Documentos de Académico
Documentos de Profesional
Documentos de Cultura
Édito
Ce numéro de Batailles Aériennes vous propose de revenir sur un épisode de la Seconde Guerre mondiale qui a beaucoup
marqué les esprits dans le Royaume-Uni et plus particulièrement dans les grandes villes industrielles : le Blitz. Toutefois, ayant
publié trois numéros sur la Bataille d’Angleterre, nous abordons logiquement la période du Blitz à partir de janvier 1941. Quand
les Allemands ne purent faire plier le Royaume-Uni et l’amener à des négociations de paix, ils décidèrent de frapper les villes
afin de malmener le moral de la population tout en continuant à détruire des objectifs industriels. Cette tactique produisit l’effet
contraire : la population britannique resserra les rangs et décida plus que jamais qu’il fallait résister. L’attaque délibérée des grandes
villes où résidait une population nombreuse sera plus tard adoptée par les Alliés, avec les destructions massives que connurent les
villes allemandes. Hitler, au début de 1941, avait déjà un autre objectif en tête : l’attaque de l’URSS. Pour ce faire, il allait devoir
largement dégarnir ce front occidental ; l’Allemagne n’avait pas les moyens de faire la guerre sur deux fronts. On peut se demander
ce que croyait le dictateur allemand en ouvrant ce second front, alors qu’il savait pertinemment que les Britanniques ne cèderaient
pas et qu’ils allaient tôt ou tard se renforcer. Cette erreur fut fatale à son pays. Mais en attendant, la population britannique allait
beaucoup souffrir de ces bombardements nocturnes...
La seconde partie du “Blitz” paraîtra dans le n° 82 de votre magazine, le n° 81 étant consacré à l’année 1917 de notre saga sur la
Première Guerre mondiale.
Bonne lecture à tous.
Michel Ledet.
En couverture et ci-contre :
dans la nuit du 14 octobre 1940,
une bombe allemande traversa la
chaussée pour exploser dans la
station de métro de Balham, dans
Balham street, au sud de Londres,
tuant 68 personnes. Le bus, de la ligne
n° 88, qui roulait sans aucun éclairage
avec le black-out, chuta alors dans le
cratère causé par l’explosion.
La reproduction, même partielle, des articles et des illustrations de ce Pour en savoir plus et commander nos produits
magazine est soumise à autorisation préalable de l’éditeur et des auteurs. sur notre nouveau site (paiement sécurisé)
www.avions-bateaux.com / www.aircraft-navalship.com
4 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
le « blitz »
(1e partie : du 1er janvier au 31 MARS 1941)
Jean-Louis Roba
Dès la fin de 1940, Après avoir pris largement part à la surprenante mois de la Battle of Britain dont le parcours
la Luftwaffe s’était victoire éclair sur la France (fin juin 1940), était éventé par Ultra. Malheureusement pour la
tournée vers le Blitz, l’aviation militaire allemande allait être Luftwaffe, ces actions aléatoires et au coup par
les bombardements directement engagée sur la Grande-Bretagne. coup survenues trop tard ne purent influencer le
de nuit de la Cependant, lors de cette campagne aérienne, sort de la bataille (‘Too little, too late’, comme
Grande-Bretagne.
la Luftwaffe allait affronter un ennemi aussi disent les Britanniques… !). Mais, lors du Blitz,
Les bombardiers y
participant, comme ‘sournois’ qu’inconnu : Ultra, l’appareillage les appareils allemands, opérant isolément puisque
les He 111 présents décryptant les messages (principalement de la évoluant dans l’obscurité, allaient de la même
sur ces documents, Luftwaffe) transitant par la machine de codage manière désorienter la défense de la RAF et réduire
voyaient leurs flancs allemande Enigma. Dès lors, bien au courant dès la largement l’efficacité d’Ultra.
