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TSANSONNIER

DES

»K<rOSOE E M H O S , S£>V r. E T AVEÎ1ÎKI6E.

! c h u n t , c'e*î te bfuirna <b Panas.


(Lyre sarutdiennt.)

QUEBEC, '
PRÉFACE
*,
B E I.A r RI" MI ERE ECJTIOÎf.

A NOS CONFRÈRES.

Souvent, clans les loisirs de nos con-


gés et surtout dans nos joyeuses réu-
nios&devacances, nous croirions notre
joie bien incomplète si l'on ne fredon-
nait quelque chanson, dont nous répé-
tons bruyamment les refrains. Nous
aimons à chanter, et, sous ce rapport,
nous sommes Français. Malheureu-
sement les chansons nous font souvent
défaut. Il est vrai que, outre les
chansonniers étrangers, il existe plu-
sieurs recueils imprimés en Canada ;
mais ordinairement, et pour cause,
ces chansonniers sont saisis à la douane
ila cojléga, p,t force nous est de nous
' les procurer in fraudem legis, ou de
nous contenter de quelques chansons
mal copiées à la dérobée.
C'est pour remédier à d'aussi graves
inconvénients, que nous commençons
aujourd'hui la publication du Chan-
sonnier des Collèges, où nous tâcherons
de réunir toutes les ehansr.ns que nous
croyons les plus propres à charmer-nos
loisirs. Nous osons espérer que ce pe-
tit recueil, muni de tous les passeports
nécessaites, jsaryiendm^bientôt à tous
les écoliers, non pas tout-à-fait exempt
de tout droit, ruais moyennant la mo-
dique somme de DEUX Sous par li-
vraison.
Que de plaisir pour D E U X SOUS !
DES

COLLEGES.

CHANSON CANADIENNE.
AIR : Ah,' quelle, quelle inquiétude.'
Sol Canadien, terre chérie !
Par des braves tu fus peuplé ;
Ils cherchaient loin de leur patrie,
Une terre de liberté.
Nos pères, sortis de la France,
Etaient l'élite des guerriers,
Et leHrs enfants de leur vaillance
N'ont jamais flétri les lauriers.

Qu'elles sont belles nos campagnes !


En Canada qu'on vit content !
Salut, ô sublimes montagnes,
Bords dn superbe Saint Laurent.
Habitant de cette contrée
Que nature veut embellir,
Tu peux marcher tête levée :
Ton pays doit t'enorgueillir.
Respecte la main protectrice,
D'Albion, ton digne soutien ;
Mais fais échouer la malice
D'ennemis nourris dans ton sein*
Ne fléchis jamais dans l'orage :
Tu n'as pour maître que tes lois.
Tu n'es point fait pour l'esclavage ;
Albion veille sur tes droits*
Si d'Albion la main chérie
Cesse un jour de te protéger,
Soutiens-toi seule, ô ma patrie !
Méprise un secours étranger.
Nos pères, sortis de la France,
Etaient l'élite de» guerriers,
E t leurs enfants de l e u r vaillance
Ne flétriront pas les lauriers.
ISIDOEE BEDAED.

H <7 </'-?</
LA P A R I S I E N N E . '
Ara : Peuple buveur, ami du verre-
Peuple Français, peuple de Mares,
La liberté rouvre ses bras.
On nous, disait : Soyez esclaves !
Nous avons dit : Soyons soldats, !
Soudain Paris, dans sa mémoire,
A retrouvé son cri de gloire :
E n avant, marchons
Contre leurs canons ;
A travers le fer, le feu, les bataillon»,
Courons à la victoire.
3

Serrez vos rangs, qu'on se soutienne !


Marchons ! chaque enfant de Paris,
De sa oartouche citoyenne,
Fait une offrande à son pays.
O jour d'éternelle mémoire !
Paris n'a plus qu'un cri de gloire :
E n avant, & c

La mitraille en vain nous dévore :


Elle enfante des combattants.
Sous les boullets voyez éclore
Ces vieux généraux de vingt ans.
O jour d'éternelle mémoire !
Paris n'a plus qu'un cri de gloire :
E n avant, &c.

Pour briser leurs masses profondes,


Qui conduit nos drapeaux sanglants ?
C'est la liberté des deux mondes;
C'est Lafayette en cheveux blancs.
O jour d'éternelle mémoire !
Paris n'a plus qu'un cri de gloire :
E n avant, &c.

Les trois couleurs sont revenues,


E t la colonne avec fierté
Fait briller à travers les nues
L'ar-en-ciel de la liberté.
O jour d'éternelle mémeire !
Paris n'a plus qu'un cri de gloire:
E n avant, &c.

Soldat du drapeau tricolore.


D'Orléans ! toi qui l'as porté,
Ton sang se mêlerait encore
4

A oelui qu'il nous a c o û t é .


C o m m e a u x beaux jours de notre histoire.
T u rediras c e cri de gloire :
E n avant, & e .

T a m b o u r s , du convoi de n o s frères
R o u l e z l e funèbre signal j
E t nous d e lauriers populaires
Chargeons leur cercueil triomphal.
O temple d e deuil et de gloire !
P a n t h é o n , reçois leur m é m o i r e !
Portons-les, marchons,
D é c o u v r o n s nos fronts.
S o y e z immortels, vous tous que nous pleurons,
M a r t y r s de la victoire !
CASIMIR DEILAVOUE.

L A MARSEILLAISE.

A I R : Entendez°vou$ noire, peitriv.

A l l o n s , enfants do l a p a t r i e ,
L e jour de gloire est arrivé •
Contre nous de la tyrannie
L ' é t e n d a r d sanglant est l e v é .
Entendez-vous dans les campagne»
Mugir c e s îoroces soldats 1
Ils viennent, jusque dans vos bras,
E g o r g e r vos iii-:, vo: ooinpijoes.
5

A u x firmes, eiteyens ; formez vos bataillons ,


M a r c h e z j qu'un sang impur abreuve vos sillon».
CHŒUR.
M a r c h o n s ; qu'un sang impur abreuve nos sillons.

Que veut cette horde d'esjclaves,


D e traîtres, de rois conjurés 1
Pour qui ces ignobles entraves,
C e s fers dès longtemps préparés 1
Français, pour nous, ah ! quel outrage !
Quels transports il doit exciter !
C ' e s t nous qu'on ose méditer
D e rendre à l'antique esclavage !
A u x armes, & c .

Quoi ! des cohortes étrangères


Feraient la loi dans nos,foyers !
Quoi ! des phalanges mercenaires
Terrasseraient nos fiers guerriers !
Grand D i e u ! les deux mains enchaînées,
Nos fronts sous l e j o u g se plairaient !
D e vils despotes deviendraient
Arbitres de nos destinées !
A u x armes, & c

Français, 6 guerriers magnanimes !


Portez ou retenez vos coups :
Epargnez ces tristes victimes,
A regret s'armant contre vous ;
Mais ces despotes sanguinaires,
Mais les complices de Bouille,
T o u s ces tigres qui, sans pitié,
Déchirent le sein de leurs m è r e s . , .
A u x armes, & c .
6

Tremblez, tyran» ; et vous, perfide»,


L'opprobre de tous les partis,
Tremblez : vos projets parricides
Vont enfin recevoir leur prix. ,
Tout est soldat pour vous combattre :
S'ils tombent, nos jeunes héros,
L a France en produit de nouveaux,
Contre vous tout prêts à se battre.
Aux armes, Ssc.

Nous entrerons dans lu carrière,


Quand nos aînés n'y seront plus:
Nous retrouverons leur poussière
E t l'exemple de leurs vertus.
Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil,
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les suivre.
Aux armes, &c.
RoBSET DE l'ISLE.

L E S SOUVENIRS D'UN VIEUX MILI-


A
TAIRE.
Ain DU Vieux Sergent.

Te souviens-tu, disait un capitaine


Au vétéran qui mendiait son pain,
Te souviens-tu qu'autrefois dans la plaine
Tu détournas un sabre de mon sein ?
Sous le» drapeaux d'une mère chérie,
7

Tous deux jadis nous avons combattu.


Je m'en souviens : car je te dois la vie ;
Mais toi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
T e souviens-tu de ces jours trop rapides,
Où le Français acquit tant de renom ?
T e souviens-tu que sur les pyramides,
Chacun de nous osa graver son nom ?
Malgré les vents, malgré la terre et l'onde,
On vit flotter, après l'avoir vaincu,
Notre étendard sur le berceau du monde :
Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
T e souviens-tu que les preux d'Italie
Ont vainement combattu contre nous?
T e souviens-tu que les preux d'Ibérie
Devant nos chefs ont plié les genoux ?
T e souviens-tu qu'aux champs de l'Allemagne,
Nos bataillons, arrivant impromptu.
E n quatre jours ont fait une campagne ?
Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu î
T e souviens-tu de ces plaines glacées,
Où le Fraitçais, abordant en vainqueur,
Vit sur son front les neiges amassées,
Glacer son corps sans refroidir son cœur?
Ce fut alors qu'au milieu des alarmes,
Nos, pleurs coulaient ! Mais notre œil abattu
Brillait encor lorsqu'on courait aux armes :
Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu?

T e souviens-tu qu'un jour notre patrie,


Vivante encor, descendit au cercueil ?
E t que l'on vit dans' la France flétrie
Les étrangers marcher avec orgueil ?
s
G a r d e en ton creur ce j o u r pour le m a u d i r e ,
E t quand enfin B e l l o n e aura p a r u ,
Jamais on n'ait besoin d e te r e d i r e :
D i s - m o i , soldats, d i . i , t'en souviens-tu?
s m o

T e souviens-tu 1 1 . . mais i c i j e m ' a r r ê t e :


C a r j e n'ai plus de noble souvenir.
V i e n s , m o n a m i , viens-t'en dans m a retraite
A t t e n d r e en p a i x un meilleur a v e n i r ,
E t si la m o r t , planant sur m a c h a u m i è r e ,
M e r a p p e l a i t un repos qui m'est d û ,
T u fermeras doucement m a p a u p i è r e ,
E n me disant : S o l d a t , t'en souviens-tu ?
EMILE DEBKAUX.

O CANADA ! M O NPAYS !

C o m m e l e dit un vieil adage :


R i e n n'est si beau que son p a y s ;
E t de le chanter, c'est l'usage :
L e m i e n j e chante à mes amis-
L ' é t r a n g e r - v o i t avec un œ i l d'envie
D u S a i n t L a u r e n t le majestueux cours ;
A son aspect, le C a n a d i e n s'écrie :
O C a n a d a ! mon pays ! mes amou r s !

M a i n t s ruisseaux et maintes r i v i è r e s
A r r o s e n t nos fertiles champs ;
E t de nos montagnes a l t i è r e s ,
On voit de loin les longs pench.ar.l5.
Vallons, coteaux, forêts, chûtes, rapides :
De tant d'objets est-il plus beau concours 1
Qui n'aimerait tes lacs aux eaux limpides ?
O Canada ! mon pays ! mes amours !

Le Canadien, comme ses pères,


Aime à rire et à s'égayer.
Doux, aisé, vif en ses manières,
Poli, .galant, hospitalier,
A son pays il ne fut jamais traître ;
A l'esclavage il résista toujours,
Fît sa maxime est la paix, le bien-Être
Du Canada, son pays, ses amours.

O mon pays! de la nature


Vraiment tu fus l'enfant chéri ;
Mais l'étranger souvent parjure
En ton sein le trouble a nourri.
Puissent tous tes enfants enfin se joindre,
E t valeureux voler à ton secours !
Car le beau jour déjà commence à poindre,
O Canada ! mon pays ! mes amours !
G. E. CABTIEK.

fi %<fî
LE CITANT DU D E P A R T , 1794.

A I R : Pourquoi ces vains complots ?


VS D E P U T E DTJ P E U P L E .
La victoire en chantant nous ouvre la barrière î
L a liberté guide nos pas ;
E t du nord au midi la trompette guerrière
' A sonné l'heure des combats.
2
10
Tremblez, ennemis de la France,
Rois, ivres de sanjç et d'orgueil ;
L e peuple souverain s'avance,
Tyrans, descendez au cercueil.
L a république nous appelle :
Sachons vaincre, ou sachons périr.
Un Français doit vivre pour elle,
Pour elle un Français doit mourir.
U N E MEKJE D E F A M I L L E .
De nos yeux maternels ne craignez pas les larme^ :
Loin de nous de lâches douleurs !
Nous devons triompher quand vous prenez les
C'est aux rois à verser des pleurs, [armes ;
Nous vous avons donné la vie,
Guerriers, elle n'est plus à. vous ;
Tous vos jours sont à la patrie :
Elle est votre mère avant nous.
La république, &c.
D E U X VIEILLARDS.
Que le fer paternel arme la main des braves ;
Songez à vous au champ dé Mars ;
Consacrez, dans le sang des rois et des esclaves,
L e 1er béni par vos vieillards,
E t , rapportant sous la chaumière
Des blessures et des vertus,
Venez fermer notre paupière,
Quand les tyrans ne seront plus.
La république, &c.
"UN E N F A N T .
De Barra, de Viala le sort nous fait envie :
Ils sont morts, mais ils ont vaincu.
Le lâche accablé d'ans n'a point connu la vie ',
11

Qui meurt pour.Ie peuple a vécu.


Vous êtes vaillants, nous le sortîmes :
Guidez-nous contre les tyrans.
Les républicains sont des hommes,
Les esclaves sont des enfants.
La république, &c.
TEOJS GTJEHHIEBS.
Sur le fer devant Dieu, nous jurons à nos pères,
A nos épouses, à nos sœurs,
A nos représentants, à nos fils, à nos mères,
D'anéantir les oppresseurs." •
En tout lieu, dans la nuit profonde
Plongeant l'infâme royauté,
Les Français donneront au inonde
Et la paix et la liberté..
La république, Stc.
M . J . CHENIER.

A 8Vf9
CHANT DE MORT DES SPARTIATES.

A I R DU Chant du départ.
Recevez notre encens, vous que la Grèce adore,
Muses, chastes filles des cieux :
Car avant que la nuit sur nous descende encore,
La mort aura fermé nos yeux.
L e Mèdc altier partout s'avance,
E t , répété par les échos,
L'airain trouble au loin le silence
Qui couvre déjà nos tombeaux.
12

Guerriers, voilà l'heure qui sonne :


Là-basnous attend le trépas.
Vive à jamais Lacédémone !
Un Grec meurt, mais ne se rend pas.

Quoi ! le Mède insolent souille notre rivage,


Et des Grecs fuiraient devant lui !
Déesses, soutenez nos bras, notre courage :
Jamais fils de Sparte n'a fui.
Derrière nous sont nos compagnes,
Nos enfants, nos pères, nos Dieux,
Nos cités, nos riches campagnes
Et la gloire de nos ayeux.
Guerriers, &c.
O vous, qui des héros que ces bords ont vus naître
Aimez à chanter les exploits,
Vous direz : Ils n'ont point reconnu d'autre maître,
En mourant, que Sparte et ses lois :
Qu'au bord sombre, à sa voix dociles,
Le soir, au funèbre banquet,
Des défenseurs des Thermopyles,
Non, pas une ombre ne manquait !
Guerriers, &c.

L E S ADIEUX DE BERTRAND.

Avant de quitter le rivage


Où dort pour jamais le Héros,
Bertrand, près du rocher sauvage,
A sa tombe adresse ces mots :
C'est donc là que le Roi du monde
A vu ses beaux jours se flétrir !
13

S u r un roc, au milieu de l'onde,


L e destin le force à p é r i r !
A h ! donnons-lui, compagnons de sa gloire,
Seulement une larme, un regret par victoire,
E t plus que lui jamais Français
N ' a u r a c o û t é de pleurs et de regrets.

Lorsque sonna sa dernière heure,


U n nuage obscurcit mes y e u x ,
E t dans la céleste demeure
J'aperçus tous nos demi-dieux.
C e s preux que la F r a n c e regrette
Tendaient les mains à ce H é r o s ,
E t l a mort, planant sur sa tête,
Pleurait sur le coup de sa faux.
A h ! donnons-lui, & c .

Celui qui du haut des colonnes


F o r ç a i t les rois à se cacher ;
C e l u i qui donnait des couronnes,
P o u r tombe a le creux d'un rocher !
C e l u i que protégeait Dieu même,
H é l a s ! le vainqueur des vainqueurs,
T o m b é l o i n de son diadème,
N ' a plus d'autels que dans nos cœurs.
A h ! donnons-lui, & c

D u grand homme que j e regrette,


Refusant tout bienfait nouveau,
3
Je ne veux qu une violette,
Q u i croisse au pied de son tombeau.
A v e c m o i j ' c m p o r t e ses armes,
N u l mortel ne les touchera;
E n c o r couverte» de ses larmes
14.

- Son fils un jour les portera.


Ah ! donnons-lui, &c.
Adieu, dernier espoir des braves !
Le destin me dicte là loi
D'aller vivre au sein des esclaves
Qui jadis tremblaient déviait toi ;
E t quand viendra ma dernière heure,
Que l'on m'accorde dans ce lieu,
Près de ta tombé, un peu de terre :
C'est là mon seul et dernier vœu.
Ah ! donnons-lui, &e.

LA G U E R R E AMERICAINE, 1813.
AIR eu Soldat et tfHenri IV-
Baptiste, à la rieur de son âge,
De l'honneur suivant le sentier,
A la Fourche plein de courage,
Combattait comme un vieux guerrier :
La balle cruelle
Vient Patteiadre dan s le moment
Où la victoire est à nos vœux fidèle ;
Au champ d'honneur^ il meurt content.
Un autre aussitôt prend sa place,
Et moDtre la même valeur.
Le sort couronne son audace :.
De le suivre il a le bonheur.
Après la victoire.
Il chante et répète gaîment :
Quand on revient couronné par la gloire
Au champ'd'honneur, on vit content.
15

Jamais des hordes étrangères


N e régneront sur nos foyers :
Des nobles vertus de leurs pères
L e s Canadiens sont héritiers.
Dans notre province,
Ils se montrent toujours vaillants,
E t d'accourir pour leur pays, leur prince
A u champ d'honneur, toujours contents.

Nobles entants de celte terre


D é j à teinte de votre sang- !
Comme dans la p a i x , dans la guerre
i Q u e votre nom soit triomphant.
D e Mars le g é n i e
Vous inspire ses sentiments :
Toujours vainqueurs, enfants de ma patrie!
A u champ d'honneur, vivez contents.

L E R E V E I L DE L A POLOGNE.

1
E l l e se l è v e , elle appelle à la v i e ,
L a nation qu'on veut anéantir ;
D e son tombeau sort le peuple martyr,
E t l'aigle blanc plane sur Cracovie.
D e la Pologne invincible génie,
O liberté ! soutiens tes défenseurs.
Q u e devant toi tombe la tyrannie ;
G l o i r e aux martyrs, et mort aux oppresseurs !

A p r è s quinze ans ressuscite plu9 brave,,


Sublime élan ! ce grand corps mutilé ;
16

L e s rois bourreaux, qui le tenaient e s c l a r e ,


Sous son regard intrépide ont tremblé.

L e s rois tombaient, mais leur cœur se rassure.


N'ont-ils pas s û , vautours unis entre eux,
Depuis un siècle élargir la blessure
Toujours saignante à ce flanc généreux !

De l'héroïsme impérissable exemple !


Duel à mort et toujours renaissant !
Un contre trois !... l ' E u r o p e les contemple,
Sans mettre fin à. ce drame de sang.

T a noble lutte, hélas ! n'a pas d'issue :


T u le sais bien, et partout tu combats,
F i è r e Pologne, immortelle vaincue !
Que l'on enchaîne et qu'on ne dompte pas.

L a F r a n c e en vain rêve ta délivrance :


Quel bras fatal arrête son secours 1
Qui donc retient le grand cœur de la F r a n c e 1
Q u ' e s t devenu le peuple des trois jours 'l
LOUISE COI.ET.

NAPOLEON, L A PATRIE E T L'HONNEUR.

AIR D U Troubadour, ou : Miches cités.


Pour un Français, serait-il des entraves î
Interrogé, l'univers vous dit, Non,
17
J e m'enhardis, et l'aspect rte ces braVee
Me tiendra lieu des faveurs d'Apollon.
Au plus noble délire
Je cède, et sur ma lyre,
J e vais chanter les élus de mou cœur,
Napoléon, la Patrie et l'Honneur.

Napoléon a sauvé la Patrie :


Elle a donné le trône à ce guerrier.
Du double nœud qui tous deux les allie,
L'Honneur français est l'auguste ouvrier.
Soldats, votre courage
Garantit vofre ouvrage.
On est bien fort quand on porte en son cœur
Napoléon, la Patrie et l'Honneur.

Lorsqu'à l'appel que lui fait la Patrie,


Sans balancer, chaque jeune Français
S'arrache aux bras d'une mère chérie,
Qu'il craint, hélas ! de ne revoir jamais,
Qui peut, tendre nature,.
Appaiser ton murmure '{
Trois mots sacrés, que tu lis dans son coeur,
Napoléon, la Patrie et l'Honneur.

Lorsqu'au Français, vainqueur eu Mosôorie,


L'hiver jaloux livra.d'affreux combats,
Ii n'eut bientôt pour soutenir sa vie
Qu'un sang glacé par les âpres tri mats. ,
O transport électrique !
O feu vraiment magique !
Trois mots sacrés ont ré chauffé, son cosur,
Napoléon, la Patrie et l'Honneur.
18

De l'univers Architecte suprême,


Entends les vreux qu'en ce jour nous formons :
Qu'en Albion ton flamboyant emblème
De nos guerriers guide les bataillons,
E t que de la Tamise
P a r eux l'onde soumise,
Reporte aux mers ce cri libérateur,
Napoléon, la Patrie et l'Honneur.

L E S GIRONDINS.

(Chant révolutionrifiire. français, de fév: 1 S 4 8 , )

Par la voix du canon d'alarmes,


L a France appelle ses enfants j
Allons, dit le soldat, aux armes i
C'est raa mère, j e la. défends.
Mourir pour la patrie,
C'est le sort le plus beau, le plus digne d'envie.

N o n s , amis, qui, loin des batailles,


Succombons dans l'obscurité,
Vouons du moins nos funérailles,
A la F r a n c e , à sa liberté.
Mourir pour la patrie,
C'est le sort le plus beau, le plus digne d'envie,
19

L A REVOLUTION DE FEVRIER.

O France, une éternelle gloire


Va rendre ton nom respecté.
Arborons, en criant victoire,
L'étendard de la liberté.
Formons une garde civique,
L e peuple est roi de ta cité. ,
Vive la république !
Vive la liberté !

Dé fenseurs de la paix publique,


Si la patrie est en danger,
Il faut que notre république
Résiste au choc de l'étranger.
Formons, &c.

Aux armes, braves camarades :


La France a besoin de nos bras,
Et comme sur les barricades,
Soyons citoyens et soldats.
Formons, &c.

Liberté, toujours si féconde,


D'amour embrase donc nos cœur» j
Oui, tu feras le, tour du monde,
Comme autrefois nos trois couleurs.
Formons, &c.
20

fi
LE VIEUX SOLDAT.

A i n : Te souviens-tu.

" Ami fidèle, é c h o du DOIS S a u v a g e , .


" T o i , qui toujours sus répondre à ma voix,
Redis les maux qu'a soufferts m o n courage ;
" Retrace-les pour la d e r r i è r e fois.
" S a n s mil asile, après v i n g t ' a n s de guerre,
" N ' e s p é r a n t plus les dangers du combat,
" Seul j'habitai cet humble c o i n de terre,
" E n attendant la mort du vieux soldat.

" Lorsque jadis l'aile de la victoire


" A u x bords lointains portait nos étendards,
" Combien ce fer, étinoelant d e g l o i r e ,
" A v e c orgueil brillait à m e s regards !
" M ê m e aujourd'hui, partageant ma m i s è r e ,
" l i a gardé le feu de son é c l a t ,
c c
E t semble dire au chaume solitaire :
" Attendons-nous ia mort du vieux soldat ?

" V i e n s mon habit, que j e t'admire encore ;


" R é j o u i s - m o i de tes nobles couleurs.
" Pourquoi montrer la c r o i x qui te décore ?
" A son aspect je sens couler m e s pleurs.
" Q u a n d nous é t i o n s sur l e c h a m p de bataille,
" Le sort voulut qu'un boulet m'épargnât ;
" E t j e te v o i s , l à , sur un peu de paille,
" Attendre enfin la mort du vieux soldat !
21
u
Jours d'Austcrlitz, de Wagram, de Jeramape,
" Mon cœur palpite à votre souvenir.
i l
A h ! pardonnez-la plainte qui m'échappe :
" Depuis longtemps je n'ai plus d'avenir.
" Sur ce rocher, souvent baigné de larmes,
" Que j ' a i maudit et le traître et l'ingrat !
" Mais plus tranquille, appuyé sur mes armes,
" J'attends en paix la mort du vieux soldat ! "
Déjà la nuit remplaçait la lumière ;
Un voile épais couvrait l'azur des cieux.
Sa voix s'éteint ; il ferme la paupière . . .
Coteaux, vallons, ont reçu ses adieux !
Soudain alors, au sein du bois sauvage,
D'un coup de foudre, a retenti l'éclat...
E t , le matin, l'oiseau dans son ramage
Eut à pleurer la mort du vieux soldat !

L E C H A N T DE VICTOIRE DE
L'ESPAGNOL.

Des Maures les hordes impies


Ont renversé partout nos croix,
E t dans nos villes envahies
Le Prophète dicte ses lois.
Nobles enfants de Plbé rie.
Oui, vous direz tous avec moi :
Liberté pour notre patrie !
Tout pour Dieu, tout pour notre rbî t
22
Parmi des ruines ÎPnittanteS,
Ma mère expira sous leur coups ;
Elle embrassait leurs mains sanglantes,
Demandant grâce à deux genoux.
Ma mttin était trop faible encore,
Je ne pus venger son trépas ;
Mais à l'ennemi qu'il abhorre,
L'Espagnol ne pardonne pas.
Aux montagnes de l'Asturie,
Flotte encore un noble étendard :
Pelage, au cri de la patrie,
A mis la main sur son poignard.
O bonne Dame de Liesse !
Porte à Dieu nos humbles accents,
Et veille en ces jours de détresse
Sur l'Espagne et sur ses enfants !

Vole, ma cavale légère,


La gloire des champs Andalons !
Adieu, cendres de mon vieux père,
.Te vais combattre loin de vous.
Dieu le veut, mon pays l'ordonne :
Il faut tout quitter pour la foi.
J'entends le clairon qui résonne ;
Tout pour Dieu, tout pour notre roi !

L E HAUT E T L E BAS-CANADA.
A I K : De la pipe de tabac-
Enfin je connais l'Amérique,
Et j'ai vu les deux Canadas :
23

Je dis, sans craindre qu'on réplique,


Qu'au Haut j e préfère le Bas.
D'un côté la noire tristesse
Offre l'image du trépas :
De l'autre la pure allégresse
Fait du Haut distinguer le Bas.

L e matelot dans la tempête,


Perché sur la cime des mâts,
Dit qu'il perdra bientôt la tête,
S'il ne descend du Haut en Bas.
Vois ce palais mis en poussière
Par le tonnerre et ses éclats,
Et chante, en gagnant la chaumière,
Qu'il fait plus dur en Haut qu'en Bas.

Fuis le sommet de la montagne,


Séjour horrible des frimas ;
Choisis la fertile campagne,
E t laisse le Haut pour le Bas.
Vois l'oiseau qui, d'un vol rapide,
Cherche en chantant les doux climats :
Pour éviter le sol aride,
Vois-le voler du Haut en Bas.

Vois l'orme que, dans sa furie,


-Le vent agite avec fracas :
Son ombrage et l'herbe fleurie
Font au Haut préférer le Bas.
Ses rameaux sentent la secousse
Qu'à ses pieds je ne ressens pas :
Etendu sur un lit de mousse,
Je plains le Haut, j'aime le Bu».
24

Si d'un» étiquette à la mode


La loi règne dans un repas, -
De la table, d'un air commode,
Laissez le Haut, cherchez le Bas :
Là, frétillant sur votre chaise,
Livrez-vous aux plus doux ébats ;
Buvez, et chantez à votre aise
Que le Haut vaut moins que le Bas.
J. MEBMET,
Adjt : dtt régiment de Wattwille,

A V A N T TOUT JE SUIS CANADIEN.

AIR : De la pipe de tabac.


Souvent de la Grande Bretagne
On vante les mœurs et les lois ;
Par leurs vins, la France et l'Espagne
A nos éloges ont des droits ;
Admirez le ciel d'Italie,
Louez l'Europe, c'est fort bien :
Moi, je préfère ma patrie ;
Avant tout je suis Canadien.
Sur nous quel est donc l'avantage
De ces êtres prédestinés 1
En science, en arts, en langage,
Je l'avoue, ils sont nos aînés ;
Mais d'égaler leur industrie,
Nous avons chez nous les moyens :
A tous préférons la patrie ;
Avant tout soyons Canadiens.
25

"Vingt ans, les Français ds l'histoire


Ont oceupé seuls le crayon ;
Ils étaient fils do la victoire
Sons l'immortel Napoléon.
Ils ont une armée aguerrie,
Nous avons de vrais citoyens r
A tous préférons la patrie ;
Avant tout soyons Canadiens.

Tous les jours, l'Europe se vante


Des chefs-d'œuvre de ses auteurs :
Comme elle, ce pays enfante
Journaux, poètes, orateurs.
E n vain le préjugé nous crie :
Cédez le pas au monde ancien :
M o i , j e préfère ma patrie *
Avant tout j e suis Canadien.

Originaires de la France,
Aujourd'hui sujets d'Abion,
A qui donner la préférence,
D e l'une ou l'autre nation 1
Mais n'avons-nous pas, j e vous prie,
Encor de plus puissants liens 1
A tous préférons la patrie ;
Avant tout soyons Canadiens.

LE CANADIEN EXILE.

Un Canadien errant,
Banni de ses foyers,
26

Parcourait en pleurant
Des pays étrangers.
Un jour, triste et pensif,
Assis au bord des flots,
Au courant fugitif
Il adressait ces mots :
" Si tu rois mon pays,
" Mon pays malheureux,
" Va dire à mes amis
" Que je me souviens d'eux.
" Pour jamais séparé
" Des amis de mon cœur,
" Hélas I oui, je mourrai,
" Je mourrai de douleur.
" Plongé dans les malheurs,
" Loin de mes chers parents,
" Je passe dans les pleurs
" D'infortunés moments. "
A. LAJOIE.

4 ÎStt
LA FRANCE E S T BELLE.

La France est belle ;


Ses destins sont bénis :
Vivons pour elle ;
Vivons unis.
27
Passez les monts, passez les mers ;
Visitez cent climats divers :
Loin d'elle, au bout de l'univers,
Vous chanterez fidèle :
L a F r a n c e est belle, Sec.

Faut-il défendre nos sillons 1


Voyez cent jeunes bataillons
S'élancer, brûlants tourbillons,
Où la foudre étincelle !
L a F r a n c e est belle, & c .

De nos états jadis rivaux,


L e temps, aù prix de longs travaux,
Fonda, pour des siècles nouveaux,
L'unité fraternelle.
L a F r a n c e est belle, &c.

Maint peuple, sortant du sommeil,


Salue, à l'horizon vermeil,
L e s trois couleurs de ton soleil,
O reine universelle !
L a F r a n c e est belle, &c.

Bon ange, elle aime à pi'otéger


L e proscrit du bord étranger :
Il vit sans trouble et sans danger,
Murmurant sous son aile :
" L a F r a n c e est belle. ;
" Ses destins sont bénis :
" Vivons chez elle,
" Heureux bannis ! "
28
E t nous, ses fils, arec ardeur
Nous travaillons pour sa grandeur,
Offrant à Dieu, son créateur,
Des cœurs brûlants de zèle.
La France est belle, &c.

fi 3S / a .
LE RETOUR DANS LA PATRIE.

A I R : Suzon sortant de son village.

Qu'il va lentement le navire


A qui j ' a i confié mon sort !
Au rivage où mon cœur aspire,
Qu'il est lent à trouver un port !
France adorée I
Douce contrée !
Mes yeux cent fois ont cru te découvrir.
Qu'un vent rapide
Soudain nous guide
Aux bords sacrés où je reviens mourir.
Mais enfin le matelot crie :
Terre ! terre ! là-bas, voyez !
Ah ! tous mes maux sont oubliés.
Salut à ma patrie !

Oui, voilà les rives de France ;


Oui, voilà le port vaste et sûr.
Voisin des champs où mon enfanc»
S'écoula sous un chaume obscur.
France adorée !
Douce contrée !
29
A p r è s vingt ans, enfin je te revoie ;
De mon v i l l a g e
J e vois la plage ;
Je vois fumer la cime de nos toits.
Combien mon âme est attendrie !
L à furent mes premiers amours ;
L à , ma mère m'attend toujours.
Salut à ma patrie !

Loin de mon berceau, jeune encore,


L'inconstance emporta mes pas,
Jusqu'au sein des mers où l'aurore
Sourit aux plus riches climats.
F r a n c e adorée !
Douce contrée !
Dieu te devait leurs fécondes chaleurs.
Toute l'année,
L à , brille ornée
D e fleurs, de fruits, et de fruits et de fleurs-
Mais l à , ma jeunesse flétrie,
R ê v a i t à des climats plus chers ;
L à , je regrettais nos hivers.
Salut à m a patrie !

Poussé chez des peuples sauvages,


Q u i m'offraient de régner sur euK,
J'ai su défendre leurs rivages
Contre des ennemis nombreux.
France adorée !
Douce contrée !
T e s champs alors gémissaient envahis.
Puissance et gloire,
C r i s de victoire,
R i e n n'étouffa la v o i x de mon p s y s ,
30

D e tout quitter mon cœur me prie :


Je reviens pauvre, mais constant.
U n e bêche est l à qui m'attend.
Salut à ma patrie !

A u bruit des transports d'allégresse,


Enfin le navire entre au port.
Dans cette barque où l'on se presse,
Hâtons-nous d'atteindre le bord.
France adorée !
Douce contrée !
Puissent tes fils te revoir ainsi tous !
Enfinj'arrive,
E t sur la rive
Je rends nu ciel, je rends g r â c e à genoux ;
Je t'embrasse, o terre chérie !
Dieu ! qu'un exilé doit souffrir !
M o i , désormais j e puis mourir.
Salut à ma patrie !
BEBANGES.

L E S LANCIERS POLONAIS.

A m ; Ici commence ton voyage^

Dans l a froide Scandinavie,


D u héros retentit le nom ;
Soudain la Pologne asservie
S e lève pour Napoléon.
I l avait brisé les entraves
D e ce peuple ami des Français,
E t la France au rang de ses brave»
Compta les lanciers polonaif.
31

S a n s regret quittant leur patrie»


P o u r N a p o l é o n les guerriers
V o n t au fond de l a S i b é r i e
Cueillir des moissons de lauriers-
Partout la gloire les appelle ;
Ils volent à de b e a u x s u c c è s ,
Kt p a r t o u t l a g l o i r e e s t fidèle
A u x braves lanciers Polonais.

Q u a n d la fortune trop volage


E t la plus noire trahison
E n s e m b l e ont t r a h i le c o u r a g e
D e notre grand N a p o l é o n ,
I l fitj e n d é p o s a n t l e s a r m e s .
D e tristes a d i e u x a u x F r a n ç a i s ,
E t l'on vit r é p a n d r e des larmes
A u x braves lanciers Polonais,

N a p o l é o n , l'âme attendrie,
L e u r dit, dans c e cruel moment :
K e t o u r n e z dans votre patrie,
Je vous remets votre serment,
n c r o y a i t , dans son triste asile,
N ' ê t r e suivi que des F r a n ç a i s ;
M a i s il trouve e n c o r dans son î l e
C e s braves lanciers Polonais.
O v o u s q u ' à nos b e l l e s j o u r n é e s
L a g l o i r e a fait p a r t i c i p e r ,
P o l o n a i s , de vos destinées
L e c i e l enfin doit s ' o c c u p e r .
M a i s fussiez-vous dans les alarmes,
A m i s , nous n'oublierons jamais
Q u e nous avions pour frères d'arme»
L e s braves lanciers Polonais.
5
LE VIEUX MAKIN.

U n vieux marin, dans le port de M a r s e i l l e ,


De soa vaisseau, redisait aux passants :
Approchez-vous du brave aux cheveux blancs*
A u port la frégate appareille.
V e n e z avec moi ;
S o y e z sans effroi:
Quand j e ferme un œil, l'autre veille.
J'ai sur l'océan
N a v i g u é trente aus ;
L e s rhers m'ont vu combattre les Anglais ;
.T'ai fait la guerre aux T u r c s , a u x Portuguais ;
Toujours pour l'honneur du pavillon français.

A Trafalgar, j ' a i vu le jour horrible,


Sur le vaisseau que commandait L u c a s ;
E t de Nelson le glorieux trépas
F u t lancé par ma main terrible \
E t sur le V e n g e u r ,
Tout couvert d'honneur,
Je coulais à fond l'Invincible.
J'ai sur l'océan, & c .

J'ai d'Aboukir vu l e s p l a g e s b r û l é e s ;
J'ai combattu sur le T i m o l é o n ,
Quand d'Alténas le grand Napoléon
Chassait des troupes désolées.
Bien avant cela,
Sur le C a Ira,
T r o i s jours je fus dans la m ê l é e .
J'ai sur l ' o c é a n . & c .
33

A
L E SOMMEIL DU G R A N D HOMME.

Il dovt ! ce héros dont la gloire


V e r r a la fin de l'avenir !
Il dort ! on entend la Victoire
L e rappeler par un soupir.
Tous avec moi versez des larmes,
Guerriers, que respecta la mort ;
C a r vous direz, posant vos armes :
I l dort ! il dort !

I l dort ! hélas ! il faut le dire,


Pour ne se réveiller jamais !
I l dort, et Clio va redire
Quel fut pour lui le nom français.
Oui, c e beau nom, vous dira-t-clle,
Pourrait ê t r e terrible e n c o r . . . .
Mais le héros que j e rappelle,
I l d o r t ! il dort!

I l dort ! et sa t ê t e repose
S u r les lauriers dus au vainqueur.
Il dort ! et son apothéose
S e grave au temple de l'honneur.
Tous avec .moi, versez des larmes,
Guerriers, que respecta la mort ;
C a r vous direz, posant vos armes :
I l dort ! il dort !
N. Al'BIN.
3-t

LE CITOYEN.

A I R : Bons habitants du village.

Mon enfant, tu voudrais comprendre


C e qu'on entend par citoyen :
L e s livres n'ont rien à t'apprendre ;
F e r m e - l e s , ils n'en disent rien.
Vois travailler sous ma fenêtre
Ce charron ; rcgardc-lc bien.
Il ne commit que Dieu pour maître :
V o i l à , mon fils, un citoyen.

Vieux débris de la vieille a r m é e ,


Il vit tomber nos défenseurs ;
Il pleura la gloire éclipsée.
E n espérant des jours meilleurs ;
Soudain la liberté l'appelle.
L e canon gronde : il est soldat ;
Il fait plus que mourir pour elle :
Il conduit ses fils au combat.

Enfants, dit-iï, c'est la patrie


Qui dans nos mains remet son sort :
Honte à qui ménage sa vie !
Enfants, la victoire ou la mort !
Des larmes sillonnaient sa joue ;
Il combattait, couvert de sang,
E t foulait aux pieds, dans la boue,
L'étendard brisé du tyran.
35
î l revient, après la v i c t o i r e .
T r a v a i l l e r avec ses enfants.
Q u e de noms inscrits dans l'histoire
N e valent pas ces pauvres gens !
C o m m e e u x , ne sers que la pairie :
L a gloire est tout, l'argent n'est rien,
P o u r qui sait honorer s a vie
P a r les vertus du c i t o y e n .

C e l t e horreur de la tyrannie,
C e mépris d'un v i l i n t é r ê t ,
C e noble amour de la patrie,
Sont-ils dans le cœur d'un sujet ?
L ' o r g u e i l d'un maître est la limite,
Q u ' i l ne peut franchir vers le bien ;
S o n âme étroite est trop petite
P o u r les vertus du citoyen. ^

A NAPOLEON L E GRAND.

A m i s , célébrons la naissance
D ' u n héros digue de ce nom.
Livrons-nous à la jouissance :
J e vais chanter N a p o l é o n ! ! !
Ouvrons nos cœurs à l'allégresse ;
Oublions nos m a u x un moment ;
Peut-on songer à la tristesse
E n chantant ce refrain charmant 't
T o u t g r a n d homme eut son é g a l ,
S o n émule ou son rival ;
M a i s au temple de mémoire
36

Jamais près d'un autre nom


L a déesse>de la G l o i r e
N'inscrira Napoléon.

Sur les pas de Koroe et de Sparte


L a France avait lancé son cliar.
Alors s'ouvrit pour Bonaparte
L a route où s'égara C é s a r :
M a i s plus prudent, sa main habile,
A u x yeux surpris de l'univers,
Rend du char la marche facile,
Malgré mille obstacles divers.

Soudain la trompette guerrière


P r è s du N i l attire ses pas :
L e char en paix suit sa carrière ;
L u i , vole à de nouveaux combats.
L i v r é s sans frein à leurs caprices,
Bientôt les chevaux ombrageux
S'emportent, vers des précipices
Tournent leur cours impétueux.
L a France, à deux pas de l'abîme,
Jette un cri : le héros l'entend ;
Il vient, plus grand, plus magnanime,
O ù l'immortalité l'attend ;
D'un bras nerveux saisit les rênes,
Des coursiers suspend la fureur,
E t leur montre au loin dans les plaines
L e chemin qui mène à l'honneur.
L e char, guidé par son génie,
V o y a g e avec sécurité ;
Mais d'Albion la jalousie
Veut troubler sa félicité.
37
L ' o r , les manœuvres^iiurigantes
Du Nord assemblent les soldats ;
Bientôt leurs masses mugissantes
Menacent nos heureux climats.

T r e m b l e z : N a p o l é o n s'avance.
Son calme inspire la terreur;
L a mort au combat le devance :
T e l est l'ange exterminateur.
Sur le rivage asiatique
Tl dissipe les bataillons,
T e l Eo!e aux déserts d'Afrique
Route le sabie en tourbillons.

On lui comparait Alexandre ;


Mais Callisthènes mutilé
Suffit pour en flétrir la cendre.
César Peut peut-être égalé 'i
C é s a r désola sa patrie :
L u i , l'illustra par ses succès.
C é s a r haï, perdit la vie :
L u i , vit chéri des bons Français.

MA PLACE E S T LA-BAS J

A I R : Mon pays m'appelle.

M è r e é c o u t e z . . . le canon t o n n e . . .
Ce bruit retentit dans mon cœur.
Songez que c'est la mort qu'il donne,
L a mort qui répand ia terreur.
38

Pour l'honneur de notre patrie


Un seul peut décider du sort ;
A d i e u , ma mère, adieu, Marie :
Je vais chercher ou gloire ou mort !
L e tambour résonne,
E t le canon tonne ;
L e devoir l'ordonne :
Volons au trépas.
Déjà plus d'un frère
Meurt à la frontière . . •
A u revoir, ma mère :
M a place est là-bas !

L o i n de ma sœur et de ma m è r e ,
Comment vivrai-je désormais 1
Je v a i s , pensant à ma c h a u m i è r e ,
M e consumer en vains regrets.
Imitez-moi, prenez courage :
L à - b a s , du moins, au champ d'honneur,
L e souvenir de ce village
M e soutiendra dans mon malheur.
L e tambour, & c -

M è r e , voyez sur la montaçne


Les conscrits, victimes du sort,
. C o m m e moi, quittant la campagne
P o u r aller affronter la mort.
E m b r a s s e z - m o i . . . S é c h e z ces larmes ;
A u p r è s d'eux je me rends soudain.
L e pauvre Pierre prend ses a r m e s . . .
Il p a r t , et dit en son chemin :
L e tambour, & c .
39

L E SOLDAT E T L E BKRGER.

LE SOLDAT •

Vois-tu cette troupe guerrière


Déployer ses nobles drapeaux ?
Berger, laisse là ta chaumière,
E t ta houlette et tes troupeaux ;
Parmi les fils de la victoire
Viens briller d'un plus noble éclat ;
Quitte le repos pour la gloire,
Fais-toi soldat, fais-toi soldat.

LE BEEGEK.

Soldat, vois-tu ces eanx dociles


Suivre la pente du coteau ?
C'est l'image des jours tranquilles
Qui s'écoulent dans ce hameau.
Tes lauriers, arrosés de larmes,
N'offrent qu'un bonheur passager ;
L e nôtre est pur : quitte tes armes j
Fais-toi berger, fais-toi berger.

LE SOLDAT.

Qui 1 moi, déserter la carrière


Que Mars ouvre à ses favoris !
M'ensevelir dans la poussière,
Couvert d'opprobre et de mépris!
Lorsqu'à mon bras le ciel confie
L'intérêt sacré de l'état !
Mon sang est tout à ma patrie :
Je suis' soldat, je. suis soldat.
40
LE BERQER.

Des vrais'amis'l'heureux modèle.


E n tous lieux moa chien suit mes pas.
Guidés par ce gardien fidèle,
Mes agneaux ne s'écartent pas.
M a cabane échappe au tonnerre
Qui met les trônes en danger ;
Des rois que me fait la colère'?
Je suis berger, j e suis berger.

L E S O L D A T E T L E BON P A S T E U R .

Sold. O vous, bon pasteur du village


Q u e , bien jeune, j ' a i d é s e r t é ,
Je viens vous raconter l'usage
Q u e j ' a i fait de ma liberté.
L e malheur a courbé ma tête ;
M a i s , bon pasteur, ne craignez rien :
Je reviens pauvre, mais honnête . . •
Paat. Bien ! mon enfant, très-bien ! très-bien !
Oui, mon enfant, très-bien ! très-bien !

Sold. Vous le savez, j ' a i m a i s m a mère


Presque ou'ant que vous aimez Dieu,
E t c'est pour calmer sa misère,
Q u ' u n jour j ' a i dû lui dire adieu.
L o i n d'elle, hélas ! ne gagnant guère,
J'étais pourtant son seul soutien j
Mais vous savez . . . au cimetière . . .
Past. Oui, mon enfant, très-bien ! très-bien !
Mon pauvre enfant, très-bien ! très-bien'
41
Sold- Je restais donc seul sur la terre,
S e u l , sans famille et sans appui ;
Q u a n d , tout à coup, un cri de guerre
M e fit v o l e r a l'ennemi.
J'ai versé mon sang pour la F r a n c e ,
S a n s jamais lui demander rien :
Là-haut j ' a u r a i ma récompense . . .
Past. V i e n s dans mes bras, homme de bien :
Dieu, par ma v o i x , te dit : Très-bien !

1
LES HIRONDELLES. '

A I B : Non loin du palais de VAmire.

Captif au rivage du Maure,


U n guerrier, courbé sous ses fers,
Disait : Je vous revois encore,
Oiseaux ennemis des hivers.
Hirondelles, que l'espérance
Suit jusqu'en ces brûlants climats,
Sans doute, vous quittez la France :
D e mon p a y s , ne me parlez-vous pas 1

Depuis trois ans, j e vous conjure


D e m'apporter un souvenir
Du v a l l o n où ma vie obscure
S e berçait d'un doux avenir.
A u détour d'une eau qui chemirie,
A flots purs, sous de frais lilas,
Vous avez vu notre chaumine :
D e ce vallon ne me parlez-vous pas 1
42

L ' t r o e de vous peut-être es-tnée


A u loit où j ' a i reçu le j o u r ;
L à , d'une mère infortunée
Vous avez dû plaindre l'amour.
Mourante, elle croit à toute heure
E n t e n d r e le bruit de mes pas :
E l l e écoute et puis elle pleure :
C e son amour ne nie parlez-vous pas ?
^ BiiRANSEK.

S oi «"s
L A CHANSON DU BON P A S T E U R .

B o n s habitants du village,
P r ê t e z l'oreille un moment.
M a morale est douce et sage,
E t tonte de sentiment-
Vous saurez bien me comprendre :
C ' e s t mon cœur qui parlera.
Quand vous pourrez, venez m/entendre,
E t le bon Dieu vous bénira.

A u x vignes, dans les vendanges,


A u x champs., pendant les moissons,
D e Dieu chantez les louanges :
I l sourit à vos chansons.
Quand le plaisir dans la plaine,
L e soir vcus appellera,
Dansez gaîment sous le vieux chêne,
E t le boa Dien vous bénira.
4,3

Va eoidat que le froid glace,


L e soir vient-il à pas lents.
Vous demander une place,
P r è s de vos foyers brûlants ;
Sans connaître la bannière
Sous laquelle il s'illustra,
V i t e , ouvrez-lui votre chaumière,
E t le bon Dieu vous b é n i r a .

D e vos gerbes si nombreuses


P o u r moi ne détachez rien.
V o s familles sont heureuses :
L e u r bonheur suffit au mien.
M é n a g e z votre abondance
Pour celui qui pâtira ;
P a y e z la dîme à l'indigence,
E t le bon Dieu vous bénira.

Loin des cendres de sa m è r e ,


C h e z vous un pauvre e x i l é
D é v o r a i t sa peine a m è r e :
V e r s lui Dieu l'a rappelé.
Qu'importe, si sa prière
D e la vôtre différa ?
P r i e z pour lui, c'est votre f r è r e ,
E t le bon Dieu vous b é n i r a .

&
L E R E V E DU M O U S S E . ^

L ' a i r était froid, m a m i r e ;


O h ! comme il était froid!
44

L a brise était a m è r e
S u r la flotte du roi.
Mais au fond de mon âme,
Dans des flots de soleil,
Marseille aux y e u x de tome
Réchauffait mon sommeil;
Lorsqu'une blanche f é e .
D e vos voiles coiffée,
M'appelle au fond de l'eau :
Bonjour, m a n i è r e ; oh ! que mon r ê v e était beau !

t £
— V i e n s , disait votre image :
L ' e a u seule est entre nous-
T r o p vite ton jeune â g e ,
A quitté mes genoux j
V i e n s , que j e berce encore
T e s r ê v e s de printemps ;
L e s flots en font é c l o r e
Qui nous calment longtemps ! . . . "
E t mon âme étonnée
S e réveille entraînée
P a r les baisers de l'eau*
Bonjour, & c .

L a flotte dans les ombres


E n silence glissa ;
A v e c ses ailes sombres
Mon vaisseau s'effaça . . .
Sous sa lampe pieuse,
S a n s cesser de courir,
L a lune curieuse
M e regardait mourir*
45
Je n'avais plus de plainte ;
Trois fois ma voix éteinte
S'évanouit dans l'eau . . ,
Bonjour, &c*
C'en était fait du mousse,
Mère, sans votre voix ;
Sa clameur forte et douce
Me réveilla trois fois.
Sous les vagues profondes
Nageait en vain la mort :
Vos deux bras sur les ondes
Me poussaient vers le port,
Et votre âme en prière
Semait une lumière
Entre le ciel et l'eau.
Bonjour, &,c.

LA RECONNAISSANCE.

A I E : Pour trouver le parfait bonheur.

Vous qui de prêcher la raison


Avez contracté l'habitude,
Parmi les vices de renom,
Vous oubliez l'ingratitude.
L'on vante tant la probité,
L'on vante tant la bienfaisance,
Ah ! messieurs, ayez la bonté
D'y joindre la reconnaissance.
46
Dans ce beau siècle, où l'on a mis
L e s mots à la place des choses ;
O ù d'infaillibles beaux esprits
Prennent les effets pour les causes ;
Combien de fois n'a-t-on point v u ,
A u x jours nébuleux de la F r a n c e ,
Dénigrer l'honneur, la vertu,
E t surtout la reconnaissance t

L ' a m i dont le cœur g é n é r e u x


M ' a fait partager son aisance,
Sur mes destins moins malheureux
Verse plus d'une jouissance :
Il double le bien qu'il m'a fait
E n me tirant de l'indigence j
Je jouis d'abord du bienfait,
E t puis de ma reconnaissance.

MON V I L L A G E .

A I B : Batelier, dit Lisette.

Combien j e te regrette.
Beau ciel de mon pays,
E t toi, douce retraite,
Que toujours jo chéris !
Soleil qui fais é clore
L e s trésors de l ' é t é ,
Dois-tu me rendre encore
L » vie et ma gaîté I
47

Une erreur trop commune


Egara ma raison ;
Je rêvais la fortune
Et l'éclat d'un vain nom ;
Mais aujourd'hui plus sage,
D'un regard attendri.
Je cherche mon village
Et mon premier ami.
Vers cette heureuse terre
Qui me ramènera '{
Là repose ma mère ;
Mon ami m'attend là.
O pensers pleins de charmas i
Endormez ma douleur,
Et vous, coulez, mes larmes,
El soulagez mon cœur.
Une fleur étrangère,
Eu de tristes climats,
Sur sa tige légère
Cède au poids des frimas.
Jeune, ainsi je succombe,
Faible comme la fleur.
Ici, je vois la tombe ;
Là-bas est le bonheur.
Je veux, dès mon aurore,
Surpris d'un froid mortel,
Me réchauffer encore
Au foyer paternel.
Chaquejour ma patrie *
1
Charme mon souvenir-
Ijà, commença ma vie':
IA, je veux la finir.
48

LA P R I E R E D'UNE ORPHELINE.

J'entends dans nos montagnes


Le son du chalumeau,
Et déjà mes compagnes
S'assemblent sous l'ormeau.
Auprès de ma chaumière,
Seule je vais errer :
Las ! qui n'a plus de mère,
Ne songe qu'à pleurer.

Le chagrin dès l'enfance,


M'environna toujours ;
Mon père loin de France
Vit terminer ses jours.
Auprès de ma chaumière,
Seule je vais errer :
Car sans lui, sans ma mère,
Je n'ai plus qu'à pleurer.

J e ne trouve de guides
Que dans mon souvenir.
Des cieux où tu résides,
Daigne encor me bénir I
Auprès de ma chaumière
Où tu me vois errer,
Veille sur moi, ma mère.
Toi que j'aime à pleurer.
49

L ' H U M B L E TOIT DE MON P E R E .

On. vante ces palais, ces temples, ces trophées,


Que la belle Italie élève jusqu'aux cieux,
Et qu'on prendrait plutôt pour l'ouvrage des fée»,
Tant leur grandeur magique éblouit tous les yeux.
Moi pourtant je préfère
A. ce brillant séjour
L'humble toit de mon père,
Où je reçus le jour.
On vante les jardins de l'iieureuse Idumée,
Où le soleil répand ses plus riches couleurs,
Où d'éternels printemps à- la terre embaumée
Ne refusent jamais ni les fruits, ni les fleurs.
Moi pourtant je préfère
A ce brillant séjour
L'humble toit de mon père,
Où je reçus le jour.
Non, ce n'est pas à moi qu'ils pourront faire enrie,
Ces jardins, ces palais, dont l'œil est enchanté :
Dans les climats du nord, où j'ai reçu la vie,
J'ai autant de bonheur et plus de liberté :
C'est pourquoi je préfère
A ce brillant séjour
L'humble toit de mon père,
Où je reçus le jour.
A. B i i o t ' K j t i .
50

A £S'2â
LA PETITE MENDIANTE.

C ' e s t la petite mendiante


Q u i vous demande un peu de pain :
Donnez à la pauvre innocente !
Doimez, donnez, car elle a faim.
N e rejetez pas ma prière :
V o t r e cœur vous dira pourquoi.
J'ai six ans, je n'ai plus de m è r e ,
J'ai faim : ayez pitié de moi.

H i e r , c'était fête au village :


A moi personne n'a songé ;
Chacun dansait sous le feuillage,
H é ï a s ! et je n'ai pas niangé !
Pardonnez-moi si j e demande :
J e ne demande que du pain.
D u pain ! j e ne suis pas gourmande ;
A h ! ne me grondez pas, j ' a i faim.

N ' a l l e z pas croire que j ' i g n o r e ,


Q u e dans ce monde il faut souffrir ;
M a i s je suis si petite encore !
A h ! ne me laissez pas mourir.
Donnez à la pauvre petite,
E l pour vous comme elle priera !
E l l e a faim : donnez, donnez vite ;
Donnez, quelqu'un vous le rendra.

S i ma plainte'vous importune,
E h bien ! je vais rire et chanter :
51
De l'aspect de mon infortune,
Je ne dois pas vous attrister.
Quand je pleure, l'on me rejette ;
Chacun me dit : " Eloigne-toi."
Ecoutez donc ma chansonnette :
Je chante, ayez pitié de moi.
BOUCHER DE PEKTHES.

LA SAVOYARDE.

Tu vas quitter notre montagne,


Pour t'en aller bien loin, hélas !
Et moi, ta môre et ta compagne,
Je ne pourrai guider tes pas !
L'enfant que le ciel vous envoie,
Vous le gardez, gens de Paris ;
Nous, pauvres mères de Savoie,
Nous le chassons loin du pays,
En lui disant : Adieu I
A la grâce de Dieu !
Adieu ! à la grâce de Dieu !

Ici commence ton voyage :


Si tu n'allais pas revenir !
Xa pauvre mère est sans courage,
Pour te quitter, pour te bénir.
Travaille bien, fais ta prière :
La prière donne du cœur ;
Et quelquefois pense à ta mère,
Cela te portera bonheur.
Vu, mon enfant, adieu ! &c.
52
I l s'en va donc par la v a l l é e ,
Gagner son pain sou9 d'autres «ieux.
Longtemps, longtemps et désolée,
S a m è r e le suivit des y e u x ;
M a i s lorsque sa douleur amère
N ' e u t plus son cher fils pour témoin,
E l l e pleura, la pauvre mère !
L'enfant, qui lui disait de loin :
M a bonne m è r e , adieu ! & c -

A %S3o
LE PETIT FRERE.

D e ma sainte patrie
J'accours vous rassurer :
Sur ma tombe fleurie,
M e s sreurs, pourquoi pleurer ?
Dans son affreux mystère,
L a mort a des douceurs.
Je vous vois sur la terre :
N e pleurez point, mes sœurs.

Dans les cieux j e suis ange,


E t j e veille sur vous ;
M a joie est sans mélange,
C a r j e suis humble et doux.
Des saintes immortelles
Je suis le protégé.
Dieu m'a donné des ailes,
Mais ne m'a pas changé.
53
Ma souffrance est passée,
Et mes pleurs sont taris ;
Ma main n'est plus glacée ;
Je joue et je souris.
Mon regard est le même,
Et j'ai la même voix ;
Mon cœur d'ange vous aime,
Mes sœuis, comme autrefois.
J'ai la même figure
Qui charmait tant vos yeux ;
La même chevelure
Orne mon front joyeux ;
Mais ces boucles coupées
Au jour de mon trépas,
De vos larmes trempées,
Ne repousseront pas 1
Jje ciel est ma demeure j
J'habite un palais d'or ;
Nous puisons à toute heure
Dans l'éternel trésor.
Un fil impérissable
A tissu nos habits ;
Nous jouons sur un sable
D'opale et de rubis.
Là-haut, dans des corbeilles,
Les fleurs croissent sans art ;
Les méchantes abeilles
Là-haut n'ont point de dard.
Les roses qu'on effeuille
Peuvent encor fleurir,
Et les fruits que l'on cueille,
Ne font jamais mourir.
54

Les anges de mon âge


Connaissent le sommeil ;
Je dors sur un nuage,
Dans un berceau vermeil ;
J'ai pour rideau le voile
De la mère d'amour ;
Ma lampe est une étoile,
Qui brille jusqu'au jour.

L e soir, quand la nuit tombe,


Parmi vous je descends ;
Vous pleurez sur ma tombe,
Vos larmes, j e les sens ;
Caché parmi ïes pierres
De ce funèbre lieu,
J'écoute vos prières,
E t je les porte â Dieu.

Oh! cessez votre plainte,


Ma mère, croyez-moi :
Vous serez une sainte,
Si vous gardez la foi>
C'est un mal salutaire
De perdre un nouveau né ;
Aux larmes d'une mère
Tout sera pardonné !

M A D , EMILE DE G n t A R W r r .
(DELPHINE G A Y ) .
L'ENFANT AU BERCEAU.

A i i t : Humble cabane de mon pèr

H e u r e u x enfant, que j e t'envie


T o n i n n o c e n c e e t ton b o n h e u r !
Ail ! garde bien toute ta vie
L a p a i x qui r é g n e d a n s t o n c t e û r .

T a d o r s ; m i l l e songes v o l a g e s ,
A m i s paisibles du s o m m e i l ,
T e p e i g n e n t de d o u c e s i m a g e s ,
Jii:sqii'*;"i s o m e n t d e t o n r o v c i l .

E s p o i r n a i s s a n t de t a f a m i l l e ,
T u fais son d e s t i n d ' u n s o u r i s ;
Q u e Sur ton front la g&îté b r i l l e ,
T o u s les fronts s o n t é p a n o u i s .

T o u t p l a î t à t o n â m e ing-emte :
S a n s regreta, c o m m e sans d é s i r s ,
C i i a q u e objet q u i s'offre à t a v u e
T ' a p p o r t e de n o u v e a u x p l a i s i r s .

S i quelquefois t o n cœur- soupire^


T u n ' a s point de longues douleurs,
E t P o n voit ta bouche sourire
A l'instant où coulent tes pleurs.

