la visite!... entrez, jeune homme.

L’enfant- (En entrant) Bonsoir.

Inès (Heureuse) C’est un enfant !

Clara- Qui ?

Marta - Un enfant!

Inès - Oui ma petite Marta, un enfant, je te l’avais dit, il n’est pas venu dans un panier
mais c’est un enfant quand même.

L’enfant- Je ne suis pas un enfant.

Clara- Qui êtes-vous ?

Marta - Un enfant !

Inès - Comment, tu n’es pas un enfant ?

L’enfant - Je suis déjà grand, j’ai douze ans.

Inès- Combien ?

L’enfant - Vingt-six.

Clara - Qui est cet enfant ?

Marta - Un enfant !

L’enfant - Je ne suis pas un enfant !

Marta - Un enfant ?

L’enfant - Non bordel, j’ai dix ans !

Inès - Ne l’énerve pas. (À lui) Ne te fâche pas.

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L’enfant - Alors ne me traitez pas d’enfant.

Marta - Un enfant !

Inès - Un enfant, non !

L’enfant - Va chier !

Inès - Mais elles n’ont pas entendu que tu avais vingt ans.

L’enfant – Seize !

Inès - Tu n’es donc plus un enfant, n’est-ce pas ? Viens, ne te fâche pas.

Clara - Mais Inès, d’où as-tu sorti cet enf… ce garçon ?

Inès - Il était à la porte Clara.

Clara - Et tu le laisses entrer ?

Inès - Qu’est-ce qu’il va nous faire ma petite Clara ? C’est un enf… un jeune homme.

Clara - Même s’il était le pape… Nous ne savons pas qui c’est.

Inès - Qui ?

Clara - Lui (Elle montre l’enfant)

Inès - (Heureuse) Ahi ! Un enfant !

Marta - Un enfant !

L’enfant – Allez vous faire foutre, faites chier !

Clara - (Surprise) Ecoutez-le, l’enfant dit des gros mots.

Marta - Un enfant ! Un enfant !

Inès - Clara arrête de l’appeler enfant.

L’enfant - Si elle m’appelle encore une fois comme ça je vais la crever.

Clara - Qui es-tu ? Qu’est-ce que tu veux ?

Inès- Clara ne l’énerve pas.

Clara - Tais-toi idiote ! Tu ne te rends pas compte ? Nous ne savons pas qui il est, tu es
une vieille idiote !

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Inès - Mais ma petite Claire…

Clara - (Maintenant furieuse et hors d’elle)


Ferme-la ! Les années te rendent de plus en plus idiote, hein ? Dis-moi elles te rendent
de plus en plus idiote ?... Inutile… je suis entourées de deux vieilles inutiles et je ne
peux rien faire pour me débarrasser de vous… moi aussi je suis une inutile avec deux
inutiles. Vieille idiote ! Tu ne te rends pas compte que personne ne t’aime ? Personne ne
se souvient de toi, toi-même tu ne te souviens plus de rien. Et par-dessus le marché
l’autre malade…

Inès - Chut, du calme petite Clara. (A lui) Ça lui arrive de temps en temps.

L’enfant - Je ne comprends pas.

Clara- Vieillarde ! Imbécile !

Inès - Il faut lui donner ses médicaments.

Marta - C’est l’heure des médicaments !

Clara - Toi aussi vieille malade !

Inès - Je vais chercher les médicaments.

Clara - (A lui) Et toi aussi ! Tu es un des pires enfants de salaud.

Inès - Chut petite Claire, ne dis pas ça il va s’énerver.

Clara - Vieille tarée! Pourquoi tu tiens à ce qu’il soit là ? A cause de cette affection
inutile que tu as pour les enfants ? Parce qu’un jour je t’ai dit que tu ne pouvais pas
avoir d’enfant ? Ou non, laisse-moi te le dire comme il faut… à cause du mensonge
qu’un jour je t’ai dit ? Ce mensonge qui disait que tu ne pouvais pas avoir d’enfant ?

Inès – Mensonge ?