et parties supérieures veille des objectifs du lendemain de l’adversaire, Vers le mois d’octobre 1940, Ju 87 et Bf 110 avaient
recouverts de peinture la RAF put concentrer adéquatement ses chasseurs été retirés du front de la Manche pour être envoyés
noire lavable. Les sur les formations de bombardiers tandis qu’au soit dans le Reich, soit sur le théâtre méditerranéen
codes et même sol la DCA, ravitaillée en urgence en munitions, au sein du tout récent X. Fliegerkorps. La
les marques de
tirait de tous ses tubes sur les intrus. Les pertes Lehrgeschwader 1, équipée de Ju 88, qui avait
nationalité (croix et
svastika) étaient ainsi sur l’Angleterre s’ajoutant à celle de la campagne fort bien combattu les mois antérieurs, avait été
dissimulés, rendant à l’ouest forcèrent les Kampgfgeschwader fort divisée, ses II. et III./LG 1 ayant été transférés en
leur identification malmenées à se réfugier dans le ‘Blitz’, les Sicile à la fin de 1940.
difficile, voire attaques nocturnes des villes et usines stratégiques.
impossible ! Si ces bombardements allaient parfois manquer de
précision, ils allaient indirectement court-circuiter
l’avantage britannique acquis grâce à Ultra. À
la fin de la Bataille d’Angleterre, les stratèges
allemands avaient lancé de jour des Jabos
(chasseurs bombardiers) sur l’Angleterre mais
également des bombardiers isolés lors d’‘Einzel-
Zerstörereinsätze’, des attaques ponctuelles
visant des objectifs précis, souvent choisis en
dernière minute après consultation de la météo.
Les chasseurs britanniques ne pouvaient dès lors
que rarement intercepter ces ‘ions libres’ bien
différents des formations compactes des premiers
5
La KG 2 était toujours
équipée de Dornier
17 devenus pourtant
quelque peu désuets
à cette époque. On
note la bande (dont
la couleur identifiait
l’escadrille ou Staffel)
sur le nez, l’insigne
distinctif de cette
escadre.
7
Höhne) était à Evreux avec le I./KG 54 (Hptm Jobst son seul Stab (Obstlt Stefan Fröhlich) basé à Le Hptm Heinrich
Heinrich von Heydebreck). Le II./KG 54 était à St Cormeilles avec une poignée de Do 17 et de Ju Lau, Kommandeur
André (Major Erhart Krafft von Dellmensingen). 88, le reste de l’escadre étant en Allemagne pour du I./KG 30, dans
son Ju 88. À noter
L’escadre volait depuis peu sur Ju 88. effectuer sa reconversion sur Ju 88.
l’insigne au ‘parapluie
-La KG 55 (menée par l’Obstlt Hans Korte, puis -La KG 77 (Obstlt Johann Raithel) semble pour sa de Chamberlain’ qui
par l’Obstlt Benno Kosch fin janvier) avait son part avoir dû mener à bien cette mutation sur le front aurait été celui de la
Stab et son III./KG 55 (Hptm Heinrich Wittmer) car ses effectifs rassemblaient des Do 17 et des Ju 88. première escadrille.
à Villacoublay. Le I./KG 55 (Major Joachim Le Stab, le I./KG 77 (Major Joachim Poetter) et le
Roeder) était à Dreux et le II./KG 55 (Major III./KG 77 (Major Kurt Handke) étaient à Laon, le II./
Hans Joachim Gabriel) à Chartres. Un IV./KG 55 KG 77 (Major Franz Behrendt, puis Major Dietrich
d’écolage (Hptm Rudolf Kiel) avait été envoyé à Peltz en mars 41) étant pour sa part en Belgique à As.
Dijon-Longvic. Un Gruppe d’écolage, le IV./KG 77, basé à Couvron,
-La KG 76, au début de 1941, était réduite à semblait avoir déjà perçu des Ju 88.
Visite du maréchal de
l’air Hermann Göring
au K.Gr. 806 basé à
Carpiquet.
8 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Ju 88 C du I./NJG -La LG 1 avait, comme il l’a été dit, été -Le K.Gr. 806 , ex Kü.Fl. Gr. 806, (Major Hans
2 à Gilze-Rijen. démembrée. Ne restait plus à Bricy que le I./LG 1 Emig) avait connu la même trajectoire que le 606.