P a r le- c h a r m e d e l a f a i b l e s s e ,
T u nous attaches à ta loi,
56

E t jusqu'à la froide vieillesse.


Tout s'attendrît autour de toi.
Que ne peut l'image touchante
Du seul âge heureux parmi nou3 i
Ce jour, peut-ctre où je le chante
De mes jours est-il le plus doux.
Heureux enfant, que je t'envie
Ton innocence et ton bonheur ï
A.h ! garde bien toute t a vie
lia paix qui règne dans ton coeur.
7i£R<li:ixr.

MA CABANE AU BOUT) DE L ' E A U .

L'on m'avait dit : Sur un autre rivage


Tu dois choisir la paix et le bonheur :
Dans la cité rien n'a séduit mou cœur,
Kt je reviens à mon pauvre village.
Oh! rendez-moi mon léger bateau.
L'azur du lue paisible,.
E t roa rame flexible j
Oh ! rendez-moi mon léger bateau
E t ma cabane au bord de Peau.

Sons les lambris où la pourpre étincelle,


Pavais perdu ma douce liberté ;
Car au pays je laissai ma gaîte,
Et je perdis tout bonheur avec elle,
fth i rendez-moi» &c.
0/

La souvenir d'une sœur qui m'est chère,


Me rappelait au sein de mon hameau :
Car chez les grands, la vie est un tombeau ;
E t je reviens au foyer de mon père.
Oh ! rendez-moi; 8tc.

MA CHAUMIERE. A ^ *

Pour trouver le parfait bonheur,


Dont le séjour est un mystère,
Consultez toujours votre cœur ;
Que ce guide seul vous éclaire.
De vos ambitieux désirs
Fuyez la trompeuse lumière
Kt pour goûter de vrais plaisirs.
Venez me voir dans ma chaumière.

Lil, vous jouirez des faveurs


Que me prodigue la nature :
Vous y verrez des fruits, des fleurs,
E t le cristal d'une onde pure.
Si vous aimez un doux sommeil,
Venez dormii sur ma fougère ;
Si vous aimez nn doux réveil,
Réveillez-vous dans ma chaumière.

Zéphire y parfume les airs


Des odeurs que !a rose exhale ;
Vous entendrez les doux concerts
Do la fauYfttte matinale ;
58

E t si. vous aimez la gaîté


Q u e donne un travail salutaire,
On la trouve avec la santé
Dans ie jardin de ma chaumière.

L a fortune, par des remords,


Souvent nous fait payer ses charmes ;
M o i , je vous offre des trésors
Q u i ne coûtent jamais de larmes.
L a paix du cœur, de vrais amis,
M o n chien, ma lyre et ma r i v i è r e ,
Peu de livres, mais bien choisis :
V o i l à les biens de ma chaumière.

LA CABANE DE MON PERE.

Humble cabane de mon p è r e ,


T é m o i n de mes premiers plaisirs,
Du fond d'une terre é t r a n g è r e ,
C ' e s t vers toi que vont mes soupirs.

L e jeune tilleul, qui, t.'ombrage,.


E t la montagne, et lç hameau,
T)s ton agreste paysage
T o u t me retrace le tableau.

J'ai vu devant moi sans envie


S'ouvrir de superbes palais :
C 'est toi, ma cabane c h é r i e ,
Qui peux remplir tous mes souhaits.
59

D'où vient cette joie inquiète


Dont ton nom seul saisit mon cœur ?
Si dans ta paisible retraite
Le ciel n'eût fixé mon bonheur.

MA N O R M A N D I E . A <

AIR : Non loin du palais de l*Amire*

Quand tout renaît à l'espérance,


E t que l'hiver fuit loin de nous ;
Sous le beau ciel de notre France
Quand le soleil revient plus doux )
Quand la nature est reverdie ;
Quand l'hirondelle est de retour ;
J'aime à revoir ma Normandie :
C'est le pays qui m'a donne le joue.

J'ai vu les champs de PHelv.étie,


E t ses chalets et ses glaciers^
J'ai vu le ciel de l'Italie,
E t Venise et ses gondoliers ;
En saluant chaque patrie.
J e me disais : Aucun séjour
N'est plus beau que ma Normandie :
C'est le pays q u i m ' a donné le jour»

Il est un âge dans la vie,


Où chaque rêve doit finir ;
Un âge où l'âme recueillie
A besoin de se souvenir.
GO

Lorsque ma muse refroidie


Aura fini ses chants d'amour ;
J'irai revoir ma Normandie :
C'est le pays qui m'a donne le jour.
Quand je reverrai la prairie,
J e chanterai à mon retour
Ce refrain qu'en d'autre patrie,
J e redisais à chaque jour,
Auprès de ma mère chérie.
Pour l'égayer dans ses vieux jours ;
Je chanterai toa Normandie :
C'est le pays qui m'a donné Iejour.

L E S A D I E U X DE M A R I E S T U A R T .

Adieu, charmant pays de France,


Que je dois tant chérir !
Berceau de mon heureuse enfance,
Adieu ! te quitter, c'est mourir.

Toi, que j'adoptai pour patrie,


E t d'où je crois me voir bannir,
Entends les adieux de Marie,
France, et garde son souvenir.
L e vent souffle ; on quitte la plage,
E t , peu touché de mes sanglots,
Dieu, pour me rendre à ton rivage,
Dieu n'a point soulevé les flots !
Adieu, charmant, &c.
(il

Lorsqu'aux vieux du peuple que j ' a i m e ,


J e ceignis les lis é c l a t a n t s ,
Il applaudit au rang s u p r ê m e ,
M o i n s qu'aux charmes de mon printemps.
E n vain la grandeur souveraine
M'attend c h e z le sombre Ecossais :
J e n'ai d é s i r e d'être r e i n e ,
Q u e pour régner sur des Français.
A d i e u , charmant, &c.

L ' a m o u r , la gloire, l e g é n i e ,
Ont trop enivré mes beaux jours ;
D a n s l'inculte C a l é d o n i c ,
D e mon sort va changer le cours.
H é l a s ! un p r é s a g e terrible
D o i t livrer mon c œ u r à l'effroi :
J'ai cru voir, dans un songe horrible,
U n c c h a f a u d d r e s s é pour moi-
A d i e u , c h a r m a n t , &c.

F r a n c e ! du milieu des a l a r m e s ,
L a noble ftlle des Stuarts,
C o m m e en ce jour qui v o i t ses larmes,
V e r s toi tournera ses regards.
M a i s Dieu î l e vaisseau trop rapide
D é j à vogue sous d'autres c i e u x ,
E t la nuit, dnns son YOI h u m i d e ,
D é r o b e tes bords à mes y e u x !
A d i e u , charmant, &c.
B E BAISSEE-
62

VAINE ATTENTE.
Sur ce rivage où t'attendait ma mère,
Ami, pourquoi plus tôt ne pas venir ?
Seul en ces lieux j ' a i fermé sa paupière,
Oui, seul, hélas ! j'eus sou dernier soupir.
A l'horizon lorsqu'apparut ta voile,
La pauvre mère était bien près des cieux ;
De l'espérance avait pâli l'étoile.
Pourtant encorjc lisais dans ses yeux :
Bons matelots, redoublez de courage,
Fendez les (lots, soyez vite au rivage :
Une mère qui va mourir
Attend son fils pour le bénir*
Lorsque, le soir d'une belle journée,
La pauvre mère interrogeait les cieux,
Par la douleur son âme était navrée ;
Oh! que de pleurs j ' a i vus baigner ses yeux ï
Pourtant encore elle avait i-espérance,
Du malheureux seul et dernier soutien ;
Elle disait, regardant vers la France :
Pour m'embrasser, demain, mon fils, reviens.
Bons matelots, &c.
J'ai vu souvent son front braver l'orage,
Quand un vaisseau demandait du secours ;
Elle était là, priant sur le rivage ;
Croyant te voir, elle exposait ses jours.
Quand le canon annonçait la détresse,
Quand son srlence était signe de mort,
J e l'entendais, dans sa vive tendresse,
Je l'entendais longtemps redire encor :
Bons matelots, &c.
6îi

LE ROSSIGNOL. ^

D o u x rossignol, reste au séjour


O ù tes petits ont pris le jour ;
E n c h a n t e - n o u s p a r Ion r a m a g e :
M o n c œ u r , i n s t r u i t d a n s t o n langage»
Avec l'écho, redit amour.

D e tes c o n c e r t s m é l o d i e u x
T u p r i v e r a s t r o p tôt c e s l i e u x .
Q u a n d l ' a u t o m n e flétrit l e u r s c h a r m e s ,
Q u a n d tu îious fuis, c'est p a r mes l a r m e s
Q u e j e r é p o n d s à tés a d i e u x .

M a i s aussitôt q u e le p r i n t e m p s
A u r a r e n d u la iîeur a u x c h a m p s ;
A h ! sois fidèle à r e p a r a î t r e ;
R e v i e n s a u bois qui t e vit n a î t r e
R e d i r e e n c o r tes d o u x a c c e n t s .

3
A MA S ΠU R .
A I R : O mon pays, heureuse terre!

Compagne de ma tendre enfance.


M a s œ u r , a p r è s v i n g t nus d ' a b s e n c e ,
J e r e v o i s enfin le p a y s
De France,
O ù v o n t fleurir c o m m e j a d i s
L e s lis.
9
64

Mais mie famille étrangère,


Hélas ! habite la chaumière,
Où, dans ses funèbres adieux,
Ma mère
Nous dit : Soyez longtemps heureux
Tous deux.
Le château n'a plus ses tourelles ;
Mais au printemps les hirondelles,
C ommo autrefois à ces débris,
Fidèles,
Y font encor pour leurs petits
Des nids.
Sur la montagne solitaire,
Il n'est plus l'arbre tutclaire,
Où, pour charmer ses longs travaux,
Mon père
Nous racontait des fabliaux
Si beaux.

LES SOUVENIRS.

A I R : 0 mon pays, heureuse terre .'

Combien j'ai douée souvenance


Du joli lieu de ma naissance !
Ma sœur, qu'ils étaient beaux ces jours
De France !
O mon pays, soit mes amours
Toujours.
T e souvient-il que notre mère.
Au foyer de notre chaumière,
Nous pressait sur sou cœur joyeux,
Ma chère 1
E t nous baisions ses blancs cheveux,
Tous deux.

T e souvient-il du lac tranquille


Qu'effleurait l'hirondelle agile 't
Dix vent qui courbait le roseau
Mobile,
E t du soleil couchant sur l'eau
Si beau '?

M a sœur, te souvient-il encore


Du château que baignait la Daure,
E t de cette taot vieille tour
Du Maure,
Dont l'airain sonnait le retour
Du jour 1
CHATEAUBRIAND.

L A P R I E R E DU C H A T E L A I N . '

A Ï R : Quand je veux chasser la tristesse.

D é j à le vent du soir soupire


Dans les vieux débris de la tour ;
Déjà le flot du lac e x p i r e ,
JEn murmurant la fin du jour j
66

M a i s on dirait qu'à l a rivière


L ' é c h o redit un chant lointain.
Ecoutez bien-, c'est ïa prière
Du châtelain-

L e pàtrc, sur sa mandoline.,


Module ses refrains d'espoir ;
L-airain sacré de la colline
Annonce l'angelus du soir ;
Tandis qu'on prie à la chaumière,
Au loin réfwnne un chant lointain.
Ecoutez bien, & c

L;\-bfl?, il est dans ïa vallée,


Au bois où souffle le zéphir ;
Il prie au pied d'un mausolée,
Tombe chère à son souvenir.
S a voix se mole avec mystère
Aux chansons du hameau voisin.
Ecoutez bien, &c.

LE JEUNE MALADE.

Dans la solitaire bourgade.


R ê v a n t à ses maux tristement.
Languissait un pauvre malade
D'un long mal qui va consumant.
Il disait : Gens de la chaumière,
Voici l'heure de la prière,
E t le tintement du beffroi :
Vous qui p l i e z , priez pour moi.
67
Mais quand Vous verrez la cascade
Su couvrir de sombres rameaux,
Vous direz : Le jeune malade
E s t délivre de tous ses maux.
JLors revenez sur cette rive
Chanter la complainte naïve,
E t quand tintera le beffroi.
Vous qui priez, priez pour moi.

Q u a n d à l a h a î n e , à l'imposture,
J'opposais mes mœurs et le temps ;
D'une vie honorable et pure
Le terme approche, je Pattends.
II fut court mon pèlerinage !
J e meurs au printemps de mon âge ;
Mais du sort je subis la loi.
Vous qui priez, priez pour moi-
MlLLEVOYK.

ADIEUX A CHATEAUBRIAND.

Dors au bruit de la mer profonde


Qui porta tes premiers destins,
Alors que, pèlerin du monde,
Tu voguais vers des bords lointains ;
Dors sur ce rocher solitaire,
Où tu jouais naïf enfant ;
Dors en paix, l'humble croix de pierre'
Abrite îc front du croyant.
68

T e s pas ont foulé mainte plage ;


T e s yeux ont TU bien des douleurs :
Partout l'homme est né pour l'orage,
Pour la souffrance et pour les pleurs.
Mais partout aussi la prière
E t le protège et le défend.
Dors en paix, & c

Descends dans la nuit solennelle,


T o i qui ne crains rien de la mort.
L e temps est sombre . . . Dieu t'appelle,
Chateaubriand, voici le port !
Sur ce rocher venait ta mère
Ecouter ia plainte du vent.
Dors en paix, l'humble croix de pierre
Abrite le Breton croyant.
ARISTIDE SE LATOVS.

• SOUVENIRS DU JEUNE A G E .

Souvenirs du jeune âge


Sont graves dans mon cœur,
Et je pense au village
Pour rêver le bonheur.
A h ! ma voix vous supplie
D'écouter mon désir :
Rendez-moi ma patrie,
Ou laissez-moi mourir.

De nos bois le silence,


Les bords d'un clair ruisseau,
L a paix et l'innocence
69

Dca enfants du hameau


Ah ! voilà mon envie,
Voilà mon seul désir.
Rendez-moi ma patrie,
Ou laissez-moi mourir.

L'INFORTUNE. "

Aïs : Pourquoi me fuir, passagère hirondelle t

Si jeune enoor, je connais l'infortune,


Et la douleur empoisonne mes jours.
Hélas pourquoi d'une vie importune
L e sort cruel prolonge-t-il le cours 3

Les doux instants de ma paisible enfance


Me promettaient le plus doux avenir.
J'ai tout perdu, jusques à l'espérance :
Présage vain, je suis né pour souffrir.

Adieu! beaux jours, dont j'entrevois l'aurore !


Adieu ! plaisirs, que j'ai si peu connus l
Heureux moments, il no me reste encore
Que la douleur de vous avoir perdus.
70

SUR MON R O C H E R .

Ils vont courant la terre,


En cherchant le bonheur ;
Mais ils n'en trouvent guère
Qu'une faible lueur.
Le bonheur je le trouve
Sans le chercher,
E t je l'éprouve
En fredonnant sur mon rocher.
Demandant à la ronde
Un instant de gaîté,
lis vont courant le monde,
Le cœur tout attristé.
L a gaîté je la trouve
Sans la chercher.
Et je l'éprouve
En fredonnant sur mon rocher.

1 L E B O N H E U R DE L A S O L I T U D E .

AIR : Le sombre hiver va disparaître.

Dans cette aimable solitude,


Sous l'ombrage de ces ormeaux, •
Exempts de soins, d'inquiétude,
Mes jours s'écoulent en repos.
71

Jouissant enfin de moi-même,


Ne formant plus de vains désirs,
J'éprouve que le bien suprême,
C'est la paix, et non les plaisirs.

Ici, rien ne manque à ma vie :


Mes fruits sont doux, mon lait est pur;
Sous mes pieds la terre est fleurie ;
Le ciel sur ma tête est d'azur.

Si quelquefois un noir orage


Me cause uti moment de frayeur,
Elle passe avec le nuage ;
L'arc-en-ciel me rend mon bonheur ;

Dans le mondes où tout inquiète,


L'homme est en proie à la douleur ;
A peine est-il dans h retraite,
Que le calme naît dans son cœur.
De même cette onde en furie
Court dans ces rocs en bouillonnant ;
Dès qu'elle arrive à ma prairie,
Elle serpente doucement.
FLOBIA II.

L E NID D E F A U V E T T E . A

.Te le tiens, ce nid de fauvette ;


Ils sont deux, trois, quatre petits.
Depuis si longtemps je vous guette !
Pauvres oiseaux, vous voilà pris.
10
12

C r i e z , sifflez, petits r e b e l l e s ;
.Débattez-vous, oh ! c'est e» vain.
V o u s n'avez point oncor vos ailes :
Comment vous sauver de mes mains ï

M a i s , quoi fn'entends-je pas la m è r e


Q,ui pousse des cris douloureux?
Oui, je le vois, oui, c'est leur p è r e
Q u i vient voltiger autour d'nuxv
A h ! pourrais-je causer leur peine,
Moi qui, l ' é t é , dans nos vallons,
Venais mVndormir sous un chêne,
A u bruit de leurs douces chansons !

Hélas T si du sein de m a mère


Un méchant venait me ravir \
Je le sens bien, daussa misère,.
E l l e n'aurait plus qu'à mourir j
E t j e serais assez barbare
P o u r vous arracher vos- enfants l
N o n , non. que rien ne vous sépare ;
NOIÎJ les voici, je vous les rends.

Appreitcz-ïcar, dans le bocage,


A voltiger auprès de vous ;
Q u ' i l s écoutent votre ramage,.
P o u r former des sons aussi doux j.
E t moi, dans la saison prochaine,
Je reviendrai dans ces vallons,
Dormir quelquefois sous un chêne,
A u bruit de leurs-jeunes- chansons
L-i L E Ç O N D'UN P E R E A SON F I L S .

A I R : Quand tout rtnaU à Pespéranct.

M o n fils, ma tendresse m'iiispire j


J e vais te faire la leçon.
T u ne sais encor que sourire ;
M a i s viendra Page et la raisoa."
J e me montrerai peu sévère \
E t je désire avec ardeur.
M o n fils, que la leçon d'ur. père
Puisse à jamais se graver dans touctsur*

ï l est un Dieu dont la puissance


Protège chacun ici-bas j
L e ciel dans sa munificence,
Nous le révèle à chaque pas-
Matin et soir que ta prière
?

S o i t adressée au Créateur.
M o n fils, & c .

C o n t r e les écueils de c e raoad«


E n vain pins d'un a combattu;
F a i s que ton avenir se fonde
S u r le travail e t la vertu.
R i c h e , soulage la misera
D u faible sois le défenseur.
MonJ&l*, & c
74

Pour celle qui, dans ton jeune âge,


T e prodigue des soins touchants,
T u dois être soumis et sage ;
T u protégeras ses vieux ans.
l a i s s e - t o i guider par ta m è r e :
Son plus doux rêve est ton bonheur.
M o n fils, & c
T u voudras connaître l'histoire
De ton pays si grand, si beau :
.Te te parlerai de la gloire
Qui couronne son vieux drapeau.
JLau^frie est une autre m è r e ,
Q'rrjl faut servir avec honbenr.
M o n fils, & c .

L a mort, avide de pâture,


S a n s compter nous moissonne tous.
Selon l'ordre de la nature,
Mon fils, tu dois vivre après nous ;
Q u e notre asiie funéraire
S o i t le témoin de ta douleur.
M o n fils, & c .

Ù L'HIRONDELLE E T L E PROSCRIT.

Ste. Hélène, 1821.

Pourquoi me fuir, passagère hirondelle 1


Ah ! viens fixer ton vol auprès de moi.
Pourquoi me fuir, lorsque ma voix t'appelle 1
Ne suis-je pas étranger comme toi ?
75

Peut-être, hélas Ides lieux qui t'ont vu naître


Un sort cruel te chasse ainsi que moi.
Viens déposer ton nid sur ma fenêtre :
Ne suis-je pas voyageur comme loi 1
Dans ce désert le destin nous rassemble :
Ah ! ne crains pas d'y rester avec moi.
Si tu gémis, nous gémirons ensemble :
Ne suis-je pas exilé comme toi 1
Quand le printemps reviendra te sourire,
Tu quitteras et ton exil et moi ;
Tu voleras au pays de Zéphire,
Ne puis-je, hélas ! y voler comme toi ?

L E S R E G K E T S DE L A C A M P A G N E . ^

Loin des chalets qui m'ont vu naître.


Dans les cités portant mes pas,
Mon cœur séduit voulut connaître
D'autres peuples, d'autres climats-
O mon pays ! de tes belles campagnes
Je garde au moins un touchant souvenir ;
E t loin de toi ce refrain des montagnes
Me fait toujours palpiter de plaisir-
Tra, la, la, la, la, la, la, la, la, l a , l a , T i a , la.
Ce refrain, dont je garde un touchant souvenir,
Me fait toujours palpiter de plaisir.
Q.ue'je regrette, au sein des villes,
La douce paix de nos hameaux !
76

Soe cieux d'azur, nos lacs tranquîU«,


Nos jours dû fête et nos travaux !
Omon pays! &c.
Quand reverrai-je lu colline
Où l'on respire un air si frais ?
E t le château qui la domine,
E t ses jardins et ses bosquets 1
O mon pays ! &c.

MA PAUVRE GRAND' MERE.

M on, rien n'était bon, sur la terre,


Comme notre grand'mèrc ;
Seulement d'y penser,
Cela méfait pleurer! . . . .
C'était une petite vieille,
Toujours, toujours de bonne humeur,
Ayant bon œil et fine oreille,
£ t surtout un excellent cœur.
Il me semble la voir encore,
Assise dans son grand fauteuil ;
Aux j«ùx, que sa voix fait é clore,
Elle sourit du coin de l'œil :
Car rien n'était bon, &c.
Souvent au refrain de la danae
Doucement elle s'endormait ;
Soudain, chacunfaisait silence:
Comme nous tous, chacun l'aimait.
77
M a i s à ses enfants j dan.; son r ê v é ?

E l l e d i s a i t , t e n d a n t les b r a s :
( t
J e v e u x q u e la d a n s e s ' a c h è v e ï
J e d o r s m i e u x au b r u i t d e vos p a s , ' *
Non* rien n ' é t a i t b o n , & c

U n j o u r , se s e n t a n t affaiblie,
E l l e fit signe d e la main.
?
Q u e l o n o u v r i t sa j a l o u s i e ,
Q u e parfumaient rose et jasmin.
E t n o u s d i t , f e r m a n t sa p a u p i è r e t
i (
J e vais dormir entre vos-bras :
" V o w s j enfante, c o m m e à l ' o r d i n a i r e ^
?
" S u p p o s e z que j e n y suis p a s . "
E t , pour toujours, notre g r a n d ' m è r c
Alors quitta la terre . . . .
Seulement d'y penser,
C e l a m e fait p l e u r e r -

NOTRE DAME DE LA MER.

N o t r e c h a n t est sans m e s u r e ,
N o u s sommes pauvres pécheurs ;
M a i s , sous nos h a b i t s d e b u r e ,
N o u s p r i o n s avec nos c œ u r s .
P r é s e r v e z notre nacelle
l>u g r o s t e m p s et d e l ' é c l a i r ;
E t , si vous v e i l l e z sur e l l e ,
N o u s vous d i r o n s c i n q pater,
Notre Dame de la mer !
78
M a i s , si la tempête gronde,
Prenez soin de nos enfants ;
C a r i l n'ont que vous an monde,
Lorsque nous sommes absents.
Vous qui commandez aux lames,
Vous qui parlez à l'éclair,
Consolez nos pauvres âmes ;
Nous vous dirons cinq pater,
Notre Darne de la mer !

Nous partons, et notre barque


Doit revenir dans trois jours ;
Mais, quand le pêcheur s'embarque,
Bien souvent c'est pour toujours-
S'il nous faut subir l'épreuve,
Nous dirons sous votre main :
Souvencz-vons de la veuve,
N'oubliez pas l'orphelin,
Sainte mère du marin !

L E CLOCHER DE MON V I L L A G E .

C h e z nous il est un monastère,


Qui s'élève au milieu des bois ;
Souvent sa cloche, avec mystère,
Nous jette de mourantes voix.
Il me souvient qu'en mon jeune â g e ,
Je l'écoutais dans le lointain ;
Mais du clocher de mon village
J'aimais mieux le timbre argentin !
79

Un jour, pour la terre étrangère,


Il me fallut quitter ces lieux,
Ces lieux où je quittais ma more
E t qu'en pleurant suivaient mes yeux.
Mais, quand je perdis leur image,
Longtemps encor, dans le lointain,
Du beau clocher de mon village
J'entendis le timbre argentin.

Mais je reviens, et plus j-'avance,


Le buisson, la iîeur, le ruisseau
M'apporte, un doux parfum d'enfance,
0 n doux parfum de mon ïiampau ;
E t , comme aux jours de mon jeune âge,
J'entends déjà dans le lointain
Du beau clocher de mon village
Résonner le timbre argentin.

L E SIECLE PASTORAL. /?

A I H ; Le sombre hiver va digparaUre.

r*réeieux jours, dont fut ornée


La jeunesse de l'univers,
P a r quelle triste destinée
N^êtes-vous plus que dans nos vers ?
La terre, aussi riche que belle,
Unissait, dans ces heureux temps,
Les fruits d'une automne éternelle
Aux fleurs d'un éternel printemps.
11
80
T o u t l'univers était champêtre,
T o u s les hommes étaient bergers;
L e s noms de sujets et ds maître
L e u r étaient encore étrangers.

Sons cette juste indépendance.


Compagne de l ' é g a l i t é ,
T o u s , dans une même abondance,
Goûtaient même tranquillité.

L e ors toits étaient d'épais feuillages ;


L ' o m b r e des saules, leurs lambris;
L e s temples étaient des bocages ;
L e s autels, des gazons fleuris.

Ils n'avaient point d ' A r é o p a g e s ,


N i de Capitoles fameux ;
M a i s n'étaient-ils point les vrais sages,
Puisqu'ils étaient les vrais heureux i

Ils ignoraient les arts pénibles


E t les travaux nés du besoin ;
Des arts enjoués et paisibles
L a culture fit tout leur soin-

On ignorait dans leurs retraites


L e s noirs chagrins, les vains désirs,
L e s espérances inquiètes,
L e s longs remords des courts plaisirs.

L ' i n t é r ê t au sein de la terre


N ' a v a i t point ravi les métaux ;
N i soufflé le feu de la guerre,
N i fait de chemins sur les eaux.
SI

Les pasteurs, dans leur héritage,


Coulant leurs jours jusqu'au tomï>eau,
N e connaissaient qne le rivage
Qui les avait vus au berceau.

L a mort, qui pour nous a des ailes,


Arrivait lentement pour eux ;
Jamais des causes criminelles
N e hâtaient ses coups douloureux.

O règne heureux de la nature !


Quel dieu nous rendra tes beaux jours T
Justice, égalité, droiture,
Que n'avez-vous régné toujours ?
G-BESSET

L E ROSIER. 4 *

Je l'ai planté, je l'ai vu naître,


Ce beau rosier où ies oiseaux
Viennent chanter, sous nia fenêtre,
Perchés sur ses jeunes rameaux-
Petits oiseaux, troupe joyeuse,
A h ! par pitié, ne chantez pas :
Mon fils, qui me rendait heureuse,
Est parti pour d'autres climats.

Pour les périls du Nouveau Monde,


Il nous fuit, il brave la mort !
Hélas 1 pourquoi chercher sur lVmda
L e bonheur qu'il trouvait au port ?
82
Vous, passagères hirondelles,
Qui revenez chaque printemps ;
Oiseaux voyageurs, mais fidèles.
Ramenez-le-moi tous ies ans.

5 T S U R L'OCEAN DU M O N D E .

Sur l'océan du monde


Puisqu'il me faut voguer,
Ma/gré le vent qui gronde,
Je vais donc m'embarquer.
Ciel, conduis ma nacelle s

Pour qu'elle, pour qu'elle. . .


Ciel, conduis ma nacelle,
Pour qu'elle arrive au port.

Vers le céleste pôle


Tend toute mon ardeur.
La grâce est ma boussole j
Le pilote est mon cœur.
Ciel, conduis, &c.

Dans le triste passage


De la vie à la mort.
Mon corps, par sonjiiaufrage,
Mettra mon âme au port-
Ciel, conduis, &c.

L à , les saints et les anges


M'attendent chaque jour,
83

Pour chanter les louanges


D'un Dieu rempli «l'amour.
Ciel, conduis, &c.

Dans l'éternel asile,


Mon âme, en sûreté.
Aura un sort tranquille
Pour une éternité.
Ciel, conduis, &c.

L'AVEUGLE E T SON CHIEN. $

Au pied d'une antique chapelle,


Un pauvre aveugle était assis \
P r è s de lui faisait sentinelle
Un chien, le meilleur des amie.
Damon passe. Son char rapide
Ecrase l'appui du malheur.
L e vieillard, aux cris de son guide,
Exhale en ces mots sa douleur :

" Si de mon front sexagénaire


Les rides causaient tes dédains.
Si les lambeaux de ma misère
Blessaient tes regards inhumains,
De mon existence pénible
Tu pouvais trancher le lien j
Mais, dis-moi, jeune homme insensible!
Dis-moi, que te faisait mon chien % >>
84
** A l o r s que d'une v o i x mourante,
D é v o r é par l'horrible f a i m ,
J e tendais une main tremblante
P o u r mendier un peu de pain \
A v a r e de ton o p u l e n c e ,
T u pouvais ne me donner r i e n .
T u détruis ma seule e s p é r a n c e :
J e n e vivais que pour m o u c h i e n ! "
t (
II veillait sur moi dès l'aurore,
P r é s e n t a n t la coupe aux bienfaits ;
.La nuit, M é d o r gardait e n c o r e
L e r é d u i t où je r e p o s a i s .
M o n chien é t a i t , dans m a d é t r e s s e ,
M o n seul ami, m o n seul soutien.
O ù puia-je traîner m a v i e i l l e s s e ?
J e u n e h o m m e , regarde m o n chien ! "

" C o m m e toi, j e fus jeune et r i c h e ,


J e montais un coursier fougueux ;
M a i s , dans c e rang que l'or affiche,
J e respectais le malheureux.
Quand un vieillard, sur l a p o u s s i è r e ,
D e m o i réclamait quelque bien ;
M o n cœur soulageait sa m i s è r e ,
E t m a main caressait son c h i e n . "
i :
S i quelque jour le sort contraire
T e réduisait à mendier,
S i le passant à ta prière
Refusait un simple denier^
A h ! puisses-tu, dans tes alarmes,
T r o u v e r un M é d o r pour soutien,
E t repentant, verser des larmes
D e m'a voir privé de mou chien ! "
LEVY-
85

LE GARDIEN DE L A CITADELLE. «4

Gardien de la citadelle,
V o i s donc, situ veux m'ouvrir,
Pour remplir ton escarcelle
T o u t ce que je puis t'offrir ;
V o i s cet anneau, cette chaîne,
E t ces riches bracelets,
Pareils à ceux d'une reine :
Ouvre-moi donc, et prends-les.
— N o n , lui dit la sentinelle,
T o u t au loin portez vos pas ;
N o n , à mon devoir fidèle,
Je n'ouvre pas, je n'ouvre pas,
N o n , non, j e n'ouvre pas.

N e demande pas, ordonne ;


D i s , pour te récompenser,
Q u e veux-tu que j e te donne,
Si tu me laisses passer ?
J ' a i , vois-tu, de la puissance ;
J e suis plus riche qu'un roi :
Parle, ami, sans défiance ;
D i s , que veux-tu ? réponds-moi.
— R i e n , reprit la sentinelle;
Tout au loin portez vos pas :
C a r , à mon devoir fidèle,
Je n^ouvre pas, j e n'ouvre pas,
N o n , non, j e n'ouvre pas.

T i e n s , ouvre-moi j pour ta m è r e ,
Prends, ami, voici de l'or ;
E n songeant à sa misère,
86

Pcut-tu refuser eneov '( . . .


Vraiment, ton refus m'étonne,
T u ne m'as donc pas compris %
T a pauvre more est si bonne !
Serais-tu donc mauvais fils ?
— A h ! reprit la sentinelle,
Ma mère est bien pauvre, hélas !
Mais Dieu veillera sur elle :
Je n'ouvre pas, je n'ouvre pas,
Non, non, je n'ouvre pas.
./-"F^"" "~
,!i
LOUTS XVI A U X F R A N Ç A I S , ( a )

O mon peuple, que vous ai-je donc fait?


-T'aimais la vertu, la justice ;
Votre bonheur fut mon unique objet,
Et vous me traînez au supplice.
Français, Français, n'est-ce pas parmi vous
Que Louis reçut la naissance •?
L e même ciel nous a vus naître tous ;
J'étais enfant dans votre enfance.
( a ) Couplets pour accompagne' cette chanson-
LES GARDES DE LOTUS' X V I .
V o l e z avec nous au cotnbat ;
Vengeons et l'autel et le trône :
A l'autel rendons son éclat ;
A Louis rendons sa couronne.
LES EEVOtaTIONHAIEES.
T r o p longtemps abusés par de vils imposteurs,
De leur ambition nous sommes la victime ;
Brisons ce sceptre impur qui causa nos malheurs,
E t sachons secouer lejoug qui nous opprime.
87

O mon peuple, ai-je donc mérité


Tant de tourments et tant de peines ?
Quand je vous ai donné la liberté,
Pourquoi me chargez-vous de chaînes ?

Tout jeune encor, tons les Français en moi


Voyaient leur appui tutélaire ;
Je n'étais pas encore votre roi,
Et déjàj'étais votre père-

Quand je montai sur ce trône éclatant


Que me destina ma naissance,
Mon premier pas dans ce poste brillant
Fut un edit de bienfaisance.

Nommez-les donc, nommez-moi ics bienfaits


Dont ma main signa la sentence.
Un seul jour vit périr plus de Français
Que les vingt ans de ma puissance.

Si ma mort peut faire votre bonheur,


Prenez mes jours, je vous les donne.
Votre bon roi, déplorant votre erreur,
Meurt innocent, et vous pardonne.

O mon peuple, recevez mes adieux :


Soyez heureux ; je meurs sans peine j
Puisse mon sang, en coulant sous vos yeux,
' Dans vos cosurs éteindre la haine !
12
8S

L'OISEAU BLEU.

Il est tard ; l'ange cstpassé ;


Déjà le jour est baissé,
Et l'on n'entend pour tout bruit
Que le ruisseau qui s'enfuit.
Endors-toi ;
Mon fils, c'est moi.
Il est tard, et ton ami,
L'oiseau bleu, s'est endormi.

Dors ; la fée arrivera ;


Puis elle t'apportera,
Pendant que tu dormiras,
Tous les fruits que tu voudras.
Endors-toi; &c.

Je vois se fermer tes yens,


'l'es yeux bleus comme les cieux :
Tu vas dormir, n'est-ce pas ?
Il s'endort . . . chantons bien bas,
Endors-toi ; &c.

MA VOCATION.

Jeté sur cette boule,


Laid, chétif et souffrant,
Etouffé dans la foule
39

F a u t e d'être assez grand.


U n e plainte touchante
De ma bouche s o r t i t ;
L e bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit.

L e char de l'opulence
M'eclabousse en passant ;
J'éprouve-l'insolence
Du riche et do. puissant :
D e leur morgue tranchante
R i e n ne nous garantit.
L e bon D i e u , & c .

D ' u n e vie incertaine


A y a n t eu de l'effroi,
J e rampe sous la chaîne
Du plus modique emploi.
L a liberté m'enchante ;
Mais j ' a i grand appétit.
L e bon D i e u , & c .

Chanter, ou j e m'abuse,
E s t ma tâche ici-bas.
Tous ceux qu'ainsi j'amuse
N e m'aimeront-iis pas ?
Q u a n d un cercle m'enchante,
Quand le vin divertit,
L e bon Dieu me dit : Chante,
C h a n t e , pauvre petit.
BZJIAHOKB»
90

5 A MA M E R E .

Ma bonne mère,
Objet des plus doux sentiments,
Reçois mon hommage sincère,
Mes tendres voeux, mes simples chants,
Ma bonne mère.
Je veux, ma mère,
De ta vie embellir îc cours ;
Je veux d'une trame légère
Former le tissu de tes jours,
Ma bonne mère.
Pour toi, ma m è r e ,
Au ciel j'adresse des souhaits-
Seigneur, exauce ma prière :
Si je demande tes bienfaits,
C'est pour ma mère.
Tout pour ma mère,
E s t la devise de mon coeur.
Ah ! s'il est des biens sur la terre,
J e n'en veux point ; que mon bonheur
Soit pour ma mère.

L E MAL DU P A Y S .
Hélas ! qui pourrait oublier
Le triste sort
91

Du noble et vaillant chevalier


Jean de Montfort ?
Pour suivre le prince et la reine
Vers le saint lieu,
A son beau pays d'Aquitaine
Il dit adieu.
Bientôt, près du saint roi Louis,
Fait prisonnier,
Il devint d'un pauvre dervis
Le jardinier,
Et, loin du ciel de la patrie,
L'infortuné
Au? bords déserts de la Syrie
Fut amené.
Là, se rappelant un séjour
Qui lui fut cher,
Il venait rêver chaque jour
Près de la mer ;
Chaque jour, assis sous l'ombrage
D'un noir cyprès,
Il confiait à ce rivage
Ses vains regrets,
Ainsi l'infortuné martyr,
Dans ses ennuis,
Se consumait au souvenir
De son pays,
Et quand sur un lit de souffrance
Il fut mourant,
Sa bouche encor nommait la France,
En expirant.
EDMOND GE'EAUO-
92

^ 4 LA N O S T A L G I E .

AIR tfe ta République.

Vous m'avez dit : " A Paris, jeune pâtre,


" Viens, suis-nous, cède à tes nobles penchants :
( i
Notre or, nos soins, l'étude, le théâtre,
" T'auront bientôt fait oublier les champs."
.Te suis venu ; mais voyez mon visage.
Sous tant de feux mon printemps s'est fané,
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village
E t la montagne où je suis né I

La fièvre court triste et froide en mes veines ;


A vos désirs cependant j'obéis.
Les grands repas, res tables toujours pleines,
J ' y meurs, hélas ! j'ai le mal du pays.
En vain l'étude a poli mon langage ;
Vos arts en vain ont ébloui mes yeux.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village
E t ses dimanches sijoyeux !

Avec raison vous méprisez nos veilles^


Nos vieux récits et nos chants si grossiers.
De la féerie égalant les merveilles,
Votre opéra confondrait nos sorciers.
Au saint des saints le ciel rendant hommage,
De vos concerts doit emprunte v les sons.
Ali ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
E i s a vallée et ses chansons !
93
Nos toits obscurs, notre église qui croule,
M'ont à mol-môme inspiré des dédains.
Des monuments j'admire ici ïa foule ;
Surtout ce Louvre et ses pompeux jardins
Palais magique., on dirait un mirage
Que le soleil colore à son coucher.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
E t ses chaumes et son clocher !

Convertissez le sauvage idolâtre ;


Près de mourir, il retourneà ses dieux.
Là-bas, mon chien m'attend auprès de Pâtre ;
Ma mère en pleurs repense à nos adieux.
J'ai vu cent fois l'avalanche et l'orage.
L'ours et les loups fondre sur mes brebis.
Ah ! rendez-moi, rendez-moi mon village,
E t la houlette et le pain bis-

Q,u'entends-je, 6 ciel ! pour moi rempli d'alarmes


" Pars, dites-vous; demain, pars au réveil.
i e
C'est l'air natal qui séchera tes larmes ;
" Va refleurira ton premier soleil."
Adieu, Paris, doux et brillant rivage,
Où l'étranger reste comme enchanté.
Ah ! je revois., je revois mon village
E t la montagne où je suis n é .
94.
A £5L>i>

LA BRIGANTINE.

L a brjgantine,
Qui va tourner.
Roule et s'incline
Pour m'entraîner.
O vierge M a r i e !
Pour moi priez D i e u .
Adieu, patrie ;
Provence, adieu !

Mon pauvre père


Verra souvent
P â l i r ma mère
A u bruit du vent.
O vierge Marie !
Pour moi priez Dieu.
Adieu, patrie ;
M a mère, adieu !

M a sœur se l è v e ,
E t dit : D é j à
J'ai fait un r ê v e ,
Il reviendra.
O vierge Marie !
Pour moi priez D i e u .
Adieu, patrie ;
M a sœur, adieu !
C , DiLAVISNE.
95

P R E S DU B E R C E A U .
Comme un pêcheur, quand l'aube est p r c s d ' é c l o r e ,
Court épier le réveil de l'aurore,
Pour lire au eiel l'espoir d'un j o u r serein,
T a m è r e , enfant, rêve à ton beau destin.
Ange des cieux, que seras-tu sur terre ?
H o m m e de paix, ou bien homme de guerre ?
P r ê t r e à l'autel, beau cavalier au bal î
Brillant p o è t e , orateur, g é n é r a l '{
E n attendant, sur mes genoux,
Auge aux yeux bleus, endormez-vous.
Son œil le dit, il est né pour la guerre :
D e ses lauriers comme j e serai i i c r e !
Il est soldat ; le voilà g é n é r a l .
I l court, il v o l e , il devient maréchal !
L e voyez-vous, au sein de la bataille,
L e front serein, traverser l a mitraille 7
L ' e n n e m i fuit ; tout cède à sa valeur.
S o n n e z , clairons, c a r mon fils est vainqueur.
E n attendant, sur mes genoux,
B e a u g é n é r a l , endormez-voes.
Mais non, mon fils, ta m è r e en ses alarmes
Craindrait pour toi le j e u sanglant des armes ;
Coule plutôt tes jours dans le saint lieu,
L o i n des périls, sous les regards de Dieu ;
S o i s cette lampe à l'autel allumée,
D e la p r i è r e haleine parfumée ;
Sois cet encens qu'offre le séraphin
A l ' E t e r n e l avec l'hymne divin.
E n attendant, sur mes genoux,
M o n beau l é v i t e , endormez-vous.
13

PardoD, mon Dieu, dans ma folle tendresse,


J'ai de vos lois méconnu la sagesse-
Si j'ai péché, ne punissez que moi :
J'ai seule en vous, Seigneur, manqué de foi.
Près d'un berceau, le rêve d'une mère
Devrait toujours n'être qu'une prière.
Daignez, mon Dieu, choisir pour mon enfant :
Vous voyez mieux, et vous l'aimez autant.
Et toi, mon ange aux yeux si doux !
Bepose en paix sur nies genoux.
A . NETTEMENT.

S h h LA P R I E R E DU P Ê C H E U R ,
Refrain.
La nuit profonde
S'étend sur l'onde ;
La foudre gronde
Avec fureur.
Sainte Madone,
O ma patronne !
Sois toujours benne
Pour le pêcheur.

Allons, courage !j
Bravons l'orage : ;
Pourquoi gémir,
S'il faut périr V
Sire natale,
Sois moins fatale
A mon retour
En m»w aéjouy.
97

Le not rebelle
Trompe mon aèle ;
Vite en travail.
Mon gouvernail.
Tu vois ma peine,
O Carthagcne :
Pour moi, ce soir,
Non, plus d'espoir !
A coup de rames
-J Brisons les lames.
Le vent du nord
Me pousse à bord.
Ah ! la tempête
Fond sur raa tête !
Tout est en feu . . .
Grâce, ô mon Dieu !
C H E V E I . D E CHAELEMASME.

A 2£*4?? LE RETOUR.

Apaise-toi, vague fatale :


Voici le moment fortuné ;
J'aperçois la rive natale,
Le beau pays où je suis né.
Oui, je le reconnais aux transports que j'éprouve,
C'est lui, c'est mon pays qu'on découvre là-bas ;
Semblable à l'ami qu'on retrouve,
Et qui de loin nous tend les bras.
Apaise-toi, &c.
98

C'est ma ville ; v o i l à ses falaises, ses g r è v e s ,


S o n é g l i s e , son port avec ses v i e u x murs g r i s .
D i e u ! j'entends, c o m m e dans m e s r ê v e s ,
M a m è r e appeler à grands cris.
Apaise-toi, & c .

J e vais d o n c la revoir, à bonheur sans m é l a n g e !


V o i r ma m è r e ! Une m è r e , e s t - i l r i e n de plus doux î
C est l'étoile, c'est le bon ange
Q u e le Seigneur nous donne à tous.
Apaiae-toi, &c.

A 3 J lu
r
LA MUSIQUE.

A I R : La farira dondaine, gui •'

Purgeons nos desserts


D e s chansons à boire ;
Vivent les grands airs
Du Conservatoire !
Bon !
L a farira d o n d a i n e ,
Gai !
L a farira d o n d é .

L ' O p é r a toujours
F a i t bruit et merveilles ;
On y voit les sourds
Boucher leurs oreilles.
Bon ! ko.
99

Acteurs très-profonds,
Sujets de disputes,
Messieurs les bouffons,
Soufflez dans vos flûtes.
Bon ! &c.
Et TOUS, gens de l'art,
Pour que je jouisse,
Quand c'est du Mozart,
Que l'on m'avertisse.
Bon ! &c.
Nature n'est rien ;
Mais on recommande
Goût italien
Et grâce allemande.
Bon ! & c
Si nous t'enterrons,
Bel art dramatique, .
Pour toi nous dirons
La messe en musique.
Bon!&c.
BXBANGER.

L E S DEUX F R E R E S SAVOYARDS.

Mon frère, mon frère,


Vois-tu là-bas, là bas, là-bas 1
—Mon frère, mon frère,
C'est le pays ; pressons le pas.
Duo. Rien qu'en voyant notre campagne,
Je sens déjà battre"m.on cœur.
îOO

V o i s , tout là-bas, c'ert l a montagm ;


L a montagne, c'est le bonheur.
O u i , tout là-bas, c'est la montagne ;
C ' e s t le bonheur, c'est le bonheur.

C o m m e , en quittant notre village,


Nous ressentions de la douleur !
—Je te disais : Prenons courage-
M a i s chaque pas brisait mon cœur.
Autant que moi tu souffrais, oui, mon frère ;
C a r tu pleurais ; v a , je le croyais bien-
—J'aurais voulu te cacher, mon bon Pierre,
T o u t mon chagrin, et prendre tout le tien.
M o n frère, & c .

Q u e l bon soleil ! sens-to, mon frère î


C ' e s t un bon temps pour nos moissons.
— C ' e s t un bon temps pour notre m è r e .
Notre mère que nous aimons.
Notre voyage attristait sa vieillesse ;
E l l e pleurait déjà depuis longtemps ;
Mais le bon Dieu, qui v o y a i t s a tristesse,
A rappelé bien vite ses enfants.
M o n frère, & c .

E t maintenant, bien de l'ouvrage


A qui sans nous ramonera.
— E t maintenant, un bon voyage
A u savoyard qui partira.
Nous lui dirons ce que notre bon père,
T u t'en souviens, nous a dit en mourant :
u
Heureux l'enfant qui rapporte à sa mère
" Un cœur honnête avec un peu d'argent !
M o n frère, &e.
IOI

L'HOMME RANGÉ.

A I R : Eh ! Ion lan la, landerirette.

Maint vieux parent me r é p è t e


Q u e j e mange c e que j ' a i .
Je veux à cette sornette
Répondre en homme rangé :
Quand on n ' a rien,
Landerirette,
On ne saurait manger son bien.

Faut-il que je m'inquiète


P o u r quelques frais superflus î
S i ma concience est nette,
M a bourse l'est encor plus.
Quand on n ' a rien,
Landerirette,
On ne saurait manger son bien.

U n gourmand dans son assiette


Fond le bien de ses aïeux ;
M o n hôte à crédit me traite ;
J'ai bonne chère et vin vieux.
Quand on n'a rien
Landerirette,
On ne saurait manger son bien.

Q u e Dorval, à la roulette,
A tout son or dise adieu ;
J ' y joûrais bien en cachette ;
102

M a i s il faudrait mettre aux jeu . . .


Quand on n'a rien
Landerirette,
On ne saurait manger son bien.

BKBANGEB.

P L A I N T E S DU CAPTIF.

Q u e mon sort est funeste !


A d i e u , mes bons a m i s !
A u régiment j e reste ;
Vous allez au p a y s .
Oui, j ' e n perdrai la v i e ,
Par la douleur que j ' a i :
Seul de ma compagnie,
Je n'ai pas mon c o n g é .
Adieu donc, mes amis,
Adieu donc, mon p a y s .

Ils vont revoir leur mère,


E t la mjenne auprès d'eux
V a courir la première
Pour combler tous ses vœux.
O mère que j ' a d o r e !
T u les verras sans moi.
Combien longtemps encore
Je vais penser à toi !
Adieu donc, Ssc.
103

Canton, qui m'as vu naître


E t qui reçus ma foij
J e vais mourir peut-être,
E t pour d'autres que toi !
Ah ! calmez m a souffrance ;
Dites à mes amis,
Que si je meurs en France,
Mon cœur est an pays.
Adieu donc, &c.

APRÈS LE TRAVAIL. ^

Remplie est notre tâche,


E t vive le plaisir !
Après travail, relâche :
Courons nous divertir.

Au jeu qui nous réclame


Livrons-nous pleins d'ardeur :
La joie inspire l ' â m e ,
Eft plaît au Créateur.
Que ce Dieu tntclairc
Pour nous est généreux I
Ainsi qu'un tendre père,
Il comble tous nos vœux.

De notre jeune enfance


Toujours il est l'appui ;
Sans borne est sa clémence :
Louange et gloire à lui.
104

LE PAUVKE.

J e suis pauvre ; sur la t e r r e


Nul ami ne m'est resté ;
Tous ont fui, quand la misère
S'est assise à mon c ô t é .
Solitaire
Sur la terre,
Sans amis,
Pauvre j e vis.

E t pourtant, dans mon enfance ;


J e m'en souviens, autrefois
J'étais heureux d'espérance*
Dans l'avenir j'avais foi ;
Mais l'aurore
S'évapore ;
Vient Je soir,
E t nul avoir !

Chut ! écoutons : l'heure sainte


Sonne et dit : P a u v r e , à genoux.
A vos pieds j e mets m a plajnte ;
Vierge, j e m'a,dresse â vous.
Mon amie,
C'est M a r i e ;
Mon espoir
E s t soa pouvoir.
PETIT PIERRE L E MARIN.

Petit Pierre était enfant.


E t déjà marin dans l'âme.
I l voguait sur le torrent j
E t jouait avec sa rame.
R ê v a n t de brillants destins,
A sa m è r e , qui soupire,
I l ne parlait que navire
j E t que voyages lointains.
" A h ! ne crains rien, bonne mère ;
" V a , je feraimoii c h e m i n . "
Ainsi disait Petit P i e r r e ,
Petit Pierre le marin.

" Petit P i e r r e , il faut partir 1 . . .


" M a l g r é ma douleur affreuse,
x <
De ton brillant avenir
" Suis la route glorieuse. "
L a pauvre m è r e pleura,
E t , pendant vingt ans d'absence,
S i grande était sa eoivffranée>
Q u e sa raison s'égara.
" A h ! disait la tendre mère,
" Dieu, toi qui vois mon chagrin,
" Prends pitié dé P e t i t Pierre,
" Petit Pierre le marin."

U n jour elle entend des c r i s . . •


N o n , non, cè n'est point iri rêve ;
Dans ses d e u ï bras, -c'est'son fil*
Q u ' e l l e presse et qu'elle enlève.
106

Bonhenr qui n'a pas d'égal !


Ah ! combien sa mère est fière î
Il porte, le Petit Pierre,
Le riche habit d'amiral !
E t Pierre dit à sa mère :
" Vois ! j'ai bien fait mon chemin.
" Embrasse ton Petit Pierre,
" Petit Pierre le marin. "

f
E N VERITE JE VOUS LE DIS.

En vérité je vous le dis,


Jeune» espoirs de vos familles,
J'ai quitté nos vertes charmilles,
Nos champs, nos bois, nos prés fleuris ;
J'ai visité, dans mon jeune âge,
J'ai visité bien des pays :
Rien n'est si beau que mon village,
En vérité je vous le dis.
Rien n'est si beau que nos moissons,
uand le soleil les a mûries ;
ien n'est si beau que nos prairies,
Quand nous y dansons aux chansons.
Sur le penchant de nos collines
Lorsque le soir on est assis,
Rien n'est si beau que nos chaumines,
En vérité je vous le dis.

Aucun mortel n'est plus que vou»


Chéri du ciel en cette vie ;
107
L e s rois, à qui l'on porte «nvie,
N ' o n t pas un sort qui soit plus doux :
C a r d a n s s a c l é m e n c e profonde,
D i e u , qui confond grands t t petits,
F i t du bonheur pour tout le monde,
E n v é r i t é j e vous le dis.

V i v e z , vivez dans c e séjour.


Au départ, tout est espérance ;
P u i s les jours sont longs dans l'absence,
E t souvent l'on pleure au retour :
Souvent pour un plus long voyage
C e u x que noue aimons sont partis :
V i v e z , vivez dans c e village,
E n vérité j e vous le dis.

L'ARGENT.

S u r c e globe, argent fait tout,


De l'un jusqu'à l'autre bout.
T e l en a pour son usage,
Qui en voudrait davantage ;
L ' a p p é t i t vient en mangeant :
V o i l à l'effet de l'argent.

L e riche peut a c q u é r i r
R i c h e s s e , honneur e t plaisir j
Il peut pour se satisfaire,
F a i r e agir toute la terre.
L ' i n t é r ê t est son agent :
Voilà l'effet de Vàrgeajt.
Î08

Qu'un nomme à talent n'ait fîen,


Qu'un sot ait beaucoup de bien ;
L'un a l'esprit pour ressource,
Mais l'autre l'a dans sa bourse ;
L e plus sot, c'est l'indigent :
Voilà l'effet de l'argent.
Rustre, lourdeau, débauché,
Jean n'est qu'un ours mal léché ;
Mais il est riche en finance,
On le courtise, on l'encense ;
Pauvre, on se fût ri de Jean :
Voilà l'effet de l'argent.
Paul autrefois n'avait rien,
On disait : C'est un vaurien ;
Mais depuis son héritage,
On dit : C'est un garçon sage ;
C'est le même garnement :
Voilà l'effet de l'argent.
Terminons ces traits divers,
Muse, et laissons là les vers :
Car un pinceau véridique
N e peut braver la critique;
Si l'auteur n'est opulent :
Voilà l'effet de l'argent.

4
"' LES ADIEUX.

J'aurai bientôt quatre-vingts ans ;


Je crois qu'à mon âge il est temjp»
D'abandonner la Via ;
109

A u s s i j e la perds sans r e g r e t .
E t j e tais gaîment m o n paquet :
B o n <>oir, la c o m p a g n i e .

J ' a i g o û t é de tous les plaisirs j


J'ai perdujusques a u x désirs ;
A présent j e m'ennuie.
L o r s q u e l'on n'est plus bon à r i e n ,
O n se retire, et l'on fait bien.
B o n soir, la-compagnie.

L o r s q u e d'ici j e s o r t i r a i ,
J e ne sais pas trop o ù j ' i r a i ;
M a i s en D i e u j e m e fie.
I l ne peut me mener que bien :
A u s s i j e n ' a p p r é h e n d e rien ;
B o n soir, la c o m p a g n i e .
L'ATTAIGKATÎT.

LA VEUVE P U SOLDAI.

P o r t a n t de contrée en contrée
E t son enfant et sa d o u l e u r ,
U n e pauvre femme é p l o r c e
Racontait ainsi son m a l h e u r :
" D ' u n défenseur de l a patrie,
M o r t pour la F r a n c e , en combattant,
M e s bons M e s s i e u r s , j e vous en p r i e ,
S e c o u r e z la veuve et l'enfant,
110
L e b r a v e a suivi la v i c t o i r e
C h e z les p e u p l e s les plus g u e r r i e r s ;
U o c y p r è s . . • p o u r vingt ans de g l o i r e ï
R e m p l a c e ses n o m b r e u x l a u r i e r s .
D ' u u d é f e n s e u r . SEC.

V o y e z c e signe du c o u r a g e ;
Il b r i l l a i t j a d i s sur son c œ u r .
S a c r o i x est l ' u n i q u e h é r i t a g e ,
Q u e n o u s a laissé s a v a l e u r .
D ' u n défenseur, & c

P o u r venger L u t è c e envahie,
Il b a t t i t l ' A n g l a i s , le G e r m a i n ,
M a i s , h é l a s ! il p e r d i t la v i e .
S o n fils e t moi m a n q u o n s d e p a i n . "
D'un défenseur, &c.

L e luxe, l'orgueil, l'opulence


K e f u s a i t l ' a u m ô n e à ses p l e u r s ;
U n i n v a l i d e seul s ' a v a n c e ,
G l i s s e sa bourse a u x v o y a g e u r s .
C e v i e u x soutien de la p a t r i e ,
B l e s s é l u i - m ê m e en c o m b a t t a n t ,
D ' u n e m a i n t r e m b l a n t e et m e u r t r i e
S e c o u r u t la v e u v e et l ' e n f a n t .

A ÎS'll LE SOLITAIRE.
Q u i t r a v e r s e à la n a g e
Nos rapides torrents?
Q u i sur un r o c s a u v a g e
V a défier les vent* ?
111

A l'ours dans sa tanière


Qui donne le trépas t
D e la biche l é g è r e
Qui devance les pas ?
Chut ! C ' e s t le solitaire :
Il fait tout, il voit tout,
Il sait tout, est partout.

Qui sans cesse protège


Nos villes, nos hameaux ?
Qui défend de la neige
Nos moissons, nos coteaux ?
Qui féconde la terre t
Qui fait fleurir nos bois 1
Qui rend le ciel prospère
A tous nos villageois ?
C'est, & c .

Qui conserve à la branche


Ses fruits prêts à mûrir î
E t sous une avalanche
Qui vient nous secourir 1
Qui console une m è r e
E n retirant des flots
Un enfant t é m é r a i r e
Disparu sous les eaux 1
C'est, &c.
M. FLANABD.

15
112

L E NOUVEAU DIOGENE.

A r a : Bon voyage, Cher Dumollet,


Diogène,
Sous ton manteau,
Libre et content, je ris et bois sans gêne,
ÏMogùne,
Sous ton manteau,
Libre et content, je roule mon tonneau.
Dans Peau, dit-on, tu puisas ta rudesse ;
Te n'en bois pas, et, censeur plus j o y e u x ,
E n moins d'un mois, pour loger ma sagesse^
J'ai mis à sec mon tonneau de v i n vieux.
Diogène, & c .
O ù j e suis bien, aisément j e séjourne ;
M a i s , comme nous, les dieux sont inconstants ;
Dans mon tonneau, sur ce globe qui tourne,
Je tourne avec la fortune et le temps.
Diogène, & e .
Pour les partis dont cent fois j ' o s a i rire
Ne pouvait èlre un utile soutien^
Devant ç a tonne on ne viendra pas dire :
Toor qui tiens-tu, toi qui ne tiens à rien ?
Diogène, Stc.
-^aime à. fronder les préjugés gothiques
E t les cordons <!c toutes les couleurs ;
Mais étrangère aux e x c è s politiques,
T

M a Liberté n'a qu'un chapeau de fleurs.


Diogène, & c ,
113

Q.u'en un congrès, se partageant le monde,


Des potentats soient trompeurs ou trompée.
J e ne vais point demander à la ronde
Si de ma tonne ils se sont occupés,
Diogène, Sec.

N'ignorant pas où conduit la satire,


J e Fuis des cours le pompeux appareil ;
Des vains honneurs trop enelin â médire,
Auprès des rois je crains pour mon soleil-
Diogène, &c.

Exempt d'impôt, déserteur de phalange,


J e suis pourtant assez bon citoyen :
Si les tonneaux manquaient pour la vendange,
Sans murmurer' je prêterais le mien.
Diogène, &c.
BEBAN'JEE.

LA FIN DU JOUR. // $3

La fin du jour
Rend aux plaisirs l'habitant du village.
Voyez les bergers d'alentour
Danser en chantant tour autour :
Ah ! comme on aime, après l'ouvrage,
La fin du jour !
La fin du jour
Rend le bonheur aux oiseaux du bocage :
Bravant dans leur obscur séjour
Il*

L a griffe du cruel vautour,


Ils vont guetter sous le feuillage
La fin du jour.

La fin du jour
M e voit souvent commencer un bon somme.
E t pour descendre au noir séjour,
En fermant les yeux sans retour
Je dirai gaîment : C'est tout comme
La fin du jour.
ARMAND GOUFFC.

\ %$"%'• C H A N T DE L ' O U V R I E R .

Bon ouvrier, voici l'aurore,


Qui te rappelle à tes travaux.
Ce matin, travaillons encore ;
L e soir sera pour le repos.
Tout seul, on s'ennuie à l'ouvrage :
Pour l'abréger, on 1^ partage ;
A ton aide chacun viendra.
Du courage,
A l'ouvrage ;
Les amis son toujours là.

Bon ouvrier, c'est le dimanche,


Que tout chagrin est oublié ;
Quelle gaîté naïve et franche !
Trinquons un verre à l'amitié.
Boire tout seul est un outrage :
En bon compagnon l'on partage
315

Cette bouteille que voilà.


Du courage,
A l'ouvrage •
L e s amis sont toujours là.