Clara - Oui idiote ! (Elle rit) Tu aurais pu avoir tous les gosses que tu voulais, eh, eh,
eh… Mais non ! Tu n’allais pas en avoir, tu m’entends ? Si moi je ne pouvais pas en
avoir, alors personne n’allait avoir de gosses dans cette maison ! Ah ! Tu as toujours pu
en avoir vieille imbécile ! Mais je t’ai sauvée, moi ! Je t’ai sauvé de ces petites créatures
abominables, de ces gosses répugnants… comme celui-ci. (Elle montre l’Enfant) Enfant
de salaud ! Ah ! Enfant dégoutant ! Enfant de merd… (Inès lui donne un coup de poing
dans la figure, ce qui l’éjecte de sa chaise et la fait tomber au sol de tout son long.)

Inès - (A l’Enfant) Maintenant elle ne va plus vous embêter… Excusez-moi, c’est


l’heure des médicaments. (Elle sort)

Maître de Cérémonie - Il est en train de se passer quelque chose d’étrange ici.

L’enfant - Chut.

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Maître de Cérémonie - Je te dis qu’il y a beaucoup de choses bizarres

L’enfant - Ferme-la !

Maître de Cérémonie - La vieille cache quelque chose.

L’enfant - Ferme-la Alexis !

Maître de Cérémonie - J’ai l’impression qu’elle est folle.

L’enfant - Alexis !

Maître de Cérémonie - Ça va… je dis seulement que j’ai l’impression qu’il y a


quelque chose d’étrange.

L’enfant - Je ne veux pas t’écouter.

Maître de Cérémonie - Tu le sais bien… il va falloir qu’on la tue.

L’enfant - Chut, chut !

Maître de Cérémonie - Tu sais que nous devons le faire, tu le sais! Il faut qu’on avance
sur les terribles secrets que tu caches, sur ton horrible passé. Il faut effacer le souvenir
de tes parents…

L’enfant - Ne parle pas de mes parents.

Maître de Cérémonie - Qui a parlé de tes parents ? Personne ne veut parler de ces bons
à rien.

L’enfant - Ne dis pas du mal de mes parents!

Maître de Cérémonie -
Des enfants de pute, lamentables, mal-aimés, ignorants, égoïstes, trouillards, pouilleux,
irresponsables, imbéciles, ratés…

L’enfant - Ce n’est pas de leur faute.

Maître de Cérémonie - (Se moquant de lui) Ce n’est pas de leur faute.

L’enfant - Ne me…

Maître de Cérémonie - Bien sûr que c’est de leur faute ! Bien sûr que oui !! Je ne vais
pas te laisser dire ça. S’ils étaient de nouveau à côté de toi, juste un instant, tu te
rappellerais. Ils ont toujours été coupables. Tu veux que je te rappelle les détails ?

L’enfant - Je ne veux…

Maître de Cérémonie - Bien sûr que tu veux ! Ton père, commençons par lui, par ce
grand fils de pute qui ne t’a jamais aimé, qui n’a jamais aimé ni un enfant, ni personne !

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L’enfant - Ne me traite pas d’enfant.

Maître de Cérémonie - N’oublions pas qu’il battait ta mère, il lui collait la main dans
la figure, avec le poing fermé le lâche, ça ne te dérange pas ça ? Non bien sûr que non,
le pire est que la sale chienne saignait et saignait, la figure en compote, cette salope
éclatée qui couchait avec tout le monde, qu’on ne sait même pas si ton père est bien ton
père… Oui, ça oui, ça te dérange, non ?

L’enfant - Fiche-leur la paix! Qu’ils reposent en paix!

Maître de Cérémonie - Non ! Tu ne comprends pas ? Ça, c’est ce qu’ils font eux, ils
dissimulent tout, essaient de te faire oublier, que tu laisses le passé derrière toi, mais le
passé ne s’en va pas, il reste, il reste dans notre tête et vit pour toujours en nous
tourmentant, avec le temps il prend plus de relief, bien loin de se faire oublier il reste
fortement tatoué dans nos mémoires. C’est ce qu’ils font eux, ils te mentent et te disent
d’oublier, ils te disent des mensonges, qu’ils t’aiment, qu’ils t’aiment tellement,
tellement… Et au lieu de t’offrir une paire de petits soldats, ils t’offrent…

L’enfant - Un bataillon !