(Hptm Kuno Hoffmann) équipé de Ju 88. Gruppe et était basé à Caen-Carpiquet.
À ces escadres s’ajoutaient trois Gruppe
‘spéciaux’. Le bombardement n’était bien sûr pas tout. La
-Le K.Gr. 100 (Hptm Kurd Aschenbrenner) reconnaissance, primordiale pour la préparation
spécialisé dans le guidage radio était avec ses He ou l’étude subséquente des attaques, s’appuyait
111 à Vannes-Meucon et servait d’éclaireur. Pour surtout sur des escadrilles dispersées en Belgique
cette tâche, le Gruppe ‘rivalisait’ avec le III./KG et en France. Il va de soi que les Hs 126, avions
26 opérant de même avec des appareillages radios de reconnaissance rapprochée à aile haute, étaient
1. ObdL = Oberkommando der sophistiqués. devenus inappropriés pour opérer sur l’autre rive
Luftwaffe ou commandement -Le Kü.Fl.Gr. 606, ex-unité aéronavale menée par de la Manche. En 1940, la plupart des Staffeln
supérieur de la Luftwaffe. l’Obstlt Joachim Hahn, avait troqué ses hydravions de Fernaufklärung (reconnaissance à longue
2. L’Erprobungsgruppe 210
avait été créé le 1er juillet 1940 contre des Ju 88 et était à Lanion. L’unité était distance) avait abandonné le trop vulnérable Do
à Köln-Ostheim afin de tester également désignée comme Kampfgruppe 606. 17 P, ces ‘crayons volants’ étant progressivement
les capacités des avions de
chasse au bombardement ;
ce groupe se composait à sa
création de trois escadrilles,
soit deux équipées de Bf 110
et une de Bf 109.
3. Les 1. et 3./NJG 2 étaient en
principe équipées de Ju 88 C
tandis que la 2./NJG 2 alignait
des Do 17 Z-7 et Z-10.
Toujours à Gilze-
Rijen, il s’agit cette
fois d’un Dornier Do
17 Z-7 de la 3./NJG
1 ; cette version n’eut
guère beaucoup de
succès.
11
remplacés par des Ju 88 et des Bf 110 ; même si Melsbroeck, la 3e à Eindhoven (puis à Soesterberg) Un Bf 110 de la 7./LG
des He 111 étaient encore employés à l’occasion. et la 5e à Amiens. 2 à Evere. Au début de
La 3.(F)/121 était basée à Châteaudun et la 4. Les 1.et 3. (F)/123 semblent surtout avoir opéré de 1941, cette escadrille
(F)/121 à Villacoublay (avant son départ en mars Buc. La 2e escadrille se partageait entre Cherbourg quittera la Belgique
1941 vers les Balkans). et les îles anglo-normandes mais partira en février pour la Roumanie.
Les 1. et 4. (F)/122 étaient à Evere, la 2e escadrille à 1941 en Méditerranée.
Un Bf 110 de l’Erpr.
Gr. 210 dans le nord
de la France. Il
est équipé de deux
bombes ventrales.
Les Zerstörer de
l’unité étaient chargés
d’attaquer des
objectifs ponctuels
(usines, navires, …) et
opéraient souvent par
paires (Rotte).
12 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Des Defiant du N°
264 Sq. probablement
au début de 1941.
Engagés en chasse de
nuit, ils arborent leur
livrée noire.