L E REFRAIN D E S OUVRIERS,

Refrain-
Chantons, chantons, dans chaque métier :
L e chant ranime un bon ouvrier ;
L e chant nous délasse ;
Pour que le temps passe,
Chantons, chantons, dans chaque métier,
Oui, dans chaque métier.

T e l qui gagne à peine


Pour une semaine,
Chante à perdre haleine
Pour mieux s'étourdir;
U n autre en revanche,
Rabottant sa planche,
Dit : Jusqu'au dimanche
C'est mon seul plaisir.
Chantons, & c .

T r o p jeune pour être


Habile à connaître
L ' é t a t de son maître,
Q u e dit l'apprenti 1
E t que lui réplique.
116

Soit dans sa boutique,


Soit dans sa fabrique,
L'ouvrier fini ? .. .
Chantons, chuntons, & c

Pour faire un clief-d'ceuvre,


Dès l'aurore à l'œuvre,
Le pauvre manœuvre
Croiserait ses bras;

Et sur son ouvrage,


Le front tout en nage,
I! perdrait courage,
S'il ne disait pas :
Chantons, chantons, &c.

Couvreur, ébéniste,
Menuisier, lampiste,
Maçon, machiniste,
Doreur, tonnelier:
Chacun d'eux se vante
D'avoir, lorsqu'il chante.
L'âme plus contente
Qu'un riche banquier.
Chantons, chantons, &c.

BARCAROLLE D E LA MUETTE,

Amis, la matinée est belle :


Sur le rivage assemblez-vous ;
Montez gaiment votre nacelle,
Et des vents bravez le courroux»
117
Conduis ta barque avec prudenee.
!
J. eeiieur parle bas ;
s

Jette tes filets en silence j


Pêcheur, parle bas ;
L e roi des mers ne t'échappera pas.
L'heure viendra : sachons l'attendre j
Plus tard, nous saurons la saisir.
Le courage fait entreprendre ;
Mais l'adresse fait réussir.
Conduis, 8&c.
Pécheur, sur la mer orageuse
Brave la mort ; va, ne crains rien ;
Pour une action périlleuse,
Vogue saus peur, en vrai marin.
Conduis, &c.

Ne redoute pas la haleine ;


L e temps est calme, il faut partir ;
Tente une conquête incertaine.
Le brave craint-il de mourir i
Conduis, &c.

r
LE CANOT. *• ~ *

A I E : Amis, la matinée est belle-


Joyeux viveurs, l'onde est tranquille ;
L e soleil dore l'horizon :
Montons sur le canot agile j
Que chacun prenne un, aviron-
118

De l'ensemble ! allons, du courage ï


Contre le courant
Nous saurons avoir l'avantage,
Malgré voile et vent.
Gagnons, ramons, gagnons toujours avant !

Au terme de notre voyage,


Un festin tout prêt nous attend,
Pour ranimer notre courage :
Ramons, et nous boirons d'autant.
Des plus vieux fûts, en abondance,
Nous aurons le choix ;
Mais j) nous faudra, par prudence,
Borner nos exploits,
Pour qu'en marchant nous puissions rester droits.

L a nuit à la hâte s'avance :


Gais viveurs, il faut repartir ;
Appareillons en diligence ;
Pour aujourd'hui, trêve au plaisir.
Mais aviint de quitter la rive,
Tous, silence à bord !
L e péril est en perspective :
Au large ! . . . et d'accord,
Ramons . * • enfin, nous touchons à bon port.

MON R O C H E R D E S A I N ' S M A L O .
A tout je préfère
Le toit de ma mère,
Mon rocher de Saint Malo,
Que l'on voit sur l'eau,
De loin, sur l'eau.
119

" Monsieur Dngaym'a dit: "Tient,


" Veux-tu venir avec moiî
" Ta seras homme de guerre,
" Montant la flotte du roi.
" Va, laisse, là ton hameau,
" Pour mon grand vaisseau si beau ! "
— Non, non, je préfère, Stc.

" Après combats et naufrage,


" De simple mousse du roi,
" Tu deviens, à l'abordaçe,
" Grand amiral comme moi ;
" lit tu verras los climats,
t i M
Où vogue mon beau trois-mats.
—Non)' non je préfère, &c.
" Au lieu do vieillir sans gloire,
" Comme un obscur paysan,
" On meurt un jour de victoire-
" Pour tombe on a l'océan ;
" Puis du brave le requin
*' Prend le corps pour son butin. "
—Non, non, je préfère
Qu?ici l'on m'enterre,
Au rocher do Saint Jlalo,
Que l'on voit sur l'eau,
De loin, sur l'eau.
GUSTAVE LKMOISK.

1S
120

L E S O L E I L DE M A B R E T A G N E .

L a mer m'attend, je veux partir demain.


Sœur, laisse-moi : j ' a i vingt ans, je suis homme j
Je suis Breton, et je suis gentilhomme :
Sur l'océan je ferai mon chemin-
— Mais si tu pars, mon frère,
Que ferai-je sur terre 1
Toute ma vie, à moi,
Tu sais bien que c'est toi . . .
Oh ! ne va pas loin de notre berceau ;
Reste avec moi, ta sœur et ta compagne.
On vit heureux à la montagne,
E t puis de la Bretagne
L e soleil est si beau !

— Sur un beau brick, qui portera ton nom,


Je reviendrai dans un an capitaine;
J'achèterai ces bois, ce beau domaine,
Et nous serons les seigneurs du canton.
—Mais n'as-tu pas, dit-elle,
Notre pauvre tourelle 1
Pour trésor, le bonheur 1
Pour t'aimer, tout mon cœur 1
Oh ! ne va pas &c.
s

Mais il partit, quand la foudre grondait.


Dix ans passes, de-, lui point de nouvelle !
•Près du foyer, sa compagne fidèle
Pleurait toujours et toujours attendait.
Un jour, à la tourelle,
Un naufragé l'appelle,
Lui demande un abri . . .
" C'est lui ! mon Dieu ! c'est lui ! "
— Oui, sœur, c'est moi ; je reviens au berceau :
J'ai tant souffert loin de toi, n;a compagne!
Mais je l'oublie, en voyant ma montagne ;
O ma chère Bretagne !
Que ton soleil est beau !

A S
CHANSON DE ROLAND,

Où vont tous ces preux chevaliers,


L'orgueil et l'espoir de la France ?
C'est pour défendre vos foyers
Que leur main a repris la lance ;
Mais le plus brave, le plus fort,
C'est Roland, ce foudre de guerre :
S'il combat, la faulx de la mort
Suit les coups de son cimeterre.
Soldats français, chantons Roland,
L'honneur de la chevalerie,
E t répétons en combattant
Ces mots sacrés : Gloire et Patrie!

Déjà mille escadrons épars


Couvrent le pied de ces montagnes ;
Je vois leurs nombreux étendards
Briller sur les vertes campagnes.
122
Français, là sont vds ëniieniis r
Que pour eux seuls soient les alarmes:.
Qu'ils tremblent : tous seront pnnis . . .
Roland a demandé ses armes !
Soldats français, Sec.

L'honneur est d'imiter Roland,


L'honneur est près de sa bannière,
Suivez son panache éclatant,
Qu'il vous guide dans la carrière.
Marchez, partagez son destin ;
Des ennemis que fait le nombre 'l
Roland combat : ce mur d'airain
Va disparaître comme une ombre.
Soldats français, &c.

Combien soni-ils 1 combien sont-ils t


C'est le cri du soldat-sans gloire ;
L é héros cherche les périls :
Sans les périls qu'est la victoire 1
Ayons tous, ô braves amis,
De Roland l'âme noble et fière :
Il ne comptait les ennemis
Qu'étendus morts sur la poussière.
Soldats français, &c.

Mais j'entends le bruit de son" cor


Qui résonne au loin dans la plaine ;
E h qnoi 1 Roland combat encor î
Il coiobat : 6 terreur soudaine !
J'ai vu tomber ce her vainqueur.
L e sang a ba;2;nc son armare ;
Mais toujours fidèle a l'honneur,
1
Il dit, en montrant sa blessure :
123
Soldats français, chantez Roland r
Son destin est digne d'envie.
Heureux qui peut, en combattant,
Vaincre et mourir pour sa patrie t

L E DÉPART DES RECRUES.

C H ΠU B D E BECnUES.

Entendez-vous la trompette qui sonne 1


Au champ d'honneur il nous faut tous courir.
L'airain mugit et le bronze résonne j
L a loi le veut, nous devons obéir.
Compte sur nous, 6 belle France !
Pour toi toujours prêts à mourir,
Nous te vouons notre vaillance ;
Tu le dis : nous altous partir.

t'NE KECIU:E. .'•

Stapendant, c'est ben grand dommage :


D'quittèrWfûm^aio'ut pour servir ;
De laissëWam'feré ad village'; ''
De l'entend re en partant ge m i r
E t puis dire : " O mon espérance 1
Mon fils, sans toi m'faudra mourir. "
On a le cœur percé comm' d'une lance ;
Mais faut partir, mais faut partir, s.

LE SEEGENT.

S i tu laisses dans ton village


Une inère, un père, une sœur,
12.4.

Arme-toi du noble- courage


Qui des héros forme le cœur.
Revenu du champ de bataille.
Plus tard les pressant sur ton sein,
Heureux sous l'humble toit de paille,
Tu seras fier de ton destin-
LE SERGENT.

Ver.«e, garçon, une pleine rasade :


Demain peut-être il nous faudra mourir.
Donnons au vin une franche accolade :
Le tambour bat, il va falloir partir.
Buvons, mes amis, à la France,
A ses succès, à ses héros,
Aux compagnons de notre enfance?
A nos parents, à nos drapeaux-

LE VIEUX CAPORAL.

E n avant ! partez, camarades,


L'arme au bras, le fusil chargé.
J'ai ma pipe et vos. embrassades ;
Venez me donner mon congé.
J'eus tort de vieillir au service ;
Mais pour vous tous, jeunes soldats,
J'étais un père à l'exercice.
Conscrits, au pas;
Ne pleurez pas,
JSTc pleurez pas ;
Marchez au pas.
Au pas, au pas, au pas, au paa !
125

Un morveux d'officier m'outrage !


Je lui fends . . . il vient d'en guérir.
On me condamne, c'est l'usage :
L e vieux caporal doit mourir.
Poussé d'humeur et de rogomme,
Rien n'a pu retenir mon bras-
Puis, moi, j ' a i servi le grand homme.
Conscrits, &c.

Conscrits, vous ne troquerez guèrea


Bras ou jambe contre une croix.
J'ai gagné la mienne à ces guerres
Où nous bousculions tous les rois-
Chacun de vous payait à boire,,
Quand j e racontais nos combats.
Ce que c'est pourtant que la gloire !
Conscrits, &c.
Robert, entant de mon village,
Retourne garder tes moutons.
Tiens, des jardins vois-tu l'ombrage 1
Avril fleurit mieux nos cantons.
Dans nos bois, souvent dès l'aurore,
J'ai déniché de frais appas.
Bon Dieu ! ma mère existe encore !
Conscrits, & c
Qui là-bas sanglote et regarde ?
Eh ! c'est la veuve du tambour.
En Russie à l'arrière-garde,
J'ai porté son fils nuit etjour.
Comme le père, enfant et femme
Sans moi restaient sous les frimas :
Elle vaprier pour mon âme.
Conscrits, &c.
126

Morbleu !<ma pipe s'est éteinte.


N o n pas encore . . . Allons itant mienx !
,Nous allons entrer dans l'enceinte ;
v
Gà ! ne me bandez pas les yeux.
Mes amis, fâché de la peine.
Surtout ne tirez point trop bas,
E t qu'au pays Dieu vous ramène-
Conscrits, &c- ^

Q U E S T I O N S DU J E U N E SAVOYARD.

On m'assurait dans les montagnes


Qu'on faisait fortune à Paris ;
Moi, j'allais quitter nos campagnes,
Quand l'oncle André m'dit, tout surpris :
A Paris, crois qu'on ri'pënt rien faire
Qu'à force d'or
Pauvre petit, ah ! reste encor
Dans ta chaumière 1
J'H réponds : Mon oncle', dans c'te ville,
Est-c'que je n'trouv'rons pas d'amis ?
—Ah ! qù'i m'dit : Tu" crois" ça facile ;
Mais à ton.'â{r*,-c'est ben permis j
Des amis ! oui, l'on peut s'en faire,
Quand on a d ' I ' o r . . .
Pauvre petit, &c.
J'ii répliq' : Pour ma faible enfance
Dieu m'donn'ra ben un protecteur.
—Non, ra'f'ait-il, perds-en l'espérance ;
127

C'«st u n ' e h o s ' si r a r ' q u ' u n bon c œ u r !


O n n ' t r o u v ' pas d ' a p p u i t u t é l a i r e \
C'est ceux qu'ont d'I'or . - .
Pauvre petit, & c .

M o n o n c P , v o u s P r i v e z au pus j u s t e ,
J ' o n s d ' I ' h o n n c u r c t d'Ja p r o b i t é ;
J'somni' travail'enr, j ^ o m m ' i V a a C j j ' s o m n i '
— M o n n ' v c u , tu dis la v é r i t é ; [juste»
M a i s tout ç a n ' t e s e r v i r a g u è r e :
T u n'as p o i n t d ' o r . . -
Pauvre petit,

M o n oncle, où donc trouver, j ' v o u s p r i e ,


L a bon*6, la f r a n c h e a m i t i é \
P o u r l ' o r p h e î î t i . une p a i r i e ' ?
P o u r l ' i n f o r t u n e , \x\ p i t i é
— M o n n ' v e u , c ' n ' e s t ià q u ' u n ' v a i n ' c h i m è r e ,
S i l'on manqu' d'or . . •
Pauvre petit, & c

M o n n ' v e n , ne c h e r c h ' pas la f o r t u n e ,


D's a m i s , n i d ' p t a î s i r à P i i r i s :
C ' t i - I à qu'est dans l a c l a s s ' c o m m u n e
N ' y t r o u v ' que de3 r ' f u s , des m é p r i s ;
E t dans tout on n ' s ' y t i r ' d ' a f f a i r e
Qu'avecque d'Por.
Pauvre petit, & c .

ï6
Ï2&

L E S PAVES-.

Aimant les vérités bien crues,


Messieurs, le pavé m'inspira ;
C'est un sujet qui court les rues*
E t le peuple m'applaudira.
Depuis dix-huit cent trente, en France*
On les a dix fois soulevés :
C'est un sujet de circonstance ;
Entendons-nous sur les payés.
De tous côtés mon œil découvre
De vils flatteurs auprès des rois ;
On en a donc pavé le Louvre \ . . .
Ce sont les mêmes chaque fois.
En vain, pour leur donner la chasse*
Le peuple en armes s'est levé ;
La sottise est toujours en place,
E t le talent sur le pavé,
En France, malgré l'anarchie.
Nos annales se conservaient ;
Les beaux faits de la monarchie-
Sur lo marbre se retrouvaient \
De Fempire les jours de gloire
Sur le bronze furent gravés s
Quant à notre dernière histoire^
On la lira sur les pavés.

On n'avait pas le temps d'attendre?


Aux jours de nos premiers combats %
12.9
Tous le» matins, on allait prendre
Les officiers chez les soldats.
Ah ! si la France fait éclore
Tant de généraux éprouvés,
Le canon peut en faire encore
Sortir de dessous les pavés.

L E S GRANDS NEZ.
ÀIB de la garde royale.
Il existe encore au monde
De funestes préjugés ;
Il est des lieux où l'on fonde
D'admirables procédés :
A Paris, où l'on peut dire
Que le public est savant,
J'ai vu des gens oser rire
De mon grand ne*: ! . . . et pourtant
Les grands nez
Ne sont pas à dédaigner-

Pour notre bonheur sur terre ?

Disait Babet à Gotton,


Ne laissons jamais, compère^
Les hommes hausser le ton ;
Menons-les tous au contraire
A leur insu par le nez.
Mais comment voulez-vous faire*
S'ils ont des roquets de nez ?
' Les grands nez
sontjïai à dédaigner-
230

Kombreux agents de police,


Fiers de leurs petits talents ;
Maints douaniers, par semée
Forcés d'éplucher les gens ;
Chasseurs désirant an gîte
Surprendre quelque gibier.
Vous diront: Pour tout mérite,
Il faut qu'un chien ait du liez i
Les grands nez
Ne sont pas à dédaigner.
De ceux qui portent lunette
J e réclame le concours ;
Au refrain que je répète
Qu'ils soient de quelque secours,
Puisque l'instrument fragile,
Qui leur donne de bous yeux,
Doit sur le nez, immobile
Rester sans cesse . . . pour eus.
Les grands nez
Ne sont pas à dédaigner.

LE PAYSAN LUCAS.

Ainsi, content dons sa chaumière,


Au lien d'accuser le destin,
Lucas égayait sa misère,
Chantant ce consolant refrain ;
Mais, à la fin de son ouvrage,
Le soir amène le repos.
131

Lacas regagnait son village,


Chantant, en portant ses fagots;
Dans cette vie,
Où tout varie,
Où chaque pas
Mène au tombeau,
Portons gaîment
Notre fardeau.
Un des fils qui faisait sa gloire
Voulait défendre son pays ;
Mais, hélas ! bientôt la victoire
A maltraité ses favoris.
Du sort méprisant les injures,
En route, Je jeune héros
De lauriers couvrait ses blessures,
Fredonnant, le suc sur le dos :
Dans cette vie, & c

Pauvres, qui guettez l'espérance,


E t n'obtenez que la pitié y
Martyrs d'une noble vaillance,
Qu'elle n'a nourris qu'à moitié ;
Vieillards, que la tombe muette
Avec effroi repousse encor ;
Bergers, qui portez la houlette,
Rois, qui portez le sceptre d'or ;
Dans cette vie, u.c.

Tout nous prouve que sur la terre


Chacun a.son lot de douleur;
3
Tout n en pas peine à la chaumiè
Au palais, tout n'est pas bonheur
L a crainte assiège la richesse,
LIÉ p a u v r e y t r o u v e m a i n t é e u e i i ;
3La j o i e a ses j o u r s d e t r i s t e s s e ,
E t la gloire a ses j o u r s d e deuil-
"Dans c e t t e v i e , & e .

'43
MON PAUVRE PIERRE.

A d i e u ! ma b o n n e m è r e !
J e p a r s : le t a m b o u r b a t .
P u i s q u e y sais m i l i t a i r e s
F a u t que j ' f a s s e m o n état*
N e crains rien : à la g u e r r e ,
J ' a u r a i bien soin d e m o i ,
E t le c i e l , j e l ' e s p è r e ,
M e conservera p o u r t o i .
K a m p a m p l a n , varop'irnplanj rampamplaBj
Tambour battant,
Oli ! r a m p a m p l a n .

M ' s i e u r P c u r c , j ' v i e n s v o u s faire


E n partant mes adieux.
S i quelque m i l i t a i r e
"Venait vous d i r e en c e s l i e u x
Q u ' i l a vu m o u r i r P i e r r e
P o u r la F r a n c e et son r o i ,
NMites rien à ma m è r e .
E t priez Dieu pour moi •
R a m p a m p l a n , &c-

L ' s a c sur P d o s , vers la plaise^


A m i s , dirigeons-non*
Î33

J'sais ben qu'ça fait d'ia pefae ;


Mais il faut filer doux.
Dans un moment d'alarme,
Pour chasser le chagrin,
Renfonçons une larme?
E t chantons ce refrain :
Rampamplan, & c

L e cœur gros, l'œil humide*


L'habitant du hameau
L e voit d'un pas rapide
Descendre le coteau ;
Bientôt, sur l'autre r i v e ,
Ils se perdent enfin,
E t l'oreille attentive
Peut seule entendre an loin :
Rampamplan, & c .

LE JEUNE MILITAIRE.

N e v ' i â que six mois


Que j ' p o r t ' l'uniforme^
E t les plus sournois
Disent que j ' forme.
Je n ' suis plus c ' Jean-Jean:
Q u ' o n trouvait si bête ;
A tabP j ' a i d ' l a tête ;
J' bats un rataplan,
Rampamplan,
J' bats un rataplan ;
P faia du bruit çBmm' quatre ;
?
P o u r un r i e n j v e u x m ' battre :
J
A u s s i 1' m o n d d i t - i l
Q u e j ' sis ben g e n t i l .

P o u r m a r c h e r au p a s ,
J V o n s pas la t ê t ' dure :
J W a r r o n d i s les bras ;
J e prends d' la tournure ;
J e t e n d s le j a r r e t ,
E t , quand j ' m e dandine,
Dieu ! que j ' a i b o n n ' mine !
A v e c mon briquet,
Rampampianj
A v e c mon briquet.
J e valse a v e c g r â c e ;
J e sais f a i r ' des passes :
A u s s i 1' m o n d e d i t - i l
Q u e j ' sis ben g e n t i l .

Q u a n d le r é g i m e n t
P a s s * d.ins un v i l l a g e ,
J'.saJs en un m o m e n t
jVTett'tout au p i l l a g e ;
Poulets et dindons.
Je vous prends en traître ;
O n n ' v o i t pins reparaître
C e u x que j'aitrapons,
Rampamplan,
C e u x que j'attrapons,
S i l'on m e q u e r e l l e ,
Je cass' la vaisselle :
Aussi V mond* dit-il
Q u e j * sis ben g e n t i l .
135

LUS GUEUX.

Refrain-

L e s g u e u x , les g u e u x
S o n t des g e n s h e u r e u x ,
Ils s'aiment entr'eux :
V i v e n t les gueux.

Des gueux chantons la touange.


Q.ue d e g u e u x h o m m e s d e b i e n !
JU f a u t q u ' e n f i n l ' e s p r i t v e n g e
L'honnête homme qui n'a rieu.
Les gueux, &x.

O u i , le b o n h e u r est facile
A u s e i n d e la p a u v r e t é :
J ' e n atteste i"évangile,
J ' e u atteste m a g a î t e .
Les gueux, &c.

Au Parnasse la misère
A longtemps r é g n é , dit-on :
Q u e l bien p o s s é d a i t H o m è r e ?
U n e b e s a c e , un b â t o n .
L e s g u e u x , SLC.

V o u s qu'afflige la d é t r e s s e ,
S o n g e z que plus d'un h é r o s ,
D a n s le s o u l i e r q u i l e b l e s s e ,
P e u t r e g r e t t e r se8 sabots*
L e s gueux, &e.
Sa faste qui vous étonne,.
I / e x i l pimitplus d'un grand j
ÎHogène, dans sa tonne.
Brave en paix un conquérant-
Les gueux, & c .

D'un palais l'éclat vous frappe ;


l i a i s i'enniii vient y gémir.
On petit bien manger sans nappe ;
Sur la paille on peut dormir.
L e s gueux, Sic.
BERAIÎGER ,

L A DOT DE L ' A U V E R G N E .

P o u r dot ma femme a cinq sous


M o i quatre, pas davantage.
P o u r monter notre ménage,
>'emme, comment ferons-nous t
— Cinq sous !
— Ci.oq .sons ,
P o u r monter notre ménage.
— Cinq sous-î
— Cinq tous.
F e m m e , comment ferons- nous t

— E h bien, nous achèterons,


TJn petit pot pour soupière j
A v e c la même cuillère
Tous les deux nous mangerons»
—Pour dot, & c .
Ï31

— Tîhbien, noue vendrons de Pesa,


•Que l'on trouve à la rivière -j
Tous deux à la tirnonnière,
Sous traînerons le tonneau.
— Pour dot, &c,

— Puis le dimanche au sîint lieu,


Nous ferons notre |>rière ;
A l'église sur la pierre,
Gratis on peut prier Dieu.
— Pour dot, hc.

A 5
LA CROIX D E M A MÈRE.

A I R : Un jour pur, Sfc.

•Celle qui m'a donné la vie


Est dans le champ des noirs cyprès,
Sous la froide pisrre endormie^
Pour ne se réveiller jamais.
Dans ce lieux sombre et solitaire,
Tous les jours je verse de* pleurs ;
Au pied de la croix de ma mère
J e prie et j e sème des fleurs.

Dans mon pieux pèlerinage,


J e crois entendre autour de moi
8a voix à travers un nuage,
<Jui « l e d i t : " J e veilla .sur toi- "
138

Et, comme un baume salutaire,


Ces mots apaisent nues douleurs.
Au pied de la croix de ma mère
Je prie et jesèmc des fleurs-.

Sur la terre pauvre orpheline,


Je ne savais plus que pleurer ;
Mais vers hi croix je m'achemine,
E t sa voix me dit d'espérer-
J e me résigne., et sur la pierre
Où seront un jour nos deux cœurs,
Au pied de la croix de ma mère.
Je prie et je sème des fleurs.

/' 'Si?')* LE VIOLON BRISÉ.

Viens, mon chieu, viens, ma pauvre bete ;


Mange, malgré mon désespoir.
Tl me reste un gâteau de fête :
Demain nous aurons du pain noir.

Les étrangers, vainqueurs par ruse,


M'ont dit hier dans ce vallon :
" Pais-nous danser. " Moi, je refuse.
L'un d'eus brise mon violon.
C'était l'orchestre du village.
Pins de l'êtes ! plus d'heureux jours !
Qui fera danser sous l'ombrage ?
Qui réveillera les amours 1
139
Viens, mon chien, viens, ma pauvre béte ;
Mange, malgré mon désespoir.
Il me reste uu gâteau de fête :
Demain nous aurons du pain noir.

Combien sous l'orme et dans la grange


Le dimanche va sembler long !
Dieu bcnira-t-il la vendange
Qu'on ouvrira sans violon ?

II délassait des longs ouvrages,


Du pauvre étourdissait les maux ;
Des grands, des impôts, des orages,
Lui seul consolait nos hameaux.
Les haines, il les faisait taire ;
Les pleurs amers, il les séchait*
3 amais sceptre n'a fait sur terre
Autant de bien que mon archet*

Viens, mon chien, viens, ma pauvre bête ;


Mange, malgré mon désespoir.
Il me reste un gâteau de fêle :
Demain nous aurons du pain noir.
BEAAKGEZt,

L E S BOSSUS. <*•"
Depuis longtemps je me suis aperçu
De l'agrément qu'on a d'être bos<u.
Polichinelle, en tout lieu si connu,
Toujours chéri, partout si bien venu,
Qu'en eût-on dit s'il n'eût été bossu ?
340

L o i n q u ' u n e bosse soit un e m b a r r a s ,


î î e c e paquet on fait un f o r t g r a n d c a s .
Q u a n d un bossu P e s t d e r r i è r e et d e v a n t ,
S o n e s t o m a c est à l ' a b r i du v e n t ,
E t sas énaule.-s sont plus c h a u d e m e n t .

T o n s l e s bossus ont o r d i n a i r e m e n t
L e ton comique et beaucoup d ' a g r é m e n t .
Q u a n d un bossu se m o n t r e d e c ô t é ,
I I r o g n e en lui c e r t a i n e m a j e s t é
Q u ' o n n e peut v o i r sans e n ê t r e e n c h a n t é .

Si j ' a v a i s eu les trésors d e C r é s u s ,


J'uur.iis r e m p l i m o n p'tlais d e bossus.
O n aurait vu p r è s de m o i , nuit et j o u r .
T o u s les bossus s ' e m p r e s s e r tour à tour
D e m o n t r e r leur é m i n e n c e à la c o u r .

D a n s m e s j a r d i n s , sur i m "beau p i é d e s t a l ,
J ' a u r a i s fait m e t t r e un E s o p e e n - m é t a l ,
E t , par m o n o r d r e , un de m e s substituts
A u i a i t g r a v é p r e s d e ses attributs :
V i v e la bosse e t v i v e n t les bossus !

C o n c l u o n s d o n c , p o u r a l l e r jusqu'au bout,
• Q u ' a v e c la bosse on peut passer partout ;
Q u ' u n h o m m e soit ou f a n t a s q u e ou bourru,
Q u ' i l soit chassieux, n i a / p r o p r e , ma.1 vêtu ;
ï l est c h a r m a n t , p o u r v u . q u ' i l « o i t bossu.
F A I T E P A R UN BOSSU,
N E V E U DE
nt

hVlS CLOCHES DU MONASTERE.

L e s c l o c h e s du m o n a s t è r e
O ù j ' a i p r i s le c a p u c h o n
N e s o n n e n t j a m a i s sans faire
A u g e n r e h u m a i n la leçon ;
Soit p a r feinte,, ou p a r m é p r i s e ,
E l l e s ont p r i s p o u r devise :
.Dindon-, d i n d o n , d i n d o n , .
Mortels, écoutez-les donc,.
Dindon, dindon, dindon.

V o y e z - v o u s ce r i c h e a v a r e
Q u i j e û n a i t s u r son a r g e n t ,
D o n t le t r é p a s le s é p a r e 1
I l m o u r u t en e n r a g e a n t .
A peine est-il dans l ' e n c e i n t e ,
Q u e d é j à la c l o c h e t i n t e ;
Dindon, dindon, dindon,
Q u e n e j o u i s s a i s - t u d o n c 't
Dindon, dindon, dindon.
?
A n fond d u n e s i m p l e b i è r e
V o y e z ce p r o d i g u e fou,
Q u i , t r o i s fois m i l l i o n n a i r e ,
M o u r u t sans a v o i r un sou.
A. sa suite il n ' a p e r s o n n e ,
E t n o t r e c l o c h e hu sonne :
Dindon, dindon,, dindon,
Que ne ménageais-tu donc t
D i n d o n , dindon*- dindon;.
142

Quel est c e convoi modeste î


Celui d'un Gascon bavard,
Qui, pour un propos trop leste,
Hier fut mis à l'écart.
A peine il contait pour trente,
E t notre cloche lui chante :
Dindon, dindon, dindon.
Que ne te taisais-tu donc ?
Dindon, dindon, dindon.

O vous, qui de cette vie


Avec moi suivez le cours,
jEt qui trouvez, je parie,
Que les instants en sont courts,
Gardez-vous que la clochette
Certain jour ne vous r&pète :
Dindon, dindon, dindon,
Que n'en profitiez-vous donc '!
Dindon, dindon, dindon-

L E BOUQUIN E T L E LIVRE D ' O R .

Chez Barbin, sur uns planche,


Certain livre se carrait ;
Beau papier, doré sur tranche,
Maroquin qu'on admirait j
Très-brillant,
Da burin sur feuille blanche
Au dedans.
143

CAte à eàte est un volume,


fin maussade parchemin,
Que le ver ronge et consume, >
Qu'on no voit qu'avec dédain ;
Au dedans,
Force notes à la pluma
Du vieux temps.

Orgueilleux de sa^parure,
L e premier criait ainsi :
" Oh ! qu'il sent la moisissure !
" On ne peut durer, ici : .
• '?Jtfûns.B&r,bJn>
" Otez viré cette ordure,
" Ce bouquin. "

L'autre lui répond : " Confrère,


i !
ÏTn ppn pins .-.'huinanité :
" Chacun peut pour le libraire
" Avoir son utilité. "
— " Oiii, vraiment ! "
Lui répond l'autre en colè re,
Fièrement.

Il en eût dit davantage,


Mais il entre un ouneux.
A l'aspect du vieil ouvrage.
I l lève les mains aux eieux :
" Livre d'or ! "
S'écria le personnage,
' " Q u e l trésor ï "

Tout,ce qu'on veut il l'achète,


x
E t «.éprise le voisin ; .*
1S
144

Ayant TU son étiquette,


11 cria : " Monsieur Barbin,
" Q.ue fait là
" Cet extravagant poète
" Que v o i l à ? "
.Les romans de nul usage
Sont indignes d'être lus ;
Cependant son étalage
N'est pas si mal entendu ;
MAINT SEIGNEUR
N'^ST QUE PAK SON EQUIPAGE
E N HONNEUR.

ROGER BONTEMFS.

AIR : Ronde du camp de Grandprc.


Aux gens atrabilaires
Pour exemple donné,
En un temps de misères
Roger Bontemps est né.
Vivre obscur à sa guise,
Narguer les mécontents,
Eh gai ! c'est la devise
Du gros Roger Bontemps.
Du chapeau do son père
Coiffé dans les grands jours,
De roses ou de îierre
Le rajeunir toujours ;
145

M e t t r e u n m a n t e a u de b u r e ,
V i e i l a m i de v i n g t ans j
E h gai ! c ' e s t la parure
Du gros R o g e r B o n t e m p s .

D i r e a u c i e l : J e m e fie,
Mon p è r e , à ta bonté ;
D e m a philosophie
Pardonne la gaîté ;
Que nia saison dernière
S o i t e n c o r e un printemps ;
E h gai ! c'est la prière
D u gros R o g e r Bontemps-

V o u s , pauvres pleins d'envie,


Vous, riches désireux,
V o u s , dont le c h a r dévie
A p r è s un c o u r s h e u r e u x ;
V o u s , qui p e r d r e z p e u t - ê t r e
D e s titres é c l a t a n t s ;
E h gai ! p r e n e z pour maître
L e gros R o g e r B o n t e m p s .
BJÉHAKOEB,

LA P E T I T E FILEUSE.

J e a n n e , sois sans craints


P o u r ton â m e sainte,
S i 1 Ïcloche tinte,
T ' a p p e l l e au saint lieu ;
Travaille avec zèle :
T a tâche fidèle
146

E s t toujours, ma belle,
Agréable à Dieu.
F i l e , file, file, file, J e a n n e .
I>ien notre p è r e est indulgent,
Kicn indulgent ;
T a quenouille fait tomber la manne
Entre les mains de l'indigent;
F i l e , file, file,
F i l e , file, file,
F i l e , file, Jeanne :
Travailler,
C'est prier,
Jeanne, c'est prier.

Depuis l'aube é c l o s e ,
Sous ton beau doigt rose
S e métamorphose
L a blancheur du lin.
A plus d'une é p r e u v e
L e pauvre s'abreuve :
F i l e pour la v e u v e
F t pour l'orphelin.
F i l e , file, file, & e .

F a i s tourner bien r i t e
T o n fuseau, p e t i t e ,
P o u r le saint e r m i t e ;
L e preux a c c a b l é ;
F i l e avec constance
Pour chaque souffrance ;
Pour rendre la France
Au pauvre e x i l é .
F i l e , file, file, &e.
FRANCIS TOURTE.
147

AVE MAKI A.

Ave, Maria ï
Cor voici l'heure sainte ;
La cloche tinte :
Ave, Maria !
Tous les petits anges
Au front radieux
Chantent vos louanges,
O Iteine des cieux f
Ave, Maria ! Sec*
Tout dort sous votre aile
L'enfant au berceau,
La pauvre hirondelle
Dans son nid d'oiseau.
Ave, Maria ! & c

Vous êtes la voile


Du pauvre marin ;
Vous êtes l'étoile
Du bon pèlerin.
Avcj Maria ! &c-
Vous êtes servante
Des pauvres blessés ;
Vous êtes l'amante
Des cccnrs délaissés.
Ave, Maria ! &c.

Votre nom si tendre


Sur un front mortel
148
Fait toujours descendre
L a beauté du ciel.
A v e , Maria ! & c
Aussi les Maries,
K n choeur gracieux,
A vous réunies,
Montent vers les cicux-
Mais le jour s'en va ;
De la cloche qui tinte
Finit la plainte :
A v e , Maria !
LoïsA P U G E T .

MA C H A U M I E R E E T MON TROUPEAU.

P o u r aller venger la patrie.


Jeune encor je quittai les champs.
A u silence de la prairie
A succédé le bruit des camps.
Plus d'une fois, pendant la guerre.
Songeant au bonheur du hameau,
Je regrettais mon vieux p è r e ,
M a chaumière et mon troupeau.

Braves soldats, mes frères d'armes,


Dont j ' a i toujours suivi les pas
Dans nos succès, dans nos alarmes;
Compagnons, ne. m'oubliez pas.
R e c e v e z les adieux de Pierre :
Demain il retourne au hameau
Revoir encor son vieux pore,
S a chaumière et son troupeau.
149

Du s e r m e n t de s e r v i r la F r a n c o
V i n ^ t blessures m ' o n t d é g a g é ;
Maisj'eiïïporte pour récompense
L a c r o i x du b r a v e et m o n c o n g é .
L o i n tlu t u m u l t e d e l a guerre,,
J e v i v r a i paisible au h a m e a u ;
.T'y r e v e r r a i m o n v i e u x p è r e ,
M a c h a u m i è r e et m o n troupeau-

S i v e r s les r i v e s <l2 la F r a n c e
L ' é t r a n g e r m a r c h a i t en v a i n q u e u r ,
L e n o b l e é l a n d e la vaillance
S o u d a i n ferait b a t t r e mon c œ u r ;
A v e c a r d e u r on v e r r a i t P i e r r e ,
P o u r c h e r c h e r au loin son d r a p e a u ,
Q u i t t e r e n c o r son v i e u x p è r e ,
S a c h a u m i è r e e L son t r o u p e a u .

LE BONHOMME.

T e n e z , m o i , j e suis «m b o n h o m m e ,
J e l'affirme de b o n n e foi ;
Il faudrait a l l e r j u s q u ' à R o m e
Pour e n t r o u v e r u n c o m m e m o i :
P o u r é v i t e r , d a n s u n e affaire,
L e s querelles q u ' o n veut c h e r c h e r ,
T r a n q u i l l e m e n t j e laisse faire
Ce que j e ne puis e m p ê c h e r .

J ' a i du p e n c h a n t p o u r ê t r e i v r o g n e ,
J'iàolàtre un Vfcrre de vin ;
150

Qu'il soit de Bordeaux, de Bourgogne,


J e le trouve toujours divin ;
Mais, bien qu'il me soit salutaire,
l o r s q u e je sais dans un repas,
J e sais me contenter d'eau claire
Quand le vin ne se montre pas.

ïl est des gens dans ce bas monde


Qui de rien ne sont satisfaits ;
E t , bien que chez eux tout abonde;
ÏIs forment encordes souhaits.
Moi, la misère me tracasse,
Je n'ai jamais un sou vaillant ;
Il m'en faudrait, niais je m'en passe,
Ne pouvant pas faire autrement.

J e connais de grand personnages,


J e les vois môme fort souvent ;
lis reçoivent bien mes hommages,
E t me font plus d'un compliment ;
Sis ont une bonne cuisine,
ÏIs donnent de fort bous repas ;
Mais jamais chez eux je ne dîne :
Car on ne m'y invite pas.

En commençant ma chansonnette,
J'espérais, je dois l'avouer,
Vous plaire ; mais la voilà faite,
E t je ne puis pas m'en louer.
Sans démentir mon caractère,
Il faut, mes amis, dans ce casj
Prendre le parti de me taire,
Pour que Pon n« m'y force pas.
F AN F AN L A T U L I P E . / %
Comme Pmuri d'notre mère
Doit toujours s'app'Ier papa,
Je vous dirai que mou père
Un certain jour me happa ;
Puis, me m'nant jusqu'au bas de la rampe,
M'dit ces mois qui ra'mir' tout sans d'ssus d'ssous
J'tc dirai, ma foi,
Qu'i ivya plus pour toi
Jlifîi chcï nous ;
V i a cinq sous,
E t décampe.
En avant,
Fanfan la Tulipe ;
1
Oai, mi 11 nom d'un' pipe,
Eu avant.

Puisqu'il estd'init qu'un jeune homme,


Quand il a cinq sous vaillant.
Peut aller d'Paris à R o m s ,
Je partis en sautillant.
L'premierjour, je trottais comme un ange ;
Mais Plend'main, je mourais quasi d'faim*
tin r'eruteur passa,
Q,ui me proposa . - ,
Pas d'org-ueil,
J'm'en buts Pruil,
Faut que j'mange.
En avant,
Fanfan la Tulipe ;
Oui, nnlP nom d'un'pipe,
En avant.
152

Q u a n d j ' e n t e n d i s la m i t r a i l l e ,
C o m m ' j e r ' g r e t t a i s m e s foyer» '
M a i s q u a n d j ' v i s , à la b a t a i l l e ,
M a r c h e r nos vieux g r e n a d i e r s :
Un i n s t a n t , nous s o m m ' s toujours e n s e m b l e ,
Y e u t r e b l e u ! m e dis-je a l o r s tout b a s ,
A l l o n s , mon e n f a n t ,
M o n petit F a n f a n ,
V i t e au pas ;
Qu'où n'dis' pas
Q u e tu t r e m b l e s .
E n avant,
Fanfan la T u l i p e ;
Oui, mill' nom d ' u n ' p i p e ,
E n avant.

E n vrai s o l d a t d e la g a r d e ,
Q u a n d les feux é t a i e n t cessés,
S u n s r ' g a r d e r à la c o c a r d e ,
J ' t e n d a i s la m a i n aux b l e s s é s .
D ' i n s u l t e r des h o m m ' s vivant e n c o r e
Q u a n d j ' v e y a i s des l â c h ' s se faire un j e u .
Q u o i ! mill* v e n t r e b l e u !
Devant moi, morbleu !
JVouffWrais
Qu'un Français
S'déshonore !
E n avant,
Fanfan la T u l i p e ;
Oui, mill' nom d ' u n ' pipe,
E n avant.

V i n g t ans soldat v a i l l ' q u e v a i l l e ,


Q u o i q u ' o n d ' v o i r toujours s o u m i s ,
U n ' fuis h o r s itu c h a m p d ' b a t a i l l a ,
J'n'ai jamais connu d'enn'niis j
D e s vaincus la t o u c h a n t e p r i è r e
M ' f i t toujours v o l e r à l e u r secours.
P ' t - è t ' c'que j'fais pour e u x ,
L e s uiuiv' m a l h e u r e u x I
L ' P r o n t un j o u r
A leur tour
Pour ma mère.
En avant,
F a n f a n la T u l i p e ;
O u i , m i l l ' nom d'un' p i p e ,
E n avant.

M o n p è r e , dans l ' i n f o r t u n e ,
M ' a p p ' l a pour l e p r o t é g e r ;
S i j ' a v a i s eu d ' i a r a n c u n e ,
Q u e l moment pour me venger 1
M a i s un franc et l o y a l m i l i t a i r e
D'iea p a r e n t s d o i t toujours e t ' l ' a p p u i :
S i j ' n ' a v a i s eu q u ' l u i ,
J e s'rais aujourd'hui
M o r t de faim ;
M a i s enfin
C'est mon p è r e .
E n avant,
Fanfan la T u l i p e ;
O u i , m i l l ' n o m d'un' p i p e ,
E n avant.

M a i n t e n a n c e me repose
Sous le chaume hospitalier,
E t j ' y o u l t i v e lu r o s e ,
San» négliger l e laurier.
154

D'mon arrour'je détache la rouille ;


Si le roi m'app'lait dans les combats,
D' nos jeunes soldats
Conduisant les pas,
J'm'écrirais.
J'suis Français,
Qui touch' mouille !
En avant,
Fanfan la Tulipe ;
Oui, mill' nom d'un' pipe,
En avant.

TEMPETE.

J'aime le tapage,
L e tapage, le tapage ;
Oui, je suis tapageur >
J'ai besoin d'orage.
J'aime le tapage,
L e tapage, le tapage ;
Oui, je suis tapageur ;
C'est là mon humeur.
J'aime le tapage,
L e tapage, le tapage ;
Moi, je suis tapageur.
J'aime le tapage,
I.c tapage, le tapage ;
Oui, c'est là mon humeur.

Bon enfant, mais fort mauvaise tête,


Sur mon brick quand j'étais écumeur,
î5f>

I,.'équîpage me nomma TKSIPEÏE,


A cause de ma bruyante humeur.
Au beau temps, triste et sauvage.
Mais folâtre à l'ouragan ;
Quand ciel et mer faisaient rage,
Moi, je chantais en riant :
J'aime le tapage, & c
Mais signalait-on la voile anglaise,
.Te devenais tout-à-fait charmant ;
E t quand les autres bondissaient d'aise,
Moi, je dansais de contentement.
Alors commençait la fête :
A l'un je cassais les bras, »
A l'autre fendais la tête ;
Te chantais dans le fracas :
J'aime le tap'age, &c-
A présent que j'ai en ma retraite,
Je. me vois forcé de végéter ;
E h bien ! souvent, tout seul je tempête
De n'avoir jamais à tempêter.
Un vieux compagnon de lame,
Aussi folâtre que moi,
Me dit de prendre une femme • . .
E h ! mais, pas si mal, ma foi !
J'aime le tapage,
JLe tapage, le tapage ; -
Dès demain, dès demain
Entrons en ménage.
J'aime le tapage,
L e tapage, le tapage :
Femme de belle humeur
Vaut mer en fureur.
J'aime le tapage,
156

Le tapage, le tapag» ;
Moi, je suis tapageur.
J'aime te tapage,
L e tapage,, le-tapage?
Oui> c'est là mon humeur.

PAPA-MIGNON.

Or écoutez une histoire


(Hélas ï qui l'aurait pu croire î )
D'un père de l'oratoire
Qui s'est rendu capucin.
Il brocardait les bons pères
D'une insultante manière ï
Pour punir sou vitupère,
Il s'est rendu capucin.
C'était un homme de renom.
Il s'appelait Papa-Mignon,
Mignon, Mignon* Papa-Mignon-

II était de la Garonne,
Rivière un peu fanfaronne,
Il avait l'âme gasconne,
E t s'exaltail sans façons.
Ne parlant que de noblesses,
D'alliances, de comtesses,
De marquis et de duchesses,
De lambels et d'éeussons.
L e maréchal de Martignon
N'était rien près Papa-Mjgnon,
Mignon, Mignon, Papa-Mignon.
Dans les frayeurs qu'on lui donne,
Il se transporte à Navbomie,
Sans en rien dire à personne,
Pour prendre le saint habit-
D è s l o r s qu'on le vit paraîtra,
L e révérend père maître
L'introduisit dans le c l o î t r a ,
E t d'un ton nasard lui dit :
" Venez-vous iei tout de bon ?
** N'êtes-vous plus Papa-Mignon 1
l i
Mignonj Mignon, Papa-Mignoi*.
" Quelle e$t la raison, mon père,
(
* Qui vous fait quitter la chaire
" Qui a rejeté Saint-Pierre
" E t la constitution 1
" Chez vous l'on fait borme c h è r e ,
" I c i ce n'est que misère ;
t {
S i noua sommes votre affaire,
" I l vous faut changer de ton :
** Vous porterez sur le chignon
f
* L a besace, Papa-Mignon,
( <
Mignon, Mignon, Papa-Mignon. "
" Nous avons notre langage :
( (
Nous disons, notre fromage,
f <
Notre pain, notre potage ;
" Méprisons le beau français.
( (
Du savoir Ja politesse,
f t
Du langage In justesse
" Ne sied point à la noblesse t

« Des vrais fils de Saint-François.


( i
, F r è r e Pancrace d'Avignon
« Vous instruira Papa-Mignon,
" Mignon, Mignon, Papa-Mignon-
158

« — Vous vous l ê v ' r e z à Mâtine,


" Vous prendrez la discipline,
" Vous aurez de la vermine,
" E t des poux au capuchon ;
" Vous porterez des sandales,
" Vous aurez des hardes sales,
" Vous conserverez des gales
" Et de la barbe au menton ;
" Vous sentirez l'escafignon
" E t le gousset, Papa-Mignon,
" Mignon, M i g n o n , Papa-Mignon.
" Voyez bien si ce long prône
u
Sur ce que la règle ordonne
a
D é j à votre cœur étonne
" E t ralentit votre ardeur;
" N e voulez-vous point, mon père,
" Mener une vie austère,
" Embaumer le monastère
" P a r une sainte ferveur,
" Et ramper, comme un champignon,
" Sur le fumier, Papa-Mignon,
Mignon, Mignon, Papa-Mignon t

" — A h ! je dois obéissance,


" Dit-il, à votre ordonnance ;
" Je veux faire pénitence
" Sans plus longtemps différer ;
" Je veux vivre en bete asiné
" E n épouser la vermine,
" Sansjamais à mon échine
" Porter main pour me gratter.
" Barbe-Sale sera mon nom,
" A u lieu du doux P a p a - M i g n o n ,
" Sîiirnon, Mignon, Papa-Mignon."
159

Le gardien dit qu'on assemble


Toute la saloppe bande,
Fait apporter la mtitande
E t le séraphique froc
Ce
Vous vous coucherez par terre,
*• Six mois porterez la haire,
s i
Pour chatouiller votre chair
" Et mettre l'orgueil au croc. "
E t , tenant tous un lumignon,
lis embrassent Papa-Mignon,
Mignon, Mignon, Papa-Mignon.

L E CORBEAU E T L E R E N A R D .

Un jour maître Corbeau, sur un arbre perche,


Tenait dedans son bec un fromage glacé ;
Lorsque maître Renard, attiré par (Videur,
L'accoste poliment par ce propos flatteur,
Sur l'air du tra-hi-la-!a,
Sur l'air du tra-la-la-lâ,
Sur Pair du tra-deri-dera, tra-Ia-Ia.
[nous ?
Bonjour, maître Corbeau, comment nous portons-
—Merci,maître Renard, ça n'va pas mal; et vous'î
Tous mes enfants sont bien, hors mon p'tît nou-
fveau ué r

Qui. par ces derniers froids, s'est très-fort enrhumé


A Pair du tra-Ia-la-la, &c.
Peste î maître Corbeau, vous êt's jolimentrai*%
Vous vous faites pour sûr habiller à Paris 1
20
160

— O u i , r é p o n d le n i g a u d , à c e - p r o p o s flatteur..
E t l u i d o n n e a u s s i t ô t J V Î r e s s ' d e son t a i l l e u r -
S u r l'air du tra-la-la-îa, & c .

C e r t e s , s i r o t ' r a m a g e * r é p o n d à vat> p a P î o î ,
V o u s enfoncez D i i p r o , L a p h i u c h e et M a r i Ilot ;
C h a n t e z - m o i d o n c q u e l q ' c h o s e , u n e a r i e t t e , un r i e a r
C a r c h e z v o u s d ' p è r e e n fils c h a c u n n a î t musicien*
S u r l'air du tra-la-îa-la, & c

L à - d e s s u s le C o r b e a u , sans se faire prier?


E n t o n n e s a n s f a ç o n l e g r a n d a ; r d u Barbier ;
M a i s , comme il fnnt o u v r i r Jn b o u c h e p o u r c h a n t e r ,
.Il la U s ' t o m b e r p a r I J M T ' s-nn f r o m a g e g ï a c é .
fcjur l ' a i r d u t r a - J a - l a - l a ? & c .

A l o r s , maître R e n a r d , qui comptait là-dessus.


S a u t e sur le f r o m a g e , et rit c o m m e n n b o s s u .
M e r c i , m a î t r e C o r b e a u , j e v o u s a i fait p o s e r :
V o u s n ' ê t e s pas bien m i s , v o u s n ' s a v e z pas chanter,,
Pas aie m'le ifii-l:i-lv.-h., &c.

A l o r s , m a î t r e C o r b e a u resta tout c o n f o n d u :
J u s t e c i e l ! q u e l m a l h e u r ! U> u n e ! e s t défendit*
J e suis v o l e , d u p é : m a u d i t soit Je d e s t i n !
he d o y e n d e s c o r b e a u x p a s s e r p o u r u n s e r i n !
S u r l'air du tra-la-la-la, & c .

O r d o n c , do c e s c o u p l e t s la m o r « I e v o i c i ;
C o r b e a u x , p e t i t s et ç r a n d s , r e t e n e z b i e n c e c i :
C ' e s t q u ' i l est m a l a d r o i t , a dit u n v i e u x g o u r m a n d 5

Q u a n d o n ai m ' l e f r o m a g e de c h a n t e r en m a n g e a n t .
Sur l'air d« tra-la-Kvla & c - ;
161

L E R A T DE V I L L E E T L E R A T D E S

CHAMPS.

Autrefois le rat de ville


Invita le rat des champs.
D'une façon fort civile,
A des reliefs d'ortolans.
L e r é g a l fut fort honnête ;
Rien ne manquait au festin.
Mais quelqu'un troubla la fê-te
Pendant qu'ils étaient entrain-

A la porte de la salle
Ils entendirent du bruit :
L e rat de ville détafe ;
Son camarade le suit.
Le bruit cesse, on se retire j
Itats en campagne aussitôt,
E t le citadin de dire :
Achevons tout notre rôt.

C'est assez, dit îe rustique 2


Demain vous viendrez chez mol.
Ce U'KSI }>as qui: j e me pique
De tous vos festins de roi ;
Mais rien ne vient m'interrompre j
J e mange tout à loisir.
Quand la peur vient le corrompre,
J e n'aime pas lo plaisir.
T i r é de LAFOKTAIMB*
i62

BERGERONNETTE.

Inconstante bergeronnette,
P a u v r e petit oiseau des c h a m p s ,
Q u i voltiges vive et coquette,
E t qui siiiies tes jolis chants ;

Bergeronnette si gentille,
Q u i tournes autour du troupeau,
P a r le* prés sautille, sautille,
E t mire-toi dans le ruisseau.

Va^ dans tes gracieux caprices,,


Becqueter la pointe des fleurs,
Ou poursuivre, aux pieds des g é n i s s e s ,
JJCS mouches aux vives couleurs.

Reprends tes j e u x , bergeronnette.


Bergeronnette an vol l é g e r ;
Nargue Pépervier qui te guette :
Je suis l à pour te p r o l é g e r .

Si haut qu'il soit, j e puis Pabattre . . .


P e t i t .oiseau chante, et demain,
9

Quand j e marcherai, viens t'ébattre


P r è s de m o i le long du chemin.
s

C ' e s t ton doux chant qui me console ;


J e n'ai point d'autre ami que toi :
Bergeronnette, v o l e , vole,
Bergeronnette^ devant moi.
CHS. DOVALME.
Ïi63

L'OCEANT.

J e suis de quart*
L a mer est belle ;
.11 é t i n c e l l e
Mon paquebot.
D o r s , matelot,
Dors, il est tard ;
Dors :
Il est tard.
Dors.

J e suis de quart.
C a l m e , immobile,
I l ê v e tranquille
J u s q u ' à demain.
B r a v e marin,
Dors, il est lard,
Dors :
I l est tard,
Dord.

J e suis de quart.
D é j à lu brise
Court et se brise
S u r le rocher.
D o r s , o nocher,
D o r s , il est tard j
Dors :
I l est tard,
Dors-
164.

J e suis de -quart.
M a i s mon n a v i r e
S e m b l e se r i r e
Des flots amers
Sous les é c l a i r s -
Dors il est tard ;
Dors :
I ! est t a r d ,
Dors.

A u quart ! au q u a r t !
L'onde en furie
G é m i t et crie
S u r le r o c h e r .
L'on va toucher !
Enfants, au q u a r t !
L'onde en f u r i e
G é m i t et c r i e
S u r le r o c h e r .
L ' o n va toucher 1

C ' é t a i t trop t a r d :
Ca;* la t e m p ê t e
M o n t r a sa t ê t e ,
E t le vaisseau
S o m b r a sous Peau :
C ' é t a i t trop t a r d .

P, CH. S
LA CAMPAGNE.

Quittons les plaisirs de la ville :


L e a r bruit assourdit le bonheur.
165

I l m e faut un lien plus t r a n q u i i f e .


O ù l ' o n puisse e n t e n d r e son c œ u r .
O h ! si j a m a i s d e raa r e t r a i t e
L e destin m e l a i s s a i t le c h o i x ,
J ' h a b i t e r a i ? In m a i s o n n e t t e ,
L a maisonnette dedans U s bois.

J ' y v o u d r a i s un é p a i s o m b r a g e ,
D e s g a z o n s , des fleurs, un ruisseau ,
U n v i e u x t i l l e u l d o n t le f e u i l l a g e
S u r nn banc t o m b â t en b e r c e a u ;
E î m o n a u i ; j dans ma retraite^
D e tous ses c h a r m e s à ia tbis
E m b e l l i r a i t la m a ï s o n n e t f e ,
L a m a i s o n n e t t e d e d a n s les b o i s .

T a douce joie a v e c l'aurore


V i e n d r a i t s o u r i r e à mon r é v e i l ;
L e s o i r , lu j o i e v i e n d r a i t e n c o r e
M e c o n d u i r e aux bras du s o m m e i l j
E t l à , caché dans ma retraite,
U n b o n h e u r i n c o n n u des r o i s
H a b i t e r a i t la m a i s o n n e t t e ,
L a m a i s o n n e t t e d e d a n s les b o i s .

L'AIGLE.

U n j o u r , une m è r e i m p r u d e n t e
A u x champs dormait.
U n a i g l e , à la s e r r e s a n g l a n t e
3

A u x c i é u x planait.
166

Soudain Relève un cri ierrible ;


L a mère a vu, spectacle horrible ï
Sur un roc élevé
Son enfant enlevé !
C'e^t toi seule, 6 Marie,
Qu'elle implore en s'écriant :
Q Marie, prends ma vie^
Tout mou sang-,, pour mou enfant.

Eu vain elle prie éperdue ;


T
Maïs nul mortel
ÎS 'ose sur cette roche nue
Tenter le ciei.
Que ne peut le cœur d'une mère?
Voyez-la d'un pied téméraire.
S'élancer et gravir
Sans trembler* sans pâlir-
C'est toi seule, &c>

La voilà , ce n'est pas un rêve . . •


Kt son amour
Parvient à son enfant, Penlève ;
Maïs, au retour,
Elle tremble, la pauvre mère !
Elle tremble autant qu'elle espère :
Serrant à chaque pas
Son enfant dans ses bras.
C'est toi seule, &c.
C'est l'amour, divine puissance,
Qui l'inspira j
X/amour sera sa récompense :
^on ûh vivra.
167

A peine elle a touché la terre.


T o m b a n t à genoux sur la pierre,
E l l e dit* élevant
V e r s le ciel son enfant :
Sainte Vierçe Marie,
E n ce jour si triomphant,
O M a r i e ! sois bcnie>
T o i qui sauves, mon enfant.

L'ÉDUCATION A L A J E AN-JACQUES.

C o c o , le livre de la vie
Apprend lui seul à tout savoir :
Or, si l'instruire est ton envie,
Sortons de Paris pour tout voir.
— P a p a , mais tout savoir, ma foi !
A quoi ç a s e r t i dites-le-moi-
— Tout savoir ! ô candeur biblique !
Que d?im mot j e vais é c l a i r e r ,
Tout savoir, 6 mon fils unique,
C a sert . . . à ne rien ignorer.
Ah ! jeunesse ! ah ! jeunesse !
C'est ainsi qu'il faut qu'on vous dresse ï
C a r à vous former bel et bien
L'université n'entend rien.

Au boulevard voilà des ormes,


F i e r arbre aux verdoyants tfônlmeis ï
J ' e n ai connu de plus énormes,
Mais de moins orguâiIl6ttx> jamais '
21 • • -, •
168

- ~ P a p a , c'est t r è s - j o l i , m a foi !
A quoi ça sert? dites-le-moi.
— E n ce m o n d e , où t o u t s ' a p p r é c i e ^
Souviens-t'en, mon petit l a p i » ,
C ' e s t avec l ' o r m e , que P o u s c i e ,
Q u ' o n failles planches de sapin.
A h ! jeunesse, & c

R e g a r d e ces p a l a i s s p ï e n d î d e s *
P o u r ça P a r i s n ' a pas d ' é g a l .
A d m i r e au loin les I n v a l i d e s ,
C e gros nougat l ï ï o n u m t n t a î .
J
—• I a p a c'est t r è s - j o l i , m a foi !
}

A quoi ça sert 'l dites-le-moi.


•— C ' e s t là qu'on p r e n d p o u r l o c a t a i r e s
N o s soldats sans tîste ou sans b r a s ,
E t c'est avec !cs m i l i t a i r e s ,
C h e r enfant, q u ' o ù fait les s o l d a t s .
Ah. ! j e u n e s s e , & c .

E n t r o n s à 3a mérra»'erJe,
L e rendez-vous dos a n i m a i r e ;
O b s e r v e c e u x - c i , j e t ' e n prie :
C e sont dey ours et des c h a m e a u x .
— P a p a , c'est t r è s - j o l i , m a foi I
A quoi ça sert 1 d i t e s - l e - m o i .
— M o n enfant, ce b é t a i l n o m a d e
S e c o n s o m m e c h e z les coiffeurs
A fabriquer de la p o m m a d e ,
E t des barbes p o u r les s a p e u r s .
A h f jeunesse, &c.

E « fin. au delà des b a r r i ères*


V o i s tons ces t r o u p e a u x p a r les c h a m p s .
169

Y folâtrer de cent manières


E n groupes naïîs et touchants , . -
— P a p a ^ c ' e s t t r è s - j o l i , m a foi !
A quoi ça sert î tUt«s-le-moi.
— Cet a r t î c i t ' j n é d a n s Ici p l a i n s ,
C h e r a m i , se n o m m e un m o u t o n ,
E t c'est à F e m p l o i d e sa laine
Qu'on doit les bonnets de coton-
Ah !jeunesse, &c.
H. L, G-L'ERIV.

fi
L E CHEVRIEE DE LA MONTAGNE.

Troupeau que j'accompagne,


V o u s , IÏH;S d o u c e s b r e b i s .
Regagnons la montaguej
N o s c h a l e t s si c h e r i s .
E h ! y o u g . ! tra-la-la i
Vite, ça !
Suivez m e s pas.
E h ! y o u g ! tra-la-ln,
N o s chalets sont là-bas.
A-a-a-a-a-a-a-a-a-a-a.