Maître de Cérémonie - Un bataillon ! Ça te dérange non ?... Tu te rends compte… et ça


te dérange. Tu veux que je te dise franchement ? Tu sais ce qui te dérange le plus ? La
vérité.

L’enfant - La vérité ?

Maître de Cérémonie - Oui, tu sais que ton passé n’est pas comme tu le voudrais. Tes
parents n’ont jamais été de mauvais parents. Ils t’ont désiré et aimé de tout leur cœur.

L’enfant - Non… Mon père…

Maître de Cérémonie - …N’a jamais fait de mal à une mouche, il n’a jamais frappé ta
mère qui, bien sûr, lui a toujours été fidèle ! C’était des parents modèles ! Mais non, toi
tu ne pouvais pas admettre ça. C’est ça qui te dérangeait vraiment. Eux-mêmes
dérangeaient, il fallait se débarrasser d’eux. Il fallait nous inventer un passé qui puisse
légitimer nos crimes, n’est-ce pas ? Tu l’as très bien fait. Tu n’as pas de remords. Nous
l’avons fait comme il faut, à temps. Nous nous sommes débarrassé du passé, mais ce
n’est pas suffisant, nous ne pouvons plus nous arrêter à présent.

L’enfant - On ne peut plus.

Maître de Cérémonie - Nous devons laver tout le passé, il nous faut nettoyer la vieille
folle, tu le sais bien… Il y a ici quelque chose d’étrange et la guerre est déclarée.

Inès - (En entrant) C’est l’heure des médicaments.

L’enfant – Quoi ?

Inès - Et ma petite Claire ?

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L’enfant – Quoi ?

Inès - Quoi ?

L’enfant - Comment quoi ?

Inès - C’est l’heure des médicaments !

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23. Les titres du journal

Journaliste :

Passionnant
L’affaire des petits vieux assassinés brutalement au cours de ces derniers jours
Prend actuellement une tournure spectaculaire
Dans une maison du Prado
Se trouve actuellement
Celui qui pourrait être
L’auteur de ces atrocités
Et qui, selon les informations qui nous arrivent de la régie
Tenez-vous bien
Serait un jeune mineur
Fantastique !

Actuellement nous nous dirigeons vers la maison


Où se trouverait l’assassin avec une vieille femme séquestrée
Afin de retransmettre en direct et en simultané
Ce qui sera sans aucun doute l’évènement de l’année
Et vous y assisterez bien sûr sur notre chaîne
Sans aucune censure
De la violence en quantité
Du sang
Des assassinats
Des corps déchiquetés
Et de la fureur criminelle, si Dieu le veut
Ne quittez pas votre écran
Et n’ayez pas l’idée de changer de chaîne
Nous revenons dans un instant…

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24. Dernières nouvelles

Clara et Marta sont assises immobiles.

Inès - (A ses soeurs, en portant un plateau plein de pilules de couleurs)


Vous avez faim ?

L’enfant - On parle toute seule ?

Inès - Que dites-vous ? Je parle avec mes soeurs.

Clara - On vient de manger.

Inès - On a déjà mangé ? Je ne me souviens pas… Quelle heure est-il ?

Marta – Midi !

Inès – Midi ! C’est l’heure des médicaments !

Clara - Tu ne nous l’as pas déjà dit ?

Inès - Ah oui ? Je ne me rappelle pas…

L’enfant - Et où sont vos sœurs ?

Inès - C’est quoi cette question ? Vous êtes bête ?

L’enfant - Elles sont là ?

Inès - Ne vous fichez pas de moi, jeune homme.

L’enfant - Et ces pilules ?

Inès - C’est pour elles, pour nous autres… Il va falloir m’excuser car c’est l’heure des
médicaments.

L’enfant - Allez-y…

(Inès ouvre la bouche de ses soeurs qui restent immobiles, et commence à leur remplir
la bouche de pilules jusqu’à saturation, jusqu’à ce qu’elles débordent et tombent sur
leurs vêtements et qu’elles roulent poétiquement sur le sol.)