Janvier 1941
Le 1er janvier, la RAF entame fort mal l’année. gauche fut atteint. A ce moment-là, le bombardier
En fin d’après-midi, neuf Hurricane du N° 111 Sq. alluma ses feux de position jetant le doute sur
patrouillent sur l’Écosse avant de se diviser en trois sa nationalité. Le Sgt Chandler tira une fusée
sections. L’une, menée par le Sq/Ldr Arthur Biggar d’identification mais il lui fut répondu par une
(un vétéran de la Bataille d’Angleterre) intercepte rafale de mitrailleuse qui passa bien trop près de
à la nuit tombée un Ju 88 de reconnaissance venu sa tourelle. Puis, l’avion éteignit ses feux et piqua
probablement de Scandinavie ou du nord de vers l’abri d‘un rideau de brouillard stagnant en
l’Allemagne. Les mitrailleurs se défendent fort contrebas. Endersby ne put le suivre mais nota
bien puisque l’appareil de Biggar est sérieusement peu après des lueurs permettant de penser que
atteint. Escorté par ses deux ailiers, il reviendra le bombardier s’était déchargé en urgence de sa
‘crasher’ son appareil à Montrose, étant lui-même cargaison ».
indemne. De leur côté, les Nachtjäger du I./NJG 2 remportent La tourelle arrière
La nuit suivante ne voit que quelques incursions de probablement deux succès. Un Wellington du d’un Defiant disposait
la Luftwaffe. La KG 2 devait opérer sur des usines N° 301 (Polish) Sq. revenant de Brème explose d’un armement
dans le sud de l’Angleterre. Le mauvais temps sur Colleby Grange alors qu’il allait se poser à capable d’infliger de
ne permet cependant pas cette intrusion et les Do Digby (équipage tué). Son vainqueur, le Lt Rudolf sérieux dégâts aux
17 devront dès lors se rabattre sur des navires Stradner, ayant eu son appareil probablement bombardiers de la
cabotant le long de la côte anglaise. Des coups au atteint par des débris ou des tirs adverses, reviendra Luftwaffe.
but auraient été observés. Un Do 17 est perdu avec
son équipage pour une cause inconnue.
En ce début de 1941, la chasse de nuit britannique
s’appuyait encore largement sur des Boulton
Paul Defiant, ces chasseurs dont on avait dit
monts et merveilles lors de leur entrée en service
mais qui s’étaient fait étriller l’année précédente
sur le continent. Versés à la chasse de nuit,
ils allaient remporter quelques succès vu leur
puissant armement de tourelle (des mitrailleuses
quadruples). Et, justement, cette nuit-là, un
équipage du N° 264 Sq. faillit remporter la
première victoire de l’année en interceptant un
Ju 88 sur Beachy Head. Selon P. Caygill : « Le
Defiant lui donna la chasse mais l’intrus fut alors
pris sous le feu de canons antiaériens, ce qui le
força à virer vers le sud-est et à se rapprocher du
Defiant. Le Sgt P. Endersby put se placer derrière
lui à cent cinquante mètres et son mitrailleur
ouvrit le feu avec ses quatre Browning. Le moteur
14 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Profitant de la le ‘crasher’ à Gilze-Rijen. L’appareil sera déclassé de Dreux pour abattre les bombardiers au retour
couverture de nuages, mais les trois aviateurs seront indemnes. Un autre réclame un Heinkel 111. Il pourrait s’agir d’un
des Dornier 17 volent Wellington de ce même 301e s’écrase à Wellingore appareil du Stab/KG 55 revenu se poser très
vers l’Angleterre. (cinq tués), étant également revendiqué par le I./ endommagé (60%) à Villacoublay. Il se serait
NJG 2 (bien que l’on invoque parfois une faute agi ici de la première victoire émise par un ‘night
de pilotage). Les autorités britanniques durent intruder’ sur le continent.