L a nuit descend dans la vallée ;


Son ombre s'épaissit encor.
D u haut d e la v o û t e é t u i l é e ,
V a s ' é c l i p s e r l'astre a u x ails d'or.
Ah ! . . .
Troupeau que j'accompagne, &e.
170

.Les ténèbres g a g n e n t nos plainc-v,


L e s bois,-les coteaux d'alentour,
E t le front des r o c h e s lointaines
N e r e ç o i t plus les [eux du jour-
Ahi•.•
T r o u p e a u que j ' a c c o m p a g n e * & c
L a lune aux longs reflets m a g i q u e s
R a y o n n e au t r a v e r s thi p l a c i e r ;
K t l ' é c h o de nos m o n t s a n t i q u e s
J ï e d i t les c h a n t s du c h e v r i e r .
Ah! ...
T r o u p e a u que j ' a c c o m p a g n e , &c-
ADOLÎ'ÏIE F A RUE.

LA PAUVRE VIEILLE PLEURA.


< l
V o u s qui r e v e n e z de l ' a r m é e ,
" N ' a u r i e z - v o u s p a s c o n n u m o n fils 1
< s
H é l a s ! de c h a g r i n s c o n s u m é e ,
" L o i n de Un j e souffre et vieillis.
t s
O h .' dites, iaul-il que j V s p è r e '(
< c
P a r l e ? ; , et D i e u vous b é n i r a ,
t (
D ' u n m o t , consolez u n e m è r e -
E t la p a u v r e vieille p l e u r a -

" J e m e souviens, m a l g r é mon â g e .


t c
Q u e lorsqu'il s'éloigna d'ici,
KC
L e s j e u n e s enfants dn v i l l a g e
i (
E t les m è r e s p l e u r a i e n t aussi-
( (
Souffrant; sans le faire p a r a î t r e ,
" L à , sur son c œ u r il m e serra-
" . M a i n t e n a n t , il est m o r t p e u t - ê t r e « - -
E t ia p a u v r e vit'il.'e pleura-
(
*' V o t r e f i l s , " d i t l e m i l i t a i r e ,
ç e
N ' e s t p o i n t m o r t , j ' e n j u r e m a foi !
( (
Je l e c o n n a i s , s o n n o m e s t P i e r r e ;
" Il e s t l i e u t e n a n t c o m m e m o i .
" C a l m e z votre douleur a m è r e :
( {
O h ! j ' e n s u i s s û r , il r e v i e n d r a .
" Il est ici : v o y e z , m a m è r e . . .
E t la p a u v r e vieille p l e u r a .

E M I L E BAHATEATT.

L E R E T O U R D U MONTAGNARD.

C ' e s t le T y r o l , c'est m a belle patrie.


Q u e j e revois à Phorizon lointain.
L a voilà donc cette terre chérie,
Q u i pouvait seule e m b e l l i r m o n destin-
E n f a n t de la m o n t a g n e ,
.T'y r e t o u r n e e n c h a n t a n t .
JLa fatigue m e gagne ;
M a i s mon c œ u r est content,
Oui ! m o n c œ u r est content.

A d i e u , fortune, aujourd'hui tes l a r g e s s e s


D a n s les cités n ' a r r ê t e n t plus m e s pas ;
M o n cœur préfère à l'éclat des richesses
L a l i b e r t é q u i r è g n e en nos c l i m a t s .

Oh ! quel plaisir de revoir la c h a u m i è r e ,


Où m e s r e g a r d s o n t e s s a y é le j o u r j
Où j ' a i grandi sous les y e u x d'une m è r e 3

Où j e r e ç u s tant d e g a g e s d ' a m o u r !
A . BSTW.-BNÉ-
L ' E N F A N T DK SALI-ANCHES.

Voilà Sallauches,
Mon doux p a y s ,
Ses bois chéris,
Ses maisons b l a n c h e s ;
Voilà Saihmche.s ;
Adieu, Paris.
I c i , quelqu'un m'aime et m'attend,
K t j e dirai dans un instant :
JL'-tiiiAtiit qui frappe à v o i r e porte}
{.Petit P i e r r e et c e n t francs q u ' i l a p p o r t e ,
C e n t francs d ' o r pour voua opzvgués :
O u v r e z , m a m è r e , ils s o n t a;ag.tics.
Voilà Sailanches, &o.

A H o n s 1 vite, u n e v a c h e à l a i t ,
U n clos à J ' e n l o u n U i c h a l e t ,
U n pain b l a n c p a r c h a q u e j o u n w e ;

A v o u s , la vieille., et p a r a n n é e
U o e messe à la S a i n t J u l i e n ,
P o u r celui que vous s a v e z b i e n .
Voilà Sallanehes, &c.

E t p u i s lorsque v i e n d r a le s o i r .
D e v a n t vous h e u r e u x d e m ' a s s e o i r
A u coin de noire feu p a i s i b l e ,
J e vous lirai tout h a u t la bible ;
C a r j e sais l i r e , et c o m m e il faut.
T e n e z , m è r e , é c o u t e z plutôt,
^oilà S aHanches, &c.
L l i PA711E DU T Y I i G L .

Bois, vallons, fertiles campagnes,


B e a u pays denses ayeux,
T y r o l , dont j ' a i m e les montagnes,
Soas ton ciel qu'on est heureux ï
À-la-la-la, la-mi. la-la-la-la,
À-la-ïa-la, la-on, la-la-la-la.

A nia mère seule et chagrine,


Quanti j e chemine
Tout le jour dans nos champs,
JL'écho «le co-iline eu colline
Vers la ohanniïne
Porte mes ehatits.
B o i s , vallons, Sic-

Hélas ! combien j e plains mon frère !


Lui qui préfère
JLnîn de nous s'enrichir :
Pour moi, toujours pâtre, j'espère
Sur celle tores
Vivre et mourir.
BoiSj vallons, & c .
FBEDEHIC BEKAT.
174

EMBARQUONS-NOUS.

L e dieu du jour s'avance ;


Amis, les vents sont doux :
Bercés par l'espérance.,
Partons, embarquons-nous
A-a-a-a-a-a-a-a.

Bientôt, <t ma patrie,


Je verrai tes coteaux
Et ma mère chérie
Priant au bord des flots.
Le dieu du jour, & c

Je verrai ma chaumière ,
Ses bosquets odorants,
Les sentiers où ma mère
Guida mes premiers ans.
Le dieu du jour, &o .

Enchantez le voyage,
Songes dqux et légers ;
Bercez jusqu'au rivage
Les heureux passagers-
Le dieu du jour, &te.
M M E . A N T O I N E T T E DE LA B .
175

LHÏVMB1M T O I T 1>E M O N PERE.

On v a n t e ces p a l a i s , c e s t e m p l e s , ces t r o p h é e s ,
Q u e la belle Italie é l è v e j u s q u ' a u x e i e u x ,
Kt q u ' o n p r e n d r a i t p l u t ô t p o u r l'ouvrage des iWw*
T a u t leur ffrandem' diadique é b l o u i t tous les yea*:
M o i p o u r t a n t )e p r é f o i e
A ce brillant séjour
L'l«iral>le-tort rte m o n pew>,
O u j e feçfcsf t e j o n r

On vante les j a r d i n s de l ' h e u r e u s e I d m o e e ,


Où le soleil r é p a n d ses plu* r i c h e s c o u l e u r s ,
Où d ' é t e r n e l s p r i n t e m p s a lu terre e m b a u m e ?
Ne refusentjamais ut les i n i : U , m tes ileurs
M o i p o u r t a n t je p r é f è r e
A ce b r i l l a n t s é j o u r
I."humble t o i t de m o n p u r e ,
O u je r e ç u s le j o u r -
N o n , c e n'est-pas a m^i q u ' i l s p o u r r o n t faire etivu.-.
C e s j a r d i n s , ces p a l a i s , d o n t 1 œil est e n e h a n R '
D a n s les climats du nord, » u j ' s u reçu la vie,
J ' a i a u t a n t de b o n h e u r et plus de l i b e r t é :
C ' e s t p o u r q u o i je p r é f è r e
A ce brillant séjour
L ' h u m b l e t o i t de mon p è r e .
O ù j « «cas l e j o u r .
- ; • , : •. A,>iBs3!OUBtlÉ
176

L E RETOUR AU T Y R O L .

Je TOUS revois, ce n'est point un prestige,


Lieux séduisants, toujours chers à mon c œ u r .
Monts escarpés, bords fleuris de l ' A d i g e ;
A votre aspect j e renais au bonheur.
La-lal, la-lal, la-la, la-la ;
L a - l a l , la-lal, la-la, la-la.

D'un pied léger j'effleurais la bruyère,


E t , devançant le timide chamois.
Tout eu cherchant une fleur printannière t

Je faisais dire aux échos de c e s bois :


L a - l a l , la-lal, la-la, la-la ;
L a - l a l , la-lal, la-la,, la-la.

V e n e z à moi, venez, jeunes compagnes -


De l'amitié j e connais la douceur ;
Je sais encor le refrain des montagnes.
Accueillez-moi, je serai votre sœur.
L a - l a l , la-lal, ia-la, la-la j
L a - l a l , la-lal, la-la, la-la.
MB. PAULIN ***

NAPLES.

L e doux printemps se l è v e ,
Riche comme un beau rêve :
Partons, ami*, partons.
177
L^hirondelie légère
î<ïe rase pas la terre :
Les vents nous seront bous*
Vogue ma balancelle ;
3

Chantez, gais matelots ;


Que votre voix se mêle
Au murmure des flots.
A l'horizon de brume
Le Vésuve qui fume
Promet Naple aujourd'hui-
Dans cette ville heureuse^
•La vie est gracieuse
Comme un jardin fleuri.
Quand la nuit tend ses voiles
Sous ce beau ciel d'étoiles?
Le gai Napolitain
Chante la sérénade,
Puis sous la colonnade
S'endort priant un saint.
E . AUMASSIF,

CE QUI R E N D L E S A N G E S JOYEUX.
Mon cher enfant, loi que j^ainie,
Viens apprendre, en m'écoutant,
Ce qui rend, dans le ciel même,
Ton bon ange plus content.
A chaque mot prends bien garde ;
Et tous les anges des cieiix,
D'où la Vierge te regarde^
Seront joyeux -'
178

O u i , si la V i e r g e t e r e g a r d e s
T o u s les a u g e s s e r o n t j o y e u x .
L e m a t i n , quand tu t e l è v e s ,
I l faut r e m e r c i e r D i e u ,
I n » qui f a i t s i d o n x l e s r ê v e s .
E t ion firmament si bleu.
D e Dieu c h a r t e 1A l o u a n g e ,
E t tous les anjrcs des c i e u x ,
Q u i te p r e n d r o n t p o u r un a n g e ,
Serontjoyeux !
E n te rejyftrfJan't cornise un a n g e ,
T o u s les anges seront j o y e u x !

A l'orphelin de ton â g e .
A u vieillard q u i <iit : J ' a i faim î
S u r l e c h a m p , c r o i s - m o i , .partage
T e s plus beaux fruits et ton pain ;
A t o u t pau«ce»fa jss-j'aupiOrvé,
E t tous lesangeséesI cieùx*
B é n i s s a n t Penfant ;quj d o m ï e ,
Seront joyeux !
E n b é n i s s a n t l'enfant (jui d o n n e .
T o u s les anges s e r o n t j o y e u x !

L'étoile, blanche lumière,


...Paraît, e t le j o u r - n ' e s t plus ;
C ' e s t P i n s t a n t dè la p r i è r e ,
!
C a r ' . o n sonne l ' A n g e l u s .
Jpais. t a , p r i è r e à M a r i e , ,
E t t o u s les a n ^ e s d e s c i e u x
P r i a n t p o u r l'enfant qui p r i e ,

E n p r i a n t pour i'enfani qui p r i e ,


T o u s les anges s e r o n t j o y e u x !
Èants BAÉATEATÏ.
179

LES USAGES BRETONS.

Tl est dans nos v i l l a g e s .


Bien loin de nos c i t é s .
Il est d'anciens usages.
P a r nous tous r e s p e c t é s .
S o u s nos toits de bruyères,
O ù , l'hiver, nous manquons de feu,
Dans nos humbles prières,
Chaque soir, contents de si p e u , ••
Toujours nous remercions:-.Dieu-
"Voilà de nos-chaumières
Les tisanes bretons ;
Ainsi priaient nos p è r e s ,
E t nous les imitons ;
V o i l à nos usages bretons.

Point de chansons nouvelles


N'arrivent en ces lieux ;
iNous demeurons fidèles.
A u x citants de nos àïeuK-
-, Pour nous, ,1a foi. jurée,
D a n s les jours de p r o s p é r i t é ,
E s t encor plus s a c r é e ,
Quand arrive l'adversité,
O ù le malheur non m é r i t é .
V o i l à de nos chaumières
L e s usages bretons ;
Ainsi faisaient nos p è r e s ,
E t nous les,imitons ;
V o i l à nos usages bretons.
EMILE BÀRATEAtr
180

L ES CRAINTES MATERNELLES.

Petit enfant, que'j'ai l'âme attendrie


Quand j e te vois te livrer au plaisir,
E t follement chercher dans la prairie
Un papillon que tu ne peux saisir !
L'orage gronde et l'éclair fend la nue,
Reviens bien vite, enfant, voici la Î I U Ï U
L a gaîté seule à ton âge est connue ;
Tu vis heureux : reste toujours petit.

Petit enfant, tes couleurs sont vermei lies ;


Beau chérubin, j'aime tes yeux d'azur.
Bientôt les ans, les chagrins et les veilles
Viendront rider ton visage si pur.
De tes exploits, aux pagesde l'histoire,
Peut-être un jour verrai-je le r é c i t ;
Mais le bonheur n'est pas tout dans la gloire :
O mon enfant, reste toujours petit.

Que tes baisers, doux comme-ceux<l'un auge,


M e font du bien ! Enfant, n'aime que moi.
Pourquoi faut-il ici-bas que tout change ?
Pour l'avenir mon cœur est plein d'effroi.
Un autre amour, occupant ta pensée,
Effacera le mien de ton esprit ;
T a mère, enfant, plus qu'une fiancée
T e chérira : reste toujours petit.
181

ENFANTS, SOYEZ SAGES.

Enfants, soyez s;tges ;


Montrez-moi toujours
D e riants visages,
Enfants, mes amours.

C a r de votre m è r e
Pour charmer le cneur,
Il n'est sur la terre
Point d'autre bonheur.

Toujours, sœurs et f r è r e s ,
Soyez bons amis ;
Dans vos jours prospères
Vous serez bénis.

Jamais de c o l è r e ,
D e propos menteur :
L a bouche sincère
Sait toujours le cœur.

N'ayez défiance
De sévérité :
Toujours l'indulgence
Suit la vérité-

Enfants, Dieu vous aime ;


Vous serez heureux,
Si l'aimant de même
Vous combles; mes vœux-
182

pour v o t r e m è r e ,
IVÏes p e t i t s c h é r i s ,
Vons ferez sur t e r r e
U n vrai p a r a d i s .
MME. PBIOUX

"' CE QUE DISAIT JEAN"-

A DIX ANS,

J e a n disait : C e sont les n i a i s


Q u i s'en vont à i ' é c o l e ;
On iw m'y g r o n d e r a j a m a i s ,
J ' e n donne m a p a r o l e .
V r a i m e n t on p e u t b i e n ,
En n'apprenant rien,
Vivre P â m e contente ;
P o u r m o i , Dieu m e r c i ,
J e vais faire a i n s i .
M a l g r é ma bonne tante*

A VINGT ANS,
J e a n disait : C ' e s t u n g r a n d m a l h e u r s
Croyez-en m a parole.
D'être i n s o u m i s , t r i s t e , e t b o u d e u r ,
Q u a n d on p a r l e d ' é c o l e !
E c o u t e z - m o i bien :
Q u a n d o n ne sa.it r i e n ,
L'avenir épouvante*
N e m ' i m i t e z pas :
J ' a i m a l fait, h é l a s !
Dr- r i r e do. m a t a n t e .
TH. DXIÏIVE
183

L A B U L L E D E SAVON. ^ ^

D'un souffle n é e ,
D'azur o r n é e ,
Huile de vent,
L é g è r e et folle,
V e r s le ciel vole,
T e balançant.

D'un vol rapide


L'orgueil te guide . , .
Orgueil de roi !
Bulle chétive>
L a brise arrive :
Prends garde à toi t

De ta peinture,
De ta dorure,
Q.u'est-il resté ?
Comme toi fière,
Mais é p h é m è r e ,
E s t la beauté.

LE CIÎANÏEUR.

Q,ue serait notre vie


Sans le charme touchant
D'une douce harmonie
E t d'un gracieux chant ?
23
Voyageur sur la t e r r e ,
F a t i g u é dn c h e i n i n ,
Quand je chante, j ' e s p è r e ?

O u b l i a n t le c h a g r i n .

U n contretemps m ' a r r ê t e :
Fant-ii me rebuter ?
A vaincre j e m ' a p p r ê t e .
E t sais encor c h a n t e r .
Ranimant mon courage,
JLe c h a n t est à m o n c œ u r
C e q u ' e s t a u vert b o c a g e
D u matin la fraîcheur.

L a gentille a l o u e t t e .
L e rossignol des b o i s ,
L a caille e t l a f a u v e t t e
Font résonner leur voix,
ïkins P a i r , dans-la p r a i r i e .
J ' a i m e leurs c h a n t s j o y e u x ;
A u s s i , toute la v i e ,
.Te veux c h a n t e r c o m m e e u x .

C H . L A sir;

L'OREILLER D E L ' E N F A N T .

Cher petit o r e i R e r , «ionx e t c h a u d 30us m a t ê t e ,


F î e Ï E d é p l u m e choisie,et b l a n c îet fait pour moi
Ç&ïaaiS or* a p e u r du v e n t , de» l o u p s , d e l a tejropête
C h e f p e t i t oreiller, q u e je itor» bien s u r toi l
ÎS5

Beaucoup) beaucoup d'enfants,


pauvres et mis,
[san* mère,
Sans maison, n'ont jamais d'oreiller pour dormir;
ïls ont toujours sommeil, 6 destinée amère !
Maman, douce maman, cela me fait gémir.

Etqnand j'ai prié Dieu, pour tous ces petits anges


Qui n'ont pas d'oreiller, moij'embrasse le mien >
Seule, dans mon doux nid qu'à tes pieds tu m'ar-
Je te bénis, ma mère, et j e touche le tien, [ranges,

Je ne m'éveillerai qu'à la lueur première


De l'aube au rideau bleu : c'est si gai de la voir i
Je vais dire tout bas ma plus tendre prière ;
0onne encore un baiser, douce maman ; bonsoir.
MME. DESBOUDES-VALMOKE-

hA. C H A P E L L E D E G U I L L A U M E TELL.

A la fête du jour la cloche nous appelle.


Gésier à pareil jour fut jugé dans les cicux-
Allone orner de lienrs la modeste chapelle
Consacrée au Vengeur par nos libres aïeux-

Si nous foulons eu paix ces fertiles rivages,


Si nos champs sontà nous, honneur au noble T e l l !
A v e c un saint respect portons-lui nos hommages,
fît que son nom fleurisse à jamais immortel.
186

T a n t que le souvenir de ses vertus antiques


E n ces lieux c o n s a c r é s a p p e l l e r a n o s p a s ,
L u l i b e r t é , si c h è r e aux c a n t o n s h e l v é t i q u e s ^
K é p a n d r a ses bienfaits sur nos h e u r e u x c l i m a t s .

V o y e z , le l a c est p u r , et des flots, de l u m i è r e


D o r e n t nos pavillons, qui flottent s u r ces b o r d s .
On dirait q u e le ciel, que la n a t u r e e n t i è r e ,
Dan» ce j o u r solennel, p a r t a g e nos t r a n s p o r t s .
A- BETOURNL

A % y •
HANNETON, VOLE.

H a n n e t o n , vole, vole, vole ;


H a n net O û ,
Vole d o n c .

Q u a n d (u reviens sons le f e u i l l a g e ,
T o u t est v i v a n t tout est j o y e u x ;
N o u a dansons g a î m e n t sous l ' o m b r a g e ,
E t tu t e m ê l e s à nos j e u x .
Oh !
H a n n e t o n ^ v o l e , v o l e , vole ;
'Hanneton,
Voie d o n c .

P a r nos m a i n s , le fil ni la soie


N ^ e n c h a î n e r o n t lu l i b e r t é :
Q u a n d tout nous invite à la j o i e .
S i tu souffrais, plus de g a î t o -
Oh i
Hanneton, vole, vole, vole;
Hanneton,
Vole donc.
La riante saison finie,
T u meurs jusqu'au printemps nouveau.
Ainsi, nous quitterons la vie ;
Mais pnur jouir d'un ciel plus beau.
Oh !
Hanneton, vole, vole, vole ;
Hanneton,
Vole donc.

/ T
LA PETITE MAMAN.
Comme i! sourit ! comme il sommeille !
Dans son berceau qu'il est charmant !
Moi, bonne sœur, pour lui je veille ;
Mon pied le berce doucement.
Dormez, petit frère,
Oh ! ne craignez rien :
Je suis votre mère ;
Maman le veut bien.
D'abord c'est moi qui veux l'instruire,
Pour le former suivant mon goût ;
Dans ce dessein j'apprends à lire :
Car je prétends qu'il sache tout.

N'ayez jamais d'humeurs mutines ;


Que nous soyons de vous contents,
E t vous aurez de mes pralines.
Quand vous aurez poussé des dents.
188

O h ! que m a t a n t e s ' c i t t r o m p é e ,
H i e r , avec son beau p r é s e n t !
L à , m'appoyter une p o u p é e
Q u a n d j e me dois à m o n enfan* !
J.-J, POKCHA

L E JOVR DE L'AN.

O u i ! g-ui ï
L e j o u r de Tan
Auprès d'elle
N o u s rappelle*
G a i ! gai !
P r è s de m a m a n ,
F a i s o n s bien le j o u r d e l'an.
T o u t c o m b l e ici n o s d é s i r s ;
L a voix du c œ u r nous c o n v i e ,
C o m m e au b e r c e a u de la v i e ,
A g o û t e r les v r a i s p l a i s i r s .

P o u r t a n t un r e t o u r f â c h e u x
T r o u b l e e n c o r ce j o u r p r o s p è r e :
M a m a n , nous ne t'offrons g u è r e
Q u e des c a r e s s c s d e s vœtix.
}

D e tes bienfaits a s s i d u s ,
N o t r e e x i s t e n c e est le m o i n d r e :
C a r tu fais tout p o u r y j o i n d r e
L e s talents et les vertus-
189

Ah ! de tes soins précieux


Reconnaissants, tendre mère,
.Nous voulons l'année entière
X'obéir à qui mieux mieux.
Poisse sous ton œil serein
La famille qui t'honore
Bien des fois venir encore
Répéter ce doux refrain : Gai t gai ! & c
Si nous rendons faiblement
Ce que le cœur nous inspire,
Personne au moins ne peut dire T
Cela sent le compliment.

/i $
LE GOURMAND.

Aussitôt que la lumière


Vient'éclairer mon chevet.
Je commence ma carrière
Par visiter mon buffet;
A chaque mets que je touche,
Je me crois l'égal des dieux,
E t ceux qu'épargnent ma bouche
Sont dévorés par mes yeux.

Boire est un plaisir trop fade


Four Pami de la gaîto :
Ou boit quand on est malade»
On mange eu bonne santé.
Î90

Quand mon délire m'entraîne 3

J e me peins la Volupté
Assise la bouche pleine
Sur les débris d'un pâté.

Un cuisinier, quand je dîne,


Me semble un être divin
Qui du fond de sa cuisine
Gouverne le genre humain ;
Qu'ici-bas on le contemple
Comme un ministre du ciel :
Car sa cuisine est un temple
Dont les fournaux sont Pau-tel.

A quatre heures, lorsque j'entre


Chez le traiteur du quartier,
J e veux toujours que mon ventre
Se présente le premier.
Un jour les mets qu'on m'apporte
Sauront si bien l'arrondir,
Qu'à moins d'élargir la porte,
J e ne pourrai plus sortir.

S'il faut que la'mort me frappe


Au milieu d'un grand repas.
Qu'on m'enterre sous la nappe
Entre quatre larges plats,
E t que sur ma tombe on mette
Cette courte inscription :
Ci-gît le premier poète,
Mort d'une indigestion.
191

L E S DEUX E N F A N T S DU P E C H E U R .

Notre père est parti.


Pour que Dieu nous le rende,
F r è r e , prions, prions à. deux genoux :
Sa barque est si petite,
E t la mer est si grande !
Seigneur, Seigneur, daigne le secourir-
Contre l'écueiî, contre l'orage,
Seigneur, daigne le secourir :
S'il ne revient pus au rivage,
Tons deux il nous faudra mourir.
F r è r e , vois ce point dans l'espace,
Ce point que nom montre l'éclair . . .
—Hélas ! c'est un oiseau qui passe,
Qui passe et disparaît dans l'air.
Notre père est parti, &c.

Depuis que notre pauvre mère


Parmi les anges remonta,
Seul près de nous, douleur amère !
Notre bon père nous resta.
F r è r e , vois ce point dans l'espace ;
Frère, vois-tu à l'horizon ?
—Hé 1RS 1 ce n'est qu'un blanc nuage,
Qui fuit au gré de l'aquilon.
.Notre père est parti, Sec
192

S e s f i l e t s , sa b a r q u e f r a g i l e r
V o i l à notre unique trésor ;
S a c a b a n e est le s e u l a s i l e
O ù toujours nos r ê v e s sont d'or.
F r è r e , qu'apporte cette l a m e ?
D u r e t o u r e s t - c e un p r é c u r s e u r ?
— H é l a s ! elle apporte une r a m e
E t les v ê t e m e n t s d'un p ê c h e u r .
Silence

7
* " SILVIO PELLICO

au Spielberg.

H é l a s ! dans m a prison, brise à la f r a î c h e h a l e i n e ,


Quand tu viens m'ajjnoncer le d o u x retour des
[fleurs,
Q u a n d tu v i e n s m ' a p p o r t e r l e s p a r f u m s de la p l a i n e ,
T u r é v e i l l e s en moi de n o u v e l l e s âou\eurs-
J e le s a i s , du p r i n t e m p s ton h a l e i n e est r e m p l i e .
Vit ton a i l e o p a s s é «tir d e s gazons fleuris ;
M a i s pourquoi n'es-tu pas m a brise d'Italie ?
L'air e m b a u m é de m o n p a y s i

H é l a s ! d a n s m a prison» q u a n d d ' u n c i e l s a n s n u a g e
G l i s s e un r a y o n plus p u r , c o m m e un r e g a r d a m i ;
L o i n d e m e c o n s o l e r , ,je p e r d s b i e n t ô t c o u r a g e ;
J e sens des pleurs venir, et m o n c œ u r a g é m i :
E n voyant ce beau ciel, non, jamais je n'oublie
Q u ' i l n'est qu'un ciel, un seul, pour les pauvres
[proscrits.
A h î p o u r q u o i n'es-tu pas m o n b e a u c i e l d'Italie %
L e c i e l a i m é de m o n p a y s ?
193
H é l a s ! dans ma prison, parfois, lorsque je rêve,
Un songe, cet ami de mon sommeil léger,
M é d i t que je suis libre, et que mon mal s'achève ;
Que j ' a i ma liberté sur un sol étranger.
Sur un sol étranger ! oh ! je vous en supplie,
Mon Dieu ! je ne veux pas être libre à ce prix,
Qu'on me donne plutôt des fers en Italie :
J e veux mourir dans mon pays.
EMILE BARATEAT;.

L'ALOUETTE.

Alouette légère,
Si joyeuse aux beaux jours,
Loin des bruits de la terre
Chante-nous tes amours.
Dès que l'aube étincelle,
J'aime à suivre des yeux
Vers la voûte éternelle
Ton essor radieux.

Sur les rives lointaines


Tu ne t'exiles pas ;
Tu braves, dans nos plaines,
L'hiver et ses frimats.
33ès que la nuit s'efface,
Saluant le matin,
J e te vois dans l'espace
Commencer ton chemin*
Ah!
Alouette légère, &c«
194
T a voix fraîche et naïve..
Qu'en rêvant je surprends,
M'attire et me captive
Sitôt que je l'entends ;
O u i , ta voix consolante,
E n tout temps, en tout lieu,
S ' é l è v e au ciel, et chante
L e s louanges de D i e u .
Ah !
Alouette l é g è r e , & c .

E n ouvrant ta paupière,
Loin des ombres du sol,
A u foyer de lumière,
Vers Dieu va, prends ton vol.
Nul bonheur en ce monde
N'est constant, ni r é e l ;
L'allégresse profonde
N e se trouve qu'au ciel.
Ah !
Alouette l é g è r e , & c .
EUCENE FJE LoNLAV.

L E BUIS B É N I .

I l est un temps où la nature,


A p r è s avoir chassé l'hiver,
D e fleurs se fait une parure,
E t reprend son beau manteau vert ;
195

L e villageois dans la prairie,


Pour la chapelle du Seigneur*
A u temps de la Pâque fteurie,
V i e n t récolter le buis en fleur.

Il a toujours cette croyance,


Que ce rameau porte bonheur;
Que la divine providence
R e ç o i t le don qui vient du cœur ;
Que Dieu fera planer l'orage
Bien loin du toit religieux,
Loin de celui qui rend hommage
A u souverain maître des cieux.

L e laboureur et sa compagne
Amènent leurs petits enfants
Chercher au loin daus la campagne
C e buis qu'ils offrent pour encens,
E t le Dieu qui donna sa vie
Afin de nous donner les cieux,
L e jour de la P â q u e fleurie
S e contente du buis pieux.
A. D.ECOUKCELLE-

L'HIRONDELLE D'HIVER. ' " °

C'est moi le petit quî ramone ;


C'est moi qui ramone.
Faites du feu ;
Q u ' i l g è l e un peu :
C ' e s t la moisson que le ciel donne,
O u i , que le ciel donne
Au pauvre enfant de Dieu,
196

L'hirondelle frileuse
Fuit, revient tous les ans,
L a belle voyageuse,
Aux doux feux du printemps.
Moi, je reviens comme elle,
Quand le froid glace l'air :
C'est pourquoi l'on m'appelle
L'hirondelle d'hiver.
C'est moi, &c.

Chauffez-vous, grande dame ;


()1> ! oui, chauffez-vous bien :
Ce feu que je réclame,
C'est là mon gagne-pain*
Au foyer prenez place ;
Dans ma mansarde, hélas!
Quand la bise me glace,
J e ne me chauffe pas*
C'est moi &c.

Habitants de la ville,
Vous attendez toujours
Votre hirondelle agile
Ramenant les beauxjours ;
E n plenrantmon absence^
Ma mère attend ainsi,
Le cœur plein d'espérance,
Son hirondelle aussi.
C'est moi, & c
FHAKCÏS TOURTE»
197

D A N S L A MAIN D E DIEU. $
T o i qui touches la p l u m e .
T o i qui tiens le p i n c e a u ,
T o i qui frappes l'enclume
E t saisis le marteau,
P o u r vous la d e s t i n é e 1
E s t là dans un burin,
D a n s la rude j o u r n é e ,
D a n s le bois ou l'airain.
M a i s du p ê c h e u r a g i l e ,
Qui vit sur le flot b l e u ,
L a barque si fragile
E s t dans la main de D i e u .
Soldat, au cœur de flamme,
T o n sort est dans ta m a i n ,
E s t dans ton oriflamme,
Qui te trace un c h e m i n ,
D a n s Pair qui t'environne,
Dans ton magique essor,
D a n s la main qui te donne
U n e épaulette d'or.
M a i s du p ê c h e u r , &c.

Pauvre barde, tu chantes ;


T a plus douce c h a n s o n ,
T e s ballades t o u c h a n t e s ,
T o n destin, c'est un son.
Courtisan, ta r i c h e s s e ,
Galon d'or ou d'argent.
E s t dans une earesse
D e ton maître e x i g e a n t .
M a i s du p ê c h e u r , &c.
FAANCIS TOVKTE,
198

L O I N DU B R U I T D E S V I L L E S .
L a campagne est b e l l e .
L ' a i r limpide et pur ;
L a vague étincelle
Sous un ciel d'azur :
Oublions l a terre ;
Quittons le coteau ;
Du l a c solitaire
Viens charnier l ' é c h o -
Loin du bruit des villes,
Chantons toujours
Nos plaisirs tranquilles
E t nos beaux j o u r s .
T o u t dans la nature
Semble s'animer ;
Parfum, doux murmure,
Tout virnt nous charmer-
Dans notre nacelle,
Oublions P a r i s ;
V i e n s , ma susur fidèle,
Sur ces bords fleuris.
Loin du bruit, & c .

Vois ces frais ombrage^


D'un séjour charmant J
Suivons ces rivages ;
Voguons doucement.
Nos voix se marient,
Chants mélodieux,
E t deux anges prient
Pour nous dans les cieux.
Loin du bruit, & c .
ADOLPHE PORTE.
199

CHANT DES MOISSONNEURS.

S u r nos grands blés d é j à (o soleil brille.


Quels lourds épis ! Ë n fut-il de pareils ? . i .
C à j travaillons ; vite, en main la faucille ;
M a i s suivez tous, suivez tous mes cojaseils:

Enfants, de chaqtte gerbe


Que mûrit le Soigneur
Laissez tomber dans Pherbe
Quelques épis pour le glaneur;
Pensez au pauvre ghnu-ur :
F a i r e le bien nous portent bonheur.

Notre pasteur dit que le grain qu'on donne


E s t le meilleur qu'on puisse récolter,
ï t le prouvait, quand il disait au prône :
Donner au pauvre, à Dieu n'est que prêter.
Aussi de chaque gerbe, & c .

Au pauvre ici le peu qu'on abandonne,


Dieu pour beaucoup ailleurs le comptera.
Des grains donnés la moisson sera bonne î
Pour nous, au ciel, Dieu les centuplera ;
Aussi de chaque gerbe, &c*
EMILE BARATEAU.
20&

LES- QUESTIONS D ' U N ENFANT.

Quant! le cieî se v o i l e -
T o u t l à - b a s , là-bas,.
Aujardin, Fétoile
M e p a r l e tout b a s , , *
G r a c i e u s e et b e l l e ,
p a y o n s tout d o r é s ,
Dis, que m e dit-elle ?
D i s , que me dit-elle 'i . .
— E î l e dit : R e n t r e z ;
il est t a r d , r e n t r e z ;
M o n e n f a n t , r e n t r e z .;
i l est t a r d , r e n t r e z ,
Rentrez, rentrez*

Qtunr.ci la n u i t a p p r o c h e ^
;
î .lu-"fm ne p e u t r i e n v o i r .
M o i , j ' e n t e n d s 1s cloelnv
.Me p a r l e r , le soir . . >
'Doux s o n s , yoix fidèle,
D u ciel e n v o y é s ,
D i s , q u e me, «lit-elle ?
D i s , q u e m e d i t - e l l e j • • ••
— E l l e dit : P r i e z ;•
ï l est t a r d , p r i e z ;
M o n enfant, p r i e z :
ï l est t a r d , p r i e z »
^ j i e z feriez-
;
'201

€ £ u i u d , dans la nuit b r u n e .
S u r sou c h a r t r e m b l a n t .
Voyage la lune
T o u t en m e p a r l a n t . • .
S a Manche étincelle
R e n d mes yeux charmes \
-Dis, que m e dit-elle 1
D i s , que m e dit-elle % . - -
— Elle dit : Dormez :
Il est tard, dormez ;
M o n enfant, dormez ;
Il est t a r d , d o r m e z ,
Dormez., dormez,

L'étoile s'apptochc;
Dit. l ' e n f a n t , r e n t r o n s .
E n t e n d s - t u la oloclie ?
O h ! v i e n s , nous p r î r œ u .
Soudain petit Pierre
I t e n t r a , p r i a Dieu,
E m b r a s s a sa m è r e ,
E m b r a s s a sa m è r e ,
E t lui dit : A d i e u ;
I l est t a r d , adieu ;
A demain, adieu ;
A u revoir, adieu,
Adieu, adieu.
E M I L E B A K A T E J S . &
502

t
%é> 5SL U N Ï 0 I J T PETIT ROI.
Sur cet arbuste sans feuillage
Voyez cet oiseau tout petit,
Si petit qu'une fleur sauyag<s
Set ait trop vaste pour sou. nid :
Eh bien, c'est le roi des bruyères,
Ne régnant qu'aux jours-des frimas*
A l'entour de« pauvres chaumières ;
Un arpent forme ses états.
Roi d'un petit royaume,
C'est Pami du chalet ;
Sou palais est un chaume.
Son nom, le Roitelet*
Il n'a point de manteau d'hermine,
Vêtement de la royauté,
Cependant, qu'il a bonne mine
Dans sa petite majesté
Cherchant, lorsque tombe la neige.
Un abri contre les glaçons.
Sous Phumble toit qui le protège
II entre sans plus de façons*
ïtoi d'un petit royaume, &c<
Une branche lui sert.de tfône ;
Il n'a ni courtisans; tô"ç^hlÇi
Pour lui, le poids û'ffî&^àwcqntie
:
Le plus" léger sera it trop lourd»
Il pr-end sur ses sujets fidèles
Un très-mince impôt, croyez-moi ;
E t puis, comme il porte des ailes,
Point d'esclavage, c'est sa loi.
Roi d'un petit royaume, &e.
JGMILC BARATJ&A*;.
203

À h/ .v.r
ri S fcr' •
L ' A N G E DE L A PITIE.

Sur la cite briile un soleil de fête ;


C ' e s t »n beau jour que chacun veut saisir.
D e fuites parts la foule satisfaite
Court empressée où l'attend le plaisir.
Seule une femme, à la fois veuve et mère,
L e s yeux en pleurs, Le front humilié,
Demande à tous pitié pour sa misère j
N'est-il, hélas ! n'est-il plus de pitié ?

S a forée enfin s'épuise et l'abandonne ;


E l l e chancelle, r t s e traîne au saint lieu ;
P u i s , à genoux devant une madone,
Offrant son fils à la nacre de Dieu,
E l l e s'écrie : O h ! soyez sccourable
A ce roseau par l'orage plie ;
Vous dont le fils naquit dans une étable,
De mou enfant prenez, prenez pitié.

M a i s , ô prodige ! il semble que la toile


A palpité, que lit Vierge P souri,
E t que Jésus, jouant avec son voile,
Jette à la veuve un regard attendri-
E l l e se lève, emportant l'espérance :
D e tout bonheur n'est-ce pas la moitié 'i
A sa demeure un ange la devance,
L ' a n g e qu'au ciel on nomme la Pitié .
A T." G U S T E BHESSIKR.
I.E R E T O U R E N HELVJÉTÎE.

L o i n du sol q u i m ' a vu n a î t r e
Si j ' a i dû p o r t e r m e s p a s ,
J e n ' a i JHI vous m é c o n n a î t r e ,
B o r d s .chéris, h e u r e u x climats.
F r a i s vallons, r i c h e s c a m p a g n e s .
L a c s d ' a z u r , b o s q u e t s en fleur,
r
iS oirs t o r r e n t s , s o m b r e s m o n t a g n e ^
.Rendez-moi tout m o n b o p h e u r .
Ta-la-1;*, la-la-ln, ta-ïa-ïu ;
T u - l a - l a , t a - ï a - ï a . ta-ly.-k.

Q u e j ' a i m a i s sur !a v e r d u r e
A c h a n t e r de gais r e f r a i n s ,
Q u a n d , au b r u i t d e P o n d e p u r e 3

R é s o n n a i e n t les t a m b o u r i n s !
A u x a c c e n t s de P a l l é g r e s s e ,
J e sentais b a t t r e m o n c œ u r .
J e tressaille eiicor d ' i v r e s s e ,
Q u a n d j e songe à m o n b o n h e u r .

M a i s , de la v e r t e b r u y è r e ,
O n a c c o u r t , on v i e n t vers moi ;
C ' e s t m a s œ u r , c ' e s t m o n vieux p è r e .
M a m è r e que j e revois !
5

O chalets d e l ' H e l v c t i c j
P a r d o n n e z un j o u r d ' e r r e u r .
D<;&oriïKus, à vous m a vie :
Près de vous est le b o n h e u r .
Mur.. A M A S us TASZ-C
205

L E C H A N T DU C O N T R E B A N D I E R .

Qu'il pleuve, qu'il -ventes


?£t que sur tes bois
Siiïle la tourmente
A la forte voix ;
Dans chaque demeure
Descend le sommeil ;
Pour moi sonne l'heure,
L'heure du réveil.
Je pars le pied leste,
.L'oreille aux aguets,
Et j'ai sous ma vcsU:
De bons pistolets-
Silence 3 silence !1
Car dans le balliei
'Voici que s'avance
L e Contrebandier.

Quand la nuit s'etoile,


J e dors à mon tour ;
D'uti plus sombre voile
J'attends le retour.
J'aime les nuées
Aux flancs pleins de bruits* j
Mes belles journées
Sont les noires nuits,

Mais, l'ombre est profonde,


Et les gabeloui,
20&

Quand la foudre gronde,


Ronflent dans leurs trous;
Alors à ma bande
Je donne l'essor,
Et l;i contrebande
Arrive à bon port.

Narguant la régie.
J'ai du bon tabac,
De i'horlogevis,,
Du rum et du me ;
Au diable la clique,
Douane et commis.
Moi, je fais la nique
Aux droits réunis.
XAVIER CE MOSTEPAIK.

LA BETE A BON DIEU.

Où vas-tu, leste et pimpante,


A travers fleurs et gazon,
En quittant par cette pente
Le creux d'arbre, ta maison 1
Avec ta robe d'ermite,
A points noirs, couleur de feu,
Où vas-tu, dis-moi, petite,
Petite bête à bon Dieu ?
Petite bête à bon Dieu,
K«commande mon âme à Dieu.
20?
Une épingle meurtrière
Frappe au cœur le papillon ;
Les oiseaux, dans la volière
On les met tous en prison ;
M a i s , toi, d'épargner ta vie
On dirait qu'on a fait vœu ;
L'enfant lui-même s'écrie :
C'est une bête à bon Dieu.
Petite bête à bon Dieu,
Recommande mon âme à Dieu-
FRÉDÉRIC DE COUKCY.

LA R E S S E M B L A N C E E T L A "
DIFFERENCE.

L a douceur et la beauté
F o n t notre félicité :
Voilà la ressemblance.
L a beauté, deux ou trois ans ;
L a douceur, dans tous les temps : »
Voilà la différence.

L e voleur et le tailleur
Du bien d'autrui font le leur :
V o i l à la ressemblance.
L ' u n vole en nous dépouillant.
E t l'autre en nous habillant :
Voilà la différence.
26
20.8
Hippocrale et le canon
Nous dépêchent chez Pluton :
Voilà la ressemblance.
.L'un le fait pour de l'argent,
L'autre gratuitement :
Voilà la différence •

Clef de fer et clef d'argent


Ouvrent tout appartement :
Voilà la ressemblance.
L e fer ouvre avec fracas,
L'argent, sans bruit et tout bas :
Voilà la diiiérence.

L e perroquet et l'acteur
Tous deux récitent par cœur :
Voilà la ressemblance.
Devant le monde assemblé,
L'un siffle, l'autre est sifflé :
Voilà la différence.
PANUASD.

L E TRAVAIL P L A I T A DIEU.

Enfants du Dieu créateur de la terre,


Accomplissons chacun notre métier :
L e gai travail est la sainte prière
Qui plaît à Dieu, ce sublime ouvrier.
203

L'aVAre, pauvre au sein de la richesse,


Augmente, augmente et compte son trésor.
Cœur sans pitié, sans amour, sans tendresse,
3
ï l meurt de faim, les deux mains pleinesU or*
Enfants du Dieu, & e .

Savants, rêveurs, artistes et poètes,


Instruisez-nous, chantez, rêvez tout bai.
"Un saint labeur sort de vos riches têtes ;
L e nôtre sort de nos robustes bras-
Enfants du Dieu, & c .

P a r vos travaux, enfanta de la patrie,


Peuple et soldats, soutenez le pouvoir;
M a i s , en retour de leur sang, de leur vie,
Chefe du pays, faites votre devoir.
Enfants du Dieu, & c .

L a fourmi garde, et le bon riche donne


A l'indigent qui ne put épargner.
L e travailleur n'accepte pas l'aumône ;
C e qu'on lui donne, il aime à le gagner.
Enfants du Dieu, & c
TlSS£RA.IfT.

L E CHANT DU BERCEAU.

Clos ta blonde paupière ;


Enfant, dors sous mes yeux ;
T o n bon auge et ta mère
SUT toi veillent tous deux.
210

Sous la charmille,
L'oiseau s'enfuit j
L a lune brille ;
Voici la nuit.
L a blanche étoile
Luit au ciel d'or,
Pure, sans voile,
E t tout s'endorj.
Clos ta blonde paupière ;
Enfant, dors sous mes yeux ;
Ton bon ange et ta m è r e
Sur tei veillent tous d e u x ;
Dors, dors.

On dit qu'en r ê v e ,
Enfant charmant,
Dieu vous enlève
A u firmament"
L à , tous les anges
Chantent j o y e u x
Gloire et louantes
A u roi des cicux.
Clos ta blonde paupière, & c .

Sommeille encore,
E t que longtemps
T o n cœur ignore
Tons nos tourments.
Q u e tous les songes
Soient au r é v e i l
Les doux mensonges
D'un doux sommeil-
Clos ta blonde paupière, & c
E. Piouviss.
2il

LE LOUVETIEU.

Gais louvetiers, c'est jour de fête.


C'est grande chasse en la foret ;
Bientôt «os chiens seront en quête
Allons, partons, car tout est prêt.
Partons !
Pif ! paf !
C'est jours de fête ;
Pif! p*f!
Gare à nos coups !
Tayaut ! tayaut !
Gare à la bête !
A nous les loups-
J e suis grand louvetier du roi,
E t passé maître en vénerie ;
Jamais un loup n'a devant moi
Fait un pas sans perdre la vie.
Aussi, dès Paube au rendez-vous,
J e suis à la fontaine aux loups,
Sonnant et chantant,
Au loin r é p é t a n t :
Harloup ! vlaô ! harloup ! vlaô.
Gais louvetiers, & c

Voici mon histoire en deux mots :


Dans les forêts de nos Ardennes,
J'étais un Heur de fagots,
Pauvre d'argertf, riche de peines
Mais qand j'apercevais un loup,
XI était mort du premier coup.
212
J'ai fait m ê m e un jpur
Coup double à mon tour*
H a r l o u p ! vlaû ! harloup ! vlaô !
Gais louvetiêi's, &c-

U n jour, me voyant en f o r ê t ,
L e rai me dit : Virus à Versailles.
— S i r e , hélas ! lui dis-je à regret.
L à - b a s , vous n'avez que des cailles,
.Site, à Vureaillu ! y songez-vous '{
Toujours des cerfs, jamais de loups !
Jamais de danger,
Ni d'homme à venger !
Harloup î vlaô ! harloup ! vlaô !
Gais louvetiers, & c .

S o i t , j e te fais grand l o u v e t i e r ,
M e dit le roi ; par tes prouesses
S a c h e ennoblir ton beau m é t i e r ;
T u peux compter sur mes largesses.
Kn appréciant ça, de phiisir
M a pauvre mfire en crut mourir.
Depuis ce jour-là,
.le chante, oui-da :
Harloup ! vîuô ! harloup ! vlaô !
Gais louvetiers, &c-
ERNEST BOTJS<»ET.
213

A 8é>$>
LE PETIT JEAN.

O vous, messieurs, les heureux sur la terre 7

Sur la terre,
Vous qui passez, écoutez ma prière,
Ma prière :
Je suis un pauvre enfant,
Sans pain et sans argent.
Ma chanson pour eompag-ne,
J'ai quitté la montagne j
Protégez mon retour,
Que je retrouve un jour
Ma vieille mère,
Que je chéris.
Nos bons amts,
Notre chaumière,
Tous biens, hélas ï
Qu'on ne remplace pas.

Prenez, messieurs., ah ! prenez votre bourse^,


Votre bourse ;
Secourez-moi, car je suis sans ressource,
Sans ressource.
Pour mou petit refrain,
De grâce, un peu de pain-
Ca donne du courage,
Pour gagner le village.
Messieurs, n'oubliez pas
Ce qui m'attend là-bas,
Ma vieille mère, &c«
214»

Allons, messieurs, soulagez ma misère^


M a misère ;
ÎJn p e t i t sou, p o u r r e j o i n d r e m a m è r e ^
Oui, ma mère.
Elle m'écrit : " Viens-t'en
" Bien vite, Petit Jean-
" L a m o i s s o n s e r a bonDe
" S i peu que l ' o n te d o n n e ;
" Reviens-nous plein d'espoir."
E t j e pars pour r e v o i r
M a vieille m è r e , & c

FEEDEIUC BEHAT.

DEUX ENFANTS.

M o i , j ' a i d e u x enfants que m o n c œ u r adore ;


I l s o n t , n u i t et j o u r , m e s s o i n s a s s i d u s .
L e c a d e t , m o n fils, m a r c h e à p e i n e e n c o r e ,
IJnînô, m o n g r a n d - p è r e , il ne m a r c h e p l u s .
M o n fils a t r o i s a n s ;
Grand-père à cent ans.

P o u r ces deux enfants


M a tendresse brille ;
D e u x fois j e m e sens
M è r e de famille.
D e l ' â m e et d e s y e u x
J e veille sur e u x :
C a r l ' u n e s t si j e u n e !
E t l ' a u t r e e s t si v i e u x 1
215
i ;
Là, trop près du feu, père, on se hasarde ï
i S M
Vous, Paul, n'allez pas du côté de l'eau.
Tour à tour ainsi, mon cœur est de garde,
Auprès d'un fauteuil, auprès d'un berceau.
" Le fils, ou l'aïeul,
" N'allez pas tout seul. "
Pour ces deux enfants, &c*
<c
Quoi \ l'on se querelle ! et l'on se tient tête ! •
C'est pour une image . . . uh ! qu'ils sont mé-
chants î
.Enfin l'on s'embrasse, et la paix est faite ;
Je vois se mêler, dans leurs doux élans,
E t les cheveux blonds.
Et les cheveux blancs.
Pour ces deux enfants, &c.
FllEDEfUC DE OOÏJRCT.

LA VIERGE DOREE,

phare du pêcheur dans la tempête.

Vierge dorée,
Mère adorée
De nos jeimes cœurs.
Brillante étoile,
Guide la voile
Des pauvres pêcheur*-
27
216-
C'est pour n o u s que leur courage?.
T é m é r a i r e en ses bienfaits.
Va braver pendant l'orage
L e flot p r o p i o e a u x filets.
L à - b a s , sur la m e r qui g r o n d e ,
Battus par les noirs a u t a n s ,
Ils n'ont pour seul bien au m o n d e
Q u e les pleurs de leurs enfants-
Vierge dorée, &c.

O providence divine
Du pêcheur qu'elle conduit,
D o n t l e front d'or s'illumine
C o m m e un f;ma! d a n s l a n u i t ,
Daigne encor, V i e r g e si b o n n e l
F a i r e un miracle en ce j o u r $
Q u e l'or de ton front r a y o n n e ^
P o u r éclairer leur retour-
Vierge doréaj^&c
K. AUCOVET.

L'HORLOGE DE LA NOURRICE,

P e t i t enfant, petit enrant,


L a V i e r g e d o r t , e t t o i , tu p l e u r e s 1
L ' h o r l o g e s o n n e , il e s t d e u x h e u r e s *
V i t e , endors-toi, car D i e u t'eutend.
M o i , j e c o n n a i s d e s fleurs d o r é e s ^
F o u r le b e a u p a r a d i s c r é é e s
S i b i e n t ô t tu v o u l a i s d o r m i r ,
5
T o a , bon a n g e irait t e n c u e i l l i r .
217

O n n ' e n t e n d plus le chaut du pâtre ;


Partout le songe accourt folâtre,
E t , sur son chemin lumineux,
L ' é t o i l e marche dans les cieux.
Petit enfant, &c-

V a , ne crains rien rose vermeille;


}

D e r s , ton bon ange est là qui veille ;


L a lune luit au firmament ;
L a lampe brûle mollement ;
L e vent souffle, et la porte crie ;
L a feuille v o l e , et l'arbre plie ?
M a i s Poiseaa dort calme et muet,
C a c h é dans son lit de duvet.
Petit enfant, & c

D é j à s ' é v e i l l e toute chosej


L'abeille est sur l'espalier ros« ;
D é j à le .chien noir du berger
S ' é l a n c e j o y e u x du verger
Sur le toit bleu de la tourelle ;
D é j à gémit la tourterelle ;
D é j à ta sœur, dans le sentier,
Cueille la fleur de l'églantier.

P e t i t enfant, tu dors enfin.


Sur toi la Vierge à son tour v e i l U *
D o u c e m e n t près d'elle sommeille.
D o r s , j e te laisse dans sa main*
2ïg

A St>b$
LA F E T E DE L'EGLISE.

L a cloche sonne,
E t Pair résonne
D e chants j o y e u x ,
E t de l'église
L a voûte grise ;
L ' é c h o redit les airs pieux.

C a r c'est un grand jour pour Véglise ;


C'est fête pour le bon pasteur ;
C ' e s t un z é p h y r , c'est une brise
Qui montera jusqu'au Seigneur-
L a cloche sonne, & c

Voyez-vous ces jeunes phalanges.,


A u front candide, anx voiles blancs ?
Leur roix, comme la voix des anges,
S'envole au ciel avec l'encens.
L a cloche sonne, &c>

D i e u va descendre sur l a terre :


A genoux tous, il va venir !

f t bénissons d'un cœur sincère


a main qui s'ouvre pour bénir.
L a cloche sonne, & c .
A. DecOVRCELLE »
219

A
CAPTIVITÉ.

Prends, petit oiseau, ce que je te donne*


Dit l'enfant à son prisonnier :
O u gâteau, pour ta faim mignonne,
A v e c le sucre qui foisonne,
E t du frais plantin printanier.
— A h ! repond tout en peine,
L e regard attristé,
J'ai mon grain dans la plaine :
Rendez-moi, ah ï rendez-moi ma liberté-

Je sais des chansons qu'il te faut apprendre,


Dit l'enfant à son prisonnier ;
Des chansons que p a r l a voix tendre
Il me sera si doux d'entendre,
Sous l'aznr du ciel printanier !
— A h ! répond tout en peine,
L e regard attristé,
J'ai mes airs dans la plaine :
Rendez-moi, ah ! rendez-moi ma liberté t

T e s jours seront beaux, tes nuits seront belles,


Dit l'enfant à son prisonnier :
J'apporte au sommeil de tes ailes
Des fleurs et des mousses nouvelles,
Qu'embaume un parfum p r i i A n i c r .
— A h ! repond tout en penre,
L e regard attristé,
J'ai mon nid dans la plaine :
Rendez-moi, ah ! rendez-moi ma liberté.
HlFPOI.ïTE Gr/ERÎN.
220

LE PETIT MOUSSE NOIR.

Sur le grand mât d'une corvette,


U n petit mousse noir chantait,
Disant d'une voix i n q u i è t e ,
C e s mots, que la brise emportait :
A h ! qui me rendra !e sourire
Y)p, ma mère m'ouvrant ses bras 1
F i l e z , fiiez, à mou navire :
Car le bonheur m'attend là-bas.

Q u a n d je partis, m a bonne m è r e
M e d i t : " Tu vas sons d'autres c i e u s ;
t c
D e nos savanes la c h a u m i è r e
( {
V a disparaître de tes y e u x ;
£ (
Pauvre enfant ! si tu savais lire,
" J e t'écrirais souvent, h é l a s ! "
F i l e z , fiiez, ù mou navire :
C a r le bonheur m'attend là-bas.

" Que pour l'esclave est le m é p r i s ;


i C
O n te dira que ton visage
'J^Est aussi sombre que les nuits ;
f
^ S a n s écouter, laisse-les dire :
*• T o n â m e est blanche ; e u x n'en ont p a s . "
F i l e z , filez, d taon navire :
Car Je bonheur m'attend là-bas.
221

.Ainsi chantait-, sur la misaine.


Le petit mousse de tribord.;
Quand tout à coup le capitaine
Lui dit;, en lui montrant le port :
i {
Va,, mou enfant, loin du corsaire ;
<c
Sois libre, et fuis des cœurs ingrats.
< l
Tu vas revoir ta pauvre mère,
l i
Et le bonheur est dans ses bras. "
MARC CONSTANTIN.

LA MOUETTE DE SAINT-MARCOU-

Légende de Normandie-

Aux flots où Saint-Marcou baigne ses bruns ro-


[chers ,
Voyez, tout en lambeaux, dans la mer écumante,
Ces vieux bricks espagnols couchés sous la tour-
[mente,
Hélas ! depuis cent ans, c'est l'effrof des nochers.
Mais alentour, vole et se penche.
Son petit collier noir au cou,
La mouette blanche
De la Manche,
La mouette blanche
De Saint-Marcou.

On contait en Espagne, alors comme aujourd'hui,


Qu'une veuve expirante avait dit, pauvre femme :
Donnez, donnez, Seigneur, des ailes à mon âme.
Pour qu'en adieu suprême elle aille un peu vers lui ;
222
E t , chaque jour, vers lui se penche,
Son petit collier noir au cou,,
La mouette blanche
De la Manche,
La mouette blanche
De Saint-Marcou.

Car ect oiseau des mers, pleurant sous notre cisl,


Oui, c'est la pauvre veuve, enfants, il faut y croire :
Parmi ses blanches sueurs, voyez la plume noire
Qu'elle seule à son cou porte en deuil éternel ;
Et sur l'écueil toujours se penche,
Son petit collier noir au cou,
La mouette blanche
De la Manche,
La mouette blanche
De Saint-Marcou-
HlPPOLYTE G-IJEIUN.

E N P A R L A N T DE M A M È R E .

Lorsque, enfant, j'avais ma mère 3

Je m'en souviendrai toujours !


L a douleur la plus légère
Jamais n'effleura mes jours.
Elle n'avait au village
Q.ue son travail pour tout bien ;
Nous étions cinq en bas âge,
N e manquant jamais de rien.
Ah !ah «
223
Son souvenir, je Se révère.
Moi qui suis"maiatenanfc si vieux.
Voyez, enfants, en parlant de ma mère,
I)es pleurs, des pleurs mouillent mes yeux.

Elle disait : " Qu'on travaille,


" Pour avoir des jours meilleurs ;
" A tous paresseux, la paille ;
c
< Mais le grain, aux travailleurs.**
Pauvre autant qu'elle était bonne,
Souvent elle nous disait :
" On s'enrichit quand on donne."
Comme elle s'enrichissait !
Ah ! ah ! ^
Son souvenir, je le révère,
Moi qui suis maintenant si vieux.
Voyez, enfants, en parlant de ma mère,
Des pleurs, des pleurs mouillent mes yeus.

De la bible, en sa chaumière,
Elle lisait les trésors j
Puis, nous faisions la prière ;
On priait si bien alors !
Je l'entends qui me répète :
Ici-bas, désire peu ;
" Pour être heureux, sois honnête :
" Voilà ce qu'enseigne Dieu."
Ah ! ah !
Son souvenir, je !e révère,
Moi qui suis maintenant si vieux.
Voyez, enfants, en parlant de ma mère,
Des pleurs, des pleurs mouillent mes yeux.
EMILE BARATEAT'.
2Z«

AU RIVAGE BON MÉNAGE.

Sur Its flots, quand la brise est fraîche,


Ou que l'éclair s'allume aux cieux,
A notre bord, pendant la pêche,
Nous nous tenons silencieux,
Pour que le poisson vienne mieux»
Mais, quand la nuit nous gagne.
Au retour, nous chantons
Ce vieux air de Bretagne,
Que tous nous répétons :
la-îa-ia-la-la-Ia, la-Ia-la-Ia-la-la, la, là.
Que nos filets soient lourds? ou non,
Gaîmcnt partons.
Au rivage,
Bon ménage,.
Chez les pêcheurs bretons-

Redoublant parfois de prudence,


Dans nos barques nous nous couchons j
Alors, le cœur plein d'espérance,
Sans aucun bruit nous nous cachons,
E t le poisson dit : Approchons.
Mais, quand la nuit, &c.

Mais, hélas ! souvent il arrive,


Bien que nous nous parlions tout bas,
Que le poisson, sur l'autre rive,
Plus fin que nous, s'en fuit îà-bas.
E t puis nous ne le prenons pas.
Mai», quand la nuit, &c.
EMILE BAKAÏKAO.
221*

IL EST LA L E PARADIS. ,<\ *?

Frère, quittons le pays :


La fortune est à Paris ;
Car le plus beau paradis,
Le plus beau paradis,
Frère, c'est Paris-
Tout là-bas, & l'horizon,
T u voisibien oelte maison,
Maison blanche,
Qui se penche
Comme un nid sur le vallon.
Son maître était orphelin.
Pauvre comme nous, sans pain ^ •
Héritage,
Equipage :
Il avait tout, un matin-
Frère, quittons, &c.