Maître de Cérémonie - Elle est folle ! Je te l’ai dit.

L’enfant - Et moi je t’ai dit de la fermer.

Inès - Je n’ai rien dit.

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Maître de Cérémonie - Mais regarde-la comme elle laisse tomber ces pilules par terre,
qu’est-ce qu’elles sont ses sœurs, des mosaïques ?

L’enfant – Tu vas la fermer !

Inès - Mais… j’ai dit quelque chose ? Je ne me rappelle pas…

L’enfant - Où sont vos soeurs ?

Inès – Là.

Maître de Cérémonie - Elle est folle !

L’enfant - Vous êtes folle ?

Inès - Qui ça ?

L’enfant - Vous vous fichez de moi ?

Inès - De qui ? Non.

Maître de Cérémonie - Il n’y a qu’à la tuer.

L’enfant - Où sont vos sœurs ?

Inès - Hein ?

L’enfant - Où sont-elles vieille garce !!

Inès - Ahi, ne me criez pas dessus ! … Je ne sais pas…

Maître de Cérémonie - Je te l’ai dit, je te l’ai dit.

Inès - … Elles sont là.

Maître de Cérémonie - Elle veut te rendre dingue, tue-la.

L’enfant - Où ça ? Où sont-elles bordel ?

Inès - Je ne sais pas jeune homme, je ne sais pas… Je ne me rappelle pas…

L’enfant - Qui est-ce que tu veux cacher ? Où sont-elles ?

Inès - Ne me criez pas dessus, je ne sais pas, il y a tellement longtemps…

L’enfant - Que quoi ?!

Maître de Cérémonie - Il y a un mystère ! La vieille cache quelque chose.

L’enfant - Dites-moi tout ou je vous tue, je vous jure que je vous tue !

44
Inès – Oui ! S’il vous plait, oui ! Tuez-moi.

L’enfant - Dites-moi la vérité, merde !

Inès - Tuez-moi !

L’enfant - Parlez bordel !!


PAUSE

Inès - La vérité ?
Comme c’est curieux ce mot… La vérité… la vérité selon qui ?
Mon esprit oublie des choses mais se souvient plus encore, jeune homme…
Vous voulez ma vérité ?
Sachez que la seule histoire que je puisse vous raconter est un mensonge.
C’est quelque chose qui, à un moment donné, s’est créé dans ma tête.
Et que cependant je prends pour la vérité.
Croyez-moi, je vais vous dire la vérité.
Personne ne pourra y croire.
Incroyable et superbe histoire.
Que personne ne va croire.
La vérité.

45
25. Les surprenantes Lituaniennes

Inès - Nous vivions en Lituanie… vous connaissez ?


Jeune homme, nous venons d’un pays qui n’existe plus maintenant
Et s’il existe encore je ne me rappelle plus.

Clara et Inès - Un jeune homme a proposé le mariage à Marta.

Inès - La petite Marta…


La plus jeune des trois.
Ils se marièrent et achetèrent une maison, celle-ci.

Marta - Vous pouvez venir vivre avec nous, la maison est grande.

Inès - Et ce fut ainsi.


Ensuite… avec le temps.
La petite Clara.
La plus jolie des trois
nous a surpris.

Clara - Je suis enceinte.

Marta et Inès – Comment !?

Clara - De ton mari, Marta.

Marta et Inès – Comment ?!


PAUSE

Inès - Et c’était tout, le pire de tout. Ensuite les choses se sont passées simplement,
normalement, comme elles se passent d’habitude dans ces cas-là. Marta a tué l’enfant de
Clara, elle l’a tué dans le ventre de la petite Clara, pendant que le mari de Marta, le père
du fœtus mort et amant de Clara s’enfuyait pour ne plus jamais revenir. Combien de
temps à passé…

Marta et Clara - Quarante ans.

Inès - Quarante ans ont passé. Pendant vingt ans Marta a été… comment dire…
retardée, autiste, muette, immobile, comme absente d’elle-même. Il fallait tout faire en
fonction d’elle, manger, vivre, respirer.