être marries de ces succès et les deux pertes Le 3 janvier, malgré divers survols allemands des
seront par la suite attribuées ‘à une tempête de îles britanniques, aucune interception diurne ne
neige brutalement levée’. Cette version ‘arrangée’ put avoir lieu. De nuit, Bristol est soumis à une
est reprise encore actuellement dans bien des attaque d’environ deux cents bombardiers. Un
historiques du N° 301 Sq. Hurricane du N° 87 Sq. revendiqua un bombardier
‘damaged’. Selon son radio/radariste habituel,
Le 2 janvier, de jour, deux Ju 88 sont pourchassés le Sgt Cecil ‘Jimmy’ Rawnsley, le F/Lt John
sur la côte sud-ouest, l’un d’eux étant revendiqué Cunningham, pilote de Beaufighter du N° 604
endommagé par le N° 234 Sq. Un He 111 du I./KG Sq. et futur as, aurait abattu un He 111 cette nuit-
4 revient avec des dégâts de 20% et un blessé à là : « Le 3 janvier 1941, John abattit un Heinkel
bord lors d’une mission (de reconnaissance ?) près lors de la patrouille crépusculaire. Il volait avec
de la Humber. Peut-être par des tirs de DCA ? Phillipson et tous deux étaient sur la Manche à
De nuit, Cardiff subit une sérieuse attaque une soixantaine de kilomètres de la côte lorsqu’un
pour laquelle le K.Gr. 100 opéra en ‘marqueur intrus leur fut signalé dans le nord. John fit route
d’objectifs’. Un Beaufighter du N° 604 Sq. vers lui et, peu après, aperçut un Heinkel à quatre
revendique un He 111 détruit. Un pilote de cents mètres devant lui mais beaucoup plus haut.
Hurricane du N° 87 Sq., un des Squadrons de Il faisait si clair que, si le Beaufighter s’était
chasseurs diurnes, opérant de nuit (cf. encadré) approché davantage, sa silhouette détachée sur
signala pour sa part avoir avarié un appareil sur les nuages l’aurait fait repérer. Il attendit donc
Bristol. Un Do 17 Z de la 8./KG 2 revient de son heure en pistant discrètement l’adversaire.
Cardiff endommagé à 15% avec deux blessés à Phillipson enclencha son radar pour parer à
bord. Deux He 111 de la KG 55 sont légèrement toute éventualité et bien lui en prit car John dut
endommagés à Villacoublay mais on ne peut détourner les yeux du Heinkel pour régler son
confirmer que ce fut en combat. viseur, perdant alors son contact visuel. John
Un Blenheim du N° 23 Sq. engagé sur le secteur décida d’attaquer à une quinzaine de kilomètres
15
du petit port de Lyme Regis. Un des canons de guidage sur la Manche. La baie de Bristol et le Un anonyme Heinkel
s’enraya mais l’autre déchargea toute sa boite de port sont nettement visibles. Nous pouvons vérifier He 111 sur un terrain
munitions sur le Heinkel. Quelque chose de lourd le bon travail du Kampfgruppe 100 en amont. français, bénéficiant
se détacha du bombardier et vint heurter le ventre La cible est identifiée, les bombes sont larguées, de la protection toute
du Beaufighter. La fin du bombardier ne fut en rien virage à gauche à 90° puis nous mettons le cap relative des murs pare-
spectaculaire. Un nuage de fumée blanche jaillit sur la maison ». éclats.
de son moteur gauche. Il vira lentement de côté Parti ‘chasser’ sur le continent, un Blenheim
et perdit de l’attitude. Il plongea graduellement du N° 23 Sq. ne revient pas en Angleterre,
et disparut dans les nuages en piqué. Pour le premier appareil de l’unité ‘missing in action’ et
tableau de chasse, c’était dommage car John ne probablement tombé en mer (un auteur suggère
put revendiquer qu’une victoire probable ». Elle qu’il aurait pu être abattu par erreur sur la Manche
lui sera accordée mais on ne trouve qu’un Ju 88 du par un bombardier britannique !). Seul le pilote
III./KG 1 qui semble avoir été atteint par la DCA. sera capturé.
Un aviateur de la 3./KG 27 écrira : « De nouveaux Revenant d’une attaque de Brème, un Whitley du
objectifs ont été assignés. Ce soir, nous devons N° 10 Sq. est endommagé près de Flamborough
voler vers Bristol pour y détruire les installations Head par un ‘intruder’, un Ju 88 C de la 3./NJG
portuaires. Le ‘briefing’ a eu lieu comme à 2. Ce bombardier sera néanmoins attribué comme
l’habitude. Décollage de Tours à 22h 00. Altitude première victoire certaine au Lt Gerhard Böhme.
d’attaque : quatre mille mètres. La visibilité est Un Beaufighter de la FIU (Fighter Interception
bonne. Une nuit d’hiver claire et froide avec peu Unit) est détruit en se posant à Ford mais ses deux
de nuages. Nous nous fions également au système occupants sont indemnes.