Comme lui, nous partirons,


Et, comme lui nous aurons
Un domaine
Dans la plaine ;
En carosse nous irons ;
E t les cloches, Dieu merci,
Au retour, comme pour lui^
Pour nous, frère,
Je l'espère,
Pour nous, sonneront aussi.
Frère, quittons, &c.
226

Et du P i é m o n t tous les deux


l i e s voilà partis, heureux ;
M a i s , en F r a n c e ,
L a souffrance
B r i s a leurs accents j o y e u x .
U n soir la neige c o u v r a i t
L e plus j e u n e , qui p l e u r a i t ,
E t , tout p â l e ,
S u r la d a l l e ,
A son f r è r e m u r m u r a i t :
Oh ! que l'on souffre à P a r i s !
O ù donc est ce p a r a d i s ,
F r è r e , ce beau p a r a d i s ,
Qu'en p a r t a n t du p a y s
Tu m'avais p r o m i s ?

U n mois a p r è s , deux enfanta


A r r i v a i e n t tout h a l e t a n t s .
L e u r c œ u r ploie
S o u s l a joie ;
Un c r i p a r t en m ê m e temps :
C a r , au d é t o u r du c h e m i n ,
Ils ont v u , dans le l o i n t a i n ,
La fumée
Bien aimée
Q u ' i l s se m o n t r e n t de l a m a i n ,

F r è r e , oh ! vois n o t r e p a y s ;
E t l à - b a s , dans le t a i l l i s ,
C ' e s t notre m è r e , à ses fils
Q u i tend ses b r a s c h é r i s !
Il est l à le paradis !
GUSTAVE LKuorae-
227

L A R É P O N S E C U E O N DIEU.

A u p r è s de cette croix pieuse,


M a fille, expirons dans ces bois,
Puisque, sur la terre oublieuse,
Plus rien ne répond à nos voix.
— M è r e , disait l'enfant charmante,
M è r e , espérons toujours un peu :
Contre la faim qui nous tourmente,
Il nous reste encor le bon Die'i.

E n ville, il ne pouvait entendre,


Par le bruit qu'y font les méchants,
Poursuivait, d'un air triste et tendre
L'innocente aux regards touchants.
M a i s ici, parlons-lui sans crainte ;
Il comprendra mieux notre vœu.
P u i s leur prière avec leur plainte
S'endormit aux pieds du bon Dieu-

Un p è l e r i n , hasard suprême !
K n secret avait écouté ;
D e son pain noir, pauvre lui-même,
I l leur jeta la c h a r i t é ,
E t quand s'éveilla leur misère,
Dans le calme de ce saint lieu :
Oh ! dit l'enfant, ta vois, ma mère
C ' e s t la réponse du bon Dieu.
ÏIIRPOJ.YTS GVZK
22S

,i
(\"9 la°~''
> DORS, MON E N F A N T .

Dors, mon enfant, doucement sommeille ;


L ' a u r o r e est loin d'être de retour.
C ' e s t ta mère qui sur toi veille,
E n te gardant son plus tendre amour.

N e pleure pas : la sainte madone,


A ton réveil, bénira tes jeux.
Pour qui Painie, elle est si bonne !
Toujours son cceur s'ouvre au malheureux.

T o i seul, mon fils, de mon existence


Seras un jour l'ivresse et l'espoir.
Je veux être ta providence,
E t dans tes vœux lire mon devoir.
C R E V E I . DE C H A K L E M A G N F ,

L E C H A N T DU M A T E L O T .

Lorsque la brise est assoupie,


Lorsque la vague est endormie,
E t que mes y e u x suivent Poiseau
Q u i laisse au loin notre vaisseau,
A h ! comme lui, mon cœur s'élance
L à - b a s , là-bas, vers le pays,
O ù , déplorant ma longue absence,
Afon pauvre père, hélas ! tu dis.:
" Il tarde bien ! et j e vieillis ! "
229

Quand des beaux jours la douce aurore


Là, sur les flots, me trouve encore j
Quand mon regard au loin se perd,
E t n'aperçoit qu'un long; disert ;
Ah ! comme alors je me rappelle
Le beau printemps de mon pay.s,
Où mederance l'hirondelle !
E t puis, mon père, hélas i tu dis :
" Il tarde bien ! ut je vieillis ! "

EveiHe-toî, vague endormie j


Eveille-toi, brise assoupie,
E t chasse au loin notre vaisseau,
Plus vite encor que cet oiseau ;
Ramène-moi vers notre France,
Où toi, mon père, heureux, surpris,
Te rappelant ma longue absence,
Tu me diras : " Reste, mon fils ;
" Ne t'en va plus, car je vieillis."

* L E ROSSIGNOL

Lorsque l'hiver couvre le soi


D'un grand manteau d'hermine,
Au loin s'enfuît le rossignol,
Attristant la colline ;
Mais, sous le chaume hospitalier,
Que, le soir, il sait égayer,
Reste un oiseau fidèle,
Qui n'a pas d'aile
C'est le grillon, rossignol du foyer.
230

J o y e u x , dans la froide saison,


Quand l e sarment pétille,
C ' e s t ïe chanteur de la maison,
L ' a m i de la famille.
O u i , sous le chaume hospitalier,
Q u e , le soir, 8cc.

Il n'a regret ni du ciel bleu,


Ni des roses nouvelles j
Son firmament, c'est un bon feu ;
Ses fleurs, les étincelles.
Oui, sous le chaume hospitalier,
Q u e , le soir, & c

A i n s i , dans son destin changeant,


Quand le printemps s'envole,
D i e u laisse auprès de l'indigent
L a g a î t é qui console.
O u i sous le chaume hospitalier.
3

Q u e , le soir, & c .
EMILE: B A R A TE AU.

Q 7C LE MARQUIS DE CADEDIS.

Allons, allons, vous v o y e z que je passe :


Faites de la p l a c e .
A l l o n s , allons, vous voyez que j e passe :
Faites de l a p l a è e
A monsieur le marquis.
Sandis !
Cadédis !
7
.c a.\os d e l a p l a c e
A m o n s i e u r le m a r q u i s .
231
3'ai v:t la jour au bord de la Garonne,
Dans mi palais de marbre et de cristal.
Mon père est duc, ma mère était b a r o n t e ,
Mon aïeul pair, mon oncle cardinal.
Notre château fait époque :
Rien n'est beau comme cela j
L e Louvre est une bicoque
E n comparaison de ç a .
Allons, allons. Sic-

J e sais danser» et j'enseignerais même


Au grand Vestri» un p e m rigodon ;
P r è s de ma voix, d'une douceur extrême,"
L e rossignol a le cri du dindon.
Quand l'Institut se rassemble,
J e ris, lorsque j e les vois :
J ' e n sais plus que tous ensemble
Dans le petit bout du doigt.
Allons, allons, &.C.

J e me souviens que dans une bataille,


J ' e x t e r m i n a i , moi seul, un escadron. ^
Auprès de moi, quel géant qui me v a i l l e ?
Goliath même est un petit garçon.
Non,^ni le feu, ni la poudre,
. Ilien ne résiste à mon bras,
E t j e ne sais que la foudre,
Qui pourrait me mettre à b a s .
Allons, allons, Stc.
MARC CONSTANT:».

29
332

/"77 LA P E T I T E P E L O T E .

Pauvres enfants, qui, pour voua eoricliû^


Avez aussi quitté votre village,
VOUP arrivez, quanti moi je vais partir.
Adieu» Paris, j'ai fini mon voyage* ^[cèreft,
Puissions-nona tons, mes vœnx sont bien sin~
Heureux, un jour nous retrouver chez noua !
Partagea tous en bons frères,
TA bientôt à votre tour
Vous consolerez vos inêres,
Qui vont pleurer chaque jour-
Pour moi, j'ai fait ma petite pelote
Dans Paris,
E t je m'en retourne an pays,
Avec ma petite xuarraotts*
Ttempîjs d'espoir, et gaîmont, ctï chantant,
Vous saluiez: plus d'un grand personnage ;
Mais, voyez-vous, le pins riche souvent
N'est pas celui qui donne davantage :
Po«r un passant honnête et charitable,
Qu'on en rencontre au cœur sec et méchant !
L'un vous dit : Va-t'en au diabîe,
En repoussant votre main ;
L'autre, c'est fe fashionable,
Chante en passant son chemin.
Pour moi, j ' a i fait, &e.

Travaillez bien, me a bons petits amis,


Si vous voulez que ic ciel vous seconde ;
Ainsi que moi, bien longtemps dans Paria
1233

Saute», danses, chantez pour tout U monde ,*


Aux mauvais jours ne perdez pas courage :
Car le bon Dieu sur nous veUic toujours.
A y e z du cœur à l'ouvrage,
Et l'argent arrivera ;
Et bientôt, dans son village
Chacun s'en retournera.
Pour moi, j ' a i fait, &c.
FREDEKXC BERAT.

LE SOLDAT FRANÇAIS. /J Vf "

Au retour de la guerre,
Quand un soldat français
Porte à sa boutonnière
L e prix de ses hauts faïtS|
Je croîs à sa vaillance
Sans demander pourquoi.
Voilà comme j e pense ;
Pensez-vous comme moi î

Du faste l'étalage
N e séduit pas mon cœur.
Dans mon saint ermitage.
Je goûte le bonheur ;
-
Je sui; en conséquence
i'ius heureux que le roi.
Voilà comme &c.3

Si jamais la richesse
M'accorde ses faveurs,
234
Je veux avec largesse
Soulager le malheur ;
Protéger l'indigence
E s t ma plus douce loi.
Voilà comme, & c

~7 J RESTE AVEC TA MÈRE.


T u veux quitter nos g r è v e s ,
C e paisible hameau ;
A la ville, tu rêves
Un avenir plus beau.
Parmi l'herbe qui pousse,
L à - b a s , dans le buisson,
Vois ce doux nid de mousse j
Ecoute sa leçon.
Regarde, mon ange,
L a pauvre mésange
A quitte son nid.
Reste avec ta m è r e ,
Dans cette chaumière
Que le ciel bénit.

Sons l'aile qui l'abrite,


L'oiseau, bien faible encor,
S e dérobe, et trop vite
Veut prendre son essor.
V o i s , sa m è r e inquiète
L'appelle dans le p r é ,
E t suit l ' a i g l e qui guette
Son petit adoré.
Regarde, mon ange, & c .
235

Ne va pas, je t'en prie,


Comme l'oiseau du ciel.
Quitter trop tôt, Marie,
Ton doux nid maternel.
Crains l'aigle an vol agile : .
Il te guette, et j ' a i peur-
Cet aigle, c'est la ville,
E t l'oiseau, c'est ton coeur.
Regarde* mon auge, &e-
FILAS cm TOTJETK.

L E S SOUVENIRS DU F O Y E R . $ Y™ %

Bel arbre centenaire,


Qu'avait planté mon père,
C'en est donc fait de toi !
Tu finis avant moi !
Toi qui cachais Je plâtre
De cette humble maison.
Hélas ! au fond de Pâtre,
Tu n'es plus qu'un tison.
Ainsi la vieille Marguerite,
Avec tristesse, avec bonheur,
Au coin du foyer qui l'abrite
Réchauffe ses mains et sou cœur.

Ils ont coupé tes branches,


Nos berceaux des dimanches,
E t les petits oiseaux
Qui peuplaient tes rameaux,
236

Cherchant la cime verte


O ù tous venaient j a s e r ,
Sur la place déserte
N ' o n t plus où se poser.
Ainsi la vieille, & c

Q u a n d j ' y songe ! n a g u è r e ,
A la moisson d e r n i è r e ,
S o u s ton feuillage é p a i s
J'allais prendre le frais j
Maintenant, de l'aïeule
Chauffe les doigts frileux-
P r è s de toi j e suis seule,
Mais tu nous as vus deux*
A i n s i la vieille Marguerite,
Songeant au jour de son bonheur,
A u coin du foyer qui l'abrite
Réchauffe ses mains e t son cœur.
FlïKDERIC D E COUIÎCY.

, > LE VOYAGEUR.

Sachant que pour voir du nouveau


R i e n n'est tel qu'un v o y a g e .
J e pris m a canne et mon chapeau,
ht quittai le village.
Chœur-
M a ï s il n'a pas du tout mal fait, vraiment !
Raconte., ami, ton voyage charmant.
237
An pile nord filant tout droit,
Je n'y trouvai que glace,
E t , pour avoir un peu myins froicî,
Je dus quitter la place.
Mais il n'a pas, &c.
Les Lapons m'ont voulu nourrir
De leur blanc de baleine t
Merci ! merci ! plutôt mourir
Avant qu'on m'y reprenne.
Mais il n'a pas, &c.

Au Pérou je voulus passer


(C'est plus loin que Nanterre) ;
Là, j'étais sûr de ramasser
L'or comme de la terre-
Mais il n'a pas, &c.
L'espoir d'un si riche trésor
Flattait mon c<enr avide ;
J'eus bien du sable, mais point d'or ;
Je laissai mon sac vide.
Mais il n'a pas, & c

Du nouveau monde rebuté,


Il me prît fantaisie
D'aller admirer la beauté
De cette noble Asie.
Mais il n'a pas, &c.
Le grand Mogol D ' à point d'égal.
Ni son immense empire ;
Mais une dent lui fesait mal.
Je plaignis son martyre.
Mais il n'a pas, &e>
238

E t je me dis : C'est évideut,


Malgré son opulence,
Le Mogol souffre de sa dent :
A quoi sert la puissance 'i
Chœur*
Mais il n'a pas du tout mal dit, vraiment !
Poursuis, ami, ton voyage charmant.
J'ai vu Ceylan, Otahîti ;
J'ai parcouru 1* Afrique ;
J e suis arrive, reparti,
?
D ui) courage héroïque.
Mais ii n'a pas, &c«
Eh bien ! partout, comme chez nous,
J'ai vu champs ou rivage ;
Partout les hommes aussi fous,
E t je rentre au village-
Chœur.
Bien merci ! tous, nous voyons bien vraiment
Qu'on peut chez soi goûler même agrément.

<T/"fj-*- LA BULLE DE SAVON.

Voyez, enfants, cette bulle légère,


Que dans vos jeux vous lancez en riant ;
Si, comme vous, sa trace est passagère,
Tout comme vous, son aspect est brillant.
239
.Reconnaissez l'image de la vie,
Bulle aujourd'hui, regrettable demain.
Volez, volez, à ma bulle jolie ;
Dieu nous conduit vers le même chemin.
Sur ses contours, transparents et fragiles
Comme un miroir, brille l'azur des cieiiX.
Ainsi votre âme et ses grâces dociles
Out pour miroir l'éclat pur de v o s yeux.
En grandissant, sa forme est embellie,
Comme un cristal arrondi sous la main.
Brillez, btfllez, ô ma bulle jolie ;
Dieu nous conduit vers le même chemin.

Mais dans les airs l'imprudente s'élève !


Globe léger, qui croyez vivre un jour,
Vous passerez ainsi que passe un rêve,
E t votre éclat vous perdra sana retour-
Ah ! c'en est fait, sa course est accomplie ;
Sans bruit, lié Us ! eiic éclate soudain !
Tombez, tombez, ô ma bulle jolie ;
Dieu nous conduit ver*i le même chemin.
M ABC CONSTANTIN»

T A B L E A U D E PARIS r\
A CINQ, H E U R E S Df." MATIIf•

L'ombre s'évapore,
E t déjà l'aurore
De ses rayons dore
Les toits d'alentour ;
30
240
les lampe» pâlissent,
tes maisons blanchissent,
Les marchés s'emplissent ;
On a TU le jour.
De'la Villette,
Dans sa charette,
Suzon brouette
Ses fleurs sur le quai,
Et de Vincenne
Gros-Pierre amène
Ses fruits, que traîne
Un âne efflanqué.
Déjà l'épicière,
Déjà la fruitière,
Déjà l'écaillère
Saute à bas du lit.
L'ouvrier travaille,
.L'écrivain rimaille,
Le fainéant bâille,
Et le savant lit.

J'entends Javotte,
Portant sa hotte,
Crier : Carotte,
Panais et chou-fleur !
Perçant et grêle,
Son cri se mêle
A la voix frêle
Du noir ramoneur.
Le joueur aride,
L* mine livide
241

"Et la bourse ride,


ïlentre en fulminant ;
Kt sur son passage,
L'ivrogne plus sage,
Rêvant son breuvage,
Ronfle en fredonnant.

Quand vers Nanterre


Le solitaire,
Avec mystère,
Dirige ses pas ;
L a diligenee
Part pour M a / i u i c * ,
Bordeaux, Florence,
Où les Pays-Bas.

" Adieu donc, mon père,


Adieu donc, mon frère,
Adieu donc, ma mère,
Adieu, mes petits. "
Les chevaux hennissent,
Les fouets retentissent,
Les vitres frémissent :
Les roilà partit.

Dans chaque rue


Plus parcourue,
Ija foule accrue
Grossit tout à coup :
Grands, v&letaiiie,
Vieillards, marmaille,
Bourgeois, canaille,
Abondant partout.
242
A h fquelle cohue î
M a tête est perdee,
Moulue et fendue ;
Où donc me cacher î
Jamais mon oreille
N ' e u t frayeur pareille :
Tout Paris s'éveille ;
Allons nous coucher.
DESAtiSIZRS,

TABLEAU DE PARIS

X CINQ HEUBÏ.6 DU SOIH.

E n tou s lieux; la feule


Par torrents s'écoule ;
L ' u n court, l'autre roule j
L e jour baisse et fuit.
Les affaires cessent \
L e s dîners se pressent,
L e s tables se dressent ;
Il est bientôt nuit.

L à , je devine
Poularde fine,
E t bécassine,
E t dindon truffé ;
Plus loin, je hume
S a l é , légume,
Cpits dans l'écume
D'un bœuf réchauffé.
243
Le sec parasite
Flaire, et trotte vite
Partout où l'invite
L'odeur d'un repas j
Le surnuméraire
Pour vingt sous va faire
Une maigre chère
1
Qu'il ne paîra pas. !

Plus loin, qu'entends-je î


Quel Ijruit étrange
E t quel mélange
De tons et de voijç !
Chants de tendresse,
Cris d'allégresse,
Chorus d'ivresse
Partent à la fois.
Les repas finissent ;
Lc3 teints refleurissent ;
Les cafés s'emplissentj
E t , trop, aviné,
Un -four^ gastronome
De sa chute assomme
Le corps d'un pauvre homme
Qui n'a pas dîné.
Le moka fume,
Le punch s'allume,
L'air se parfume ;
E t de crier tous :
( (
Garçon, ma glace !
— Ma demi-tasse ! . . .
— Monsieur, de grâce,
TSempire après vous.
244

L«s journaux se lieent ;


Les liqueurs s'épuisent ;
Les jeux s'organisent.
E t l'habitué,
Le nez sur sa canne,
Approuve ou chicane,
Défend ou condamne
Chaque coup joué.

La tragédie,
La comédie.,
La parodie,
Les escamoteurs :
Tout, jusqu'au drame
E t mélodrame,
Attend, réclame
L'air des amateurs.
Dix heures sonnées,
Des pièces données
Trois sont condamnées
E t se laissent choir.
Les spectateurs sortent,
Se poussent, se portent ;
Heureux, s'ils rapportent
E t montre et mouchoir !
e i
Saint-Jean, L a Flèche,
" Qu'on se dépêche . . .
( t
Notre calèche I
— Mon cabriolet I "
E t la livrée,
Quoîqu'enivrée,
Plus altérée
Sort du cabaret.
245
Les earosses viennent,
S'ouvrent et reprennent
Leurs maîtres, qu'ils raôneîst
En se succédant ;
E t , d'une voix acre,
Le cocher de fiacre
Peste, jure et sacre,
E n rétrogradant.

Quel tintamare !
Quelle bagarre !
Aux cris de gare
Cent fois répétés,
Vite on traverse,
On se renverse,
On se disperse
De tous les côtés.
Faute de pratique,
On ferme boutique.
Quel contraste unique
Bientôt m'est offert !
Ces places courues,
Ces bruyantes rues,
Muettes et nues,
Sont un noir désert.
Une figure
De triste augure
M'approche, et jure
En me regardant . . -
Un long qui vive
De loin m'arrive,
Et jo m'esquive,
De peur d'accident*
P a r longs intervalles.,
Quelques lampes paies,
Faibles, inégales,
?
M éelaire«t encor.
Leur feu m'abandonne ;
L ' o m b r e m'environne ;
L e vent seul résonne ;
Silence î . . . tout dort.
D E S A usinas

LE M É N A G E D E G A R Ç O N .

Je loge au quatrième étage j


C ' e s t là que finit l'escalier.
T o u t fin seul je fais mon ménage j
Je suis domestique et portier.
Des créanciers quand la cohorte
A u logis sonne à tour de bras,
C'est toujours, en ouvrant ma porte,
M o i qui dis que je n ' y suis pas.

D e tous mes meubles l'inventaire


Tiendrait un quarré de papier ;
Pourtant, je reçois d'ordinaire
Des visites dans mon grenier.
Je mets les gens fort a leur aise :
A la porte un bavard maudit,
T o u s me* amis sur «ne chaise,
E t moi, je m'assieds sur mon lit.
247

Gourmands, vous voulez, j'imagine,


De moi pour faire certain cas,
Avoir l'état de ma cuisine.
Sachez que je fais trois repas :
Le déjeuner m'est très-facile,
De tous côtés je le reçoi ;
J e ne dîne jamais qu'en ville,
E t ne soupe jamais chez moi-
Je suis riche, et j'ai pour campagne
Tous les environs de Paris ;
t J'ai mille châteaux en Espagne;
.T'ai pour fermiers tous mes amis ;
J ' a i , pour faire le petit maître.
Sur la place un cabriolet ;
J'ai mon jardin sur ma fenêtre,
Et mes rentes daus mon gilet.
Je vois plus d'un millionnaire
Sur moi s'engager aujourd'hui.
Dans ma richesse imaginaire,
J e suis aussi riche que lui :
Je ne vis qu'au jour la journée,
Lui, vante ses deniers comptants ;
E t puis, à la fin de l'année
Nous arrivons en même te-mps.
Un grand homme a dit dans son livre
Que tout est bien, il m'en souvient.
Tranquillement laissons-nous viyre,
E t prenons le temps comme il vient-
Si, pour recréer ce bas monde,
Dieu nous consultait aujourd'hui,
Convenons-en tous à la ronde,
Noua ne ferions pas mieux que lui*
Jos. PAIN.
31
248

Ç ( %G LA. L E T T R E D E F A I K K PART,
0 *
Rose, l'intention d'ia présente
Est de t'informer d'ma santé.
L ' a r m e ' française est triomphante,
Et moi j ' a i l'bras gauche emj)orté.
Nous avons en d'grands avantages ;
La mitraill' m'a brisé les os.
Nous avons pris arm's et bagages ;
Pour ma part, j ' a i deux ball's dana l'doa.

.T'snit à l'hôpital, d'où j e pense


Partir bientôt pour chez les morts.
J't'envoi' dix francs qu'eelui qui m'passc
M ' a donnés pour avoir mon corps ;
Je m'8uis dit : Puisqu'il faut qos j'file,
Et qu'raa Ros' perd' son épouseur,
Ct- fuit que j'mourroi plus tranquille,
D'aavoïr que j'iui laisa' ma valeur.

Lorsque j ' a i qnitté ma vieil]' mère,


.SU* s'expirait sensiblement.
A l'arrivé' d'ma lett', j'espère
Qu'ell' sera morte entièrement :
Car, si la pauv' femme ett guérite,
Elle est si bonn' qu'elle est dans l'ea»
X>e s/fair' mourir de mort subite
A la nouvelle d'mon trépas.

JV te r'command' bien, ma p'tit' R o » « ,


Mon bon chien, ne l'abandonn' pas ;
349

Mftîs surtout n'iui dis pas la chose


•Qui fait qu'il ne ma r'verra pas :
L u i qui, j'suis sur, s'faisait uu' féte
D e me voir rVenir caporal,
i l VR pleurer comme une bête
E n apprenant mon sort fatal.
Q.uoiqu'ça, c'est queuqu*chose qui m'cnrage
D ' ê t ' fait mourir loin du pays :
A u moins quand on meurt au rillage,
On peut dir' bonsoir aux amis,
On a sa plae* derrièr' l'église,
On a soa nom sur un' croix d'bois ;
Fuis, on espèr* que la payse '
Viendra pour prier quelquefois.
Adieu, Rose* adieu, du courage !
A nous r'voir, il n'fîiut plus songer,
Car, au régiment où j'm'engage,
On ae vous accord* pas d'eongé*
V l à tout qui tourne ! j ' a ' y voit; goutte !
A h ! c'est fini ; j'sens que j'm'en vas ;
J'viens de r'cevoir ma feuill' de route :
Adieu, ltose, adieu, n'ïQ'oubli' pas.
EDMOND L M V S L U E B .

ROULE T A BOSSE.

Roui' ta bosse,
Mon p'tit luron,
Et ris toujours,
urs, à pieds comme
coma eu carrosse;
Roui' ta bosse,
Mon p'tit luron ;
Sois toujours gai, toujours franc, toujours rond*
250

Petit bossu, retiens bien c'que ton père


Chantait souvent, en t'berçant dans ses bra* ;
'* Veux-tu, mon fils, avoir un sort prospère ?
" Veux-tu dVecir bien portant et bien gras ? >*
Roule, &c.
^plaindre du sort serait une folie :
La boss' n'est pas un si triste cadeau ;
Pourquoi s'fâeher ï dans cette courte vie,
Chacun de nous n'a-t-il pas son fardeau 1
Houle, fec.
En fait d'esprit, quVas-tu celui d'Esope,
Qu'on admirait à ]a ville, à la cour 1
J'en refendrais, sous ma difforme env'ïoppe,
A plus d'un nain qui s'eroit l'géant du jour.
Roule, &c.

Pour être heureux, jamais dans ta carrière


Ne prêt' l'oreille aux cancans des badauds;
Ne dis point d'mal des autres par derrière :
Les quolibets te r'tomb'raieni sur le dos.
Roule, &c.
De tes amis soulage la détresse ;
A les servir en tout temps sois dispos ;
J
Si tu parviens au faîte d'ia richesse,
D'vant les petits ne fais pas le gros dos.
* Roule, &c.
T'es un luron qui n'boudes point à table :
Tu mang-'s de tout sans jamais hésiter j
Lorsqu'on .te sert un repas délectable,
Tu t'fais au rentre un' bostf qui peut compter.
Roule, &c.
251
S'il s'allumait une nouvelle guerre,
Sois d'ton pays l'appui le plus fervent;
Qu'jamais Penn'uai n't'envisag' par derrière :
Un brav' se montre toujours par devant.
Roule, & c .

L E R E V E N A N T SIMON. A 7'£
A mon s'eours, mes enfants !
Entrons, il est temps :
D'frayeurme v'Jà morte.
C'est Simon, not'grand gas,
Qui r'vient d'son trépas
E t nous terrd les bras.
C'est ben lui, voyez-vous ?
Enfermons-nous tous,
Tenons^ben la porte ;
Toi, pour le renvoyer,
Prends vit' ton psautier,
Moi, mon bénitier.
— Pan, pan, pan, ouvrez-donc,
C'est vot'gas Simon
Qui r'vient d'Angleterre-
Me trouvant mal là-bns,
J'm'en r'viens à grands pas ;
N'vous sauvez donc pas.
— Va-t'en, mon cher enfant,
Pour toi dans l'instant
J'somm's tous en prière :
Pour gagner l'paradis,
Ecout' ben, j'te dis,
Un I>e profundi*.
252

— Bon, un De profanait !
C'est toujours ça d'pris
?
Par l'trou d la serrure.
Mais êt's-vous donc tous fous %
Ou bien voulez-vous
M'renvoyer d'ehez nous %
—Oui, ouï, mon cher enfant,
D'nous tu s'ras content :
Car demain, j't'assure,
Pour adoucir ton sort,
J'te frai dir' d'abord
Un servie' de mort-

—Un servie' ! vous rêvez ;


J'vois ben qu'vous m'prenez
Pour m» aut', ma mère ;
Je n'suis point un r'vônant,
J'suis vraiment vivant,
Simon, votre enfant-
—C'n-'est pas la vérité :
On m'a rapporté
T o » act* mortuaire.
C'qu'est écrit est écrit ;
Mets-toi dans l'esprit
Qu't'es mort, c'est fini-

—Je n'suis pas mort un brin,


Je n'suis à la fin
N i r'venaut, ni diable.
A v e c vous sans tarder,
Pour vous rassurer,
* JVais boire et manger.
253

—Si c'est vrai qu't'es rivant,


Entre, mon enfant,
Tiens te mettre à table ;
Mang'ï tu nous rassur'ras :
Car y HAÏS ben qu'là-bas
Les morts ne mang' pas.

—C'est ben moi qui suis moi :


Calmez votre effroi,
Puisque j'cass' la croûte»
Embrassez-moi donc tous :
Mon Dieu, qu'il est doux,
D'me r'voir avec vous!
—J'ai l'écrit ben signé
Comra' quoi qu'tu fus tué
Dans un' grand' déroute ;
Je n'eroirai plus l'papicr,
Puisqn'en nos quartier»
J'te v'vois tout entier.

—M'voyant si mal reçu,


Tout d'abord j ' a i cru
Qu'vous perdiez la tête ;
Je n'savais pas pourquoi
J'vous voyais d'bonn'foi
Prier Dieu pour moi.
—C'tour-là, mon cher garçon»
M'donne un' bonn' leçon,
Je n's'rai plus si bête ;
J't'assuï', mon cher enfant,
Q u ' j e u'erois plue roaint'nant
Qu'aux revenant* vivants.
254

'Y. Lt ' ^ L E BONHOMME DIMANCHE.

Ah ! vraiment c'est un bon enfant


Qae le bonhomme Dimanche :
Toujours gai, toujours content,
Il console en tout temps ;
^ If met du pain sur lu planche :
C ' e s t le Dieu des pauvre gene»

Quand le samedi s'Achève,


Il dit : C'est mon tour.
Sur la montage il se lève ;
T o u t dort à l'entour.
Sans qu'on 'entende ses p a s ,
I l descend dans le village,
Puis au c o q , qui fait ramage,
Il dit : Ne me trahis pas !
C o q , ne me trahis pas !
C o q , n e me trahis pas ï
Ah ! vraiment, & c
?
Lorsqu'enfin I on se réveille,
Ouvrant les rideaux,
A v e c sa face vermeille,
Il rit au carreaux.
On veut dormir un instant. :
On lui dit qu'il se retire ;
X>imaoche ne fait qu'en rire,
K t , sans se fâcher, attend ;
C a r il est bon enfant !
SI est très-bon enfant !
A h l vraiment, Sec
255
Avec nous, à la chapelle
Il va le matin ;
Puis, le soir, sous le tonnelle,
Il met tout en train.
Lorsqu'enfin tout est fini,
Il dit, en faisant sa ronde :
J e vois dormir tout le monde,
J e puis bien dormir aussi,
Oui, dormir, Dieu merci !
Bonsoir, vous tous ici . . .
Ah ! vraiment, &c.

CA M'ARRANGE E T CA M ' D E R A N G E . /|

AIR : Turluretle.

Qu'à ma port' dès le matin


Nicolas sonne en lutin,
Comme il me plaît, qu' c'est un ange,
Ca m'arrange,
Vraiment ça m'arrange.

Mais si je suis visité


Par un maussade édenté,
A qui la langue démange,
Ca m'dérange,
Vraiment ça m'dérange.
32
S5S

Qu'un débiteur de bdnrv' for


M'apport* d'I'argcnt d'hon aroi,
Aimant fort c'moyen d'échange,
C'a m'arrange,
-Vraiment ça m'arrange..
Ma.is qu'un fâcheux créancier
Vienn' me diro : Il faut payer-
Un tel propos m'semble étrange ;
Ça m'dé range,
Vraiment ça m'dérange.

( Si je rencontre un arai
Qui ne m'aim' pas à demi,
Qui pour moi vol'rait au Gange,
• Ca m'arrange,. ...
Vraiment ça m'arrange.
Accosté par und'ees gens
Prodigue» de compliment?,
.Là-d'siis comm'je n'prends pas l'eliange,
Ca m'dérange,
Vraiment ça ni'dérange.

Vais-je dîner chez Pesteî,


C et estimable Vatel
Où tout est dign' de louange,
Ca m'arrange,
Vraiment ça m'arrange»
Mois sijMî»'' chez »n traiteur,
Où les mets n'ont pas d'saveur,
Qù l'vin est monsieur Mélange-,
Ca m'dérange,
"Vraiment ça m'dérange-»
257

„ y ' L A CE QUE C'IiST QUE L E PROGRES.

Je soinra' devenus-vieux sans rien-savoir ;


Mais nos gamins, dam' ! faudrait Toir
I ' sauront tous ia rieudioriqtie,
La matheumatiqua, ^; :
i a métaipfcysitpic, w. i
L a chimilqne etbeu d'aut' secrets :
V ' i à ce que c'est que le progrès.
Sur des cliem'ins de 1er, sans avoir peur»
Oa court ia poste à ,1a vapeur. "
Avec ça, lancé comm' d'un' .fronde»
En queq's "heur's de xoude,
On fait l'tour du monde,
Sans enrichir les Cabarets :
V ' i à ce que c'est que le p r o g r è s .

.Supposé que cela saute.en pelais,


K t qu'en ton>tiajitJtt,t'cass'.un bras,
Ou qu'tu t'démett' une omoplate,
Vicntun orraéopate,
Qui Pcasse l'aut' patte,
Pour té rend' Joleux .portant qu'jamaîs :
V ' i a ce que c'est que le progrès.
Mais aussi, quand on ne peut réussir,
Ons'défait d'soi, pour en finir :
L'un s'flànq' du plomb dans la calotte ;
L'aut'. se tire un' botte,
L'aut' se serr' la glotte ;
Puis faut' dans l'eau va etancher l'frai» :
¥'là-ce que c'est queile jjrqgrèei
258

Q O LA TOURNÉE DU DIABLE.
i "*•

L e diable est sorti d'enfer


Four faire le tour du monde ;
Envoyé par Lucifer
Pour butiner dans sa ronde.
Dans tous les corps de métiers.
Commcnçani par les meuniers,
Qui prennent des moutures :
" Vous irez dans ia voiture. "

Piiis il va chez le boucher,


Qui pour du bœuf vend d'ia vache.
C'est lui, j e l'entends parler :
" Bonjour ddnc, monsieur Eustache,
Bien vite, dépêche-toi
Da t'en venir avec moi ;
Laisse là tes fressures,
E t monte dans la voiture. "

" Boulangers, à votre tour,


Vous avez fait la rapine ;
11 faut laisser là le four,
I l faut changer de farine,
Vous faites, vos paijns petits,
E t le plus souvent mal cuits,
Ou bien de pâte sûre :
Vous irez dans la voiture. "

" Charpentiers et menuisiers,


Dont les pieds n'ont que dix pences ;
•259

Maçons, couvreurs, cordonniers,


Le diable est à vos trousses ;
Chaudronniers, qui mettez tons
L a pièce à côté des trous ;
Pour apprend' la soudure,
Embarquez dans la voiture. "

" L e s tailleurs et les drapiers


Monteront avec les autres,
Ainsi que les chapeliers
E t bien d'autres bons apôtres.
Toi, cabaretier malin,
Qui, pour augmenter ton vin,
Mets de l'eau toute.pure,
T u iras dans la voiture. "

" A vous, messieurs les marchands,


C'est à vous que l'on s'adresse ;
Vous savez tromper les gens
Par mensonge et par finesse ;
Bien souvent vous leur vendez
Des effets endommagés :
Vous irez, chose sûre,
Vous irez dans la voiture. "

<c
Et vous, bons cultivateurs,
Qui n'êtes point de ce nombre,
Vous êtes des gens d'honneur ;
L e diable n'a rieu de contre :
Vos terres vous cultivez ;
Honnêtement vous vendez
A la bonne mesure :
Vous n'irez pas en voiture. "
S60

^£?3 L E VIEUX GROGNARD.

Après trente ana d'honorables services.


Depuis quinze ans, ou m'a fait caporal ;
A moi Ppompon pour faire l'exercice,
2'>t encor loin pour passer général.
Avec fierté je porte la cocarde,
Je suis i'soutien de mon vieil étendard,
Du drapeau blanc ! Que l'tonnwr' les bombarde
Je sois grognnrù ! morbleu ! je suis grognard !

Au cabaret, quand je suis en gogueUc,


C'est moi qui tiens le discours le plus fm
Qu'cc soit au sabre ou à la baïonnette,
Je fais marcher au sort le plus malin.
En maraudant, quand {'faisais la campagne,
J'&avais pincer chapon-s, poulets, canards,
Et d'un bivouac faire un pays d'eoca^ne.
•Je suis grognard ! morbleu ! je suis-gregnard !

Quand des conscrits arrîv't à la caserne,


Comtn' plus ancien, je leur fais les honneurs ;
JT'leur fais passer vessies pour des lanternes,
Et régaler le plus An d'nos Hcheurs,
Leur racontant les effets d'ia mitraille,
Les coups d'eanon, les pris'sde nos-ramparts •
Ils paient à boire au parleur de bataille-
Je suis grognard ! morbleu i j e suis grognard !

J'ai combattu la Prusse et l'Allemagne,


Et j'ai suivi notre auguste Empereur ;
?
J fus en Russie en revenant d'Espagne,
J'ai marqué d'gevm's ma vieille croix d'honneur.
261

la patrie aux alarmes,


C*uUïïd o n r é d u i t
Quand on trahit notre nouveau Bayard,
En c'rpoiïient là je sens couler mes larmes.
Je suis grognard ! morbleu ! je suis grognard !

L E PAYSAN.
A mes dépens est-c'qae vous voulez rire ?
Depuis une heur' vous m'app'lez paysan ;
Sans vous fâcher, permettez-moi d'vous dire,
Qu'un paysan vaut bien un suffisant.
Avec un mot j'pourrais bien vous fair' taire :
5
Monsieur Pvalet, faut bien qu'on trouv chez lions
Des gens comm'moi prnir labourer la terre,
Afin d'nourrir des parresseux comm' vous.
Pavions chacun not'go'ût, not'caractère •
Quand il fallut adopter UD métier.
Mon frère prit l'état de militaire,
£ t moi j'adoptai celui, de fermier.
Pour mon pays, quoique j'donn'raïs ma vie,
Au labourag' je m'Hyre avec plaisir :
S'il faut des bras pour servir la patrie,
Il faut aussi des bras pour la nourrir.

Sous les drapeaux de leur chère patrie,


Oc vit combattre bien des paysans,
Pour leur pays sacrifier leur vie,
Avec ardeur s'illustrer dans les camps,
Sans murmurer, quitter l'humble chaumière.
Souvenons-nous que le brave Francœur
Se fit soldat dans le temps de la guerre ;
En temps de paix, il se-fit laboureur.
262

CONSERVONS L'ESPÉRANCE.

Ain de la Boulangère.

Chacun a son lot, ici-bas,


De j o i e et de souffrance ;
N'importe où l'on tourne ses pas,
C'est toujours m ê m e chance.
Cependant l'homme, pour appui,
Doit garder l'espérance
Chez lui,
Doit garder l'espéranee.

" Aide-toi, le ciel t'aidera, "


Nous dit une sentence ;
Celui dont l'esprit l'engendra,
N ' é t a i t pas sot, j e pense.
Bravons donc le sort jusqu'au bout,
E t gardons l ' e s p é r a n c e .
Dans tout,
E t gardons l'espérance.

Au milieu de mille hasards


L e monde se balance ;
E h bien, n'adressons nos regards
Q u ' à l'heureuse o c c u r r e n c e .
Y perdons-nous parfois nos soins î
Conservons l'espérance
Du moins,
Conservons l'espérance.
263

Rio.ts de ces faiseurs d'à Y in,


Vautours de l'éloquence,
Prétendant que notre pays
Marche à la déoadence ;
S i leur front devient soucieux,
Conservons l'espérance
Bien mieux,
Conservons l'espérance-
L'honneur, les jeux et les plaisirs,
L a gloire, l'abondance,
J a m a i s , pour combler nos désirs,
Ne manqueront en France.
On nous alarme vainement j
Conservons l'espérance,
Vraiment
Conservons l'espérance.
*'* Mais nous vieillissons, par malhe
Crie avec doléance
Un voisin, qui n'a de bonheur
Qu'en sa propre existence.
—Nous avons des fHs, des neveux :
Conservons l'espérance
Pour eux.,
Conservons l'espérance»
Lorsqu'un mortel saute le pas,
On l'enterre <?n cadence :
C'est que l'on doit aimer '.à-bas
l i a chanson, la romance.
Nous qui chantons rie bon uloi,
Conservons l'espérance,
M a foi !
Conservons l'espérance.
33
264.

/ ^ (r L E C A F É -

A Ï K : Tous les bourgeois de Chartres.

Si v o u s v o u l e z s a n s p e i n e
Vivre bonne santé.
S e p t jours de la semaine^
P r e n e z du bon c a f é ,
ii vous préservera de toute m a l a d i e ;
S a v e r d i c h a s s e r a , l à , \k p

M i g r a i n e et fluxion ; d o n , , c l o n ,
R h u m e et m é l a n c o l i e .

S a force est sans é g a l e


Contre les m a u x du eœur ;
L a glande pinéale
Y trouva s a v i g u e u r .
Q u a n d o n y m e t ri H l a i t , i ! g u é s i t l a p o i t i ' i n ? *
A u s a n g il d o n n e r a , l à , J à .
Xia circulation, d o u , d o n .
D a n s toute la machine»

S e s petits corpwscwïes
Tiennent lieu de tabae ?

E t mieux que les pilules


Confortent l'estomac ;
JLes pcflcantes h u m e u r s p a r l à sont a d o u c i e s ,
E t l'on n e sentira^ l à , J à ,
Nulle indigestion, 4o#, don,
Nulles aevienomes.
265

Il ouvre les i d é e s
A u plus savants auteursj
K l fournit des p e n s é e s
A u x grands prédicateurs-
L e s fibres du cerveau par loi sont r é v e i l l é e s ,
E t la, mémoire «a a, l à , l à ,
L e s traces d'un sermon, don, d o » , f

Beaucoup m i e n s i m p r i m é e s .

Yottlez-vous dans l'église


N e rien perdre au sermon,
D'une éloquence exquise
G o û t e r l'expression t
Vous devez vous munir, surtout l'après-dînee,
D e cette boisson-là, l à , là :
Votre application, don> don,
Sera moius d é t o u r n é e .

Veut-on à l'audience
N e s'endormir jamais 1
V e a t - o n avec aisance
Rapporter un p r o c è s ,
P r o n o n c e r tin discours, faire quelque lecture !
U s e z , pour tout cela, là, l à ,
D e l'utile boisson, d o n , don :
S a force est toujours s u c e .

P r e n e z ce doux breuvage
f
Sans trop d empressement ;
A s s i s , en homme s a g e ,
H u m e z - l e lentement.
S a respiration communfqne la vie ;
E l l e réveillera, l à , l à ,
Toute la r é g i o n , d o n , d o n ,
D ' i m e t ê t e assoupie.
266

N'allez point, par ménage,


Faire un seeond café :
Ce serait an lavage
D'un mauvais ripopé-
Si voue voulez avoir les dents propres et pures,
Le marc les blanchira, là, là ;
Son application, don, don.
En 6te les ordures.

LES MERVEILLES DE L'OPERA.

A I R : Je vais boire l'onde glacée.

J'ai vu Mars descendre en cadence ;


J ' a i vu des vols prorapts et subtils ;
J'ai vu la justice en balance,
E t qui n« tenait qu'à deux iiîs.

J'ai vu le soleil et la lune


Qui tenaient des discours en l'air ;
J'ai vu le terrible Neptune
Sertir tout frisé de la mer.

Bans le char de monsieur son père,


J'ai vu Phséton tout tremblant
Mettre en cendres la terre entière,
Avee des rayons de fer-blanc.
267

J'ai vu Mercure, en ses quatre ailes


Ne trouvant pas de sûreté,
Prendre encor de bonnes ficelles
Pour voiturer sa déitc*

J*aï vu, du ténébreux empire


Accourir, avec un pétard,
Cinquante lutins pour détruire
Un. palais de papier brouillard*

J'ai vu Roland* dans sa colère.


Employer l'effort de son bras,
Pour pouvoir arracher de terre
Des arbres qui n'y tauaieut pas.

J'ai vu plus d'un fier militaire


Se croire digne du laurier,
Pour avoir étendu par terre
Des monstres de toile et d'osier.

J'ai vu le maître du tonaerre,


Attentif au coup de sifflet,
Pour lancer ses feux sur la terre,
Attendre l'ordre d'un valet.

J'ai vu, par un destin bizarre,


Les héros de ce pays-là
Se désespérer en bécarre,
Et rendre Pâme en ré-mi-Ja.
268

LE SPECIFIQUE UNIQUE-

Refrain.

A d m i r e z ce spécifique
Unique,
Qui guérit les maux
F a s s e s , présents, futur», nouveaux: :
Il est stomachique,
Odontalgique ;
J e le c è d e à tous,
Pour combien 1 pour deux sous, [sous !
Pour combien, messieurs ? pour c o m b i e u î pour deux
S u c des plantes les plus rares,
Q u e l e grand roi X i c o g o
F i t cueillir par les Tartares
D a n s les marais du C o n g o .

C'est la guôrison certaine


D e tous les estropiés ;
ï l e n l è v e la migraine,
ï l i e n qu'en s'en frottant les pieds.

E x c e l l e n t pour les malaises


E t la gourme des enfants,
Il fait crever les punaises,
E n raffermissant les d e n t s .

C'est le vrai parfum des bouches,


Flattant tous les odorats ;
Il tue à dix pas les m o u c h e s ,
'Et donne la mort m;x rats.
269

T&ri'^ en sa d o u b l e espèce,
A d t : u x fins il p e u t servir :
P r i s en l i q u i d e , il engraisse
P r i s en p o u d r e , il fait m a i g r i r .

C ' e s t le roi J e s a n t i d o t e s ;
P a r un p r o d i g e n o u v e a u ,
I l s e r t à cirej' les b o t t e s ,
E t m ê m e à blanchir la peau.

S a v e z - v o n s p o u r q u o i , m e s amis,
N o u s s o m m e s tous si r é j o u i s %
C ' e s t q u ' u n r e p a s n'est b o n
Q u ' a p p r ê t é sans f a ç o n .
Mangeons à la gamelle :
V i v e le son !
Vive- l e son !
M a n g e o n s à la g a m e l l e :
V i v e le son !
Du chaudron.

Nous faisons n" d e s b o u s Crêpas :


On y v e u t r i r e , on ne p e u t p a s .
Lie m e t s l e p l u s friand
D a n s un v a s e b r i l l a n t ,
N e vaut pas la gamelle :
V i v e le s o n , & c .

Point de froideur, point de hauteur :


L ' a m é n i t é fait le b o n h e u r ;
270
Non, sans fraternité,
ï! n'est point de gaîté-
. Mangeons à la gamelle :
Vive le son, &c.

Vous qui bâillez, dans vos palais


Où le plaisir n'entra jamais,
Pour vivre sans souci,
il faut venir ici
Manger à la gamelle.
Vive le son, &c-

Ou s'affaiblit dans le repos


Quand on travaille,,on est dispos.
Que nous sert un £rand cœur.
Sans la mâle vigueur
Qu'on gagne à la gamelle ?
Vive le son, &c.

Savez-vons pourquoi les Romaîas


Ont subjugué tous les humains %
Amis, n'en doutez pas,
C'est que ces fiers soldats
Mangeaient à la gamelle.
Vive le son, Sec-
Bientôt les brigands couronnés,
Mourants de faim, proscrits, bern
Vont envier l'état
Du plus brave soldat
Qui mange à la gamelle
Vive le son, & c
273
Ctjs Carthaginois si lurons,
A Capoue ont fait les capous ;
S'ils ont été vaincus.
C ' e s t qu'ils ne daignaient plus
Manger à la gamelle.
Vive ie son, & x .

Ah l s'ils avaient le sens commun,


T o u s les peuples n'en feraient qu'un ;
Loin de s'entr'égorger,
lis viendraient tous manger
A IA même gamelle.
V i v e le, son, & c .

A m i s , terminons ces couplets


Par le serment des bons Fraudais ;
Jurons tous, mes amis,
D'être toujours unis :
V i v e la république !
Vive le sou !
Vive le son !
Vive la république !
V i v e le son î
Du canon !

L E ROI D ' Y V E T O T .

Il était un roi d'Yvetot


JPeu connu dans l'histoire,
S e levant tard, se couchant tôt,
Dormant fort bien sans gloire
34
274

E t couronné par Jeanneton


D'UD sitnple b o n r a t d e coton^
Dit-on-
O h ! o h ! oli ! o h
A h ! ah ! ah ! ah !
Quel bon petit roi c'était là !
.La, l a .

II f a i s a i t s e s q u a t r e r e p a s
D a n s son palais de c h a u m e ^
E t sur un â n e , pas à pas,
Parcourait son royaume.
J o y e u x , simple et c r o y a n t ïe bien,
P o u r t o u t e g a r d e il n ' a v a i t r i e n
Qu'un chien.

Il n ' a v a i t d é g o û t o n é r e u x
Q u ' u n e soif un peu vive ;
M a i s , en r e n d a n t son peuple heureux,
I! faul b i e n q u ' u n r o i v i v e .
,
L m * a i ê m e v, t a b l e e t a'dixs . s u p p ô t ,
Wur c h a q n e m n i d l e v a i t t m p o t .
D'impôt.

Il n ' a g r a n d i t p o i n t ses é t a t s ,
F u t un voisin c o m m o d e ,
E t . modèle des potentats,
P r i t le p l a i s i r p o u r c o d e .
Ce n'est que lorsqu'il expira
Q u e le p e u p l e qtù l'euteï-ra
Pleura-

O » c o n s e r v e e n c o r le p o r t r a i t
D e ce digne et bon p r i n c e ;
CN**t P e n s e i g u e d ' u n c a b a r e t
275
F a m e u x dans la provinoe.
I-.es jours de f ê t e , bien souvent,
ïja. foule s'écrie en buvaot
Devant :
O h ! oh ! oh ! oh ! & c
BÉBÀHOER.

PROPHETIE TURGOTINE.

A I R : La bonne aventure, ô gai !

Vivent tous nos "beaux espriti


Encyclopédistes !
P u bonheur français é p r i s ,
Grands é c o n o m i s t e s .
P a r leurs soins, au temps d'Adam
N o u s reviendrons, c'est lenr plan :
M o m u s les assiste* ô gai !
Momttis les assiste

C e n'est pas de nos bouquins


Q.ue vient leur s c i e n c e ,
E n e u s ces fiers paladins
Ont la sapienee-
3Lies Colfoert et les S u l l y .
N o u s paraissent grands, mais fi !
C e n'est qu'ignorance, ô g a i !
C e n'est qu'ignorance.

O n yerra tous les état*


Entre eux se confondre;
276

Les pauvres sur leurs grabats


Ne plusse morfondre-
Des biens on fera des lots,
Qui rendront les gons égaux-
Le bel œuf à pondre, ô gai f
Le bel œuf à pondre !
Ou même pas marcheront
Noblesse et roture ;
Les Français retourneront
An droit de nature.
Adieu, parlements et lois,
Adieu, ducs, princes et rois.
La bonne aventure, ô gui l
La bonne aventure !
Prisant des novations
La fine séquelle,
La France, des nations
Sera la modèle ;
Cet honneur nous le deYons
A Tiirgot et compagnons-
Besogne immortelle, ô gaï ï
Besogne immortelle !
A qui devons-nous le plus ?
C'est à notre maître,
Qui, se croyant un abus,
Ne voudra plus l'être.
Ah ! qu'il faut aimer le bien
Pour de 'roi n'être plus rien !
J'enverrais tout paître, ô gai î
J'enverrais tout paître.
L E CHEVALIER DE LISLE,
277

LE FLANEUR. A & 7 0\

M o i , je flâne ;
Qu'on m'approuve ou me condamne,
M o i , je flâne.
Je vois tout,
Je suis partout.
Dès sept heures du matin,
Je demande à la laitière
Des nouvelles de Nanterre,
Ou bien du marché voisin ;
Ensuite au café, je flûte
Un verre d'eau pectoral ;
Puis, tout en mangeant ma fiûte,
Ju dévore le journal.
M o i , je flâne, & c .

J'ai des soins très-assidus


Pour les petites Affiches ;
J ' y cherche les chiens caniches
Que l'on peut avoir perdus.
Des gazettes qu'on renomme
Je suis le premier lecteur ;
A p r è s , je fais un bon somme
Sur l'éternel Moniteur.
Moi, je flâne, & c

Pressant ma digestion,
Je cours à la promenade ;
Sans moi, jamais de parade,
Jamais de procession.
27S

Joignant aux mœurs les plus sages


.La gaîté, les sentiments,
Je m'invite auK mariages,
Je suis les enterrements.
M o i , je flâne, fcc

J'inspecte le quai nouveau


Qu'on a bâti sur la Seine ;
J'aime à. voir d'une fontaine
Tranquillement couler l'eau-
Quelquefois, une heure entière,
Appliqué sur l'un des ponts,
Je crache dans la rivière.
Pour faire de petits ronds.
M o i , j e flâne, & c

Almanach royal vivant,


Je connais chaque livrée,
Chaque personne tirée,
Et tout l'Institut savant.
Chaque généologie
Se logeant dans mon cerveau,
Je pourrais, par mon génie,
Siéger au conseil du sceau*
M o i , j e rîâne, &c.

Sur les quais, comme un savant


Et prudent bibliomane,
Je fais devant une manne
Une lecture en plein vent ;
Si j e trouve un non ouvrage,
Je «aïs, en flâneur malin-,
Faire une corne à la page*
Four lire le lendemain.
M o i ; j e flâne, & c .
27!)

Xi a s .le m ' ê t r e p r o m e n é ,
J e .vais, on gai parasite,
Rendpe à mes amis visite,
Quand vient l ' h e u r e du d î n é .
P a r une mode i n c i v i l e ,
S'il a r r i v e p a r m a l h e u r ,
Q u ' h é l a s ! ils dînent en v i l l e ,
A l o r s j e dîne p a r c œ u r .
M o i , j e flâne, & c

L e s o i r , p r è s des é t o u r n c a u x ,
A mon c a f é , j e habille
S u r les effets d'une b i l l e ,
Sur un coup de dominos.
J e fais la p a i x ou la g u e r r e
A v e c quelque vieux nigaud,
Qui sable un cruchon de b i è r e ,
Kn r a i s o n n a n t comme un pot.
M o i , j e flâne, &c.

Enfin soyez a v e r t i s
Q u e j e ne v a i s au spectacle
Que quand, par un grand miracle,,

S a n s orgueil et sans e n v i e ,
B u v a n t de l'eau pour soutien,
A i n s i j e m è n e la v i e
D'un j o y e u x é p i c u r i e n .
M o i , j e flâne, & c

CASIMIR MENKTKIEK.
280

MONSIEUR DE LA PALISSE.

Messieurs, vous plaît-iî d'ouïr


L ' a i r du fameux L a Palisse ?
Il pourra vous réjouir,
P o u r v u qu'il vous divertisse.

L a Palisse eut peu de bien


P o u r soutenir sa naissance ;
M a i s i l ne m a n q u a , de r i e n ,
D è s q u ' i l fut d a n s l ' a b o n d a n c e .

B i e n instruit d è s le b e r c e a u ,
J a m a i s , t a n t il fut h o n n ê t e ,
11 n e m e t t a i t son c h a p e a u ,
Q u ' i l ne se c o u v r i t l a t e t e .

I l 6 t a i t affiible e t d o u x .
D e l ' h u m e u r d e feu s o n p è r e ,
Et i i ' e n t r a i t g u è r e e n c o u r r o u x ,
S i ce n ' e s t d a n s l a c o l è r e .

Il buvait tous les m a t i n s


U n doigt, tiré de la t o n n e ,
E t , mangeant chez ses voisins,
Il s'y trouvait en p e r s o n n e .

îl voulait dans ses r e p a s


Des mets exquis et fort t e n d r e s ,
ÎSt faisait son mardi gras
Toujours la v e i l l e d e s C e n d r e s .
281
Il consultait rarement
Hippocrate et sa doctrine,
Ktae purgeaiv seulement
Lorsqu'il prenait mcdccuie*
Il brillait comme un soleil ;
Sa chevelure était blonde :
II n'eût pas eu sou pareil,
S'il eût été seul au rnoade.
Il eut des talents divers ;
Même on assure «ne chose :
Quand il écrivait en vers,
Xi n'écrivait pas en prose.
5! savait un triolets
Bien mieux que sa patcnûlre ;
Quand il chantait un couplet,
lî n'en chantait pas un autre-
Par un discours sérieux,
Il prouva que la berlua
Et les autres raàux des yeuK
Sont contraires à, la vue.
Chacun alors applaudit
A sa science inouïe \
Tout homme qui l'entendit.
N'avait pas perdu l'ouïe.

Par son esprit et son air, •


Il s'acquit le don de plaire-
Le roi l'eût fait duc et pair
;

S'il avait voulu le faire* ,


•'" 35
2S2
Lorsqu'on sa maison des champs
Il'vivait libre et tranquille,
On aurait perdu son. temps
De le chercher à la vills.

ï i se plaisait en bateau ;
E t , soit en paix soit en guerre,
31 allait toujours par eau*
A moins qu'il n'allât par terre.

Un beat» Jour, s'otant fourré


Dans un profond m a r é c a g e ,
I! y serait demeuré,
S'il n'eût pua trouvé passage.

I: fuyait assez l'excès ;


Etais dans les cas d'importance,,
Quand il se mettait en frais,
Il se mettait en dépense.

lîansun superbe tournoi.


P r ê t à fournir sa c a r r i è r e ,
11 parut devant le roi :
ïi n'était donc pas derrière.

C'était un homme de cœur,.


Insatiable de gloire ;
Lorsqu'il était le vainqueur,
Il remportait la victoire.

Il fut, par un triste sort,


Blessé d'une main cruelle ;
On croit, puisqu'il en est mort»
Qsie la plaie était mortelle.
283

I l m o u r u t en v r a i h é r o s ,
P e r s o n n e a u j o u r d ' h u i n ' e n doute ;
Sitôt q u ' i l e u t les y e u x clos,
A u s s i t ô t il n e vit g o u t t e .

I l m o u r u t le v e n d r e d i ,
L e d e r n i e r j o u r d e son âge ;
S'il fût mort lesaraedi,
Il eût vécu davantage.

' J ' a i In d a n s les v i e u x é c r i t s ,


Q u i c o n t i e n n e n t son h i s t o i r e ,
Q u ' i l irait en paradis,
S'il é t a i t e n p u r g a t o i r e .
Attribuée à L A MOHNOTE.

L E G A S C O N .

Plus d ' a n gascon erre,


Exaspère,
Mont
Constamment ;
Mais, cadédis !
O n p e u t c r o i r e c é que jé d i s .
J é suis d ' u n e illustré noblesse ;
T o u t en moi l é fait p r e s s e n t i r .
N e v e u d ' u n d u c , d ' u n e duchesse,
L e u r s biens doivent m'apparténir ;
U n i n t r u s v i e n t m é les ravir-
M a plainte en justice est formée ;
284*

Jé veux-plaider titres en mains;


Mais une souris affamée
A dévoré-mes parchemins-
Plus d'un gascon, &c.

Cé revers né m'aflïigé guères :


C a r j é possédé beaucoup d'or ;^
A chacun dé vous, ohers confrères,
J'offrirais on polit trésor,
Que j e .serais trop riche csicor.
L é croirez-vons ï j ' a i 3a manie
Dé toujours sortir sans argent;
Bien certain qu'une main amie
Couvrira dans un cas urgent.
Plus d'un gascon, & c

M a gardé-robé bien garnie


Est celle d'un homme dé cour ;
Bijoux, dentelles, broderie,
Chez moi sé trouvent tour à tour ;
J'en puis changer vingt fois par jour.
Connaît les bouclions, lu piquette.
Incognito y aime à jouir ;
E t si je fais peu de toilette,
C'est que l'éclat nuit au plaisir-
Plus d'un gascon? &c.

En fait d'armes, mieux qu'un St. George


.Té manie cpée, espadon:
Voulez-vous vous Couper la gorge. 1
Pour un oui, comme pour un non,
M o i , j é raé bats comme un démon.
Si j'avais ou l'âmé moins belle,
Dieux ! que d'imprudents seraient morts !
285
Mais, avec eux quand j'eus querelle,
N o b l e m e n t j'oubliai leurs torts.
Plus d'un gascon, &c.

O n a vu d é l ' a c a d é m i e
L a s m e m b r e s les plus é r u d i t s
C é d e r la p a l n i e à m o n g é n i e ;
E n lisant les d o c t e s é c r i t s
Q u ' u n plat écrivassier m ' a pris-
L e u r s t i t r e s ! . . • j ' e n fais un m y s t è r e ?
L e sot qui leur doit un r e n o m ,
P a r v i n t au fauteuil littéraire
E n les p u b l i a n t s o u s son n o m .
Plus d'un gascon* &c.

J'éclipse en p'âc.e, en assurance,


T e r p s i c h o r e et ses favoris,
E t j ë f a i s p : u i : \ q u a n d û': d a n s e ,
L e s plus grands talents d é P a r i s ,
P a u l , D u p o r t j G a r d e l et Vestris.
V o u s lé p r o v e r d a n s l a m i n u t e
N é m'aurait point ettibarrassc,
Si jé n'avais, dans une chute,
E u lé g e n o u droit f r a c a s s é .
Plus d'un gascon, &c.