Marta et Clara - Quarante années suspendues au bord du temps

Inès - Pendant quarante ans la petite Claire a été énervée, très très énervée, tous les
jours de mauvaise humeur, et de pire en pire chaque jour, furieuse contre Marta, contre
moi, avec ce qui lui restait de vie.
Vingt années suspendues au bord du temps.
Confinées dans mes seuls soins.
Et moi confinée dans leurs besoins.
Je vivais selon leurs désirs.

46
PAUSE

Vous connaissez le jardin botanique ?


C’est un endroit magnifique.
C’est ce qu’on dit.
Moi, je ne me rappelle pas.
Un jour je suis rentré à la maison après avoir fait une promenade par là-bas
Et je les ai trouvé toutes les deux.
Mes deux sœurs figées sur leur chaise.
Figées.
Mortes.
PAUSE
Elles ont laissé un mot.
Moi qui les avais choyées pendant vingt années entières je ne méritais qu’une
répugnante lettre d’adieu.

POUR INES

Marta – Où serais-je à quatre-vingts ans ?


Clara – A quatre-vingt-dix ans.
Marta et Clara – Qu’en sera-t-il de nos vies alors ?
Clara – Cela parait si loin et c’est si proche.
Marta – J’ai toujours rêvé que quand j’arriverai à mes vieux jours, pour ainsi dire, je
serais dans un fauteuil à bascule, assise devant la cheminée, tricotant, avec des petits-
enfants et des arrières petits-enfants.
Clara – Un jour j’aurai tout cela ? Je ne demande pas une grande demeure, ni la
fortune, pas même la santé, rien. Seulement ce rêve… et ce n’est pas tellement.
Marta – Des petits-enfants, des arrières petits-enfants… j’aime les enfants.
Clara – J’ai toujours rêvé…
Marta – Qu’en sera-t-il de mes rêves quand j’aurais quatre-vingt ans ?
Clara – A quatre-vingt-dix ans
Marta – J’aime les enfants. J’aurais toujours aimé en avoir un.
Même si ce n’était pas le mien… un neveu…
Clara – Non ! Un neveu, non ! J’aime les enfants s’ils sont à moi.
Marta et Clara – C’est drôle comme les choses oscillent pendant un temps et ensuite
disparaissent. Nous avons eu l’opportunité et nous l’avons laissé passer.

UN BAISER
ET ADIEU
MARTA ET CLARA

Une saloperie de lettre immonde, inouïe.


Il n’y a qu’elles qui comptaient.
Moi aussi j’aurais toujours voulu avoir des enfants
Mais il n’y a qu’elles qui comptaient.
Elles sont mortes sans souffrir
Mais moi je vis pour souffrir à leur place.
Elles sont mortes d’une bonne façon.
C’était une bonne façon de mourir…

47
Une histoire véritablement immonde, une saloperie incroyable…
Et lui ? Je n’ai jamais su ce qu’il était devenu.
Le père du fœtus assassiné.
Une fois j’ai entendu quelqu’un dire qu’il s’était remarié
mais que son épouse est morte.
Et après cela il s’est encore remarié
et cette fois ils sont morts tous les deux.
Assassinés par leur propre fils.
Brûlés vifs par leur fils…
J’aime à penser que c’était la vengeance du fœtus assassiné.

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26. Le spectacle

Inès - Mais je ne me rappelle pas et je préfère ne pas me rappeler.


J’ai préféré tout oublier.
Et je ne me souviens de rien.
Comment m’avez-vous dit que vous vous appeliez mon enfant ?

L’enfant - Espèce de vieille garce ! (Il l’attrape au col)


Je t’ai dit de ne pas me traiter d’enfant !

Maître de Cérémonie - Tue-la ! Tue-la !

L’enfant - La ferme, j’ai une meilleure idée (Il rit tandis qu’il lui serre le cou)
Alors comme ça tu voudrais avoir un enfant ?

Maître de Cérémonie - Qu’est-ce que tu vas faire ?

L’enfant - Je vais lui faire un enfant.

Maître de Cérémonie - Ne soit pas dingue !