E u b o n F r a n ç a i s , d é n:a patrie
J é fus le z é l é U é i c a s e u r ;
Mille f o i s j ' e x p o s a i ivia v i e ,
?
E t j e u s , p o u r p r i x dé nia valeur,
Croix dé St. Louis, croix d'honneur.
Q u ' i m p o r t e ! on voit mes boutonnières
Veuves dé ces riens élégants ;
286

P o u r m o i , p o u r les f r a c t i o n n a ire s ,
JLes saluts s e r a i e n t fatiguants.
P l u s d'un g a s c o n , & c

J ^ e u s toujours p o u r la c h a n s o n n e t t e
U n talent vraiment précieux ;
J
E t sans c e s s é j a i d a n s la t ê t e
D e s couplets m a l i n s , g r a c i e u x ,
E t les r e f r a i n s les plus h e u r e u x .
J u g e z , jnjez; d é m o n m é r i t e ;
F a v a r t , qu'on n ' a p a s s u r p a s s é ,
E t P a n a r d , que partout on cite,
Ont écrit cé que j'ai*'pensé.
P l u s d'un g a s c o n , &c.
P. J. CHARRIH.

JÇ TJË R E F R A I N DU CHASSEUR.

M e s avais, p a r t o n s p o u r la c h a s s e ;
D u cor j ' e n t e n d s le j o y e u x son-
T o n , ton, ton, ton,
Tontaine, ton, ton.
J a m a i s c e plaisir n e n o u s lasse j
Il e s t b o n en t o u t e s a i s o n .
Ton, ton,
Tontaine, ton, ton.

A sa m a n i è r e c h a c u n c h a s s e ,
E t le j e u n e h o m m e et le b a r b o n ;
T o n , ton, ton, ton,
T o n t a i n e , t o n , ton ;
287
Maïs le vieux chasse la bécasse,
&t le jeune un jeune oisillon.
Ton, ton*
Tontaine, ton, ton.

Pour suivre le chevreuil qui passe,


11 parcourt les bois, le vallon,
Ton, ton, ton, ton,
Tontaine, ton, ton,
E t jamais, en suivant sa trace,
li ne trouve le chemin long-
Ton, ton,
Tontaine, ton, ton-
A l'affût le chasseur se place,
Guette le lièvre ou l'oisillon,
Ton, ton, ton, ton,
Tontaine, ton, ton ;
Mais si la hiîcai-'sine passe,
Il la prend : pour lui tout est bon ;
Ton, ton,
Tontaine, ton, ton.
L e rrai chasseur est plein d'audace j
Il est gai, joyeux et luron .
Ton, ton, ton, ton,
Tontaine. ton, ton ;
Mais quelque fanfare qu'il fasse
ho chasseur n'est pas fanfaron.
Ton, ton,
Tontaine, ton, ton*
Quand on a termine la chasse,
Le chasseur se rend au grand rond,
Ton, ton, ton, ton,
Tontaine, ton, ton ;
288
E t chacun boit à pleine t a s s e
A u g r a n d S a i n t H u b e r t , son p a t r o n .
T o n , ton,
'Fontaine, ton, tott*
MAKION DU MEBSAN.

LE MOUSSE NAPOLITAIN.

Longtemps battu de l ' o r a g e ,


U n mousse napolitain
A r r i v e mourant de f a i m ,
S e u l é c h a p p é du n a u f r a g e .
L o i n d a sa patria
Q u a n d l ' o r a g e le p o u s s e ,
D o n n e z au petit m o u s s e ,
J
J er Jesu, Maria !

M a l g r é la vague en f u r i e 3

C e s bras Font s a u v é d e s m e r s .
T o u t mouillé des flots amers^
i l va cherchant qui l ' e s s u i e .
L o i n de s a palria, &c

H é l a s ï il n ' a p l u s de m è r e ,
P o u r l'aimer et te n o u r r i r :
A douze a n s j i l va p é r i r
S u r u n j terre é t r a n g è r e !
L o i n de sa patria? & c .
HENBI LEDUCQ,
289

JEMMY. À ^

Tu guides, sur la montagne,


Ton troupeau bien loin de raoi !
Que toujours Dieu t'accompagne :
Ta mère n'a plus que toi.
Pour que je sois moins craintive,
Que de loin ta voix m'arrive.
Jemmy,, mes amours,
M'entends-tu toujours 1
Toujours ?
M'entends-tu toujours î
Mon Jemmy, m'entends-tu toujours?

Par malheur, j ' a i vu ton père,


Hardi chasseur du chamois..
Loin de mon toit solitaire
S'égarer plus d'uae fois.
A son départ, que d'alarmes !
Un jour enfin, que de larmes ! . . .
Jemmy, &c.

Enfant, que ferait ta more,


Si, trop haut portant tes pas,
Ce_soh', comme un soir ton frère.
Tu ne lui répondais pas ?
Epargne-moi cette épreuve :
Héias ! je suis seule et veuve . . .
Jemmy-, &c.
M M E . ÀMABLE T A S T C -
3S
290

T A B L E A U DU JOUR D E L ' A N .

D e p u i s q u e p o u r nous. îe jonî* î m i >


Utv an s u c c è d e à l ' a » q u i f u i t .
T ï a ç r m s d'une ô ^ o q u e aussi belle,,
scîeunoîîe*
L * i m a g e fi tic l e ,
E t qu'oit d é c r i e (MI lu v o y a n t :
V ' t à c\nià c ' e s t que l ' j o u r d e l ' a n »

ï , e soleil à p e i n e a b r i l l é , .
Q u e tout le m r n d c est r é v e i l l é j
A c h a q u e ct:ig-e o » c a r i l l o n n e ^
O n r t ç n i t , on d o n n e .
O n sort, on rés-onne,..
Chacun va, vient, monte et descend :
V ' L à . c'que, c ' e s t q a e L'joav d e P t o .
:
A t v l e v e r Je ce j o n r c h é r i ,
i a l o t l P j . (pi!- n*u pay dormi",
A c c o u r t r e c e v o i r la p r m i c r e -
S i x francs d e son p è r e y

P i r i s , Hn d e sa m è r e ^
U n psautier de su g r a n d ' m i i m a r } :
?
V*jà c ' q u e c ' e s t q u e ( ' j o u r de l a a .

N O B » allons v o i r certains amis,.


Q,Miiiid. nous, savons q u ' i l s sont socfis-j
C f t e z Te c o t i c i e r g e on se pré.veute.;-
3 J
" M a d a m e esi a b s e n t e
N o u v e l l e accablante 1
Cjv s ' i n s c r i t , on s'en v a c o n t e n t :
V l à c ' q u e c ' e s t que l ' j o u r d e l ' a * -
291

Çarenis brouillés, gens refrold»


Semblent redevenir amie ;
Pour quelques livrée 'mesurées
D'araandes sucrées.
Quelquefois plâtrées,
On plâtre un raccommodement :
V'ià c'que c'est <jue le joar de l'an.
Voyez-vous cet homme de bien,
Marchandant tout, n'achetant rien ï
i l tourne, il retourne, il approche,
Flaire chaque poche,
Accroche ou décroche,
Puis, va plus loin en faire autant :
V-'là c'que c'est que le jour de l'an-
Chaque neveu vient visiter
L'oncle dont il doit hériter.
Tous voudraient qu'il vécût sans cesse;
Mais, sur sa richesse
Réglant leur tendresse,
ïls l'étouffent en l'embrassant ;
V l à c'que c'est que l'joiu- de l'ao.

L'ORAGE.
Refrain.
Chers enfants, dansez, 4ansez :
Votre âge
1
Echappe à l'orage ;
Par l'espoir gaîment bercés,
Danoez, chantez, dansez.
292

A l'ombre de ce vert bocage-


Fuyant l'école et les leçons,
Jeunes enfants, sous ce feuillage?
Vous voulez danser aux chansons.
En vain ce pauvre monde
Craint de nouveaux malheurs j
En-vain la foudre gronde ;
Couronnez-vous des fleurs.
L'éclair sillonne le nna«;e,
IVÏais il n'a point frappe vos yeux.
_ L'oiseau se tait dans le feuillage ;
Rien n'interrompt vos chants joyeux.
J'en crois votre allégresse ;
Oui, bientôt d'un ciel pur
Vos yeux, brillants d'ivresse,
Réfléchiront l'azur.
Vos pères ont eu bien des peines ;
Comme eux ne soyez point trahis.
D'une main ils brisaient leurs chaînes,
De l'autre ifs vengeaient leur pays.
î)e leur char de victoire
Tombés sans déshonneur,,
Il vous lèguent la gloire :
Ce fat tout leur bonheur.
Au bruit de lugubres fanfares.»
Hélas ! vos yeux se sont ouverts.
C'était le clairon des barbares
Qui vous annonçait nos revers.
Pans le fracas des armes,
Sous nos toits en débris.,
Vous mêliez à nos larme»
Votre premier souris.
293
Vous triompherez des tempêtes
Où notre courage e x p i r a :
C ' e s t en éclatant sur nos têtes
Que la foudre nous é c l a i r a .
S i le Dieu qui vous aime
C r u t devoir nous punir,
P o u r vous sa main ressème
JL.es champs de l'avenir.

x
E n f a n t s , l ' o r a g e , qui redouble,
Du ciel présage le courroux.
L e ciel ne vous cause aucun trouble 5
M a i s à mon â g e on craint ses coups.
S ' i l faut que j e succombe
E n chantant nos malheurs,
D é p o s e z sur ma tombe
V o s couronnes de fleurs.
UÉKANOEB-

BOUQUET A UNE TANTE. $

Puisque chacun chante


P o u r vous mieux fêter,
M o i , dont l'âme aimante
Veut vous contenter,
I l faut que j e tente,
M a tante,
I l faut que j e tente
Aussi de vous chanter.
$94

ID'abord, indulgente,
K'allez empêcher
V o i x reconnaissante
Prête à s'épancher.
Qui vous complimente,
, Ma tante.
Qui vous complimente
Risque de vous fâcher.

Amitié touchante.
Bonté « « P S détour
Par vos soins enchante
C e t heureux séjour, '
E t toujours augmente.
Ma tante,
E t toujours augmente
Vos droits à notre amour.

F ê t e ravissante,
O ù , sans vous flatter,
Nu! qui ne consente
A vous exalter !
Mais lapins charmante,
Ma tante,
Mais la plus charmante
1
C ' e s t de vous imiter.

? ? M O N C L O C H E R A JOUR

J e suis natif du Finistère ;


A Saint Pol je reçue le jour. t
295
J
M o n pays est l'plus beau d la terre^
9
M o n c l o c h e r l \>\m b e a u d ' a l e n t o u r .
Aussi j.HVtmais.
Je l'admirais,.
E t tous les jours que Dion f'sait, je m'disais :
e :
R i e n ne vanf m a b r u y è r e
" E t mon cliieher à jour. "

M a i s , q u a n d on m M H que pour l a g u e r r e
Il fallait quitter mes amours,
M a métairie et mou vieux p è r e ,
E t p a r t i r au son d u t a m b o u r ;
Je répondis,
C o m m e j*VoiTâ P d i s »
Je r é p o n d i s aussi vr-u que j ' v o u s I M i s i
C i
J'aime mieux tua b r u y è r e
" E t mon c l o c h e r à j o u r . ' '

L a game'.I' ne m ' p v o ï i t a i t g u è r e ;
J ' d é p é r i s s a i s de j o u r en j o u r .
E n m a i c h a n t y j,"restai* en a r r i è r e ^
JVX'arrêiant, à c h a q u e d é t o u r ,
E t p u i s j.*p le tirais»
E l j e m'Jisais :
** Q u i V q u ' a u r a i t d i t , mon. g a r ç o n , q u ' t o m o u r r a i s
C i
^ S a n s r e v o i r t;i b r u y è r e
C i
E t ton c l o c h e r à jour î "

— ** A c ' ^ a r ç o n - l à i r y a r i e n à f a i r e ,
( c
Q u ' u n bon e o i i g é ; c ' e s t le p l u s c o u r t »
" D î t l e - m é d ' c i n : c a r au c i m ' t i c r e
u J >
À g r a n d s \nis il v a c h a q u e j o u r *
Aussitôt fait,
Comme il disait :
296

•"' V'Ià ton congé. " Moi, j'faisais mon paquet ;


E t je r'vis ma bruyère
E t mon clocher à jour.

}2 BIS-MOI QU'ILS ONT M E N T I .


Tu veux quitter, m'a-t-on dit, ce village !
Pour t'éloigner, nia fille, attends un peu.
Hélas ! enfant, songe, songe à mon âge :
Bientôt à lui me rappellera Dieu.
Sis me l'ont dit : tu yeux partir, ma fille !
L à , dans mon cœur, ces mots ont retenti :
Toi, me quitter, toi, ma seule famille !
Ah ! par pitié, dis-moi qu'ils ont menti.
Tu ne sais pas, enfant, ce qu'est la ville ;
Tous les dangers y naîtront sous tes pas.
Près d'une mère est (e plus sûr asile ;
E t puis toujours Dieu punit les ingrats.
Ils me l'on dit : tu veux partir, ma fille !
L à , dans mon coeur, ces mots ont retenti.
Toi, nie quitter, toi, ma seule famille !
Ah ! par pitié, dis-moi qu'ils ont menti.
Ecoute, enfant, au loin quand l'hirondelle,
Quittant son nid, glisse aux flots agités,
A son retour, réponds-moi, trouve-t-elle
Tous ceux, hélas ! tous ceux qu'elle a quittés '!
Ils me l'ont dit : tu veux partir, ma fille !
L à , dans mon cœur, ces mots ont retenti;
Mais daus tes yeux cette larme qui brille
Me dit, enfant, me dit qu'Jls ont menti.
EMILE BAHATEAI;.
297

LE PETIT AVEUGLE. A

J'étais un p'tit aveugle, et n'avais pas quinze ans.


Mon vieux père était mort, ô trop trietes moments!
Ma mère aussi bientôt me quitta sur la terre,
Pour aller, me dit-on, dormir au cimetière.
. Un sac, un bâton,
Un chien nourrisson,
C i t a i t là tout mon bien. ,
L e sac sur le bras,
Je" pars au p'tit pas
Sur le bord du chemin.
Adieu, la chaumière.
Ah ! ah ! ah !
Tombean de ma mère.
Ah ! ai\ ! ah !
Conduis mes pas, mon petit chien,
Mon seul ami, quand tout me quitte-
Je ne vois pas ; toi, tu vois bien :
Petit, regarde et va moins vite.

J'allais tout chancelant, suivant mon p'tit ami,


Et tenant à la main le cordon si chéri ;
J'allais clopin-clopant sur la route trop dure ;
Mes deux pieds étaientnus, mon front sans coa-
Je tendais tremblant £vertura*
Mes mains au passant,
Pour mendier mon pain.
i l
Donnez-moi, messieurs :
" Je suis malheureux ;
u
-Je vais mourir de faim. "
37
29S
Loin de ma chaumière.
Ah ! ah î ah !
Toi, dans ma misère,
A h ! ah! a h !
Conduis mes pas, mon petit chien,
Mon seul ami, quand tout roe quitte.
J e ne vois pas ; toi, ta vois bien :
Petit, regarde et va moins vite.
[gneurs;
Je frappai très-souvent le seuil des grands sci-
Mais, en voyaMnics maux,ils ont ri de mes pleurs.
Que leurs cœurs étaient durs ! Ils n'ont pas eu de
[mère
Ceux qui du p'tit aveugl' méprisent la misère.
Ils disaient furieux :
" Va-t'en, petit gueux :
" Nous n'avons rien pour toi. "
Puis, prenant mon bras,
Me m'naient à graud9 pas
Sur le chemin du roi.
I.ûiiide ma chaumière,
Ah!ah!ah!_
Toi, dans ma misère,
Ah ! ah ! ah !
Conduis mes pas, mon petit chien,
Mon seul ami, quand tout me quitte.
J e ne vois pas ; toi, tu vois bien :
Petit, regarde et va moins vite.
[cœur
Quand la pauvre bergère, épanchant daus mon
Des paroles d'esprit, des mots pleins de douceur,
Et que sa douce main me donnait en silence
Ce qu'un chrétien réserve à la pauvre indigence j
299
J'offrais à mon chien
Moitié de mon bien ;
L e reste était pour moi.
Pendant le repas,
Je ni'disais tout bas,
Non sans un grand émoi :
" Vive la chaumière,
A h ! ah ! ali !
*' O ù vécut ma mère !
A h ! ah i ah !
t Conduis mes pas, mon petit chien,
M o n seul ami, quand tout me quitte.
.Te ne vois pas j toi, tu vois bien :
Petit, regarde et va moins vite.

("pleurs,
Je trottai bien longtemps, toujours vsrsant des
Sur la route inconnue, o ù tant cueillaient des Heurs,
E t voilà que soudain la triste maladie
E n l è v e à mon p'tit chien le reste de sa v i e .
Viens à mon secours,
Maître de mes jours :
J e suis seul en ce lieu ;
E n perdant mon chien,
4 Je perds tout mon bien.
A la grâce de Dieu !
Loin de ma chaumière ! . • .
A h ! ah ! ah !
E t mourir sans mère î
A h ! ah ! ah !
Q u o i 1 tu me laisses, mon petit chien !
A h ! quel malheuï 1 ah ! tout me quitte-
Seul ici-bas tu m'aimais bien ;
<4u« ne suis -je encore à ta suite !
300

'"j i H ADIEU, FRANCE CHERIE.

A I R de la valse favorite de Strauss.


i Adieu, moments d'irresse,
Rêves de ma jeunesse :
La mort déjà m'oppresse
Et vient glacer mon cneur.
Proscrit dans ma misère,
Pleurant toujours mon père,
En vain mon âme espère
Un terme à sa douleur.
Adieu, France chérie.
Que n'ai-je pu l'offrir mon brai '•
O ma belle patrie !
Je pleure mon trépas-
Dans nne affreuse solitude,
J'ai vu s'éteindre mon printemps,
Et la plus sombre incertitude
A mis le comble à mes tourments.
Adieu, France chérie.
Que n'ai-je pu t'offrir mon bras !
O ma belle patrie !
.Te pleure mon trépas.

Berceau de mon enfance,


Heureuse et belle France i
J'admire la vaillance
De tes jeunes héros :
301

Ils ont quitté l a terre ;


M a i s leur noble poussière
Soulève eneor la pierre
Q u i couvre leurs tombeaux.
AdieUj France chérie, & c -
A u moins, dans sa haute infortune,
Mon père eut un vaste renom ;
M a i s , hélas ! ma vie importune
S'enfuit en ne laissant qu'un nom.
O ma belle patrie !
Q u e n'ai-je pu t'offrir mon bras !
Adieu, France chérie,'
L e ciel veut mon trépas.

O glaive redoutable
D'un génie indomptable !
Vingt ans infatigable,
T u fis trembler les rois.
C'est mon seul héritage ï
L a gloire est son partage ;
Q u ' i l reste comme un gage
D e s plus brillants exploits.
A d i e u , F r a n c e chérie, & c
Longtemps une douce chimère
iierça mon cœur d'un tendre espoir.
On me parla d'une autre terre ;
Je ne devais jamais la voir.
O ma belle patrie !
Que n'ai-je pu t'offrir mon bras !
A d i e u , France chérie,
L e c i e l veut mon trépas.
C B E V E L DE C H A E L I M A O N E .
302

J "7 / *T L'ANGE E T L'ENFANT.

Un ange au radieux visage,


Penché sur le bord d'un berceau,
Semblait contempler son image
Comme dans l'onde d'un ruisseau.
" Charmant enfant qui me ressemble,
Disait-il, oh ! viens avec moi ;
Viens, nous serous heureux ensemble :
La terre est indigne de toi. "

" L à , jamais entière allégresse.


L ' â m e y souffre de ses plaisirs ;
Les airs de joie ont leur tristesse,
É t les voluptés leurs soupirs.
E h quoi ! les chagrins, les alarmes
Viendraient flétrir ton front si pur ï
E t dans l'amertume des larmes
Se terniraient tes yeux d'azur ! "

" Non, non, dans les champs de l'espace


Avec moi tu vas t'envoler ;
La providence te fait grâce
Des jours que tu devais couler.
Que personne dans ta demeure
N'obscurcisse tes vêtements ;
Qu'on accueille ta dernière heure,
Ainsi que tes premiers moments-
303

e
- Que les fronts y soient sans nuage ;
Que rien n'y révèle un tombeau :
Quand on est pur comme à ton âge,
Le dernier jour est le plus beau. "
Et, secouant ses blanches ailes.
L'ange, à ces mots, a pris l'essor
Vers les demeures éternelles . . .
Pauvre mère ! ton fils est mort.
REBOUL,

PETIT ENFANT, BONSOIR. A


Petit enfant, de dormir voici l'heure ;
L'étoile brille, il faut dire bonsoir.
L a nuit déjà voile notre demeure ;
Dans le jardin, regarde, tout est noir.
Prie à genoux, et l'ange à son passage
Rapportera, vouant du paradis,
Les jours joyeux qir'il donne à l'enfant sage,
Le doux sommeil et les songes fienris.
Petit estait, de dormir voici l'heure ;
L'étoile brille^ il faut dire bonsoir.

Ferme tes yeux, ne crains rien, moi je veille


L a nuit, le jour, sans jamais me lasser ;
Pais des beaux chants qui charment ton oreille
Bien doucement ma voix va te bercer ;
K t dans les cieux quand reviendra l'aurore,
Lorsque les fleurs s'ouvriront au soleil,
J e serai là pour te sourire encore,
Pour te donner mes baisers au réveil.
Petit enfant, &c.
304

T u grandiras ; moi, toujours ton amie,


J'aurai pour toi mêmes soins, même amour j
Vivre pour toi, voilà, ma seule envie ;
Puisse ton cœur me payer de retour !
S i le destin te devenait contraire,
S i loin de toi le bonheur semblait fuir,
T u trouveras encorprès de ta m è r e ,
M o n pauvre enfant, la force de souffrir.
Petit enfant, &c-
M M E . PRIOU.

SI LOIN î SI LOIN !

Quand le soir à bord ils chantent,


Leurs mille refrains j o y e u x ,
C e s refrains qui les enchantent
M e font triste et soucieux ;
M a i s quand l'étoile se l è v e ,
Toujours, Dieu m'en est témoin,
A u lieu de chanter je r ê v e
A ma mère : elle est si loin !

Q u a n d , signal d'une b a t a i l l e ,
P o u r nous le fer va briller,
A u milieu de la mitraille,
Enfant, j e suis le premier :
C a r même ardeur nous rassemble.
Pourtant, Dieu m'en est témoin,
L e cœur me bat, et j e tremble
P « u r ma mère : elle est si loin !
305
Quand en mer près de nous passe
Allant en France ua vaisseau,
Pour le suivre dans l'espace
J e porte envie à l'oiseau.
Comme il va dans ma patrie.,
Pleurant, Dieu m'en est témoin,
.le luijette un nom, et prie
Pour ma mère : elle est si loin !

L A V E N G E A N C E COUSE, A

Guidé, la nuit, par ma pâle lumière.


Un étranger à rua porte frappa ;
J e l'accueillis dans ma pauvre chaumière.
Le croirais-tu, mon fils, il me trompa !
Tu sais combien j'aimais ta sœur, Marie ?
Pour elle, hélas ! je ne puis que pleurer :
De la ravir, le lâche eut l'infamie-
Mais tu reviens, enfant, pour la venger :
Va droit à lui,
Courage, audace,
Point de merci ;
Attaque en face.
Va, ne crains rien ;
Songe à ta sœur,
Ajuste bien
E t trappe au cœur.

Toi, qui servis pendant longtemps la France,


Tu sais, mon fils»' tout le prix de l'honneur,
Oui, j ' e n suis sûr, de venger cette offense ;
Impatient, tu sens battre ton cœur.
•Sur le terrain, où la mort vous rassemble,
Va, mon enfant, sois ferme et courageux ;
Parla pensée, ô fils, soyons ensemble :
Car pour combattre, hélas ! je suis trop vieux.
Va droit à lui, &c.

Vois ce rocher, c'est là qu'est sa demeure ;


La nuit, de l'aigle il partage le sort.
C'est là que doit sonner sa dernière heure ;
C'est là, mon fils, qu'il doit trouver la mort.
Oh ! le beau jour, que celui qui se lève !
Jour de vengeance ! enfin je suis heureux.
Que ce combat soit sans merci, ni trêve ;
J
I ars, mon enfant, pour toi je fais des vœux.
Vfdroit à lui, &c.

D E P A R T DU J E U N E SOLDAT.

Four se mettre en route


Dans un noble état,
Souvent il en coûte
Au jeune soldat !
Plan-plan, plan-plan, plan-plan,
Rataplan, rataplan ;
Plan-plan, plan-plan, rataplan.
Aussi du village
Partant à regret,
Ce n'est qu'avec rage
Qu'il fait son paquet.
Pian-plan, &c.
397
îi'abord il s'obstine
A ite point chanter ;
Puis, simple machine,
11 va répéter :
Plan-plan, &c.
Mais plus il avan».p,
E t plus son chagrin
Cède à la cadence
De ce gai refrain :
Plan-plan, &c.

Vienne une bataille,


Le héros d'un jour j
Brave la mitraille
Au son du tambour.
Plan-plan, & c

P r è s de son vieux père


Quand il reviendra,
Notre militaire
Longtemps redira :
Plan-plan, &c.

L E D E P A R T DU MARINIER. A

Pourquoi snr le rivage


Chanter, gais matelots ?
Si vous quittez la plage.
Ah ! redoutez les flots.
3QH

Quand bien loin de la terr*


Vogue le nantonier,
O u i , toujours ma prière
Est pour le marinier.

Que toujours dans la voile


L e vent souffle l é g e r ,
E t qu'une blanche étoile
Vienne te diriger !
Quand bien loin, & c .

A h ! que l'onde tranquille


Soit docile à ta v o i x !
Que ta barque fragile
Obéisse à tes lois !
Quand bien loin, & c .
O R T A I H E CONSTANT.

% "7 2. I LES VACANCES.

A I R : Chers enfants, dansez^ dansez.

Chers amis, quel jour heureux !


V o i c i le lemps des vacances.
Nous voyons combler nos vœux :
Poussons des cris j o y e u x .
D e s travaux d'une longue année
N o u s voyons terminer Te cours.
Vacance ! époque fortunée !
A nos cœurs tu souris toujours.
309
L'espoir d'une couronne
Remplissait nos loisirs ;
Le jour qui nous la donne
Comble tous nos désirs.
Chers amis, &c.
Remplis d'une vive allégresse,
Bientôt nous verrons nos parents ;
Puissent leurs cœurs, dans leur tendresse,
De nos succès être contents !
Oh ! combien notre enfance
Leur a dû de bonheur !
Que la reconnaissance
Acquitte notre coeur. " ,
Chers amis, &c.
Il est bien permis à notre âge
De désirer le doux repos,
Quand nous avons avec courage
Supporté de rudes travaux.
Allons donc en vacances
Avec joie et gaîté ;
Que la réjouissance
Nous rende la santé-
Chers amis, &c.

L E D É P A R T DU COLLEGE.
Amis, le départ sonne,
Adieu.
Emportez prix, lauriers,
Vœux, couronne
Aux foyers,
310

Adieu donc, saint asile,


Adieu.
Mais nous te revcrrens,
Port tranquille :
. Nous t'aimons.

A d i e u , toi, notre p é r e ,
Adieu.
Garde-nous souvenir,
V œ u x , prière,
P a i x , plaisir.

A h ! garde-nous ton z è l e ,
Adieu,
Ton z è l e et ton amour
Si fidèle,
A u retour.

Adieu, toi, mon confrère,


Adieu.
Reviens sage e< pieux,
D o u x , sincère ;
Viens j o y e u x .

A d i e u , toi, mon bocage,


Adieu.
Garde-moi tes oiseaux,
T o n ombrage,
Gais et beaux.

A d i e u , toi, notre maître,


Adieu.
Guide sage, é c l a i r é ,
T u sus être
Vénéré.
L E C H A N T DE D E P A R T DES E C O L I E R S .

Demain va retentir la voix claire et sonore


De l'airain qui conduit nos pas,
Et nous annoncera que d é j à luit l'aurore
Du jour pour nous si plein d'appas.
Puisque le devoir nous assemble
Bientôt pour la dernière fois,
Chantons et répétons ensemble,
Unissant le cœur à la voix :
Partons, le plaisir nous appelle ;
Suivons tous gaîinent ses sentiers ;
A la demeure paternelle
Allons déposer nos lauriers.
Tu souris à mes vœux, après dix mois d'absence,
Toit chéri ! séjour du bonheur !
E t vous, sentiers aimés, qujen ma première en-
Je parcourais bouillant d'ardeur ! [fance,
Oui, je vais revoir mon bocage,
L'étang et le bruyant ruisseau
Dont l'onde serpente à l'ombrage
Du peuplier et de l'ormeau.
Partons, &c.

Mais déjà te voilà le verger de mon père


Et le berceau où tant de fois,
Dans les beaux soirs d'été, près de ma tendre
J'écoutais les bons villageois. [mère,
Oh ! qu'il me tarde eneor d'entendre
Chauter là-bas snr le coteau,
312

Quand la nuit invite à descendre


L'heureux habitant du hameau !
Partons, &c.
Lorsqu'ils nous reverront au sein de la famille,
' Que nos parents seront joyeux !
E t le vieux serviteur, déposant sa faucille.
Viendra s'asseoir au milieu d'eux.
Nous dirons avee complaisance
E t nos plaisirs et nos labeurs.
Dans ce premier soir de vacance,
Que nous goûterons de douceurs !
Partons, &c.

Partons donc ; mais, avant do quitter cet asile,


Jurons tous aux pieds de l'autel
De garder notre coeur à la vertu docile,
Pur et fervent jusqu'au rappel-
Puisqu'il faut quitter notre guide,
Supplions la reine d'amour
De daigner sous sa sainte égide
Nous protéger jusqu'au retour.
Partons, &c.
T . C.

ERRATA.
Page vers au Heu de lisez
8 10 un an
129 9 fonde fronde
163 L'OCEANT L'OCEAN.
164 27 assourdit étourdit
165 6 dedans dans
179 2 nos vos
TABLE ALPHABÉTIQUE
Indiquant le titre, le premier vers et ordinaire-
ment le refrain de tontes les chansons
contenues dans ce recueil.

Adieu, à la grâce de Dieu 51


Adieu, charmant pays de France 6(0
Adieu donc, mes amis, refrain, 102
Adieu, France chérie 300
Adieu, ma bonne mère 132
Adieu, moments d'ivresse 300
Adieux (les) 108
Adieux à Chateaubriand 67
Adieux de Bertrand 12
Adieux de Marie Stuart GO
Admirez ce spécifique unique 268
Ah ! donnons-lui, refrain, 13
Ah ! jeunesse, ah [jeunesse, refrain, 1G7
Ah ! répond tout en peine, refrain, 21!)
Ah ! vraiment c'est un bon enfant 254
Aigle (P) _ 165
Ainsi, content dans sa chaumière Ï30
Ainsi la vieille Marguerite 235
Aimant les vérités bien crues 128
A la fête dujour 185
Allons, allons, vous voyez que je passe, 230
39
Alton», e n f a n t s d e la p a t r i e 4
Alouette l é g è r e 133
A ma mère 90
A ma sœur 63
A mes d é p e n s est-e' que TOUS voulez r i r e 261
A m i fidèle, é c h o du bois s a u v a g e ÎO
A i n i s , c é l é b r o n s la n a i s s a n c e 35
A m i s , la m a t i n é e est b e l l e 118
A m i s , le d é p a r t s o n n e , a d i e u , 309
A mon s'cours, mes enfants, 251
A N a p o l é o n le G r a n d 35
A n ç e (1') d e la p i t i é 203
A n g e (1>) et l'enfant 302
Apaise-toi^ va:;uc fatale • 97
A p r è s le t r a v a i l 103
A p r è s trente ans d'honorables services 2G0
Argent (F) 107
A ton* j e p r é f è r e US
A n pied d'une antique chapelle 83
A u p r è s d e c e t t e c r o i s pieuse 227
A u r e t o u r d e la g t t e r r e 233
A u rivage lion m é n a g e 224
Aussi l ' i n o n d e d i t - i , 'refrain, 133
A i o u t A l q u e la l u m i è r e 189
Autrefois le r a t d e ville 161
A u x ftots o ù S a i n t M a r c o » 221
A u x gens atrabilaires 144
A v a n t de q u i t t e r le rivage: 12
A v a n t t o u t j e suis C a n a d i e n 24
Ave, Maria 147
Aveugle (le p'tit) 297
A v e u g l e (l>) e t son c h i e n 83
îTaptiste à l a fleur de son âû-e 14
Barearolle, d e 1 » m u e t t e " . lis
315
S e l arbre ceMéiVAh'e 235
Bergeronnette 3'62
Bête (la) :i boa Dieu 208
Bois, vallons, fertiles campagnes, Î73
Bonheur (le) de la solitude 70
Bonhomme (le) 149
Bonhomme Dimanche 234
Bonjour, nia mère, refrain, 43
Bon ! la farira dondaine, refrain, 98
Bon ouvrier, voici l'aurore 314
Bons habitants du village 42
t Bossus (les) 139
Bouquet à une tante 293
Bouquin (le) et le livre d'or 142
Brigantine (la) 94
Buis béni (le) 194
Bulle (la) de savon 183
Bulle (la) de savon, par Marc Constantin, 23S
Cabane (la) de mon père êS
Café (le) 264
C a m'arrango et ça m'dératige 255
Campagne (la) 164
Canadien exilé (le) 25
Canot (le) 117
Captif au rivage du Maure 41
Captivité 319
Celle qui m'a donne la vie 137
Ce que disait Jean 182
Ce qui rend les anges joyeux 177
C'est la petite mendiante 50
C'est le grillon, le grillon, refrain, 22»
C'est, le Tyrol, c'est ma belle patrie 171
C'est moi le petit qui ramone 195
C'est toi seule, 6 Marie, refrain, 365
316

Chacun a son lot ici-bas 282


Chanson (le L o u i s X V I 86
Chanson d e Roland 121-
Chanson du bon pasteur 42
Chant de départ des écoliers ( T . C .) 311
C h a n t de l'ouvrier 114
Chant de mort des Spartiates 11
Chant des moissonneurs 199
Chant de victoire de l'Espagnol 21
Chant du berceau 209
Chant du contrebandier 205
Chant du départ ( M . J . C h é n i e r ) 9
Chant du matelot 228
Chanteur ( l e ) 183
C h a n t o n s , chantons dans chaque m é t i e r 315
Chapelle ( l a ) de Guillaume T e l l 185
Chasseur (refrain du) . . . T o n t a i n e , tonton, 286
Châtelain (prière du) 65
Chaumière (ma) 57
Cher petit oreiller 184
Chers a m i s , quel jour heureux 308
Chers enfants, dansez, dansez 291
C h è v r i e r ( l e ) de la montagne 169
C h e z Barbin, sur une planche 142
C h e z nous il est un monastère 78
C i e l , conduis ma nacelle, refrain, 82
Cinq sous ! refrain, 136
Citoyen ( l e ) 34
Clocher ( l e ) de mon village 78
C l o c h e s ( l e s ) du monastère 141
C l o s ta blonde paupière 209
C o c o , le livre de la vie 167
Combien j ' a i douce soutenance 64
Combien j e te regrette 46
C o m m e il sourit ! comme il sommeille ! 1S7
317
Comme le dit un vieil adage S
Comme l'mari d'notre mère 151
Comme un pêcheur, quand l'aube 95
Compagne de ma tendre enfance 63
Conduis mes pas, mon petit cliien, refrain, 297
Conscrits, au pas, refrain, 124
Conservons l'espérance 262
Contrebandier (chant du) 205
Corbeau (le) et le Renard 159
Craintes maternelles (les) 180
Crois (la) de ma mère 137
Dans cette aimable solitude 70
Dans cette vie, refrain, 130
Dans la froide Scandinavie S0
Dans la main de Dieu 197
Dans la solitaire bourgade 66
Déjà le vent du soir soupire 65
Demain va retentir 311
De ma sainte patrie 52
Départ des recrues 123
Départ du collège (Mr. P.) 309
Dépari du jeune soldat 306
Départ du marinier 307
Depuis longtemps je me suis aperçu 139
Depuis que pour nous le jour luit 290
Des Maures les hordes impies 21
Deux enfants 214
Deux enfants (les) du pêcheur 191
Deux frères savoyards (les) 99
Dindon, dindon, refrain, 141
Diogène, Sous ton manteau 112
Dis-moi qu'ils ont menti 296
Dormez, petit frère, refrain, 187
Dors au bruit de la mer profonde 67
Dors, mon enfant 228
318
Dot (la) de l'Auvergne ^ 13G
D o u x r o s s i g n o l , reste au s é j o u r 63
D ' u n d é f e n s e u r de la p a t r i e , refrain, 109
D ' u n souille n é e 183
E c o u t e z b i e n , c'est la p r i è r e , refrain, 65
E d u c a t i o n (4') à la.Tean-Jacqtics . Î67
E l l e est si l o i n , refrain, 304
E l l e se l è v e , elle appelle à la v i e 15
Embarquons-nous 374
E n a v a n t , Fanfim la T u l i p e , refrain, 151
E n avant, partez, camarades 124
E n d o r s - t o i , M o n fils, c ' e s t m o i , refrain, 88
•Enfant (1') au berceau 55
E n f a n t de !a m o n t a g n e , refrain, 171
E n f a n t (1') de S a l l a u c h e s 172
E n f a n t s , d e c h a q u e g e r b e , refrain, 199
E n f a n t s du D i e u c r é a t e u r d e la t e r r e 208
E n f a n t s , s o y e z sages 181
Enfin j e connais l ' A m é r i q u e 22
E n parlant de ma m è r e 522
E n t e n d e z - v o u s la t r o m p e t t e qui s o n n e 123
E n tous l i e u x la foule 242
E n v é r i t é , j e vous le dis 106'
F a n f a n la T u l i p e 151
F ê t e (la) de l'église 21S
F i l e , file, J e a n n e , refrain, 145
F i l e z , fiiez, ô m o n n a v i r e , refrain, 220
Flâneur (le) 277
F r a n c e a d o r é , refrain, 28
F r è r e , q u i t t o n s le p a y s , 225
G a i , g a i , Je j o u r d e l ' a n 188
G a i s l o u v e t i e r s , c'est j o u r d e f ê t e • 211
Gamelle patriotique (la) 269
G a r d i e n d e la citadelle 85
Gascon (le) 5S3
319

G i r o n d i n s ( c h a n t des)
Goiirniar.il (JA
Grand' m i r e (ma pauvre)
Grands n e z (les)
Guerre américaine (lu)
Gueux (les)
G u i d é la nuit par m a p â l e lumière
H a n n e t o n vole
Haut ( l e ) et le B a s Canada
H é l a s ! dans ma prison
H é l a s ! qui pourrait oublier
H e u r e u x enfant, que j e t'envie
Hirondelle d'hiver (!')
Hirondelle (!') et le proscrit
Hirondelles (les)
H o m m e ran«é (1')
H o r l o g e (!') de la nourrice
H u m b l e cabane de mon p è r e
H u m b l e toit ( l ' ) de mon p è r e
Il dort, c e héros dont la g l o i r e
ï l est dans nos villages
i l est l à l e paradis
Il est tard ; l'ange est p a s s é
Il est un temps o ù la nature
II était un roi d'Yvetot
ï l existe encore au monde
I l s vont courant la terre
Inconstante bergeronnette
Infortune (!')
J ' a i m e l e tapage
J'ai sur l ' o c é a n , refrain,
J'ai vu Mars descendre en c a d e n c e
J'aurai bientôt quatre-vingts ans
J e a n disait : C e sont le niais
J e a n n e , sois sans crainte
Je l'ai planté» j e l'ai vu naître
320
Je le tiens c» nid de fauvette 71
Je loge au quatrième étage 246
Jemniy ' 289
J'entends dans nos montagnes 48
Je somm' devenus vieux sans rien savoir 257
Je suis de quart 163
Je suis grognard, refrain, 260
Je suis natif du Finistère 294
Je suis pauvre, sur la terre 104
J'étais un p'tit aveugle 297
Jeté sur cette boule 8S
Jeune malade (le) 66
Jeune militaire (le) 133
Je vous revois, ce n'est point an prestige 176
Jour de l'an (le) 188
Joyeux viveurs, l'onde est tranquille 117
lia brigantine 94
La campagne est belle 198
La cloche sonne 218
La douceur et la beauté 207
La fin du jour 313
La France est belle 26
L'air était froid, ma mère 43
La mer m'attend, je veux partir demain 120
Lanciers polonais (les) 30
La nuit profonde 96
La pauvre vieille pleura 170
La victoire en chantant nous ouvre 9
Leçon d'un père à son fils 73
Le diable est sorti d'enfer 258
Le dieu du jour s'avance 174
Le doux printemps se lève 176
Les gueux, les gueux, 135
Le tambour résonne, rtfrain, 37
Lettre (la) de faire part 24S
324
L'humble toit de mon père
Loin de sa patria,
Loin des chalets qui m'ont vu naître
Loin du bruit des villes
Loin du sol qui m'a vu naître
L'ombre s'évapore
Longtemps battu de l'orage
L'on m'avait dit : .Sur un^utre rivage
Lorsque enfant j'avais ma mère
Lorsque la brise est assoupie
Lorsque l'hiver couvre le sol
Louis XVI aux Français
Louvetier (le)
Ma bonne mère
Ma Bretagne
Ma cabane au bord de l'eau
Ma chaumière
Ma chaumière et mon troupeau
Maint vieux parent me répète
Mais il n'a pas du tout mal fait, refrain.
Maisonnette (ta) dans les bois
Mal (le) du pays
Ma Normandie
Ma pauvre grand'mère
Ma place est là-bas
Marquis (le) de Cadédis
Marseillaise (la)
Ma tante, ma tante
Ma vieille nière, refrain,
Ma vocation
Ménage (le) de garçon
ÎVière, écoutez . . . le canon tonne
Merveilles (les) de l'opéra
Met* amis, partons pour JachMsa
40
322
K«ssicurs, TOBS pLiît-ild'wiir 2SG
Moi, j ' a i deux* enfants 214
Moi, je flâne 277
Moi pourtant, je préfère, refrain, 49
Mon cher enfant, toi que j'aime 177
Mon clocher à jour 294
Mon enfant, tu voudrais comprendre 34
Mon fils, ma tendresse m'inspire 73
Mon frère, mon frère 99
Mon pauvre Pierre 132
Mon rocher de Saint Malo 118'
Monsieur La Palisse 280
Mon village 46
e
Mouette (la) "1 Saint Marco» 221
.Mourir pour la patrie, refrain, 1S
Mousse napolitain (le) 288
Mousse noir (le-petif) 220
Musique (la) 98
Naples 176
Napoléon, la patrie et l'honneur, refrain, 16
Napoléon (à) le Grand 35
Ne v'ià que six mois 133
tjid (te) de fauvette 71
Non, rien n'était bon sur la terre 76
Normandie (ma) 59
Nostalgie (la) 92
Notre chant est sans mesure 77
Notre Dame de la mer 77
Notre père est parti 191
Nouveau Diogène (le) 112
v
0 Canada ! mon pays, mes amours î 8
Océan (!') 163
G France, mie éternelle gloire 19
llh, ! ne va pas loin de notre bexcea» 120
•323

Oh < oïi ! oli ! oli ! ah ! ah ! ah ! ah ! refrain, 273


Oh 1 rend'ia-moi mon léger bateau, refrai7i, 56
Oiseau bleu (!') 88
O mon pays, do tes belles campagnes, refrain, 75
O mon peuple, que vous ai-je donc fait? 86
On m'assurait dans les ruouca^nes 126
On vante ces palais 49
Orage (1') 291
Or écoutez une histoire 156
Oreiller (1') de l'enfaut 184
Où vas-tu leste et pimpante 206
Où vont tous ces preux chavaliers 121
O vous, bon pasteur du village 40
O vous, messieurs, les heureux sur la terre 213
Palisse (la) 2S0
Papa-Mignon 156
Parisienne (la) 2
Par la voix du canon d*alun:ies 18
Pâtre (le) du Tyrol 173
Pauvre (le) 104
Pauvre petit, refrain, 126
Pauvres enfants, ijui, pour vous enrichir, 232
Pavés (les) 128
Paysan (le) 261
Paysan Lucas (le) 130
Petit aveugle (le) 297
Petite fileu.se (la) 145
Petite maman (la) 187
Petite mendiante (la) 50
Petite pelote (la) 232
Petit enfant, bonsuir 303
Petit enfant, de dormir voici l'heure 303
Petit enfant, petit enfant 216
Petit efifant, que j ' a i l'âme attendrie 1S0
324
Petit frère (le) 52
Petit Jean,(le) 213
P e t i t m o u s s e noir (le) 220
Petit P i e r r e 10.3
P e u p l e fr&nçîïï?, p e u p l e de b r a v e s 2
P l a i n t e s d u captif 102
P i a n - p l a n , pUui-pIan, p l a n - p l a n , refrain, 3ÔS
P l u s d ' u n gascon e r r e 283
P o r t a n t d e can i r c e en c o n t r é e 109
F o u r a l l e r v f n g e r Ja p a t r i e 148
P o u r dot m a femme a cinq sou? 136
P o u r q u o i m e fuir, p a ^ a g e r e h i r o n d e l l e 74
P o u r q u o i s u r le rivage 307
JViin* se m e t t r e en rouie 306
P o u r trouver le 'parfait, b o n h e u r 57
P o u r un F i a n ç a i s serait-U des e n t r a v e s J6
P r é c i e u x j o u r s dont fut o r n é e 79
P r e n d s , p e t i t oiseau, oc que j e te d o n n e 219
P r è s du b e r c e a u V5
P r i è r e ( t a ) du c h â t e l a i n 05
P r i è r e d'une orpheline 48
P r i è r e du p ê c h e u r 96*
Prophétie turgolius 275
Pui.-qt;e c h a c u n c h a n t e 203
P u r g e o n s nos desserts 98
Q u ' à m a p o r t ' d è s Je m a t i n 255
Q u a n d le ciel se voile 200
Q u a n d le s o i r à bord ils c h a n t e n t 304
Q u a n d on n-'ai'ien, refrain, 191
Quand tout renaît à l'espérance 59
Q u e mon s o r t est funeste 102
Q u e serait notre'vie 183
Q u e s t i o n s du j e u n e s a v o y a r d 126
Q u e s t i o n s (le.-) d ' u n e n t a n t • 200
325
Qu'il pleuve, qu'il vente 205
Qu'il va lentement le navire 2S
•Qui traverse à la nage 110
Quittons les plaisirs de In ville 164
Rampîan-plan . . . tambour battant 132
Rat de ville (ie) ut le liât des champs 161
Recevez notre encens 11
Reconnaissance (la) 45
Refrain des ouvriers H5
Refrain du chasseur 286
Regarde, mon ange 234
Regrets (les) de la campagne 75
Remplie est notre tâche 103
Renard (le) et le Corbeau 159
Rendez-moi ma patrie, refrain, 08
Réponse (la) du bon Dieu 227
Ressemblance et diiTûreace 207
Reste avec tanière 234
Retour (ie) 97
Retour (le) au Tyrol 176
Retour (le) dans la patrie 28
Retour (le) du montagnard 171
Retour (le) en He Ire tic 204
Rêve (le) du mousse 43
Réveil (te) de la Pologne 15
Revenant (le) Simon 2ùl
Révolution (la) de février 1848 lî)
Rocher (mon) de Saint Malo 11&
Roger Bontemps 144
Roi d'un petit royaume, refrain, • 202
Roi (le) d'Yvetot 273
Roland 121
Rose, l'intention d'ia présente 248
Rosier (le) SI
32G

Rossignol (le) 63
Kossignol (le) du foyer 229
Koule ta bosse 249
Sachant que pour voir du nouveau 236
SaJIanches (l'enfant de) 172
Savez-vous pourquoi, mes amis 269
Savoyarde (la) 51
Savoyards (les deux frères) 99
Ses dernières paroles, ou Adieu, France 300
Siècle pastoral (le) 79
Si jeune eneor, je connais l'infortune 69
Si loin ! si loin I 304
SilvioPellico 192
Si vous voulez sans peine 264
Sol canadien, terre chérie 1
Soldat (le) et le berger 39
Soldat (le) et le bon pasteur 40
Soldat français (le) 233
Soldats français, chantons Roland, refrain, 121
Soleil (le) de ma Bretagne 120
Solitaire (le) 110
Sommeil (le) du grand homme 33
Son souvenir, je le révère, refrain, 222
Souvenirs (les) 64
Souvenirs (les) du foyer 235
Souvenirs du jeune âge 68
Souvenirs (les) d'un vieux militaire 6
Souvent de la Grande Bretagne 24
Spécifique unique (le) 268
Sur ce globe, argent fait tout 107
Sur ce rivage où t'attendait ta mère 62
Sur cet arbuste sans feuillage 202
Sur la cité brille un soleil de fête 203
Sur l'airdu tra 159
327
S ) î r le g r a n d m â t d ' u n e c o r v e t t e
f>nr les flots, quand la b r i s e est fraîche
S u r l ' o c é a n du m o n d e
Sur mon rocher
S u r n o s g r a n d s b l é s d é j à le soleil brille
T a b l e a u de P a r i s ^ a o h . d u m a t i n
T a b l e a u de P a r i s à 5 h . d u soir
T a b l e a u du j o u r de l'an
T a p a g e ( l e ) , ou T e i n p ô t e ,
Tempête
T e n e z , m o i , j e suis im b o n h o m m e
T e souviens-tu
T o i qui t o u c h e s la p l u m e
T o n t a i n e , tonton
T o u r n é e ( l a ) du d i a b l e
T r a v a i l (le) p l a î t à D i e u
?
T r o u p e a u que j a c c o m p a g n e
T u g u i d e s sur la m o n t a g n e
T u vas quitter n o t r e m o n t a g n e
T u veux q u i t t e r , m ' a - t - o n d i t ce village
3

T u v e u x quitter nos g r è v e s
T y r o l (le r e t o u r a u )
T y r o l (le r e t o u r d u )
U n a n g e au r a d i e u x visage
U n Canadien errant
Un jour maître Corbeau
U n j o u r une m è r e i m p r u d e n t e
U n tout petit rôi
U n vieux marin
U s a g e s (les) b r e t o n s
Vacances (les)
V a droit à lui, refrain,
Vaine attente
328

Vengeance corse (la) 305


Veuve (la) du soldat a 109
Viens., mon chien, viens, ma pauvre bête 138
Vierge dorée 21ô
Vieux caporal (le) 121
Vieux grognard (le) 260
Vieux marin (le) 32
Vieux soldat (le) 20
Village (mon) 4(1
Violon brisé (le) 138
Vive le son, refrain, 269
Vivent tous nos beaux esprits 275
Via c'quc c'est que le progrès, refrain, 257
V l à c'que c'est que l'juur de l'an, refrain, 290
Vocation (ma) 88
Vogue, ma balancelle, refrain, 17b'
Voilà comme je pense 233
Voilà Sallanches 172
Vois-tu cette troupe guerrière 39
Vous m'avez dit : A Paris, jeune pâtre 92
Vous qui do prêcher la raison 4[
t

Vous qui revenez de l'année 170


Voyageor (le) 23B
- Voyez, enfants, celte bulle légère 228

Fin de la table.
SUPPLEMENT
AU

CHANSONNIER DES COLLEGES.

L E S TRIBULATIONS D'UN A N G L A I S .

Refrain.
Pans les pays que je parcours,
Partout on en veut à mes jours,
Partout, ycs, partout où je cours,
.T'étais contrario toujours,
Partout, yvà; partout ou je cours,
.Votais* contrarie toujours ;
Partout, yes, partout où je cours,
J'étais contrarié toujours.
Toujours, toujours.

Ah ! bien sûr, je perdrai le tête ;


Et ça ne tardera pas, je crois :
1
Car pour mt: iair' devenir bote,
Les bôt's ils se fichaient de moi !
Parlé.—Tenez;, mossé, un jouor, le docteur
Orée» il avait ordonné à rooii, le potage de cor-
beau, pour le poâtrïnc; je cherchai un, et je
trouvai qui se promenait toute seule dans le cam-
pagne. Je fiche un coup de fiousil à lui ; je tou-
chai pas- Mon bête de corbeau tournait autour de
inoâ, en disant : croâ, croû, croâ. " Crois quoi ?
2
ne j'attraperai pas vos 't oh! j'attraperai, " et j e
aisais aussi. A u bout de troâ semaines, j e voyai
mon bête de corbeau qu'il était assis dans un pom-
mier • Je baissai moâ, j'approchai doucement. . .
doucement . . . j'ajousfai. • . pan ! Il bougeait
pas ; je pogne avec la main. V o l e z la méchan-
ceté de cet oâseau : mon politique de volaille,
il avait jiougé à propos de'faiser empailler lui
depuis plus de quinzejpuors .' {avec colère) pour
se ficher de moâ ! "Vous voïez b ien, mossé, que
Dans les pays que je parcours, & c .

Un chien, jaloux de l'Angleterre,


A qui j'avais rien fait jamais,
Probablement pour se distraire,
Faisait la guerre à mes mollets !
Parlé.—Il était toujours après les jambes de
moâ. (Faisant semblant de parler à un chien)
" "Vos voulez quelque chose i hein 1'" Comme
je disais ça, il pognè à moâ, avec les dents, un
morceau de pantalon et un morceau de viande aus-
si ; je ccurai tout de suite après, et je trouvai mon
chien assis avec le propriétaire de lui. " Je v o -
lais bien savoir de quel droit, mossé le chien, vous
vous permettez -de . . . vous . . . permettre de ve-
nir chercher le nourriture de vous dans les mollets
de moâ 'l L.e premier fois que vous le faisez, je
coupais lé cou à vos avec nn coup de fiousil. "
O h ! disait le propriétaire.-^Oh ! n ' y a pas dé oh !
je faisais—Vous faisez t — y e s , j e faisais--Eh
bien ! si vous faisez, vous p a y e r — P a y e r quoi ?
le chien de vous '(—Vous ê t e z une bête de stiou-
pide.—-El vous, vous êtes un cornichon..—Corni-
chon ! qu'est-ce que ça voulait dire, un cornichon t
e prenait le dictionnaire et je voïais que, C o r n i -
3

c h o n , c ' é t a i t une l é g u m e , q u ' i l é t a i t tout à fait


a g r é a b l e , q u a n d il é t a i t confit dans du v i n a i g r e ;
i l flattait m o â alors ; m a i s . . . j ' a v a i s oublié de d e -
m a n d e r à l u i , si j ' é t a i s u a c o r n i c h o n confit ; p a r -
ce que,
D a n s les p a y s q u e j e p a r c o u r s , S t c

L o i n du p a y s d e m o n p é t r i e ,
Aul'fois comme esclave emmené
D a n s les d é s e r t s d e b a r b a r i e ,
J ' a i manqué d'être exterminé.
Parlé.—J'étais p a r t i p o u r le M é d i t e r r a n é e d a n s
u n b ê t e a u , et j e t r o u v a i un a u t r e b ê t e a u e n c o r e
p l u s . . . plus . ; . b ê t e a u q u e m o n b ê t e a u . Il a t -
t r a p a i t nous pour t r a v a i l l e r d a n s l'esclavage d ' A -
f r i q u e — { G r o s s e voix) " V o u s allez t r a v a i l l e r . "
•—" N o , j e travaillais j a m a i s . " — " V o u l e z - v o u s
t r a v a i l l e r 1 " — " N o , n o . " — " N o 1 . . . " B i e n ! ou
fiche à m o â des coups de b â t o n b e a u c o u p . O h !
p a r e x e m p l e , a l o r s , j e travaillais tout de s u i t e .
{Grosse voix) " Vous allez couver des œufs d e
d i n d o n . " — " C o u v e r quoi ! des œufs d e dindon ! "
J a m a i s d e m a v i e , j e n ' a v a i s appris à c o u v e r , m o â .
O n m e t t a i t six dans le p o â t r i n e , avec, le r e c o m -
m e n d a t i o n de t e n i r les m a i n s dessus pour le c h a -
leur- L e p r e m i e r fois, dans le p r é c i p i t a t i o n , j e
faisais une o m e l e t t e dans m o n p o â t r i n e ! Encore
d e s c o u p s d e b â t o n ! e n c o r e des œufs ! A p r è s 21
j o u r s et 21 nuits aussi, j e s e n t a i s le p i c o t e m e n t , e t
le c h a t o u i l l e m e n t dans le p o â t r i n e ; j e tirai $e s u i -
t e a v e c l'es m a i n s , e t j e votais beaucoup d e p e t i t s
d i n d o n s , qui c o u r a i e n t a u t o u r de m o â c o m m e de»
p e t i t s deveh !
-Dans les p a y s q u e j e p a r c o u r s , Sic.
4

LA MÉTEMPSYCOSE,

Dialogue populaire entre BLVGEON, apprenti


menuisier, et G A B O I R , manœuvre-maçon.

G-ABOIil.
M o n p a u v ' B i u g r o n , i f a u t q u e j ' i e dise
U n e affair' qui m ' o c c u p ' t o u t plein :
J e n ' s a i s pas si c'est d ' i a b ê t i s e ;
J ' a i lu dans un 3;v' ce m a l i n ,
Q u ' a p r è s not' mort yavait qucuqtrchosc
Qui nous Psait a v e n i r autrement ;
C a s ' a p p c i P la rr.ùironipsycose :
Sais-tu q u ' ç a s ' r a i t ben a m u s a n t !
Parte-—Tiens, vois-tu, v ' i à l a c h o s e : on n e
r ' v i e n t p a s e n h u m a i n , pas d ' b c t i s e ! on a r r i v e eu
m a g n e r e d e plante ou d ' a n i m a l . P a r e x e m p l e , t e
5
v 3à, toi . . . bien ! tu descends la g a r d e . • • bon !
E h bien ! l ' I e m P :r.ain m a t i n , t ' e s toi«t é t o n n é de te
:
r ' t r o u v e r dessus ta i" nùtrc, dans un pot d e g i r o f l é e .
BLUGEON.
— A h ! g r a n d Dieu ! quel p l a i s i r d e m o u r i r ,
Q u a n d on sait d ' e n r e v e n i r !

BLUGEON.
C a tt*m'a pas P a i r t r è s - v c r i d i q n e ;
M a i s c ' q n i fait que j ' t e c r o i r a i b i e n ,
C'est que Psoir, quand j ' v i e n s d'ia boutique,
J ' s u i s toujours suivi par un c h i e n ;
J e l ' t a p p ' ; c'est tout d'infime, il s ' o s t i n e ,
E t , dans mon émagination,
Ca fait, vois-tu, mais, qu'çà m'taquine ;
Parc'que je m'dis un'réllexion :
Parlé.—Au fait, c'est p't-étre une connaissance
qui est revenue en caniche- Ois donc, Gaboir, si
ça alïait êtr' mon pauvre oncle Rémi ! . . . avec'
c'qu'il était frisé . . . Tonnerre ! ! ! j'm'en veux-
t-i, quandj'pcnse qucj'peiïx avoir donne des coups
d'pied à mon onc' ! . . . J'vas-t-i respecter les
chiens maintenant ! N ' y a pas d'danp;er que j ' i e s
maltraite : je croirais toujours voir mon onc' R é m i .
Ah ! grand Dieu ! quel plaisir de mourir,
Qaand on sait d'en revenir !

GATÏOffi.
V l à déjà que j ' c h e i c h ' dans ma tôte
C'quc j'veux-etre apvcs mon trépas.
Ca m'est égal de d.Vinnr bote ;
Mais j'veux des iuîî's ouc l'on n'mang' pas.
On pourrait v i v ' dans la rivière ;
Un poisson, c'est qtieuqn'fois très-beau j
Mais ça n'est pas là ma manière :
Tu saisqtrje n'pcux pas sentir Peau.
Parlé.—Quoiqu'ça, j'pensc que ça s'rait encore
un fameux moyen pour vivre longtemps, que d'se
mett' poisson. Tieus, écoute, voir, une superbe
ebance : nous v'îà ^on^cons tous les deux. Nous
uous en allons en nous promenant tout du long ;
en arrive un malin, qui jette son hameçon . . . Un
moment: nous aut's, qn-a peché dans le tcmps ?

nous n'donnons pas dans la couleur . . Demi-


tour à droite ! et . . - enfoncé Pmariu !
A h ! grand Dieu ! quel plaisir de mourir»
Quand on sait d'en revenir !
6

Moi, qu'ai la tournur'si bien faite,


Que l'on dit qu'il n'ya rien d'si beau,
Sai&-tu qu'ça s'rait joliment bdte,
Si j'allais r'venir en chameau !
Quand j'iinirai mon existence,
Si l'hasard veutm'faire animal,
J'voudrais qu'il euss' la complaisance
D's'arranger pour que j'fuss' cheval.
Parlé Par exemple, c'qrii m'facheraît dans
l'état de cheval, ça s'rait d'traîner les coucous
d'Saint Clond. On rencontre une connaissance;
pas moyen d'arrêter ; et puis, à supposer que
v'Jà un dimanche qu'i fait beau, n'y a pas à dire
que tu iras du eûte de la Villette ; pas du tout ; il
faut toujours aller s'braquer du côté d'Saint Cloud.
Tandis que si tu tombes dans l'état militairej il y
a bien plus d'agrément, et des fois- ça peut se
trouver, vu qu'à la guerre les ch'vaux sont tou-
jours dans la cavalerie-
Ab ! grand Dieu ! quel plaisir de mourir,
Quand on sait d'en revenir !
GABOÏR.
V'ià qu'est très-bon ; mais, je suppose :
Quand nous nous métamorphoserons,
Il s'agirait d'savoir une chose ;
Comment c'que nous nous reconnaîtrons ?
P n ' a i pas du tout ni p è r ' ni mère,
5
J'ai perdu mon pauvre onc Rémi ;
J e n'veux pas r'venir sur la terre,
Si j ' n ' y rencontr' pas un ami.
Parlé—Dis donc, mon pauvr' Blugeon, nous
sommes deux ainis, pas vrai ? Il faut inventer un
7
ïïKiyen J'nous reconnaître» T i e n s , v ' i à la c h o s e :
nous sommes deux animaux et nous nous rencon-
t r o n s , j'^uppose- E n bien ] j e nMis rien ; j ' m e t s
s e u l e m e u t ma patte dans la tienne, et on se r ' c o n -
naît tout de suite . . . M a i s non, ça n'fera pas du
t o u t , cela :parc'que tu peux avoir un inconvénient.
A supposer <jue j V r a i un E l é p h a n t , et toi u n '
F o u r m i , si j'te mettais m a patte dans la t i e n n e ,
j'pourrais t'incommoder - . . T'auras qu'à d'mon-
t e r sus mon dos ; tu m'piqueras o ù tu voudras :
j e saurai que c'est t o i , et en avant la reconnais-
sance !
A h ! grand D i e u ! quel plaisir de mourir,
Quand on sait d'en r e v e n i r !

LE PETIT VOLONTAIRE.

H a n , plan, plan, plan, plan, plan!


l i a n , plan, plan, p l a n , plan, plan !
J e suis soldat, tambour et c o m m a n d a n t ;
A moi tout seul j e fais mon régiment-
J'ordonne, c o m m e g é n é r a l ; „
Soldat, il faut que j ' o b é i s s e .
V o y e z de quel ton martial
Je me commande l ' e x e r c i c e .
Parlé—Portez armes ! Armes à volonté ! P a r
file à gauche ! en avant, marche !
R a n , plan, plan, p l a n , plan, plan !
H u n , p i a n , plan, p l a n , plan, p l a n !
J e suis soldat, tambour et commandant ;
A moi tout seul, j e fais mon r é g i m e n t .
8

Admirez mon équipement ;


Contemplez ma grande tenue ;
Mais pour moi le plus beau moment,
C'est quand je me passe en revue.
Parlé-—Halte ! front ! alignement !
Ran, plan, plan, &c.
Pour moi je n'ai point de faveur
Lorsque j'ai mal t'ait mon service,
Et je m'impose avec rigueur
Huit jours de salle de police.
Parlé.—Vous résistez ! Ah ! vous manquez à
votre supérieur 1 Vite, au conseil de guerre ! . .
C'est encore moi cjui suis le conseil de guerre.
Ran, pian, plan, &c.
H . DEMOLIEKE.

L A M I N E D'OR,
ov
L E D E P A R T POUR LA C A L I F O R N I E .
Refrain.
C'est délirant,
Ebouriflant, (
J'en suis vraiment
Dans l'raviss'ment.
Jour de Dieu, quel divin trésor
Que ce pays tout cousu d'or !
Tout l'univers, je le parie,
Va filer en Californie.
Sans plus tarder,
J'vcux m'embarquer,
9

Pont" m'en aller coloniser ;


Sans plus tarder,
P v e u x m'en aller
Pour me coloniser.
Hier soir ma voisine Lapierre,
Causant chez l'papa Bourguignon*
M ' a dit que, dedans cette terre,
L ' o r y vieut comme un champignon.
J'preu&is'tnut ç a pour d'ia bêtise ;
Mais l'mairchand d'tabac d'à eôté,
A qui je prends souvent eun' prise,
M ' a dit q u V e t a ï t la vérité,
L a v é r i t é , la vérité.
Dire que dans la . . . la . . . (ah ! mon Dieu !
j ' v i e n s d e l'dire tout à l'heure ... la Caîibor^ne? ..
l ' Â î k a l i ? • . • c'est trop fort ! . . . ah !,je l'tiens, la
Californie), dir? que, dans cette partie du globe*
l«s habitants ont des mines ! des mines d'or, quoi !
et que les rues sont pavées avec ce précieux m é -
tal, que ceussc qu'en a pas ont la petitesse d'appe-
ler une chimère ! Mais, c'est-à-dire que le fantas-
tique pays de Cocagne, n'est plus qu'un misérable
paltoquet, auprès de c e l u i - l à . A h ! . . -
C'est délirant, Sec-
Usant de c'quc l'hasard nous livre.
Chacun peut être matador :
A bas et l'argent et le cuivre !
On va tout faire avec de l'or.
A mes cass'troles j'dis bernique ;
Je ne m'en servirai jamais ;
Pour n'plus attraper la colique.
1
Dans l or j ' m ' y jott'rai mes p'tits mets.
M e s petits mets, mes bons p'tits mets-
y*
Pus «mirent que j'm'exposcraî encore à m'a-
sphyxier avec du vert-de-gris ; j'vas sangermea
batterie?, comme dit c'fauire. D'après c'qu'ou
a découvert, tout l'monde en aura . • . des cou-
verts / C'est l'estinctioo, la désolation et l'aboli-
tion . . • des usuriers et des réturheurs de fourchet-
tes ! enfonces le melchior et le vermeil ! . . . et
c'pauv' monsieur Ruolz, qui dore depuis si long-
temps en compagnie, que réveil pour lui ! • . . •
arrière, les pièces de cinq francs, et les membres
de sa famille ! • • • c'est ça qui va décimer les
décimes ! . . . et les manacos, donc ! - . . j'vous
d'mande nn peu, qui'q'qui voudra s'abaisser au
point de se baisser pour en ramasser i Maïs quoi
donc qu'on va en faire ? - . . Ah ! mais j ' y pense ;
au Iieur lie faire faire des ch'mins dfer enfer,
je n'sais pas pourquoi on diffère de faire refaire
des cîi'mins àfer en cuivre i — Tiens ! AbondaTiee
de ch'mins n'nuit pas, comme dit {'proverbe;
ça n'empêcVrait pas qu'les oh'mins ùfer-uillent.
C'est délirant, &c.

Maî^ v'!à qu'un mélicu de majoîe


J'oubliais d'Jire, en vérité,
.1/billet qu'ici l'on me renvoie,
Et qui m'vient d'je n'sais d'quel côté.
Comme le dit le pèr' Lucimbre,
Des lettres, on en est encombré;
Depuis qn'nn a réduit le timbre,
J e crois que tout l'monde est timbré !
& monde est timbré ! il est timbré ï
E t on appellera eune économie ! D"pis qu'leg
letl' sont a quat' K O U S , j'en r'çois eune douzaine
par jour ; au point que j'passe le reste de ma jeu-
nesse à les lire. Mais, c'est exhorbitant, ça !... on
devrait mettre un impôt surceusse qu'abusent de
leur plume . . . V o y o n s d'où me vient cette let-
tre . . . Ciel! de la Californie / j ' v a s savoir an j u s -
te V qu'il en retourne. . • V o y o n s lu signature . . .
tiens ! . . . c'est du pore GRIBOIHM.OT ! . . , ( L i -
s a n t ) , Ma chère madame F R E M O U I L L A R D , depuis
six mois, j'habite la Californie oà tout le monde
nage dans Po . . . tiens ! c'tc bêtise ! dans quoi
d o n c qu'i croit quej'crois qu'i nage ? . . . où tout
le monde nage dans l'opulence • • . Ah ! j e m'a-
v a i s trompée - . . c'est qu'il écrit ! . . . des vraies
pattes de mouche, quoi ! et pis, pas d'osthogra-
j m e ! . . . tous les chemins sont remplis de pier-
res . . . eh bien, c'est avantageux ! mais c e p a y s
est un véritable ca$se-con ! . . . ah ! remplis de
pierres fines ; ceusse qui ne possèdent que 20
millions, sont enfermés dans un des pots , , .
C o m m e n t ! i vous enferment dans des pots ! soat-i
c r u c h e s 1 . . . ah ! dans un dépôt de mendicité*
Les vivres sont d'un prix un peu salé f ici s ce
qui altère beaucoup - • . j'crois bien . . . ce qui
altère beaucoup la bourse. Un artichaud à la
poivrade coûte six cents francs, et ta viande
de boucherie, revient à 3 0 mille francs le kilo È

quand elle paraît sur table ! . • • A h ! bonté du


v
du c i e l !si cher que ça,quand elle e s t euite ! • , .
M a i s ça n V r a jamais cru ! Heureusemint quH-
ci la mine d'or duçe toujours, et que f^râce à
elle on peut mettre un pot au feu de cent
s mille
livres, sans être exposé à boire un bouillon*
( A v e c enthousiasme) C ' e s t un bonheur consommé/
J ' e n veux pas lire d'avantage ; v'ià qui m'déter-
m i n e ; j'quitte Paris, q u e j ' a b o m i n e , et j e m ' a c h e -
m i n e au p a y s des m i n e s , me métbamorpHoser e n
colonne Californme.

C'est délirant, fcc.


12

MA T A N T E OPPORTUNE3
OU

L E M E N A G E D'UNE VIEILLE FILLE.

Ma tante Opportune, fille majeure, ayant une


passion désordonnée pour les chats et les petits
oiseaux- *
Grisgris, matou sexagénaire, établi à poste
iixe sur l'épaule de sa maîtresse.
Petit-fils,
serins, 12 ans seulement, mais
Petit-mignon, \
leur existence est assurée par une rente viagère
de 200f, inscrite au grand livre.
Moi, seul et unique parent, demeurant sur le
même carré, respectant les chats, les chiens et
généralement tous les animaux orduriers.

M a vieille tante Opportune


A i m a i t tant les animaux,
?
Q u e l P me laissa sans fortune,
A la mort de ses oiseaux.
N ' a y a n t qu'un chat pour famille,
D e u x vieux serins, outre moi,
A h ! disait la vieille fille,
Nous r'gardant avec émoi :
13

" M o i , j ' a i m e les bêtes ;


" E s t - c ' comm' ça qu'vous êtes î . . .
" C ' a fait tant de mal,
" D'voir souffrirun animal !
" C a fait tant de mal !
c i
U n pauvre animai ! "

U n jour son chat rendait l'âme


Je tâchais de m'attendrir.
L a vieille tombe et se pâme :
c
* Mon chat ! mon chat va mourir ! "
M o i , je l'prcnds, mais l'matou c r è v e .
Dans l'égar'ment d'sa douleur,
M a tant', qu'un tel eoup a c h è v e ,
M ' c h a s s ' comm' un empoisonneur . . .
Parlé*—Mais c ' t ' é g a l , pauv' femme, faut pas
lui en vouloir.
Elle aimait les b ê t e s , & c .

Oubliant, dans sa colère,


D e rentrer ses canaris,
Pendant qu'ell' se désespère,
Ils meur' de froid, pauv's chéris !
Seule alors, la vieille fille,
M ' é c r i v i t : Reviens chez moi.
A u mond' n'ayant plus d'famille,
Je m'suis souvenu de toi :
C a r j ' a i m e les b ê t e s , & c .

" Je n'comprends pas la morale.


> " — V o u s n'avez pas d'sentiment.
"—Je ne vois qu'un chat qui r â l e .
" — M o i , je vois un fait touchant :
" Qu'une fille se marie
* Ou garde le célibat,
" Il faut aimer dans la vie
" Ou son époux, ou son chat. "
Parlé'—Mais faites mieux.
N'aimez pas les bêtes;
Restez comm' vous êtes :
Ca fait trop mal,
Qand on est sentimental !
O a fait trop de mal
D ' c t ' sentimental.'

JL'ASTRONOMANIE.

Refrain^
Collez votre œil à mon optique,
Kt, grâce à c'ionrnon sans pareil,
Vous découvrirez, jé m'en pique,
.La lune mieux qu'en plein soleil.

Tons les jours, (Jé l'astronomie


J'élargis l'cerclc, et, si j'suis pas-
Membre dé cette académie,
C'est qu'l'envie est dé tous états :
J'fis tant d'jaloux par mon savoir,
Qu'jamais on n'voulut m'y r'cévoir.
Du resté jé m'en bats les flancs, et ça né m'em-
pêché pas dé voler dans les régions les plus recu-
lées dé notr é pôle. J é respecté mes rivaux dé
l'Observatoire ; mais jé crains pas dé dire, que
ce grand eorps dont j'eusse fait l'ornement, doit t é
15

aaordré lés doigts jusqu'à la troisième capucine, et


.être comme im crin dé m'avnir donné du balai.
Messieurs, il y a une foulé dé gens bons, pour né
pas dire plus, qui croient que la lune est un ré-
verbère., allumé par l'Etemel pour faire concur-
rence au gaz. C'est une énorme bêtise : car moi,
j é prouvé sans répliqué, que c'est lé plus grand
dés astres. Cé •monde, habité comme ici-bas par
dés gens dé loi, dés rnacaires, et antres indus-
triels, est inconnu dé ceux qui n'a jamais plongé
dans cé verre d'autant plus étonnant, qu'il rend les
A
.objets quinze cents fois plus gros que nature, au
point qu'une froumi a la conférence d'nn po. . .
potame et qu'un tambour major çstdé taille sans
s'aviser sur ses pieds, à cé que sa canne aille
au faite du Louquisor, lé quel fut jadis érigé par
cé grand Séjocrisse (Sésoxtris), et de nosjours ?

dressé en haut par lé bas.


Collez votre ce il, &e.

Au moyen de cette lunette,


i l n'est plus rien, rien do caché.
D'un procédé neuf, elle est faite
Pour bien voir à très-bon marché !
Avec dix centimes, deux sous,
J é vous mets au-dessus dé vous.
Approchez ; c'est lé moment lé plus favorable :
«ar c'est justement à l'heure où vous allez vous
jeter dans les bras d'Orphée, lé dieu du sommeil,
que, dans cé climat élévé tout lé monde est levé.
}

Chacun vaque à ses affaires. Les négociants dé


chimiques allemandes font feû et Jîammes pour
16

allumer la pratiqué ; mais ça né -prend pas tou-


jours. Enfin, les arracheurs dé dents sont de-
hors, courant après leurs mâchoires. En g é n é -
ral, les lunatiques né sont pas manchots, et lé
docteur 'franchamord fait savoir au public, qu'il
vient dé trouver une découverte chicoquancar-
dinosupériorimirobolantifique ; cette opération,
qu'il appelle lé trapisme {strabisme'), a pour effet
dé rendre la vue aux sourds, et l'ouie aux aveu-
gles. C é patricien né manqué jamais son coup ;
il sé lé couperait plutôt.
Collez votre œil, &c.

Avec moi vous pouvez connaître,


Sans faire un pouce dé chemin,
C'dont vous n'vous doutez pas pét-être :
Mon verre approch' tout sous ïa main.
Curieux ! rien n'est amusant
Coinna' dé lir' dans lé firmament.
C'est-à-dire qu'en moins de rien je vous roue à
connaître les deux, ainsi que les travaux des
lunetiers. Cé peuple a la bossé de l'invention, en
voici une preuve : un mécanicien, nommé César \
et rénommé comme la galette du Gymnase, vou-
lant procurer à ses concitoyens un certain liquide
fort goûté par lé borbillon, s'ingéra dé foirer un
puits athénien, dont que j ' e n fais voir les Vertiges*
Après avoir sondé cette terre ingrate,sans en rien
extraire que des fonds dé bouteilles, des semelles
dé savates et dés moules dé boutons, cet ingé-
nieur habile finit par s'en faire e t . . . il allait
17

envoyer tout lé bataclan chez Platon, le roi diablû*


tin, né sé voyant pas d'eau à boire ; quand tout-à -
coup une trombe d'elle fend la terre et lui crache
sans façon au visage. A cé coup de pompé, César
en eut plein lé dos, et il n'y vit d'abord que. du
feu ; mais à la moiteur de ses eifets, il reconnut
son erreur, et il put voir clairement que sa mar-
chandise était trouble. Du reste il s'en fichait
comme dé Colin Tampon : lé résultai tant ui-
tendu-t-était atteint, et la disette est impossible :
car ils ont de Peau de puits.
Collez votre œil, &c.

Chacun votre tour ; prenez garde


Dé mé déranger mon objet.
Q,né celui qui payé, regarde
Jusqu'à cé qu'il soit fratisiait-
!Ne soyez pas 1OIIÎ;S cependant :
Deux sous n'iunt pas des monts d'argent-
Faisant approcher un Anglais.
Avancez, noble insulaire, et lancez vos re-
?
gards dans une esphère où c que vous n'avez
point été* Ce qui vous éblouit pour lé quait-
d'heure est lé spectaqué d'une fête donnée p;:r îa
confrérie dés bouchers, en réjouissance de la iîn
tragique du bœuf gras dont ils ont coupé le j'U
et.. • débité les morceaux dé sa culotte.—Jé entre-
voïais qu'un fond noir,—C'est fauté d'habitude.
F i x e z toujours et vous entendrez lé bruit d'au feu.
ruggiericoarUjiciel—Jé entends que votre bec—•
C é coup d'œil mérité votre admiration.—Jé aper-
cerais toujours rien.—Alors, britannique, von*
IS

êtes louche-—,God-dem ! vous d i s e z que j e m é


mouche ; j é allais boxer v o u s . — V o y o n s , v o y o n s ,
milord, n é rageons pas et examinons si c'est que
m a m a c h i n é est indisposée • • • Juste ! régardez,
mon ambassadeur . . A-l-on vu un galopin pareil ?
K é v i e n s - y . n i é ficher u n e calotte sur mon téle-
scope ; je to soignerai, va, moutard ! —Laissez-
m o â , vos et votre moutarde, vous me montez nu
nez, et j e avais envie aussi de calotter votre fi-
guioure à vous qui a volé m o â — V o l é 1 merci ! j e
n'ai rien r e ç u — G a r d e z toute, mais vous m ' y r e -
pendrez pious.—Tant mieux pour t o i , m é c h a n t
mangeur d é pluinpuding : car si j é t ' y r é p i n c e ,
j é té frotterai si bien les reins q u e tu t'en ressen-
tiras en louchant tes côtes . . . À qui l'tour, l à ,
messieurs 1

C o l l e z votre œ i l , & c

PETIT-JEAN T E T E DURE.

O ù c'qu'est l'bon temps qu'jétions chenx n o u s ,


An lieu d ' ê t ' militaire 1
Q u e j'plantions, qu'j'arrosions nos c h o u x ,
E t que ma tendre m è r e
M e r'passait d'si bons coups 1
P o u r faire l ' e x e r c i c e ,
i m ' t i e n n ' deux heures sans broncher !
I m'en pousse u n ' j a u n i s s e ;
J'peux pas m ê m e apprendre à marcher.
19

Parlé à la manière des troupiers, et en faisant


bien ronfler les r.
Ca n'a l'air de rien d'marchcv ; mais quand
vous voulez suivre les vrais documents, c'est bien,
complique, allez ! pac'que d'abord, le gouverne-
ment veut absolument que le soldat carcule soi-
xante-cinq centimètres d'un talon à l'autre, et
d'une ! et puis, nous avons la gauche et la droite,
où c'que j'm'embrouille toujours invinciblement.
L'caporal instructeur, Simon Toupet, m'a pour-
tant conféré un moilien de m'y reconnaître ; il a
même évu l'obligeance de l'attacher lui-même ;
mon Dieu, oui, du foin pour ma gauche et de la
paille pour ma droite ! J'sais ben qu'ça leur-z-y
fait un signalement ; eh ben, vous m'eroirez si
vous voulez, ça m'ahurit encore plus, quand i
m'eric :
Petit-Jean contrefait la grosse voix de son ca-
poral) et marche tout à contretemps.
Foin, paill', foin, paill' . . .
Allons, Petit-Jean,
Sois donc intelligent :
Petit-Jean ayant peur du caporal.
Foin, pailï', paill', foin . . •
Caporal, c'a va plus mal.
C'est-i foin 1 c'est-i paill' ?
Q,ueu cass' tête infernal !
Caporal ! caporal !
Ca va-t-encor plus mal.

J e suis loin de critiquer vraiment


, L'ptus bel état du monde ;
20

Pourtant j'avoûrai franchement


Qu'ina profession abonde
E n tout' sort' d'embêt'raent ;
E t quand j e récapitule
- M e s nombreux v è x e m e n t s divers,
A bon droit j ' m ' i n t é t u l e
L e souff'douleur de l'univers.
D'abord, c'est moi qui fais la soupe aux c a m a -
rades ; m a i s c'est très-peu m o i qui la m a n g e , la
soitpe ; vu qu'étant distrait, j e manque toujours
mon tour à la gamelle, et, quand j'm'avance, j e
n'attrape que des coups de cuillers sur mes doigts
ir.ifortiinés et retardataires. E n s u i t e , le caporal
instructeur se plaint perpétuellement, que mes
tat'.m* ne se touchent pas. '* A h ! sapristi ! qui
«Ht, j e ta p r o c l a m e de la grande famille des c a -
g^eux, m o n v i e u x , a r c h i - c a g n e u x : pour que tes
tuions j o i g n a s s e n t , il faudrait qu'on te rognasse
trois nonces d'osses e n dedans de chaque genou ;
e t c o m m e ç a pourrait être douloureux, j e pour-
?

v u s les documents.
F o i n , p a i l l ' , foin, p a i l l ' . . .
A l i o n s , l'etit-Jeau,
S o i s donc intelligent :
FoiD, paill', paill', ibin . . .
Caporal, c'a va plus mal.
C'cst-i foin 1 c'est-i paill' ï
Q.ueu c a s s ' t ê t e infernal !
Caporal ! caporal !
Ca va-t-encor plus m a l .

M a i s v'ià-t-i pas qu'i dit c o m m ' ça


U n e j'ai Ja têt' trop dure :
21

Qu'étant cagneux, et estera,


Ce soir, la chose est sûre,
Cheux D O U S on m'renverra :
Ma foi, v i v ' les ganaches
E t les g'noux cagneux dans les rangs !
J'vas r'voir mon an', mes vaches,
Mes chers dindons, mes chers parents !
Très-joyeusement.
Eh ! vite, eh ! vite, ma blouse, mes sabots, mon
casque à mèche (tricotant ' vivement des jam-
bes ) ; j'peux être cheux nous su' l'eoup d'six heu-
res ; c'est l'heure où c'qu'on trait la rouge. G'te
pauvre rouge I c'est moi que j ' i a trayais ; j'avais
toute sa confiance ; j'sus sûr qu'a va me r'connaî-
tre et m'donner queque bon coup d'eorne, eu me
r'gardant avec ses grands yeux bleus ( i l rit bête-
ment). E t nos canards donc, ces pauv' barbo-
tettX ! i n's'ront pas encore couchés . . . v'ià dés
êtres qui m'étaient attachés ! me f'saient-ils bon
accueil, quand j'ieur-z-apportais à manger ! A h !
ça va-t-être une vraie fête de famille, surtout si
mon père et ma mère en sont ! En avant, marche !
Foin, paill', foin, paill' . . .
Allons, Petit-Jean,
Sois donc intelligent-
Foin, paill', paill', foin - - .
N'ayant plus l'caporal,
Qui m'app'lait animal,
Je crois qu'ea va moins mal ;
N'ayant plus l'caporal,
C a v a pourtant moins mai-
22

Q u e u bonheur ! j ' v i c n s d ' a p e r c e v o i r


L e c l o c h e r d'mon village !
M e s che.rs p a r e n t s , j ' v a u d o n c vous r ' v o i r ,
Sous n o s grands saules, j ' g a g e ,
Q u i font l e r ' p a s du s o i r . . .
D ' i a soupe a u x c h o u x qui fume !
M o n nez se r é g a l e d é j à ,
O u i , j ' i a sens, o u i , j e l ' h u m e . . .

Parlé.—Oh l l c s v ' l à ! les v ' i à ! I l s sont assis ; ils


bouffent j o l i m e n t !

B o n j o u r , m a m a n ! b o n j o u r , papa !

Riant bêlement et avec beaucoup de gaieté.


C ' e s t m o i ! m e v ' i à ! P e t i t - J e a n ! j ' a i pas é t é
l o n g t e m p s , hein 1. • • i n ' v e u l e n t pas d ' m o i ; i
m ' o n t m i s au r ' b u t , j ' a i la t ê t e t r o p dure . . . Y a -
t - i e n c o r d ' i a soupe ? tiens ! v ' i à m a c o u s i n e !
b o n j o u r M a r g o t o n . T u n'sais p a s , j ' t ' a p p r e n d r a i
demain à marcher militairement . . . doune-moi
d ' i a soupe . . • a v e c du foin et d ' i a p a i l l e . . . d o n -
n e - m o i - z - e n e n c o r e * • . V ' I à c o m m e on d i t :

F o i n , paill', foin, p a i l l ' , . ,


Allons, Petit-Jeat^
Sois donc intelligent.
F o i n , p a i l l ' , p a i l l ' , foin . . .
M ' d i s a i t mon caporal,
TCn m ' a p p ' l a n t a n i m a l .
C a m a r c h a i t toujours m a l ;
C'allait mal ! c'allait mal !
C ' a l l a i t d'plus en plus mal!
AMEDEE DE BEAUFLAK-
LA VAPEUR,

P E T I T I O N DU P E R E TRAFALGAR,

COCHEE D E COUCOU.

T o u t m e u r t dans P s i è c l ' de la l u m i è r e î
L ' c o n c o u , v a i n c u p:iv la v a p e u r ,
A cessé d T o u r n i r sa c a r r i è r e :
?
C a r P e a u , le fou c a u s m o n m a l h e u r -
D e St- G e r m a i n j'Taisais P s e r v i c e ,
J ' m e l t a i s quatr* h e u r ' s o r d i n a i r e m e n t ;
C h e v a u x , lapins, soldats, nourrice.
O u i ! tout le m o n d e é t a i t c o n t e n t .
Varié-—Qu'est-ce qui ^ c o n n a i s s a i t p a s , de P a -
r i s à S t . G e r m a i n , le vieux Truf'algar, le p è r e d u
lapitij la p r o v i d e n c e du T o u r l o u r o u 1 . . . à q u i n -
z e sous ses p l a c e s ! et m o i t i é prix p o u r m e s s i e u r s
les m i l - î - M i t a i r e s ! • • • ç a m a r c h a i t , dans c e
t e m p s la ! - . . pas t r o p v i t e , niais enfin . . . Q u a n d
t o u t d ' u n c o u p ; ie diable s*en mole : on pose d e s
t r i n g l e s en fer à, t r a v e r s les c h a m p s ; on chauffe
u n e b o u i l l o t t e , et j-'vois une t r e n t a i n e iîe c h a r - à -
b a n c s q u i c o u r a i e n t à la q u e u e pour nous la fai-
r e . . . C ' e s t c o m m e ç a que ça se j o u e , que j ' d i a t
U n e m i n u t e ; j e n e suis pas le plus fort : aussi
Au gouvernement,
Moi, directement,
C r a i n t ' d e fin t r a g i q u e ,
J ' a d r e s s e utP supplique-
24
Le tuyau fumeur
Fera mon malheur :
Aussi j'en ai peur,
K t j'fuis la vapeur.

Puis sur St. Cloud j'mets m a voiture,


Mon édredon numéroté.
lîieutôt l'wagon roule et murmure . . .
Faut s'établir d'un aut' c ô t é .
P a r des chemins tous en ferrailles,
M é c h a n t destin, tu me poursuis !
C a r on eu fait deux pour Versailles,
Un pour Corbcil, un pour S t . D ' n i s .
Parlé—C'ost tout ç a qui m'en a fait éprouver
une (comme i disent) de locomotion ! C'est vrai !
chassé de S t . Germain, je file sur St. Cloud
( c r i a n t ) : " S t . Cloud ! S t . Cloud ! » A h ! bçn,
oui ! la route en fer me rejoint et me poursuit !
Je cours sur Versailles : m ê m e jeu ; plus qu'ça
d'vapeur, excusez • • • E n v ' i à une puissance qui
va dévorer tout, à commencer par les lapins !
Oui, mais pour mettre ordre à ç a ,
A u gouvernement, & c .

M o n vieux Cosak, ma vieill' Cocotte,


Voyons, qu'est-c'quej'vasfair'devous ?
J'suis ratissé comme un' carotte ;
E n f o n c é , l'patmn des coucous !
A d i e u , l'avoin', adieu, l'fromage ;
P l e u r e z , plus rien dans mes goussets.
Çosak, va chez l'marchand d'eirage,
E t C o c o t t ' , chez l'marchand d'briquets.
Parlé.—En v ' î à un sort p é n i b l e p o u r c e s p n u r ' s
b ê t e s ! e t quand v i e n d r a t o u t - à - f a i t le r è g n e d e ta
v a p e u r , q u ' e s t c e q u ' o n en P n i de c e s p a u v ' s c h e -
v a u x i . . . des b o e f l e c k s p o u r les r e s t a u r a n t s , à
v i n g t d e u x sous 1 • • . plus d<> c h e v a u x , plus de c o -
c h e r s ; on aura des w a g o n s a n g l a i s , des courses
e n w a g o n s , « t la c a v a l e r i e ne sera plus q u e l a
w a g o n n e r i e . . . et, c o m m e i l vaut m i e u x s'adresser
au bon D i e u q V à ses saints, j ' é c r i s au g o u v e r n e -
ment, f l c o m p r e n d r a ma p o s i t i o n , l u i , l e c h a r
de l'état- C o m m e i n d e m n i t é , je demande m o n
p a s s a g e g r a t u i t en A f r i q u e p o u r m o i et m e s b ê t e s . . .
A u g o u v e r n e m e n t , Sec.

T o u t m o n e s p o i r est e n A f r i q u e :
C ' e s t un p a y s d é p o u i l l é d'eau ;
P a s d ' e h a r b e n d ' i e r r ' , pas d ' m é c a n i q u e ;
M o n seul r i v a l sera i> c h a m e a u .
M a i s j e ti'craîns pas e ' t e c o n c u r r e n c e .
P o u r m é n a g e r leurs e s c a r p i n s ,
i L e s b é d o u i n s v i e n d r o n t , c o m m e en F r a n c e ,
S ' m e t t ' sur la b a n q u e t t e aux lapins.
Parlé.—Oui, c'est ç a ; j e d é b a r q u e a v e c m e s
b ê t e s e n A l g c r e , e t , c o m m e il n ' y c r o î t aucun
c h a r b o n , en d é p i t d e la v a p e t i r , j ' é t a b l i s une l i -
g n e d ' O r a n à M a s c a r a (criant) : " Mascara !
M a s c a r a ! Oran ! Oran ! M a s c a r a ! " • • • Je d i -
m i n u e m e s p r i x , et j e fais Je bonheur des n o u r r i c e s
i :
e t du l a p i n b é d o u i n . . . IVÎaseara ! M a s c a r a !
? : ;
v o i l à not' bourgeois ! ' — M o n t e z , mon. roori-
c a u d ; à bas la v a p e u r ! e n f o n c é s , les c a r a v a n e s e t
l e s c h a m e a u x du d é s e r t !
A u gouvernement, &c.
E RM EST B O U B G & T .
D
26

L'ANGLAIS ÉCONOME.

Enfin j é avais vu le F r a n c e ,
S u r le bâtiment de vapeur.
O h '. le beau pays de bombance !
C'est un pays de bamboebeur.
L e s Français n'étaient pas avare ;
C h e z eux l'argent n'était pas rare.
Parlé.—Au lieu que dans cette s c é l é r a t e de
L o n d o n , il fallait guincter beaucoup pour divertir
soi ; il fallait de-; argents en foule, des monnaies
en multitude : c'était beaucoup fort yery d é s a -
gréable !
Oh ! c'était sans regrets
Que j e quittais
L e Angleterre :
Car pour tout* les anglais,
Oh ! que la patrie est c h è r e !

S u r le p a q u e b o f d e f u m é e ,
Je avais eu le tournoîment ;
J'ai joui de beaucoup de n a u s é e
E t bien d'autres d é s a g r é m e n t s .
L e mer m'avait fait tant malade,
Q u e j e souis venu tout • • • panade.
Parlé.—C'était encore cette gredin de p a y s qui
était cause ! S i je avais é t é naqui dans le F r a n c e ,
j e né avait pas besoin de traverser le mer pour y
être • . • voiture. Oh ! que le Angleterre m ' a -
vait c o û t é f
O h ! c'était sans regrets, &c.
27
Comme il fallait du numéraire,
Rien que pour le nouvrissement,
Kt le rosbiff aux pomm's de terre,
Il était grandement coûtant ;
Il fallait s'enivrer de bière,
Souvent de l'eau de le rivière.
Parlé*—Au lieu qu'à Paris, dans Richelieu
streetjje dînai fort bien pour dix neufe sous, et le
Chester fromage, il valait bien moins que dans son
pays natal.
Oh ! c'était sans regrets, &c-

Et dans cett' pays le police,


11 était fortement vexant ;
Les juges étaient des injoustice :
On n'avait pas pour son argent.
Je avais un fois, sur mon âme,
Cassé vingt guinées de vieill' femme,
E t le cabriolet de moi, qui avait jeté elle dans
le pavé l'avait presque guère tuée. Mais à Pa-
?

riSj je avais un fois écrasé un petite savoyard pour


45 sous ! tout entier! c'est que dans le France au
moins, il y avait toujours des circonstances ex-
ténouillantes, toujours ! toujours !
Oh! c'était sans regrots, & c
RDMOND EtXOVE.
28

J ' I R A I M'PLA INDRE A U ROI,

Pardon, excus', capitaine.


Mais dans mon corps j'existe pas :
C'est chaqu' jour que j'suis d'semaine,
J'pourrai jamais me mettre au pas.
Du soir au matin j'fais trop d'exercice :
Aussi je îi'fais qu'dcpcrir ;
Je sors de nies gonds, je quïtt' le service ;
Aussi je viens vous en prévenir-
Capitaine, comme il faut être civil dans Pmi-
litaire, et que les lois de la discipline c'est pas fait
pour les . . . enfin, n'importe, capitaine ; j'ai pas
voulu déserter sans vous en faire part, en foi de
quoi, je suis invulnérablement fixé . . .
Non, non, non, non, non ! p!u3 d'giberne !
Adieu, cantine ; adieu, caserne ;
Si vous m'jfardez malgré moi,
Ah ! j'vous Pcache pas, j'irai wi'phiind' au r o i .

L*aut' soir, j'vais à la maraude,


Poussé par notre caporal ;
.L'sergeiit major m'piuçe en fraude ?

E t c'est qu'il est un peu brutal !


C'est toujours partout moi qu'est la victime :
S'il tomb' qucqti' priai'', ça me r'vient;
Si d'hasard j'ai fait queqtie action subljme>
C'est jamais d'moi qu'on, se souvient.
29
C ' e s t - z - a c t u e l de point z - e n point, capitaine*
j ' a i p a s e n c o r e pu d é c r o c h e r une p a u v e p ' t i t ' p e r -
m i s s i o n d ' o n z e h e u r e s ; l ' m a j o r , i dit que c ' e s t p a s
dans m o n tempérament. Cependant, capitaine,
j e d ' v i e n s à rien, quoi ! je m ' c t e i n s c o m m e u n e
c h a n d e l l e d ' u n s o u ; j ' n ' t i s n s p l u s s u r m e s fils d e
f e r ; j e m ' e n v a s si é n o r m é m e n t , q u e m e s j a m b e s
s e t r a n s f o r m e n t e n flageolets : c ' e s t p o u r q u o i q u e
les a n c i e n s , i disent c o m m e ç a , que j e fais d e
l'harmonie de pantin, capitaine-

N o n , n o n , n o n , n o n , &c>

5
Q u a n d m ê m q u ' I ' o u v r a g e est p a s f a i t e ,
L e c a n i a r a d ' q u ' e s t pas m a n c h o t ,
D é e o u c h ' , s a n s t a m b o u r ni t r o m p e t t e ,
R e n t r ' p a r l a P n è t r e , e t ne d i t m o t .
P u i s on d i t q u ' c ' e s t m o i q u ' u n d é m o n t r a n s p o r t e ,
Q u ' e s t la c a u s ' d e t o u t c e b r u i t ;
C o m r a ' la v i v a n d i e r ' l'ant' semain' qu'est m o r t e ,
E t qui se r e l e v a i t l a nuit.

C a r e n f i n , c a p i t a i n e , si c ' é t a i t p a s m o i q u i f a i t
t o u t , e h b e u ! ç a serait fort m i e u x . F a u t v o u s
d i r e , c a p i t a i n e , q u e l e c a m a i v . d e de c h a m b r é e , i
d i t c o m m e ça., q u ' i s ' a m u s e à m o n o m b r e ; à l a
g a m e l l e , i pique deux coups pendant moi qu'un,
e t q u a n d q<ie m o n ' f o u r n i m e n t e s t b i e n r ' i u i s a n t e ,
il f a i t c e l u i d e se t r o m p e r , p i n c e l a m i e n n e , et à.
la p a r a d e , c'est moi qu'est p i n c é .

N o n , non, non, non, &c*


30

J'vcux plus faire la emsïne :


Car ça m'empêche l'appétit.
J ' a i m ' mieux la sali'de discipline,
Que d'Iaver l'endroit qu'on m'a dit.
C'est ben vrai, ma foi ! que c'est pas tout roses j
C'est dur, pour faire un guerrier !
5
J'm'ai pas engagé pour fair' tout ces choses ;
J'vcux me remetir' garçon meunier.
Indubitablement, capitaine, j ' m ' a i pas offert en
victime pour la patrie, pour faire le ménage et
autres ingrédients que je veux pas dire! On ne
m'fesait pas tant tourner au moulin. Ah dam ! il
faut qu'j'y retourne, ou je n'ine vois pas blanc :
d'ailleurs, capitaine, j'suïs monte comme un o-
gnon • • » Capitaine, n'ya qu'ça.
Non, non, non, non, &c.

L A M E R E JOCRISSE.

Voui ! contre nous tout l'mond' conspire ;


Oui, l'on en veut à not' bonheur ;
Voui ! l'on nous haït, on nous déchire ;
On ajuré d'fair' not' malheur !
Si vous dites : " C'est un Jocrisse ! "
Bien certain'menf, on répondra,
Q,ue l'on tira
Un grandissim' feu d'artifice
L e jour qu'est né ce gaillard-là.
Et c'est qu'il n'y a pas à dire, quand on dit
Jocrisse, on dirait qu'on a tout dit- Eh bien !
31

c ' e s t c e qui vous ( r o m p e , v o u s et tous c e u x qui n o u s


prennent pour point d'imve, et bien d'autres e n c o r e
d o n t j e ne v e u x p a s p a r l e r , et qui sont plus h é tes
que nous . . . à commencer par M a d a m e C h a r d o n -
n e r e t , q u i f a i t sa m a l i n e , et q u i s'est é v a n o u i e
h i e r m a t i n , p a r c e q u ' o n lui annonçait que son m a -
ri, M o n s i e u r Chardonneret, revenait des îles C a n a -
ries a v e c une tête de lion, des dents d ' é l é p h a n t e t
une trompe !

E s t - o n plus bet* que ç a ,


Oui-da ?
M a ï s la race h u m a i n e
E s t une «raine
D e niais !
E t la b r a n c h e des J o c r i s s e
E t des Lapalissc
N e s'éteindra j a m a i s !
Non> non, j a m a i s !
Non, non, non, n o n , jamais !
N o n , non, non, non, jamais !
Jamais, jamais, jamais, jamais !
Jamais i

V o u s , qui c r o y e z à l ' é c l a i r a g e ,
Q u i d o i t d é t r ô n e r le s o l e i l ;
V o u s qui c r o y e z tant au c i r a g e
Detachofugc et sans pareil ;
V o u s me p r o c u r e z bien des peines.
V o u s qui c r o y e z tous aux ballons ;
O u i , nous verrons
C e s f a m e u s ' flott' a é r i e n n e s
E n Pair nous m ' n e r à r e c u l o n s .
32
M a i s c ' e s t - à - d i r e q u ' i l en t o m b e , q u ' i l en p l e u t ,
q u ' i l en g r ê l e , des J o c r i s s e ! • • • L e s gens q u i
p r e n n e n t p o u r des beeflecks des vacWtecks : Jo-
crisse ! . . . L e s £e»s qui c r o i e n t au s e r p e n t de
m e r : Jocrisse ! a u x veaux à t r o i s t c t e s : Jocris-
se / , . . a u sel r e n v e r s é : Jocrisse .' Jocrisse f Jo-
crisse ! . • . E t d a n s les t e m p s , c ' é t a i t e n c o r e
b i e n p i s ! . • . M a i s , à J i r o f l a y , mou v i l l a g e , d ' o ù
j ' s u i s n é e n a t i v e , e.'-t-ce que le conseil m u n i c i p a l
n ' a v a i t p a s fait é c r i r e sur les p r o m e n a d e s : Bancs
pour s'asseoir, Pont pour passer Peau, {Nota)
Les personnes qui ne savent pas lire peuvent
prendre le bac? • . . Kl n o l ' v o i s i n , dans l ' m ê -
m e p a y s , en v ' i à un J o c r i s s e r e n f o r c é ! J e m e
s o u v i e n d r a i t o u t e nia vie du j o u r o ù il est v e n u ,
d ' u n air si t r i s t e , t r o u v e r mon p è r e p o u r lui d i r e
C i
(Jargon normand) : A h ! mon bounhoumme,
j ' a v i o n s p l a n t a i dans m o n j a r d i n des potimes d e
t e r r e . . . tu t ' n ' i m a g i n e r a i s j a m a i s c ' q u ' e s t venu ;
( a v e c c o l è r e ) L ' s a i s - t u , c ' q u ' e s t venu 1
" N o n " — - " Ë h l b ' e n , il est v'iiu une foule d e
jp'tits c o c h o n s qui les ont toutes m a n g e a i I " . , ,
E s t - o n plus b ê t e , Sec-

M o n s i e u r J o b l o t a p p r e n d la flûte
P o u r s ' a c c o m p a g n e r en c h a n t a n t ;
D a n s tous les c o i n s , on se d i s p u t e
D e s O r v i é t a n s de c h a r l a t a n .
J e vis h i e r , s ' m e t t r e en s e r v i c e ,
U n n è g r e qui c r o y a i t aussi
Q u ' e n f.sant a i n s i .
Il s ' r a i t c o m m ' les a u t ' gens d'I'office,
L o g é , n o u r r i , mais d ' p l u s b l a n c h i !
33

ï£t c e nouveau débarqué dans la maison, qtii


vient de Marseille tout e x p r è s pour faire faire son
portrait, et qui apporte son huile parce qu'on lui a
dit que les Parisiens faisaient tout au beurre .. .
E t Monsieur Pimparé ! qui fait son finaud, quand
il est en chasseur de la national- . . E t la grosse
bonne du second, qui fesaït tant de démarches pour
faire entrer son mari danà l'administration des
ponts échauffés . . •
Ést-on plus bête, & c
ESNKST BOUJIOET.

USS Q'JAT' SOUS DU P'TÏT NICOLLE.

Refrain-
Marner* m'a donné quat' sous,
Pour ra'amuser à ia foire.
C ' e s t pas pour manger, ni boire ;
C ' e s t pou m'régaler d'jonjous.
J'ai quat' sous ! j ' a i quat' sous!
H i e r , en r'venant de l ' é c o l e ,
C o m m e j'avais un bon billet,
i S
M a m è r ' m ' a d i t : Man N i c o l l e ,
s
" T i e n s , j ' t e donn 9e p'tit paquet. "
V-*là que j'prends, et pis v ' i à qu' j ' o u v r e
Un p'tit paquet d'papier blanc ;
E n Couvrant, qu'est'quej'découvre 1
C ' t e pauv' m è r ' ! c'était d'Pargent !
M a nier' m'a donné, &©.
E
34

Presque en face d'aot' barrière,


Juste quand j'sortais d'chez nous^
V ' i à qu' j'aperçois par derrière
L a sous-préfète et s'ncponx.
Tout en déf'sant ma casquette
D e derrière, j'pass' devant ;
P i s , j'ieur dis, d'un air content*
E n tapant sur ma pouqnette :
M a mer* m'a donne, &c.

J-'va» pas prend' par îe cfm'tiêre j


J'vas prend' par le p t i t ch'mîn creux-
J'veux pas rencontrer l'gros- Pierre :
I m'mèn'rait jouer au bouleux.
Quand j ' a i d'ï'argent, i m'earesse ;
I m'dit, comm* cha : " Qu* t'es genti ï
3 ?
A c theur que j'sais sa finesse,
J'sïs tout aussi malin qu'Ii*

Tarte-—Ya îroïs ans, Paimée où qu' la ïnojs«


?
son avait êié si bonne, ma mère m avait donné un
décime pour &a fête; si bien que . . . v'ià que je îe
rencontre^ et pis, que j ' a i la bêfise de H faire voir
nsan décime . . , " Veux-tu faire une partie debou-
chonne, ûian p'tît Nicolîe ? " qui ni V i t comme
cfta, areesa voix Ûutée.—" J'veux bien, que
j'Iidis . - - E n deux coups m^n affaire a été fai-
te . . . et pis, quand il a ea tout ramassé, i m'a
?
pris la main» et pis, i m'a dit comm clia : " Adieu,
marc bouunomme. " . . . Je le connais, c'est « a
malin . . -
T
M a mcr m*a donné, &c-
35

J ' a i aian cousin qui Vboiasonne ;


Comme on dit, c'est un vrai trou*
Il a l'nez qui H bourgeonue ;
Il est sec, comme IID centd-'clou.
Mes quat' sous fraient bien s'n affaire,
S'i pouvait m'ies attraper :
S'i coinpt' là-d'ssus pour pomper,
II a Ptemps d'hoir* de Peau claire.
Parlé—Yen a un que si je le rencontre à la foire,
qui n'a qu'à bien se teni. C'est ie petit d'Daiud'»
ville, le fiU du château, qui fait ses embarras avec
son chapeau blanc et pis ses souliers qui reluisent*
Si j'ai ie bounheur de me trouver avec li devant une
boutique, je m'en vas me mettre à marchander
de tout, et pis, si i s'avise encore de ricaner d'eoin
comme ifait toujou, vlan ! , • .j'H flanque un coup
d'eoude ; s'i n'est pas content, vlan ! - - - j'H flan-
que un coup d'poing ; s'i n'est pas encor content,
je l'empogne par son collet, j'H donne un croc en
jambe, et pis, une fois que je l'aurai mis d'ssous,
je l'enfourche comme un bouriquet, et pis, j'H cric
comme cha en plein, mais devant toute la foule . . •
M a m è r ' m'a donne, & c
FRÉDÉRIC BERAT.

L'ANGLAIS TOURISTE.

Haow! yes, qu'est-c'qui povait me* dire


Où il était le ciel de cett' pays
Pour lekiel mon kieur il gémit, U soupire
Et les jours et les nuits.
36

Parlé très-vite.—Haow ! celoui-là, jé loui di-


sais : -Bien obliged to yon.
De m'avoirfait connaîtr' cett* ciel,
Où hon hé tait pcrfectly very well.
Well!

Quand jé avais^uitté lé Angleterre,


C'était avec lé douleur dans lé kieur.
J'allais chercher su un plus bon terre
Où il était le gaîtc, le bonheur ;
Mais, dwcll ! après avoir cherché patout,
Jé avais trouvé rien di tout.
Figuiourez-vous que maon père, dans son nétal
pays, il se hennouyait bocop ; que lé mère, les
frères, les sceurll dans le Grand* Bretagne, il sé
hennouyait aussi bocop- Mais, moâ, qui ne
avait pas di tout lé même caractère, jé mé hen-
nouyais encore plou. Êlors, savez-vo» cé que j é
faisais l J é prenais lé valise dé moâ, le raac-
kîntoch, le carrick et le nvine de moâ, et je di-
sais : " Adieu, bonne jour, my Ovm ! benne soir,
potez-vous bien pafaitemenl : rnoâ, je vais cher-
y>
cher un pays plous hcautiful ! Eh bien, mos-
seu, je n'étais pas pioutét dedans lé dehors de
mon pétrie, qu'il n'était pas dé malheurs 'que j é
avais traversés dedans le béteau de lé vépeur.
Enfin je ne povais p»s monter un fois seulement sur
le en; pi . . . rial d'un diligence pioublique, sans que
je avais cassé lé • . - sans dessus du . . . sans de-
vant . . . dessous de pie . . . ed . . . de mon panta-
lonne!
IIuow ! yea, &c.
37
J é avais d é j à fait a u t o u r du g l è b e
P r e s q u e tout entier Je t o u r n o î m e n t .
M a i s , îe s t i o u p i d s o r t , il me d é r o b e
C e t t ' c h i m è r ' de p a y s vainement-
O h ! y e s , j é avais d a n s le T y r o l
J 7
C r u r e n c o n t r e r c e t t p e t i t soi.

H a o w ! y e s , d e d a n s le T y r o l . . . J e aimais a s -
sez f o r t t r è s - b e a t i c o p c e t t e p a y s pitt . . . p i t t . . .
p i t t • • - i o u r e s q u e ; mais l e m a l h e u r il volait q u e
l é h a b i t a n t s . . . its é t a i e n t tous p l a o n g é s d a n s un
miaulement miousical p e r p é t i o u e l : c'était bien
t r è s - d i s a g r é è b l e ; p a r c e q u e , tout ce q u e j e d e -
m a n d a i s p o u r le m i t n g e m c n t du n o u r r i t i o u r e , ou
p o u r a u t r e c h o s e , ils m é faisaient tojor : Ta* la-
la, la-la, la-la, ou-tous ! et tojor tou, tou, p a r -
t o u t la-la, p e r p è t i o u e l l e m e n t ou tou ! E h b i e n ,
m o s s e u , c e t t e b ê t e de. c h a o s e , il é t a i t p o u r m o i u n
é c l a i r c i s s e m e n t du ciel ; j é avais compris q u e l é
m i o u s u j u e , e U e p o v a i t ê t r e une langage iouniver—
selle ; et j e avais, p a r m o â , tout de «ouite, s i o u b i -
t e m e n t , lé preuve. U n j o r , j é q u i t t a i s l é p r i n c i p a u -
t é d e M o n a c o , et j e h é t a i s dans le d i l i g e n c e à
caoté d'iounc petite française. J e loui d i s • :
** H o w do y o u d o , m é d è n i e 'f . . . J e g a g e a i s , à
v o t r e tinurniourc f r a n ç a i s e , q u e vo é t i e z Té-lé-léy
lé-té;, te-lc-lé, lé-lé (sur F u i r En avant marchons').
( (
E l l e m e dit : P a r i s i e n n e ï oh ! no ; j é »ouis
Té lé lé lé lé lé lé lé le lé (sur Pair Allons y en-
fants de la patrie)* " — O h ! y e s , very w e l l , m a r -
seillaise ; très-bien ; et m o â , j e é t a i s Té lé lé lé
lé A n g l a i s ; j e venais d e Té lé lé Monaco*

H a o w ! y e s , &c>
38

Henfin raoâ j é entrais dans lé France,


Où élait le mouititioude d« gaîlé,
Et je Joui donne bien le préférence
Four le plaisir fouly volupeté ;
Oh ! yes, jé tiovais lé nec piou oultra
A Paris, au bal dé Opéra.
Parlé*—D'abord jé avais vu à la porte, sus le
jié/iche, que les dômes, ils n'étaient reçoues qu'en
DOMINO . . . J e cherchais dans mon petite Dic-
tionnaire-pocket, et je voyais : DOMINO, petite
jew en oa avec dés petites pointes noâres. J e en-
trai vite, pour voir cette petite j e u , et to de soui-
te, une petite masque iné dit : J e te eâouunais ! . . .
Moà. je né câounnoissais pas di tout . . . (avec
malice) mais je faisais celoui qui caonnaiseait.. .
oh lyes ! . . . L e lendemain, je allais voâr à son
hôtel, Breda strcet, Mylady, et c'est l à , dans son
petite salon, que je avais fait le premier parlement
de moâ, devant le pioublique partiqnioulier. J e
disais une petite chaose de raosseu Fontaine •• .
cette chaose c'était

LE CORBOO ET LE RENARD.
Fèble-
Mossenle Corboo, il était assis,
Dessus un arbre en l'air ;
Il tenait dans son baouche
Un morceau de fromage de Chester.
Monsieur le Renard, il voit le Corboo,
Et i dit au Corboo :
" How do you do ? . . . bonne jour !
Et comment vous portez-vous soi-même, cette
J e souis très-content de vous voar. " [soar t
Le Corboo ne dit rien di tout.
39
L e ïtenarJ, il dit au Corboo '•
** Oh ! mosseu îe Corboo, si vos chansons,
II était absolument le même que votre pantalon d*
pioumes,
Vo étiez le premier aubergiste de ces boas,
Je croa.
Le Corboo, i fut tout content ;
Il devint toute joyeuse, et pour montrer son chaet-
11 ouvrait son baouche»et le fromage, fson,
Il tombait par terre, dedans le herbage.
Le Renard y mangerait le fromage \
E t i dit au Corboo :
Oh ! mosseu le Corboo,
Apprenez que le flatteur, i mangerait tojor d u -
fromage ;
Le Corboo U fut en colère, et il devient rouge
comme un coq
E t iï jioura, sapristi ! . . . Godem! mille diables !
c'est tcrribllll' !
Que tojor il mangerait du fromage !
Mais, ii jioura cette chaose un peu pion trop tard !
La moralité, C'était qu'il fallait tojor manger
son fromage soâ-raême ! . . .

Haow ! ycs, maintenant je povay* dire,


Que je avais trouvé le Paradis,
Pour le kiel mon kieur il gémit, il soupire.
Depouis bien des nouitsr
Parlé.— Haow ! jé étais plongé dans le enchan-
tement et, jé poussais des petites m iougissem ents
de bonheur,
3
D'avoir enfin trouvé cett ciel
Où hon hétait nerfectly very well!
ERNE*T BOVBO»T.
40

LA TROMPETTE.

J ' s u i s t r o u p i e r dans la c a v a l ' r i e ;


5
M o r g u e n n ! m e v ' I à fier c o m m e un c o q .
C a m ' a rendu l ' â m e a g u e r r i e ;
J e n'suis pas plus s e n s i b ' qu'un r o c .
J ' n a i pu rien du tout dans la t ê t e ;
P i n s d ' s e n t i m e n t , r i e n qui m ' a r r ê t e .
J e méprise à présent l'amour ;
C ' e s t la g l o i r e qui p r e n d son t o u r .

N ' y a plus q u ' u n ' s e u l ' c h o s ' qui m ' i n q u i è t •»


C ' e s t q u ' s i t ô t q u y e n t e n d s la t r o m p e t t e .
V ' i à m a valeur, t i c , tac, t i c , t a c ,
Q u i m e r ' d e s c e n d dans l ' e s t o m a c .
{Fanfares de trompette?)
A h ! m o n D i e u ï qu'est q u ' c ' e s t q l i ' ç a ?
J' crois qu'la v ' ] à !
' A h ! ah ï ah !
(Fanfares de trompettes)
A h ! j ' s e n s m o n c œ u r qui s ' e n va-

N ' y a q u ' u n an q u e j ' s u i s au s e r v i c e ,


E t j ' a i d é j à - K - é v u le p r o f i t ,
Q,u'mon capitaine m e choisisse
P o u r lui n e t t o y e r son h a b i t .
L e s a u t r ' iî m ' a p p e l l e n t d o m e s t i q u e ;
M o i j ça m'est égal qu'on m'eritique.
J ' t n u c h e dans ma m a i n la c r o i x d ' h o n n e u r .
E t ça n ' p e u t que m ' d o n n e r du c œ u r .
N ' y a plus q u ' u n ' seul' c h o s ' , & c .
41
Yen a d'aucuns qui vous instruisent
A dépenser tout votre argent.
Des mauvais sujets, qui méprisent
L a discipline etl'règlement :
Moi, sitôt qu'mon ouvrage est faite,
-l'vas m'asseoir à côte d'ina bëtc ;
Avec un compagnon pareil,
J e n'erainspas les mauvais conseils.
Ya toujours un' clios', &e. . \

De tout ceux qui vont au manège,


J'entends dire à notre instructeur.
Que c'est moi qu'ai le privilège
De lui faire le plus d'honneur,
J'ieur dis pas, pour mieux fair' le crâne,
Q.u'c'cst l'habitud' d ' é t ' sur notre âne.
Qui fait que j'mont'ôt bieu à cn'vuî,
1-t qu'je m'tiens corA-.ne un général.
Ya cependant un' chos', &c.

3-i'brigadier dit qu'un militaire


Doit être brave par état :
Moi, j'm'amuse à. fair' la p'tit' guerre,
E n attendant qu'j'aille au combat,
Quand j'suis tout seul dans l'écurie,
J e m'mont' la têt' comme un' furie ;
J'prends ma fourche, et j'tapp' comme un
Sur les ch'vals qui sont à l'enlour- [.sourd
Ya c'pendant un' chos', & c

Mais, j'en conviens, au fond de l'âme


Kn l'entendant si je frémis,
C'est qu'il s'agit d'tirer la lame,
Quand on sonn' devant l'ennemi.
M a i s l's«rvie' m e donn'ra d'I'tisage ;
D a n s queuqu' tempsj'aurai du c o u r a g e ,
E t quand j's'rai près d'mon l i e u t e n a n t ,
A l a t e t e du r é g i m e n t ,
f
J d i r a i : n'ya plus rien qui m'inquiète ;
5 J
S i t ô t qu j entendrai l a trompette,
J e sentirai t i c , t a c , t i c , t a c ;
M a i s ce n V r a plus dans l'estomac.
G a r d e à vous, en avant, en avant, la v o i l à .
(Parlé) Marche !
E n avant, la voilà ; en avant, la v o i l à .
M E . JAIME.

L E GASÏIN D E PARIS.

L e g a m m de Paris est un b i p è d e revétn pour


l'ordinaire d'une blouse et d'un grec. On Je ren-
contre dans les carrefours, places p u b l i q u e s , et
m a r c h e s ; tantôt jouant à la toupie ou à la p i g o -
che ; tantôt trottant le nez en Pair et apostrophant
l'innocent tonrlourou ou ia v i e i l l e portière en leur
criant : " A h c'te baile ! " .11 est d'un naturel far-
c e u r , j o u e u r , hâbleur, railleur, goailleur, criailleur,
frappeur, lichardeur, mais par dessus tout flâneur j
du reste, mauvaise t ê t e et bon coaur.
Quand c'est lundi soir,
E t qu'j'ai queques sous, c'qu'est magnifî-
Voulez-vous savoir [que,
C o m m e n t j ' d é p e n s ' tout mon avoir ?
M o n premier devoir
43

E s t d'm'échapper de la boutique :
Car not' cher bourgeois
Ne m'iaiss* sortir qu'un' lois par oaoU.
Aussitôt parti,
J'coui's au L a z a r i , •
Ou chez la Saqui :
JLà, j\suis heureux, et dans l'entr'acte,
Comme i fait ben chaud,
On s'donn' du coco,
5
E t l'on r'raont bientôt
Croquant chaussons etherlingo.
M a i s j ' c r o i s qu'on pi-end ma place ;
J'bouscul' l'usurpateur,
Q u i m'uppliqu' sur la faco,
Comme on dit, no* couleur !
( i ;
Coquin î j V o î s miU chandelles !
f <
N'iuiport', q u c j M i s , sortons:
( i
Car des ir.jm'' pareilles
" N o s'îav' qu'à coups d'ehaussons.
ï r a de ri de ris,
V ' i à Pgamin d'Paris.
I vit sans soucis
£ t n'eonnaît point de dépendance ;
T r a de ri de ra,
E t de c'qu'on dira
I s'en moquera,
E t puis v o i l à ,
Dra!

Quand j ' v a i s en loupant


Du côté du palais d'justice,
J ai ben d'I'agrémcnt,
Surtout quand c'estjour de ôtu-can.
Si y a pa« d'jug'ment!
4 4

A la m o r g u e a u p l u s t ô t j ' r n e g l i s s e .
P s u i s q n ' ç a n e s t p a s bien :
M a i s c ' e s t la m o d e , a l o r s j ' y t i e n .
P e n d a n t les t r o i s j o u r s .
J ' e n a i fait d ' c e s t o u r s
Auîr v i e u x t r o u b a d o u r s ;
J ' a l l a i s v o l e r d a n s les g i b e r n e s ;
P u i s sur les c a n o n s ,
A r m é s de b â t o n s .
E n vain nous t o m b o n s ,
S i t ô t l'feu fait, n o u s y c o u r o n s .
3
M a i s j vois u n S u i s s qui Ûle ;
P e s furieux suiv* ses p a s .
X / s a u v c r c est d î l H c i l e -
N'import-*, j ' s a u t * d a n s ses b r a s .
Vainement i r e c u l e ,
5
TJJÏ' b a l ) me r a s ' l e f r o n t ;
C a m a fait u n ' v i r g u l e ,
3
M a i s j ' e r o i s q u y a p a s d. affront.
T r a de H de r i s , &c.