L’enfant – La ferme ! Cette vieille salope va servir à quelque chose.

Journaliste - (De l’extérieur) Ouvrez ! Salut ! C’est la presse !

Maître de Cérémonie - La police.

L’enfant - Vieille salope, tu vas m’aider à agrandir mon armée, n’est-ce pas ?
(Inès essaie de crier, mais c’est impossible, elle manque d’air)

Journaliste - Ouvrez ! Nous voulons filmer, rien de plus ! Cela peut vous être utile !
On peut négocier.

Maître de Cérémonie - La police espèce de con, foutus, on est foutus.

L’enfant - (Il baisse son pantalon et soulève la jupe d’Inès)


Maintenant tu vas voir ! Tu voulais un enfant ! Dis un peu « enfant » maintenant !
Allez ! Prend ça ! (Il commence à la pénétrer. Inès crie)

Journaliste - On va défoncer la porte!

Maître de Cérémonie - T’es cinglé, fils de pute ! T’es complètement cinglé.

L’enfant - (Il lui parle tout en la pénétrant) Je vais t’engrosser d’un magnifique enfant,
comme moi, dis « enfant » salope ! Dis-le !

(La journaliste entre avec une caméra et peut-être le caméraman)

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Journaliste - Incroyable mesdames et messieurs ! La scène à laquelle nous assistons est
incroyable… Ce que nous avons pris jusqu’à présent pour une bande organisée ou une
armée, n’est finalement rien d’autre qu’un jeune mineur qui, en ce moment même, est
en train de violer une vieille femme, en direct et en simultané sur notre chaîne, une
vieille décrépite qui est peut-être, attention, la propriétaire des lieux.
Nous allons tenter de parler avec eux.
(A l’enfant) Salut, pourriez-vous nous dire votre nom ?

L’enfant - TNT

Maître de Cérémonie - Tri Nitro Toluène

L’enfant - Ton N’enfant Terrible

Journaliste - Nous pouvons les voir en ce moment crucial, et nous ne savons pas ce qui
peut arriver ici…

L’enfant - (A la journaliste tout en continuant de pénétrer Inès) Toi, filme et ferme-la.


Que ça serve d’exemple. Et toi (à Inès) tombe enceinte ou meurt.

Maître de Cérémonie - Il est fou ! Personne ne m’écoute ? Faites quelque chose !


Fou à lier !

L’enfant - Je vais t’engrosser maintenant et dans neuf mois tu auras un bel enfant que tu
vas élever et éduquer pour que, dès qu’il sera assez grand, il te brûle vive ou te tire une
balle ou t’empoisonne et qu’ainsi il devienne le fidèle portrait de son père.

Journaliste - (S’approchant d’Inès)


Madame, voulez-vous dire quelque chose pour les caméras ?

Inès - (Avec difficulté, entre des gémissements de douleur et de plaisir)


J’ai toujours aimé les enfants.

L’enfant - Ne me traite pas d’enfant.


( Et il lui donne une gifle tout en continuant à s’éreinter)

Maître de Cérémonie - Il faut que tu arrêtes! Arrête je te dis. Si tu as un enfant tout va


s’arrêter. Il ne peut pas se passer ça dans cette maison. Tu ne te rends pas compte ? C’est
un piège, tout ça c’est un piège, ils veulent nous détruire. Si tu as un enfant, je ne
pourrais pas être dans son cerveau, je vais disparaître et toi aussi. Je t’en prie, on va
disparaître dans cette maison. Tu ne comprends pas ? Comme c’est arrivé aux vieilles
avant, comme le fœtus assassiné… on veut nous tuer ! Ne lui fait plus rien ou nous
disparaîtrons tous dans cette maudite maison ! Arrête avec ça je t’en prie, arrête une fois
pour toute.

L’enfant - Tu veux que j’arrête ? Comme tu voudras…

50
Journaliste - Maître - Je t’en prie, ne fait pas de conneries.
Inès - Marta! Marta! Je vais avoir un enfant.
Des images exclusives que vous ne Marta - Un enfant?
pouvez apprécier que sur notre chaîne. L’enfant - Ferme-la tu m’empêches de me
Une page de publicité.
concentrer.
Ne quittez pas vos fauteuils car après
Clara - Tu ne peux pas nous faire ça Inès.
notre journal vous verrez le film de la
semaine. Avec une proposition plus Maître - Tu es train de nous tuer ! Tu dois croire
qu’intéressante, comme sait toujours ce que je te dis.
vous offrir notre chaîne. L’enfant- Tu ne me laisses pas me concentrer
merde ! Ça ne veut pas venir.
Et n’oubliez pas d’appeler et de participer Inès - Qu’elle heure est-il?
à notre vote. Marta- Midi.
Inès tombera-t-elle enceinte ?

SE
Clara - C’est l’heure des médicaments Inès.
0900-6969 pour le OUI
Inès - L’heure des médicaments.
0900-6666pour le NON
Participez pour gagner un téléviseur de L’enfant - Prend ton médicament! Prend-le.
29 pouces. Inès - Ah, oui! Oui!
A tout de suite… Clara - Vous allez la tuer!
Maître - Tu vas nous tuer, ne fais pas l’enfant.
Marta- L’enfant !

51
LES LUMIERES
S’ETEIGNENT
TANDIS QUE
INES ET L’ENFANT
CRIENT
DE PLAISIR
JUSQU’AU BOUT.

52
FIN DE LA PIECE
UN PEU D’EPILOGUE

27. ALEXIS

(Dans le noir, il se souvient de ceci)

Superbe ! Je dirais.
Impressionnant !
je dirais
Je ne
peux pas
le
croire !!!
(rire)

C’est une de ces histoires


que moi j’appellerais
que j’appellerais moi
Je ne peux pas le croire !!
(rire)

D’où ?
De la télé.
Je m’informe de tout à la télé.

53
28. FIN - Chanson pour le petit manège qui tourne lamentablement
(« Floricanto » ; de Lhasa)

Mi corazón sufre y se llena de enojo


solo una vez se nace, una vez se es un hombre
una vez se ama, pues de una vez por siempre
ese es mi destino, vivir según su antojo

Si aún por breve tiempo estuvieras a mi lado


envuelto en mi rebozo, suspenso en mis besos
dejando a tu cuidado entre flores olvidado
si aún por un momento estuvieras a mi lado

Que todos nos vamos y


desparecemos en su
que todos nos vamos y
desaparecemos en su
casa

Mi corazón sufre porque también se acaba


suspira por la vida y marcha hacia la nada
su dominio es dudoso, su deber peligroso
sus nervios y su voz y su orbita prestados

¡Ay! así hacen las cosas


ondulando donde vida no
y así hacen las cosas
ondulando donde vida
no hay

Del todo nos vamos y desaparecemos en su…


Del todo nos vamos y desaparecemos en su casa.
¡Ay ! así hacen los cosas ondulando donde vida no…
Y así hacen los cosas ondulando donde vida no hay

Canción “Floricanto”
Perteneciente a la cantante México- americana Lhasa De Sela.
Pertenece a su álbum “La Llorona”

Mon coeur souffre et se remplit de colère


On ne nait qu’une fois, on est homme qu’une fois
On aime qu’une fois, une fois pour toute
C’est là mon destin, vivre selon sa fantaisie

Si seulement pour un instant tu étais à mes côtés


Serré sur mon sein, suspendu à mes baisers
Laissant tes soucis oubliés parmi les fleurs
Si seulement pour un instant tu étais à mes côtés

54
Car tous nous allons et
disparaissons en sa
Car tous nous allons et
disparaissons en sa
maison

Mon coeur souffre parce que lui aussi a une fin


Il soupire après la vie et marche vers le néant
Son domaine est incertain, son devoir périlleux
Ses nerfs sa voix et son espace périssables

Ahi ! Ainsi vont les choses


Qui ondulent où la vie
Ainsi vont les choses
Qui ondulent où la vie
n’est plus

FIN DU PEU D’EPILOGUE

Abril 2002 Enero 2003


Gabriel Calderón
Montevideo Uruguay

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