S e l o n la s a i s o n .
C h a q u e j e u vient à t o u r d e r ô l e :
T a n t ô t n o u s glissons ;
T a n t ô t à c l o c h ' pied n o u s s a u t o n s ;
P u i s nous n o u s p e i g n o n s ;
O n s ' p o c l i ' les y e u x , r i e n n ' e s t p l u s d r ô l e
O n s'mefc en l a m b e a u x ,
3
E t n o t ' bourgeois nous f r o t t les o s .
M a i s le s a m ' d i s o i r ,
A h ! d a m e , i faut v o i r ,
O o m m ' sur le c o m p t o i r
E n rang- d'o^-nons b r i l l e n t nos v e r r e s j
P u i s , c o m m e a u signal
45
Bientftt dans l'becal
S'insiuu' l'régal,
E t quand on yest, ça n'vas pas mal.
Puis à mes yeux tout s'brouille,
E t battant ehaqu' maison
Je tombe dans un' patrouille,
Qui me jette au violon . . .
, Mais j'erois qu'à rrion oreille
On parle de voleur ! . . .
Voleur ! c'mot-là, m'réveille :
Quoiqu' gamin, j'ons d'I'honneur.
T r a de ri de ris, &c.

Si j'suis en retard,
Je grimpe derrière un* voiture.
Comme ell' suit l'boul'vard,
J'm'endors bientôt à tout hasard ;
Mais, par un pétard
Que l'eocher m'sonn' dans la figure,
J'me réveille soudain
Tout en haut du faubourg Martin.
Mais c o m m ' j ai d'I'argenc,
Ce qu'est consolant,
Je vais lestement
Ach'ter un sou d'pomm' de térr' frites
Puis faisant l'grand tour,
Car j aim' pas l'plus court,
J'vois tout l'morid' qui court,
Vers le canal : j'trotte à mon tour.
J entends les cris d un' mère . . .
J'comprends, et, sans retard
Plongeant d un' bonn' manière,
J'iui sauv' son p'tit moutard.
On parlait d'récompense ! j
46

C o m m ' si y a v a i t b e n d ' q a o i ; *
E n pareil!' c i r c o n s t a n c e ,
T o u t a u t ' e û t fait c o m m ' m o i .
T r a de r i de r i s , & c .

E n t e n d e z - v o u s pas
L à - b a s le plaisir qui m a p p e l l e 1
J e vais d e ce p a s
3
A v e c les a u t ' p r e n d m e s é b a t s :
C est qu V a t a n t d a p p a s .
D e v o i r les amis s ' d o n n e r d ' F a i l e ,
Q u on peut b e n flâner ;
J ' d i r a i queuque c o ï t ' p o u r m e s c u s e r .
Q u a n d j e serai g r a n d , ^
O a s'ra différent :
D i e u ! quel a g r é m e n t
D e p o u v o i r agir à m a t ê t e !
N é pour le p l a i s i r ,
À me divertir,
F l â n e r à loisir
J ' v e u x c o n s a c r e r tout m o n flv'nir..-(sî7âïice)
M a i s , m a p a u v ' vieille m è r e ,
5
Q u i d a n s le m o n d n a q u ' m o i ,
S e r a i t d o n c dans la m i s è r e !
C'tidée-là m'glac'd'effroi • . .
D a n s ce c œ u r y a pas v i c e j
G u g u s , tu t ' c o r r i g ' r a s .
4
E l i , mourir à Y hospice !
O h ! n o n , mais dans m e s bras . • •
T r a d e ri d e ris, &c.
47

Alï ! QUE J'AIME DONC L E S OMNIBUS î

Dédiée à tous les gens aisés qui ont six sous


dans leur poche.
f f f f f
Ah ! qu j*aittrf donc* qu'j*nîm donc, q« j aim donc,
qu'jVim' donc les omnibus !
C'est çà qu'est un* fière voiture !
Yen a pus d'plus grande, j'vous l*jnre,
Dieu ! qu'c'est gentil les omnibus t
( f c
J<aim -t-i, j aiin -t-i les omnibus !
!
3 vas devenir bien savant, j'gage ;
£
Au pays, j poumii-t-être grognard
Quandje raconterai mes voyages
Dass le coche du boulevard.
Ah ! qu'j'aiiir d o n c , StC.

Pour se former l'ton, la tournure,


Faut voir i'monde, c'est )a vérité :
f
Pour six sous, avec c te voiture,
:
J peux m'iancer dans la société.
Ah ! qu'j'aim' donc» &c.
c
Ce n est pas pouv faire l'aimable,
Mais dans l'omnibus j'suis heureux j
,1e me crois un dieu de la Fable^
Quand je roule dessus l'essieu . . .
Parlé—AH ! en v'ià-t-i une bonue de ealem-
bourg !
Ah ! qu'j'aim' donc, & c
48
C ' e s t un' raerreill' que c'te voiture !
C a n'empêche pas qu'i.ya des gens
Q.ui dis' que les banquett' sont dures ;
Qu on pe«t s'blesser en y montant.
Parlé.—I disent aussi comm'ça qu'on y attrape
des démangeaisons. A h ! l'plus s o u v e n t . . . et puis
qu'est ce que ça m'iait à moi 1
A h .' qu'c'est bon les omnibus !
Tout, l'monrt' devrait prend' c'te voiture :
C a r ell' va droit son ch'min, j ' v o u s jure.
D i e u ! qu-'c'est gentil, & e .
BPMOND L'HuittiEK.

L E D E P A R T DU C O N S C R I T .

Je suis t-nn pauvre conscrit,


De l'an millc-huit-cent-dï ;
F a u t quitter le Languedo,
L e Laneucdo, le Langueùo,
Oh!
Faut quitter (e L a n g u e d o ,
A v e c le sac sur lo d o s .

L e M a i r e , et aussi l ' P r é f e t ,
N ' e n sont deux jolis cadets j
Ils nous font tirer z-au sort,
T i r e r z-au sort, tirer z-au sort,
Ort ;
Ils nous font tirer z-au sort,
F o u r nous eonduir'z-à la mort.
49
Adieu donc ! mes chers parents,
N'oubliez pas votre enfant ;
Criyez-li de temps en temps,
De temps en temps, de temps en temps,
En ;
Crivez-li de temps en temps,
Pour lui envoyer d'I^argent
Adieu donc ! dans sa douleur,
Vous consolerez ma sœur ;
Vous y direz que fan fan,
Que fanfan, que fanfan,
An;
. Vous y direz que fanfa»,
Il est mort z-en combattant.
Qui qu'a fait cette chanson,
N'en sont trois jolis garçons j
Ils étiont faisuux de bas,
Faiseux de bas, faisons de bas,
Ah ;
Ils étiont faiseux de bas,
E t à c'theure ils sont soldats.

CADET ROUSSELLE.
Cadet Rousselle a trois maisons
Qui n'ont ni poutres ni chevrons :
C'est pour loger les hirondelles.
Que direz-vous d'Cadet Rousselle ?
Ah ! ah ! ah ! mais vraiment
Cadet Rousselle est bon enfant-
G
50

Cadet Kousselle a trois habit* ;


Deux jaunes, l'autre en papier gri».
Ifc met celïîï-là quand il gèle,
©w quand il pleut, et quand il grêle,
Ah ! ah ! &e.
Cadet Kousselle a trois chapeaux ;
deux ronds ne sont pas très-beaux,
Et le troisième est à deux cornes :
Ue sa tête il a pris la forme.
Ah-h ah ! &c.

CadetKousselte a trois Beaux yeux ;


I>'un r'garde à Caen,- l'autre à Bayoux.
Comme il n'a pas In- TU? bien nette,
ÎLc troisième c'est sa lorgnette.
r

Ah !ah ! &c~

Gadet Kousselle a une- épee


Très-longue, mais-tonte romllée.
On dit qu'elle est en-cor pncelle ;
C'est pour fair' peur aux hirondelle».
Afcfah.! &c-.
Cadet Eousselie a trois garçons :
&'un est voleur, l'autre est fripon,
ï^e troisième est un p»u ficelle ;
ïl ressemble à Cadet Kousselle.
Ah ! ah ! Sec.
Cadet Rousselle a. trois gros chiens ;
L'un court au lièvr', l'autre au lapin,
lj?troisiême s'enfuit quand »n l'appelle,
Eomme le chien d'Jcan de Nirelle.
A h l a h ! &e.
C a d e t Roueselle a trois beaux chat»,
Q u i n'attrapent jamais les rats.
L e troisièra' « ' a p as de prunelle ;
I l monte au grenier sans chandelle.
A h 1 ah ! fcc.

C a d e t Rousselle a t r o i s deniers ;
C ' e s t pour payer ses créanciers.
Q u a n d î i a montré ses ressources,
I l les remet dedans sa bourse-
A h l a h ! &c.

Cadet Roussell' s'est fait acteur


C o m m e Chénier s'est fait auteur ;
A n café quand il j o u ' son r ô l e .
L e s aveugles le trouvent drôle.
Ail ! ah ! & c .

Cadet Roussell' ne mourra pas :


C a r , avant de sauter le p a s ,
O n dit qu'il apprend l'orthographe,
Pour fair' l u i - m ê m ' son épitaphe.
Ah ! ah ! & c

GUÏLLERI.

£l était un p'tit hoinme,


Q u i s'app'lait Guilleri
Carabi ;
52

Il s'en fut à la chasse,


A la chasse aux perdrix,
Carabi,
Titi Carabi,
Toto Carabo,
Compère Guilleri,
Te lai'ras-tu mouri' ?
Il s'en fut à la chasse,
A la chasse aux perdrix,
Carabi ;
Il monta sur un arbre
Pour voir ses chienscouri\
Carabi,
Titi Carabi, &c.
Il monta sur un arbre
Pour voir ses chiens couri',
;
Carabi. • • •
La branche vint à rompre,
Et Guilleri tombi',
Carabi,
Titi Carabi, &c.

La branche vint à rompre,


Et Guilleri tombi',
Carabi ;
Il se cassa la jambe
Et le bras se demi'
Carabi,
Titi carabi, &c.
Il se cassa la jambe
Kt le bras se demi',
Carabi ;
53

L e s dam' deVHopitale
Sont arrivc's au brui',
Carabi,
Titi C a r a b i , & c .

L e s dam' de VHopitalt
Sont arrivc's au brui',
Carabi ;
L ' u n e apporte un emplâtre,
L'autre de la charpi',
Carabi,
Titi Carabi, & c .

L ' u n e apporte un emplâtre,


L'autre de la charpi',
Carabi ;
On lui bande la jampc,
E t le bras lui r e m i ' ,
Carabi,
T i t i carabi, & c -

J'AI DU B O N T A B A C

J'ai du bon tabac dans ma tabatière,


J'ai du bon tabac ; tu n'en auras
Pas.
J'en ai du fin et du râpé
Ce n'est pas pour ton iichu nez.
J'ai du bon tabac, & c .

C e refrain connu que chantait mon père,


A ce seul couplet il était borné.
51

Moi? je me suis déterminé


A le grossir comme mon nez.
J ' a i du bon tabac, &c-
Un noble héritier de gentilhommière,
Kecueille,tout seul, un fief blasonné ;
Il dit ù son frère puîné ;
Sois abbé, je suis ton aîné-
J ' a i du bon tabac. Sic
Un vieil usurier, expert en affaire,
Auquel, par besoin, l'on est amené.
A l'emprunteur infortuné
Dit, après l'avoir ruiné :
J ' a i du bon tabac, &c*
Juges, avocats, entr'ouvrant leur serre,
Au pauvre plaideur, par eux rançonné,
Après avoir pataliné,
Disent, le procès terminé :
J ' a i du bon tabac, & c
Neuberg, se croyant un foudre de guerre
Est par Frédéric assez m a l m e n é .
JLe vainqueur qui Pa talonné.
Dit à ce hongrois étonné :
J'ai du bou tabac, &c.
Tel qui veut nier l'esprit de Voltaire,
Est pour le sentir trop enchifrené.
Cet esprit est trop raffiné,
E t lui passe devant le nez.
Voltaire a l'esprit dans sa tabatière
Et dû bon tabac, tu n'en aura»
Fa».
55
P a r ce bon monsieur de C t e n a o n t - T o a -
[nerre,
Q u i fut mécontent d'être chansonué j
M e n a c é d'être bâtonné.
On lui dit, le coup détourne :
J'ai du bon tabac, & c .

V o i l à neuf couplets, cela ne fait g u è r e ,


Pour an tel sujet bien assaisonné ;
Mais j ' a i peur (ju'un priseurmal né
Ne chante, en me riant au nex :
J'ai du bon tabac, & c .

MORT E T CONVOI DE .L'INVINCIBLE


MALBROUGH.
Refrain.
Malbrough s'en v a t-en guerre,
Mironton, mironton, mirontaine,
Malbrough s'en va t-cn gn erre.
Ne sait quand reviendra.
11 reviendra z - à Pâques,
Ou à la T r i n i t é .
L a Trinité se passe,
Malbrough ne revient pas.
Madame à sa tour monte.
Si haut qu'ell' peut monter-
E l l e aperçoit son page,
Tout de noir habillé.
56

Beau page, ah ïmoa beau page,


Quell' nouvelle apportez?
Aux nouvelles que j'apporte,
Que vos yeux vont pleurer !
Quittez vos habits roses.
Et vos satins brochés.
Monsieur d'Maïbrough est mort,
Est mort et enterré.
J'I'ai vu porter eu terre,
Par quatre z~officiers :
L'un partait sa cuirasse,
ï/autre son bouclier.
L'un portait son grand sabre,
^ L'autre ne portait rien.
A Pentour de-sa tombe,
?
Romarins l on planta.
Sur la pins haute branche
L e rosignol chanta.
On vit voler son â m e ,
Au travers des lauriers.
Chacun mit ventre à terre
E t puis se releva.
Pour chanter les victoires
Que Malbrongh remporta.
L a cérémonie faite,
Chacun s'en tut coucher.
JPn'en dis pas davantage,
Car en voilà z-assez.
57

L E T R É P A S DU CHAT.

11 «5ta.it d a n s ïa ville
line petite fille,
B i e n c h è r e à sa f a m i l l e ,
Mais bien dans l'embarras,
A h ! a h l a h ! a h ! ah ! ah !
l i e g r a n d m a l qui l'oppresse
E t si fort l ' i n t é r e s s e ,
Sujet d e six t r i s t e s s e ,
E s t la m o r t d e son c h a t ,
E s t la m o r t d e son c h a t , ah ! «h
E s t la m o r t d e son c h a t .

P a r un g r a n d j o u r de f ê t e ,
Q,ue cette p a u v r e b o t e
A v a i t m a l à. ht t ê t e
D e s douleurs d ' e s i o m a c ,
A h ! a h ! a h ! ali ! a h ! a h !
Cette pauvre carcasse,
E t e n d u ' dans la p l a c e ,
D é p l o r a i t sa dit-grâce,
E n poussant des hélas,
E n poussant des hélas-, ali ! a h !
E n poussant des h é l a s . *

Q u a t r e d o c t e u r s ensemble
S ' a c h e m i n e n t , s'assemblent,
A r r i v e n t ; le c h a t t r e m b l e ,
O i t : J e suis.au t r é p a s ,
A h ! aK ! a h ï a h ! a h ! a h !
II
5S

L'an lui saigne l ' o r e i l l e ,


L ' a u t r e dit : C ' e s t m e r v e i l l e
I l s restent en c o n s e i l ,
E t le c h a t e x p i r a ,
E t le c h a t e x p i r a , a h ! a h i
E t le c h a t e x p i r a .

On court au S é m i n a i r e
Chercher monsieur V a l l i è r e ,
F o u r t r a n s p o r t e r en t e r r e
L e s restes d e ce chat..
A h ! ah ! ah ! ah ! a h ! a h !
( i u a l i e a u t r e s chats h o n n ê t e s ,
L e voile sur la t ê t e ,
E t tout couverts de crêpe3,
P o r t a i e n t les coins d u d r a p ,
P o r t a i e n t les coins d u d r a p , ah ! ail t
P o r t a i e n t les coins d u d r a p .

l i e j o u r de son p o r t a g e ,
U n matou du v i l l a g e ,
Habile personnage,
S u r sa t o m b e g r a v a .
A h ! a h j ah ! ah ! a h ! a h t
C i - g î t d e n o t r e ville
" L e c h a t le p l u s h a b i l e ,
" Q u i fut toujours h o s t i l e
" A u x souris et a u x r a t s ,
" A u x souris et a u x r a t s , a h ! aïs £
" A u x «oari» et aux r a t s . "
59

LE GRAND NEZ.

Refrain,
Ah ! quel nez, ah ! quel nei!
Tout l'monde en est effrayé ;
A i ! quel nez, ah ! quel, nez i
Tout l'monde en est effrayé.
An raond' quand j'suis venu,
J'avais l'nez biscornu ;
Maintenant me v'ià grand,
C'est pis qu'un sabot d'enfant.
Ah ! quel nez, &c
l^uand j'demand' du tabac,
C't-à qui n'm'cn doim'ra pas :
D'chaqu' narin', voyez-vous,
J'en r'nitîlc au moins pour deus soua-
Ah ! quel nez, &e.

Sur l'p'tit pont d'I'Hôtel-Dicu,


Via qu'un malin curieux
M'dit : '•' Range donc ton nez
Quej'voi' l'archevêché."
Ah ! quel nez, &c.
li'autr' jour, à St. Martin,
V'ià qu'un plaisant gamin
Dit, riant aux éclats :
" Oh ! quelle fiche il vous a ! "
Ah ! quel nez, &c
60

Hier mon commandai!t


Bougonnait sou lieut'nant
Que d'six potic'a en avant
Mon nez passait l'alignement.
Ah ! quel nez, file.

C O M P L A I N T E DU J U I F - E R R A N T .

Est-il rien sur la terre


Qui soit plus surprenant
Que la grande misère
Du pauvre Juif-Errant 1
Que son sort malheureux
Paraît triste et fâcheux !

Un jour près de la ville


De Bruxelle en Rrabaut,
Des bourgeois fort dociles
L'accoster' en passant.
Jamais il n'avaient vu
Un homme si barbu.

Son habit, tout difforme


E t très-mal arrangé,.
Leur fit croir' que cet homme
Etait fort étranger,
Portant, comme ouvrier^
Devant lui un tablier-
On lui dît ; Bonjour, maître.
De grâce, accordez-nous
La satisfaction d-*être
61

Un moment avec vous ;


Ne nous refusez pas ;
Tardez un peu vos pas.
Messieurs, je vous proteste
Que j'ai bien du malheur :
Jamais je ne m'arrête,
Ni ici, ni ailleurs :
Par beau ou mauvais temps,
J e marche incessamment.
Entrez dans cette auberge,
Vénérable vieillard,
D'un pot de bière fraîche
Vous prendrez votre part ;
Nous vous régalerons
Le mieux que nous pourrons.

J'accepterais de boire
Ï3eux coups avecqne vous ;
Mais je ne puis m'asseoir,
Je dois rester de bout -
Je suis en vérité
Confus de vos bontés.
Ah ! de savoir votre âge
1
Nous serions fort curieux :
A voir votre visage,
Vous paraissez fort vieux ;
Vous avez bien cent ans ;
Vous montrez bien autant.

L a vieillesse me gêne,
J
J ai bien dix-huit-cents ans.
Chose sûre et certaine,
62
J e passe encor douxeuns :
J'avais douze ans passé
Quand Jésus-Christ est né.
N'êtes-vous point cet homme
De qui l'on parle tant ?
Que l'Ecriture nomme
ïsa'c, le Juif-Errant 1
De grâce, dites-nous
Si c'est sûrement vous.

Isaac Laquedem
Pour nom me fut donné ;
Né à Jérusalem,
Ville bien renommée,
Oui, c'est moi, mes enfant»,
Qui suis le Juif-Errant.
Juste ciel ! que ma ronde
Est pénible pour moi !
Je fais le tour du monde
Pour la cinquième fois.
Chacun meurt à son tour.
E t moi, je vis toujours.

J e traverse les mers.


Les rivièr', les ruisseaux,
Les forets, les déserts,
Les montagn', les coteaux,
Les plaines, les vallons :
Tons chemins me sont bon*-
J'ai vu dedans l'Europe
Ainsi que dans l'Asie,
Des bataill's et des chocs
63
Q u i coûtaient b i e n des ries ;
Jo ïes ai traversés
Sans y ê t r e b l e s s é .

J'ai vu dans l ' A m é r i q u e ,


C ' e s t une v é r i t é ,
A i n s i que dans l'Afrique
Grande mortalité;
L a mort ne me peut rieiij
Je m'en aperçois b i e n .

J e n'ai point de ressource


E u maisen ni en bien ;
J ' a i cinq sous dans m a bourse,
V o i l à tout mon m o y e n ;
E n tons lieux", en tous t e m p s ,
J'en ai toujours autant-

N o u s pensions c o m m e un songe
L e vecit de vos maux ;
N o u s traitions d e mensonge
T o u t vos plus grands travaux :
Aujourd'hui nous voyons
Que nous nous mépreniong.

Vous é t i e z donc coupable


D e quelque grand p é c h é ,
Pour que Dieu tout aimable
Vous ait tant affligé 1
Dites-nous l'occasion
D e cette punition.

C ' e s t m a cruelle audace


Qui causa mon malheur ;
S i mon crime s'efface,
64
j ' a u r a i bien du bonheur :
J ' a i traité mon Sauveur
A v e c t r o p de r i g u e u r .
S u r le m o n t du C a l v a i r e
J é s u s p o r t a i t sa c r o i x ;
li m e dit d é b o n n a i r e ,
Passant devant chez moi ;
C i
Veux-tu bien, m o n a m i ,
Q u e je repose i c i ? "
M o i , brutal et r e b e l l e ,
J e lui dis sans r a i s o n :
" Ote-toi, c r i m i n e l ,
D e devant m a m a i s o n ;
A v a n c e et m a r c h e d o n c .
C a r tu m e fais affront. "

J é s u s , la b o n t é m ê m e ,
M e dit en s o u p i r a n t :
Tu marcheras toi-même
P e n d a n t plus de mille a n s ;
L e dernier jugement
F i n i r a ton t o u r m e n t .

D e chez moi à l ' h e u r ' m ê m e


J e sortis bien c h a g r i n j
Avec douleur e x t r ê m e
J e m e mis en c h e m i n ;
D è s ce j o u r - l à , j e suis
E n m a r c h e j o u r et n u i t .
M e s s i e u r s , le t e m p s rn^e p r e s s e ,
A d i e u , la c o m p a g n i e ;
G r â c e à vos p o l i t e s s e s >

Je; vous en r e m e r c i e :
J e suis t r o p t o u r m e n t é
Q u a n d j * suis a r r ê t é .
65

IL E T A I T UN' BERGÈRE.

Il était un' b e r g è r e ,
R o n , ron, ron, petit patapon,
Il était un' bergère
Qui srardait ses moutons,

Qui gardait ses moutons.

E l l e fit un fromage,
R o n , ron, ron, petit patapon,
Elle fit un fromage
D u lait de ses moutons,
R o n , ron,
"a lait de ses moutons.

L e chat, qui la regarde,


R o n , ron, ron, petit patapon,
L e c h a t , qui la regarde
D'un petit air fripon,
R o n , ron,
D'un petit air fripon.

S i tu y mets la patte,
R o n , ron, ron, petit patapon,
S i tu y mets la patte,
T u auras du b â t o n ,
Ron, ron,
T u auras du b â t o n .

Il n'y mit pas la patte,


R o n , ron, r o n , petit patapon,
I
C6

Il n'y mit pas la p a t t e ;


Il y m i t le menton,
lion, ron,
Il y m i t le menton.

IJ& b e r g è r e en c o l è r e ,
B o n , ron, ron, petit patapon,
L a b e r g è r e en c o l è r e
T u a son p ' t i t c h a t o n ,
B o n , ron,
T u a son p ' t i t c h a t o n .

E l l e fut à c o n f e s s e ,
K o n , ron, ron, petit pataton,
E l l e fut à confesse
P o u r obtenir p a r d o n ,
Ron, ron,
P e u r obtenir pardon.

Mon père, je m'accuse,


Kon, rou, ron, petit pataton,
Mon p è r e , je m'accuse
D'avoir tué chaton,
lion, ron,
D'avoir tué chaton-

. P o u r votre p é n i t e n c e ,
Ron, ron, ron, petit patapon,
P o u r votre p é n i t e n c e
Tous mangerez chaton,
Kon, ron,
Von» m a n i è r e s en «ton.
MA BOULE BOULANT.

D e r r i è r ' c h e z BOUS y a - t - u n é t a n g ,
E n r o u l a n t m a boule ;
T r o i s b e a u x c a n a r d s s'en vont « l i g n a n t ,
Rouli, roulant,
M a boule roulant,
E n roulant, ma bonlc roulant,
E n roulant m a boule.

T r o i s b e a u x c a n a r d e s'en vont b a i g n a n t ,
E n roulant ma b o u l e ;
L e fils du roi s'en v a c h a s s a n t ,
Rouli, roulant, &c.

L e fils du r o i s'en v a c h a s s a n t .
E n roulant ma boule ;
N
A v e c son g r a n d fusil d ' a r g e n t ,
R o u l i , r o u l a n t , Sec.

A v e c son g r a n d fusil d ' a r g e n t ,


E n r o u l a n t m a l&oule ;
V i s a le n o i r , tua l e b l a n c ,
R o u l i , r o u l a n t , &c-

Visa le n o i r , tua le b l a n c ,
E n roulant ma boule ;
O fils du r o i , tu es m é c h a n t !
R o u l i , r o u l a n t , fec.

O fils du r o i , tu es m é c h a n t !
E n roulant M » bouts ;
68

D'avoir tué mon canard blanc,


Rouli, roulant, &c.

D'avoir tué mon canard blanc,


E n roulant ma boule ;
Par dessous l'aile il perd son sang,
Rouli, roulant, &o>

Par dessous l'aile, il perd son sang,


E n roulant ma boule ;
Par les yeux lui sort des diainans,
Rouli, roulant, &c.

Par les yeux lui sort des diamans,


E n ronlan ma boule ;
E t par le bec l'or et Purgent,
Rouli, roulan, &c-
?
E t par le bec l or et l'argent,
En roulant ma boule ;
Toutes ses plum' s'en vont au vent,
Rouli, roulant, & c

Toutes ses plum' s'en vont au vent,


E n roulant ma boule ;
Trois dam' s'en vont les ramassant,
Rouli, roulant. & c

Trois dam' s'en vont les ramassant,


En roulant ma boule ;
C'est pour en faire un lit de camp,
Rouli, roulant, &c-
69

C'est pour en faire un lit de camp,


En roulant ma boule ;
Pour y coucher tous les passants,
Rouli, roulant, &c.

LA M E M E

Avec un refrain différent.


Derrièr* chez nous ya-t-mi étang,
Love ton pied légèrement ;
Trois beaux canards s'en vont baignant,
Lésèrc-légère-
Lève ton pied, lugère-légère-
Lève ton pied légèrement.

LA M E M E

Avec un refrain différent-

Derrièr' chez nousya-t-un étang,


Légèrement,
Gaî-gaîment,
Trois beaux- canards .s'en vont baignant,
Tout du loiig de la rivière j
Suivons le vent,
Mon compère,
Suivons le vent,
Gaî-gaîment*
70

M'EN REVENANT DE L A VENDÉE.

M ' e n revenant de la V e n d é e ,
Dans mon chemin j ' a i rencontré . . .
Vous m'amusez toujours.
Jamais je m'en irai chez nous :
J'ai trop grand' peur des loups.

Dans mon chemin j ' a i rencontré


Trois cavaliers fort bien montés,

T r o i s cavaliers fort bien montés ;


Deux à cheval et l'autre à pieds,

D e u x à cheval et l'autre à pieds.


Celui d'à pieds m'a demandé,

Celui d'à pieds m'a demandé :


" O ù irons-nous ce soir coucher ? "

" O ù irons-nous ce soir coucher t "


— " C h e z moi, monsieur, si vous voulez.

" C h e z moi, monsieur si vous voulez ;


" V o u s y trouv'rez un bon souper.

" Vous y trouv'rez un bon souper


" E t un bon lit pour TOUS coucher,

" E t un bon lit pour vous coucher.


Lsu csvalievs ont accepté.
71

A SAINT M A L O .

A Saint-Malo, beau port de mer,


Trois gros navîv' sont arrivés.
Nous irons sur Peau
Nous y prora'-promener,
Nous irons jouer dans l'île.
Trois gros navir' sont arrivés,
Chargés d'avoin', chargés de blé-
Chargés d'avoin', chargés de blé ;
Trois dam's s'en vont les marchander.

Trois dam's s'en vont les marchander :


" Marchand, marchand, combien ton blé ?
" Marchand, marchand, combien ton blé ?
5
—Trois francs i'avoin , six francs le blé.
Trois francs l'avom', six francs le blé.
—C'est bien trop cher d'un' bonn' moitié.
C'est bien trop cher d'un' bonn' moitié.
—Monte?:, mes dam's, vous le verrez.
Montez, mes dam's, vous le verrez-
-—Marchand, tu n'vendras pas ton blé.
Marchand, tu n'vendraspas ton blé.
—Si j'ne l'vends pas, je le donn'rai.
Si j ' n e l'vends pas, je le donn'rai.
—A ce priïj on va s'arranger-
72

BAL CHEZ BOULÉ.

Dimanche après les vêpres,


Yanra bal chuz B o u l é ;
Mais il n ' y va personne
Que ceux qui savent danser.
Vogue, beau marinier, vogue.
Vogue, beau marinier.

Mais il n'y va personne


Q u e ceux qui savent danser.
Ijouison B l é , comra' les autr's,
Voulut itou y a l î e r .

Louison B l é , comm' les autr's,


Voulut itou yaller-
Non, li dit .sa maîtresse,
T ' i r a s quand Ptrain s V a fait.

Non, li dit sa maîtresse,


T ' i r a s quand l'traiu s'ra fait*
I s'en fut à Fétable
. S e s animaux soigner.

X s**n fut à l'étable


S e s animaux soigner;
P r i t B a r e t t ' par la p a t t e .
E t Caillctt' par le pied.

P r i t B a r e t t ' par la patte,


E t Caillett' par le pied.
73

Quand tout son train fut fait,


I s'en fut s'habiller.

Quand tout son train fut fait,


I s'en fut s'habiller,
M i t son gilet barré
E t ses souliers francés.

M i t son gilet barré


E t ses souliers francés.
Quand i fut habillé,
I s'en fut chuz B o u l e .

Quand i fut habillé,


I s'en fut chuz B o u l é .
Quand i fut chuz B o u l é ,
I se mit à danser.

Quand i fut chuz Boulé,


I se mit à danser.
Quand il eut bien dansé,
I s'en alla s'eoucher.

L A M A L A D I E OUI-DA.

Quand le mari s'en vint du bois,


Trouva sa feoim' malade,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
Trouva sa femm' malade.
S
74

A h } qu'as-tu donc ma pauvre femme ï


J'ai-t-un grand mal de t ê t e ,
Qui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
J'ui-t-un grand mal de tare.

Faut aller qu'ri le m é d e c i n ,


L e méd'cin du village,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
L e méd'cin du village.

Quand le méd'cin fut a r r i v é ,


Connut la maladie,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
Connut la maladie.

Qu'on œett' de l'eau dedans son vin,


E l l e sera guérie,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
E l l e sera guérie.

S i l'on met d'I'eau dedans mon v i n ,


D è s d'main j e serai morte,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
D è s d'main j e serai morte.

On mit de l'eau dedans son vin ;


E l l e n'en fut pas pire,
Oui-da, hum ! hum ! ha ! ha !
E U » n'en fut pas pire.
75

PIERRE NICOLAS.

E n revenant du Canada,
J'ai rencontré P i e r r ' Nicola».
J'ai c't-épaule qui m'branle, qui m'branle ;
J'ai o't-ell'-là qui ne branl' pas.

D ' o ù reviens-tu, Pierr' Nicolas ?


Je r'viens du fond du Canada.
J'ai c't-épaule, Ssc.

Q.u'apportes-tu, Pierr' Nicola» î


J'apporte ma femme et mon chat.
J'ai c't-6paule, Sic.

. N'apportes-tu rien que cela î


J'apporte un' tarquett' de tabac.
J'ai c't-épaule, & c .

M ' e n dona'ras-tu, Pierr' Nicolas t


J't'en donnerai long comm' le bra«.
J'ai c't-épaule, & c .

E t pour le reste, qui l'aura t


C e s'ra le beau gas de Thomas.
J'ai c't-épaule, Sic.
76

LE MEUNIER.

Quand le meunier revint du marche,


Trouva son blé tout en tas foulé,
Sur le haut, sur le bas, sur le sac, que de blé !
Sur le cric-cric-cràc, sur le champ du meunier !

Trouva son blé tout en tas foulé.


Valet, valet, tu vas t'en aller-
Sur le haut, sur le bas, &c.

Valet, valet, tu vas t'en aller.


— Ah ! oui, mon maît', si v'voulez m-'payer.
Sur lehaftt, sur le bas, &c.

Ah ! oui, mon maît', si v'voulez m'payer.


— Valet, valet, comment c'que j ' t e doi ?
Sur le haut, sur le.bas, &c-

Valet, valet, comment c'que j ' t e doi ?


— Vous m'devez cent éçus pour l'année-
Sur le haut, sur le bas, &c.

Vous m'devez cent écus pour l'année.


— Valet, valet, j'm'en vas fies donner.
Sur lehaut. sur le.bas, &c.
77

MON M O I N E .

Ah ! si mon moine voulait danser,


Un capuchon je lui donnerai.
Daase, mon moin', danse,
Tu n'entends pas la danse,
Tu n'entends pas, mature Ion la,
Tu n'entends pas, rnaluré, danser.

Ah ! si mon moine voulait danser,


Un ceinturon je lui donnerai-
Danse, & c

Ah ! si mon moine voulait danser,


Un chapelet je lui donnerai-
Danse, 5tc-
Ah ! si mon moine voulait danser,
Un froc de bur' je lui donnerai.
Danse, Sec-
Ah ! si mon moine voulait danser,
Un beau psautier je lui donnerai.
Danse, &o.
S'il n'avait fait vœu de pauvreté,
Bien d'autres chos' je lui donnerai.
Danse, 8so.
78

MIC-MIC.

C'est un nommé Martin


Qui s'ièv' de grand matin ;
Il s'en va-t-au moulin,
An moulin (lu voisin,
Guediguedindiu, de la roue tournée,
Oh ! oh ! oh ! m i c - m i c - m i c ,
Tonrlouvlour,
Moudra
Qui voudra
Mon grain.
Moudra
Qui voudra
Mon grain.

I l s'en va-t-au moulin,


An moulin du voisin.
Oh ! bonjour, mon voisin ;
Veux-tu moudre mon grain ?
Guediguedindin, &o.

Oh ! bonjour, mon voisin ;


Veux-tu moudre mon grain î
Ah ! je'n'mondrai ton grain
Que demain au matin.
Guediguedindin; & c

Ah ! j e n'moudrai ton grain


Que demain au matin.
Mais le loup est venu ;
fl a mangé Martin.
Guediguedindin, &e.
79
Mais le loup est venu ;
ï l a mangé Martin.
T o u s les parents venaient
Peur y pleurer Martin.
Guediguedindin, &c.

Tous les parents venaient


P o u r y pleurer Martin.
M a i s , de tous ces gens-là,
Jacquot fut le plus fin,
Guediguedindin, & c .

Mais de tous ces gens-là


Jacquot fut le plus fin :
Car il alla noyer
Son chagrin dans le vin.
Guediguedindin, & c .

FUIT A L'HUILE.

Mon père a fait bâtir maison,


A h ! a h ! ah ! frit à l'huile,
Sont trois charpentiers qui la font,
Fritain-'-friton,
Frit au poilon,
A h ! ah ! ah ! frit à l'huile,
F r i t au beurre et à Pognon.

Sont trois charpentiers qui la font,


A h !ah ! ah ! frit à l'huile,
Dont le plus jeune est mou m i g n o n ,
Fritain'-friton, &c.
80

Dont le plus jeune est mon mignon,


Ah ! ah ! ah ! frit à l'huile,
D'un saut il mont' sur le pignon,
Fritain'-friton, &c.
D'un saut il mont' sur le pignon,
Ah ! ah! ah ! frit à l'huile,
Il appelle ses compagnons,
Fritain'-friton, &o.
Il appelle ses compagnons,
Ah ! ah ! ah ! frit à l'huile,
i !
J'ai-t-un pâté de trois pigeons."
Fritain'-friton, &c
< (
J'ai-t-un pâté de trois pigeons-"
Ah ! ah ! ah ! frit à l'huile,
— " Assis-toi là, et le mangeons. "
Fritain'-friton, &c.
f {
Assis-toi là, et le mangeons. "
A h ! ah! ah! frit à l'huile,
En s'asseyant il fit un bond,
Fritain'-friton, &c.

En-s'asseyant il fit un bond,


' Ah ! ah !.ah! frit à l'huile,
Qui fit trembler mer et poissons,
Fritain'-friton, & c

Qui fit trembler mer et poissons,


Ah ! ah ! ah ! frit à l'huile,
Et les cailloux qui sont au fond,
Fritain'-friton, &c.
81
LA MEME

Avec un refrain différent.

M o n père a fait bâtir maison,


S u r le coin, sur le coin d'un pont ;
Sont trois charpentiers qui la font,
Sur le coin d'un coin,
Sur le coin d'un pont.
A h ! le beau petit joli coin,
Que le coin d'un coin,
Que le coin d'un pont !

LA MEME

Avec un refrain différent.


Fringue, fringue,
Sur la rivière ;
Fringue, fringue,
Sur l'aviron.
Mon père a fait bâtir maison
Fringue, fringue
Sur l'aviron.
Sont trois charpentiers qui la font.
Tortille,
Mortille,
Arrangeur de faucilles,
Compère Siroop.
Fringue, fringue,
Sur la rivière ;
Fringue, fringue,
Sur l'aviron.
K
LA BOITEUSE.

<S>Dnml la boileus' s'en va-t-au boie,


JEU' n'y va pas sans ses arriats.
Donnez-moi du bois :
Voilà mes arriats-
N'a-t-on jamais vu
Une boiteuse
Aussi joyeuse ?
N'a-t-on jamais vu
Une boiteuse
Aussi tortu' 1

Quand la beiteus' s'en va-t-à l'eau,


EU' n'y va pas sans ses deux seaux.
Donnez-moi de l'eau :
Voilà mes deux seaux.
N'a-t-on, &c.

Quand la boiteus' s'en va-t-aux choux,


EH' n'y va pas sans ses deux sous.
Donnez-moi des choux :
Voilà mes deux sous.
N'a-t-on, &c.
Quand la boiteus' s'en va-t-au pain,
EH' n'y va pas sans ses deux chiens.
Donnez-moi du pain :
Voilà mes deux chiens.
Wa-t-on, &c.
83

Quand la boiteus' s'en va-t-au r m » ,


E U ' n ' y Va pas sans son bonhomme*
Donnez-moi du rum :
V o i l à mon bonhomme.
N'a-t-on, & c .

BONHOMM', BONHOMM', SAIS-TU J O U E R î

Bonhomm', bonhomm', sais-tu jouer ?


Sais-tu jouer du tambourinon 'i
B o u m ' ! boum' ! boum' ! du tambourinon î
Bonhomme,
T u n'es pas maître dans ta maison,
Quand nous y sommes.

Bonhomni', bonhomm', sais-tu jouer î


Sais-tu jouer du vignolon, la 1
B o u m ' ! boum' ! boum' ! du tambourinon ?
V i g n ' ! vign' ! vign' ! du rignolon, la t
Bonhomme,
T u n'es pas maître dans ta maison, '
Quand nous y sommes.

B o n h o m m ' , bonhomm', eais-tu jouer î


Sais-tu jouer de la flûte, la t
B o u m ' ! boum' ! boum' ! du tambourinon î
V i g n ' ! vign' ! visfn' ! du vignolon, l a ?
Flùt» ! flut' ! flûi» ! de la fiute, la 1
Bonhomme,
T u n'es pas maître dans ta maison,
Quand nous y sommes.

On continue ainsi, en ajoutant tous les instru-


ments que la mémoire peut retenir.
84

MAIS ! MAIS ! M A I S !
La moutonne est dans un fossé ;
La pauvre bête est morte !
Son p'tit agneau courant après :
Mais ! raais ! mais ï
Ma mère, êtes-vous morte ?
Mais ! mais ! mais !
Ma mère, êtes-vous morte t

Sont p'tit agneau courant après :


Ma mère, êtes-vous morte ?
Nenni, nenni, mon p'tit agneau,
Mais ! mais ! mais !
J e n'suis point encor morte.
Mais ! mais ! mais !
J e n'suis point encor morte.
Nenni, nenni, mon p'tit agneau,
Je n'suis point encor morte.
J'donne à ce monsieur que voilà,
Mais ! mais ! mais !
L a sangle et la croupière
Mais ! mais ! mais !
La sangle et la croupière.
J'donne à ce monsieur que voilà
La sangle et la croupière ;
J'donne à ce monsieur que voici,
Mais ! mais ! mais !
L'eau du ruisseau pour boire,
Mais 1 mais ! mais !
L'eau du ruisseau pour boire.
85

LA RIGAILLE."

Le premier jour de mai, labouré,


Quand fut fait' la semaille,
J'm'en fus planter un mai, labouré,
DVant la porte à Jean Braille.
Oui, j't'en goutt', d'ia rigoutte, oh ! y a ,
Oui, j'I'cn goutt', d'ia vigaille.
J'm'en fus planter un mai, labouré,
D'rant la porte à Jean Braille ;
Quand le mai fut planté, labouré,
Dans la maison j'entraille.
Oui, j't'en goutt', &c.
Quand le mai fut planté, labouré,
Dans la maison j'entraille.
Voyant la table mie, labouri.
Sans façon j'm'approchaille.
Oui, j't'en goutt", &o.
Voyant la table mie, labouri.
Sans façon j'm'approchaille ;
De mes deux mains j ' e n prends, labourant,
lit commenc' la ripaille.
Oui, j't'en goutt', & c

De mes deux mains j'en prends, labourant ;


E t commenc' la ripaille ;
Tour à tour j'fais passer, labonrc,
Dindons, fricots d'volaille,
Oui, j't'en goutt', &c.
86

Tour â tour j'fais passer, labouré,


Dindons, fricots d'volailles.
C't-assez, m'dit-i, gourmand, labourant ;
Ya'ssez longtemps qu'tu tailles.
Oui, j ' t ' e n goutt', & c

C't-assez, m'dit-i, gourmand, labourant,


Ya'ssez longtemps qu'tu tailles-
—Je Jie suis point gourmand, labourant;
Je soulage mes entrailles.
Oui, j't'eïi goutt', &c.

LA BICHE.

Ah ! c'était une biche,


Son berdin berdindaine,
Qui n'avait que deux dents,
Son berdin berdindents.

Elle s'en alla paître,


Son berdin berdindaine,
Dans le clos de Mayrand,
Son berdin berdindents.

Elle mange une feuille,


Son berdin berdindaine,
Qui valait bien cent francs,
Son berdin berdindents.
87
E t un pied d'échalottc,
Son berdin berdindaine,
Qui valait bien autant,
Son berdin berdindents.

Mayrand qui la regarde,


Son berdin berdindaine,
N'en parut pas content,
Son berdin berdindents.

Il la prend et la mène,
Son berdin berdindaine,
Devant le parlement,
Son berdin berdindents.

Elle lève la queue,


Son berdin berdindaine,
Et s'assit sur un banc,
Son berdin berdindents.

EU' fit un pet au juge,


Son berdin berdindaine,
Trois pour les assistants,
Son berdin berdindents.

E t un boisseau de crottes,
Son berdin berdindaine,
C'est pour Monsieur Mayrand,
Son berdin berdind«nt«.
88

DOUBLE-DOUBLE.

Madame m'envoyait au m a r c h é ,
Pour un tambour lui acheter.
Mon tambour fait : double-double-double-double.
" Je ne suis pas bou marchand, madame î
( i
Je ne suis pas bon marchand, voyez ?
Madame m'envoyait au m a r c h é ,
Pour un p'tit chien lui acheter.
Mon p'tit chien fait : ouak, ouak, ouak, ouak ;
Mon tambour fait double-double-double-double ;
" Je ne suis pas, & c .
Madame m'envoyait au m a r c h é ,
Pour un p'tit coq lui acheter.
Mon p'tit coq fait : coq-coricô . . . coq-coricô , . .
Mon p'tit chien fait : ouak, ouak, ouak, ouak ;
Mon tambour fait : double-double-double-double.
" Je ne suis pas, & c -
Madame m'envoyait au m a r c h é ,
Pour un coq-d'Inde lui acheter, [lourlou ;
Mon coq-d'Inde fait : piouc, piouc, tourlour, lour-
Mon p'tit coq fait : coq-coricô . . . coq-coricô . . .
Mon p'tit chien fait : ouak, ouak, ouak, ouak ;
Mon tambour fait : double-double-double-double.
" J e ne suis pas, & c .
On ajoute ainsi tous les noms d'animaux que
l'on veut, et chacun imite à sa façon le cri de ces
animaux en commençant par le dernier. S i l'on
veut, éviter l a confusion, les cris doivent se faire
en cadence.
89

MARIE-PUNIÇON.

I m'a été pris hier au soir, ici,


C'est l'bonnetde mon mari.
Qu'est-c' qui l'a doue ?
Marie Puniçon,
Marie Puniçon, dondaine,
Marie Puniçon, dondé.
I m'a été pris hier au soir, ici,
C'est les bott' de mon mari.
Qu'est-c' qui l's a donc ?
Marie Puniçon, & c

ï m'a été pris Lier au soir, ici»


1
C'est Us jamb de mon mari-
Qu'est-c' qui Ps a donc 1
Marie Puniçon,, & c
I m'a été pris hier au POÏÏ*, ici,
C'est le nez de mon mari-
Qu'est-c' qui Pa donc 1
Marie Puniçon, &c.
ï m'a été pris hier au soir, ici,
C'est Ps oreilP de mon mari-
Qu'est-c' qui Ps ÏI donc 1
Marie Puniçon, &,c.

I m'a été pris hier au seir, ici,


C'est la têt' de mon mari.
Qu'est-c' qui Pa donc ?
Marie Puniçon, &c.
90

I-A-TLA-TÏ.A.

P a r (m d i m a n c h e a p r è s m i d i ,
M a femme s'est laissé m o u r i .
V o i s i n s , v o i s i n s , m a f e m m e est m o r t e ;
A h ! venez donc l'ensevelir.
Q u e les a n g e s l ' e m p o r t e n t î
Ia-tla-tla, ia-tla-tla,
Ia-tla-tla, ia-tla-tla.

J ' a i a r r ê t e c h e z le b e d e a u ,
J ' a i a r r ê t e c h e z le b e d e a u .
B e d e a u , b e d e a u , m a f e m m e est m o r t e î
F a i t e s la d o n c c a r i l l o n n e r .
Q u e les a n g e s l ' e m p o r t e n t !
Ia-tla-tla, &c.

J ' a i a r r ê t é c h e z le c u r é ,
J ' a i a r r ê t é c h e z le c u r é .
C u r é , c u r é , ma femme est morte :
C h a n t e z - l u i d o n c s o n libéra.
Q u e les anges l ' e m p o r t e n t !
Ia-tla-tla, &c.

J ' a i a r r ê l é c h e z le f o s s o y e u r ,
J ' a i a r r ê t é c h e z le fossoyeur.
A h ! fossoyeur, m a f e m m e est m o r t e :
C r e u s e z - l u i d o n c assez a v a n t ,
Qjue j a m a i s e l l ' n ' e n s o r t e .
Ia-tla-tla, &c.
91
E n revenant de l'enterr*mefct,
J'ai vu des gensses qui buvaient
J'en ai_paye cinq ou six pottes :
A h ! c'était pour me rappeler
Q u e ma femme était morte.
Ia-tla-tla^&c.

LA BIBOURNOISE.

Quand j ' é t a i s c h e z mon père,


Petite Jeanneton,
L a glinglanglon,
M'envoi'-t-à la fontaine,
"Pour emplir mon cruchon.
L a bibournoise !
Sont-c' des pois t des pois ! des feves ? des f è v e s !
D e Pognon 1 . . •
Ya-t-i pas d e l à glinglanglon !
B o n , bon, bon,
B o n , bon, bon ;
Darillon, darillon, darillon.
O h ! la galgalançon bibournoise,
Bon ! bon !
Faisons le saut de la galgalançon bibournoise !

M'envoi'-t-à la fontaine,
Pour emplir mon cruchon,
L a glinglanglon.
L a fontaine est profonde ;
Je suis coulée au fond.
L a bibournoise, & c .
92

La fontaine est profonde ;


J e suis coulée au fond,
L a glinglanglon.
Par icite il y passe
Trois cavaliers barrons,
La bibournoisc, &c.

Par icite il y passe


Trois cavaliers barrons,
La glinglanglon.
" Que donneriez-vous, belle,
" Qui vous tir'rait du fond î "
La bibournoise, &o.

" Que donneriez-vous, belle,


" Qui vous tir'rait du fond 1 "
L a glinglanglon,
— Tirez, tirez, dit-elle,
Après ça, nous verrons.
La bibournoise, &c.

Tirez, tirez, dit-elle,•


Après ça, nous verrons,
L a glinglanglon.
Quand la bell' fut tirée,
S'en fut à la maison.
La bibournoise, &c.
93
LA M E M E
Avec un refrain différent.

Quand i'étais chez mon p i r e ,


Gai, vive le roi !
Petite Jeanneton,
Vivent le roi-z-et la reine !
Petite Jeanneton,
Vive Napoléon !

LA GINGTTE M E P R E N D .

Mon mari est ben malade.


En grand danger de moni'i'.
Il m'cnvoi' dessus ces côtes,
Pour cueillir des pomm's pour lui ;
La gingu' me prit, gai, gai, gai,
Via qu'çà m'prend,
Gaî-gaîment.
5
Il m'envoi dessus ces côtes,
Pour cueillir des pornm's pour lui.
Quand je fus dessus ces côtes,
-3 'entendis sonner pour lui.
Lagingue, &c.

.Te me j'tis à deux genoux,


Pour prier pater pour lui.
94,

Je m'en »'vins à la maison,


Pour ensev'Iir mon mari.

Quand je fus devers les y e u x ,


J 'avais peur qu'il me r'gârdît.

Quand je fus devers le n e z ,


J'avais peur qu'il me sentît.

Quand je fus devers la bouche,


J'avais peur qu'il m'embrassît.

Quand je fus devers les mains,


J'avais peur qu'il me poignît.

Quand je (us devers les pieds,


J'avais peur qu'il gigotît*
L a gingu' me r'prit, gai,%ai, g a i ,
V ' i à q u ' ç à mr'prend,
Oaî-gaîment.

U N TOUR DU D I A B L E .

L e d i a b l ' s'en va dans la v i l l ' de Poquier,


Dans le moulin pour y prendr' le meunier,
l i e meunier avait un sac assez grand :
Il a pris l'diable et l'a fourré dedans,
L ' a attaché à la rou' du moulin,
L ' a fait virer du jour au lendemain.

L e lendemain le diable se fâcha.


Il se renfla, et le sac déchira.
Il s'en va-t-à la fcnêt' du meunier :
95

" Va voir ton sac, il est tout déchiré. "


Et puis il dit au meunier en partant :
" Viens dans l'enfer, j e t'en ferai-z-autant. "
Il arrêta chez un cabaretier.
Mais, pour ce coup, il fut bien attrappé î
L e cabaretier l'a trouvé si gros,
S'est défendu de ces verr' et ses pots ;
Il lui en a tant fouté sur le corps,
Ah ! je crois bien que l'animal est mort.

ILS D I S E N T Q U E J ' A I M E L E S POMMES.


Ils dis' que j ' a i m ' les pommes
A la douzaine.
J'en aim' ni un', ni point,
A la douzain' que j ' a i m ' , qucj'aime ;
A la douzain' que j'aimerai.
Ils dis' que j ' e n aim' deusses
A la douzaine.
J'en aim' ni deux, ni un', ni point,
A la douzain' que j ' a i m ' , &c.
Ils dis' que j ' e n aim' troisscs
A la douzaine.
J'en aim'ni trois, ni deux, ni un', îii point,
A la douzain'que j'aime, &o
Il dis' que j ' e n aim' quatre
A la douzaine.
J'en aiin' ni quaf, ni trois, ni deux, ni un', ni point.
A la douzain' que j ' a i m e , &c.
On continue ainsi jusqu'à 12'
96

C A N O N S .

A 4 parties-

Frère Jacques,
Frère Jacques,
Lève-toi,
Lève-toi ;
Sonne les Tnatines,
Sonne les matines.
Dign' ding' don,
Dign' ding' don.

A 5parties.

Bonjour, Pierrot,
Bonjour, Michflt,
Tuons le coq ?
Tuons le coq 1
II ne fera plus :
Coq holà, coq holà ;
XI ne fera plus :
Coq holà, coq holà ;
Il ne fera plus :
Coq holà rieot.
97
A 6 parties*
Bom, bom, bom, bom,
Bom, bom, b o m , bom, bom,
Bom, bom, bom, b o m , bom, bom, bom,
E n t e n d s - t u le carillon ?
L e b o u r d o n , le carillon 1
E n t e n d s - t u le carillou ?

A 4 parties.

ScotUnd* s b u r n i n g ,
Scotland' s burning ;
L o o k ont,
L o o k ont.
F i r e î fire !
F i r e ! lire !
Pour on v/ater,
P o u r o n traler-

A 4 parties.
E n t e n d e z - v o u s aussi la cloche du moulin ?
B o m , jpom, b o m , boni, b o m ,
Bom, bom, bom, bom,
D i g u e d i g u c d i n d i n , diguediguedin*

A 4 parties.
Rataplan-taplan ! rataplan-taplan!
3Le t a m b o u r vous a p p e l l e , entendez-vous ?
L a c l o c h e q u i fait :
Bom, bom, bom, bom,
B o m , b o m , r a t a p l a n , rataplan*
M
9S

A 4 parties.
Ah ! la joli moulinet,
Qui fait tique-tique
Tique-tac, tic-taque, nuit et jour
Qui fait tique-tique-tique-tique-taque nuit et jour.

A 5 parties.
Kihil sub Sole, stib Sole Novum, nihil, Nihil.

A 4 parties.
Si l'on ose attaquer Mon pays et ses droits,
Je suis à la patrie, E t je défends ses lois.

A 3 parties. A 3 parties.
Grégoire est mort, Qui toujours dort
Ou bien il doi-îj A bien grand tort :
Dans son caveau, gai refrain
Près d'un tonneau ; Doit mettre en train,
XI a pris fin Par ses accents,
Cuvant son vin. Le fainéant. '

L E R E V E I L DU L A B O U R E U R .

Canon à 3 parties.
Debout, camarades :
L e coq a chanté,
Et sur nos bourgade»
Brille un ciel d'été.
99
Joyeuse l'aurore
Luit sur nos coteaux.
E t !e soleil dore
L'azur des ruisseaux*
Que l'on se dépêche ;
Au front les chapeaux;
En main pioche, pêche,
Corbeille et râteaux.
Au jardin les filles,
Au champ les garçons ; ^
Armes de faucilles,
Courons aux moissons.
Travaillons, mes frères,
Nous aurons gaîté,
Jours longs et prospères,
Vigueur et santé-
Bravant la tristesse,
Purs de tout remord,
Jusqu'à la vieillesse
Nous fuirons la mort.

TELALL1TA,

Par un dimanche au soir,


M'en allant promener,
Dana mon chemin reucontre
J
La boim' femm Jean Caycr-
Son petit tclallita, Ii(.a-tolalîîta 3

Lita-télallita, télallita,
Lita-télalUta.
100
Dans mon chemin rencontre
L a bonn' femm' Jean C a y e r -
E l l e m'a dit : Monsieur,
E n t r e z donc vous chauffer-
Son petit télallita, &c-

E l l e m'a d i t : M o n s i e u r ,
B n t r e z donc vous chauffer.
— C e n'est point votre feu
Que nous venons chercher.
Son petit télallita, &c.

Ce n'est point votre feu


Que nous venons chercher ;
C ' e s t de prendre avec vous
C e soir un bon souper.
S o n petit télallita, &c.

C'est de prendre a v e c vous


C e soir un bon souper.
•— T u n' mang'ras pas m a s o u p e ,
V a , m é c h a n t cordonnier.
S o n petit télallita, &c.
TABLE ALPHABÉTIQUE
du Supplément.

A h ! c ' é t a i t une biche 86


A h ! le joli moulinet ! 98
Ah ! qu' j ' a i m ' donc les omnibus ! 47
Ah ! quel nez ! ah ! quel nez ! 59
A h ! si mon inoine voulait danser "77
Anglais ( P ) économe 26
Anglais (1') touriste 35
A Saint M a l o , beau port de mer 71
Astronomanie ( ! ' ) 14
Bibournoise Oa) 91
Biche (la) 86
Boiteuse ( l a ) 82
B o m , bom, bom, bom, canon, 97
Bonhorom', bonhomm', sais-tu jouer 1 83
Bonjour, Pierrot, bonjour, Michot, canon, 96
B o u l é (bal chez) 72
Boule ( m a ) roulant 67
Cadet llousselle 49
C'est délirant S
C'est un nommé Martin 78
Collez votre œil à mon optique 14
P a n s les pays que j e parcours 1
Debout, camarades, canon, 9S
D é p a r t du conscrit • 48
D é p a r t pour la Californie 8
102

D e n i e r ' chez rions ya-t-un étang 67-69


Dimanche, après les vêpres, 72
Double-double 88
Enfin jé avais vu le Franco 26
En revenant du Canada 75
E n roulant ma boule 67
Entendez-vous aussi, canon, 97
Est-il rien sur la terre 60
Foin, paille, refrain, 18
Frère Jacques, canon, 96
Fringue, fringue 81
Frit à l'huile 79
Gamin de Paris (le) 42
Grand nez (le) 59
Grégoire est mort, canon, 98
Gnediguedindin, ou Mic-mic, 78
Guilleïï 51
Haow ! yes, qu'est-c'qui povait me dire 35
I-a-tla-tla 90
Il était, dans la ville 57
Il était un'bergère 65
Jl était un p'tit homme 51
Ils dis' que jaim' les pommes 95
I m'aété pris hier au soir, ici, 89
J'ai c't-épaule qui m'branle • 75
J'ai du bon tabac 53
Jamais je m'en irai chez nous 70
Je suis t'un pauvre conscrit 48
J'irai m'plaindre au roi 28
J'snis troupier dans la caval'rie 40
Juif-errant (complainte du) 60
La bibournoise 91
La gingue me prit 93
La moutonne est dans un fossé 84
103

l i a rigailte _ S5
Le diabî' s'en va dans la vill'de Poquier 94
I J C pri-mier jourde mai, labouré, 85
Ma boule roulant 67
. Madame m'envoyait au marché 88
Mais ! mais ! mais ! 84
Maladie oui-da (la) 73
Malbi'otiirh s'en va-t-en guerre 55
Ma m e t ' m'a donné quat'sous * 33
Mario Pnniçon 89
Ma vieille tante opportune 32
Ménage (le) d'une vieille fille 12
M'en revenant de la Vendée 70
Mère Jocrisse (la) 30
Métempsycose (la) 4
Meunier (le) 76
Mic-mie 78
Mine d'or (la) 8
Mon mari est ben malade 93
Mon moine 77
Mon pauv'Blugeon, i faut que j ' t e dise 4
Mon père a fait bâtir maison 79-81
Nïhil snb sole, canon, 98
Nous irons sur l'eau, refrain, 71
Où'c'rtu'est l'bon temps 18
Oui, j ' t ' e n goutt' 86
Pardon, excus', capitaine, 28
P a r un dimanche après midi 90
Par un dimanche au soir , 99
Pétition du père Trafaigar ''. • 23
Petit Jean l'ête-dure 18
Petit volontaire (le) 7
Pierre Nicolas 75
10-4
Quand c'est lundi soir
Quand j'étais ch«z mon père
Quand la boiteus' s'en va-t-au bois
Quand le mari s'en riut du bois
Quand le meunier revint du marché
Quat' sous (les) du p'tit Nicolie
Qui toujours dort, canon,
Kan-plan-plan-plan, plan, plan,
Rataplan-taplan, canon,
Iléreil (le) du laboureur, canon,
Rigaille (la)
Ron-ron-ron, petit patapon
Scotland' s buraing, canon anglais,
Si l'on ose attaquer, canon,
Son petit télallita, refrain,
Sur Je coin d'un coin, refrain,
Sur le haut, sur le bas, refrain,
Télallita
Tout meurt dans le siècl' de la lumière
Trépas du chat
Tribulations (les) d'un anglais
Trompette (la)
Un tour du diable
Vapeur (la)
Vive le roi-z-et la reine, refrain,
Vogue, beau marinier, vogue, refrain
7
Voui, contre nous tout l'mond conspir
Vous m'amusez toujours, refrain,

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