Un He 111 de la KG
53 sur le front de la
Manche. Il est plus ou
moins protégé de la
neige par des bâches.
Le 4 janvier, vers 14h00, le Do 17 Z-3 5M+J de Les 5 et 6 janvier, le mauvais temps bloque toute
la Wekusta 26 est pris à partie près de Portland activité diurne et nocturne d’importance. Quelques
par des Spitfire du N° 152 Sq. et abattu en mer appareils allemands opèrent cependant en
avec son équipage au sud-ouest des Shambles par reconnaissance ou en mouillage de mines. Ainsi,
le P/O Eric Mars. Cette victoire aurait cependant la nuit du 5 au 6, parti vers Londres, un Do 17 de
été partagée par moitié avec la DCA navale de la 8./KG 2 est contraint de se poser en urgence
Portland. Un Bf 110 est revendiqué endommagé à Cambrai, victime d’un problème technique, et
par le N° 65 Sq. s’endommage à 35%. Cette même nuit, un pilote
De nuit, Bristol concentre toute l’attention du N° 616 Sq. revendique un Do 17 abattu sur le
d’environ cent cinquante bombardiers de la Wash. Il pourrait s’agir d’un appareil du III./KG 3
Luftwaffe. Des mines sont également larguées dans revenu se ‘crasher’ à St Trond sans mal pour son
le proche détroit. Malgré une défense solide de la équipage.
chasse et de la DCA, aucune victoire certaine de la Le 6, les He 111 du II./KG 26 quittent Amiens,
RAF ne sera revendiquée. Un pilote de Hurricane partant en Sicile (Catane) pour renforcer le
du N° 87 Sq. affirme avoir endommagé un Ju 88. X. Fliegerkorps, le conflit en Méditerranée
Peut-être un avion du K.Gr. 806 posé en urgence s’intensifiant.
à St Lô ? Un Do 17 Z de la KG 2 s’endommage à Le 7 janvier, des Spitfire du N° 421 Sq. combattent
l’atterrissage à Épinoy. successivement deux Ju 88 opérant sur la Manche.
Placement d’une
bombe sous le ventre
d’un He 111. On note
la peinture noire
lavable appliquée lors
des vols de nuit.
17
Bristol Beaufighter Mk.1F T4638/NG-F du N° 604 Squadron, basé à Middle Wallop au début de 1941.
Le travail des
mécaniciens n’était
pas une sinécure en
pareilles conditions
climatiques…
de trois semaines de congé pour les fêtes de fin Nous avons survolé la mer laissant derrière nous
d’année. Il est de corvée cette nuit-là : « J’étais les vagues lueurs de la terre ferme et avons mis
revenu hier et aujourd’hui, je dus déjà prendre le cap droit sur l’embouchure de la Tamise tout
part à une mission : un largage de mines dans la en gagnant progressivement de la hauteur. À trois
Tamise ! Je décollai à 22 h 02. Mon observateur, mille mètres, nous avons atteint l’altitude idéale.
Hans, leva la main pour indiquer que tout était La vue était bonne et la défense antiaérienne ne
en ordre. Les lampes défilèrent de plus en plus nous avait pas repérés. Les mines furent larguées
vite tout au long de la piste. Je tirai le manche et mon mécanicien de bord, Theo, me signala que
Un Ju 88 C-4 du I./ peu avant d’arriver à la lampe rouge signalant les deux parachutes s’étaient bien déployés. Hans
NJG 2 à Gilze-Rijen. qu’il ne restait plus que deux cents mètres. Mon nota l’heure et marqua le point de largage sur
On remarque le Ju 88 se montra très paresseux dès que nous une carte. Ainsi allégé, je lançai les moteurs et
camouflage très fourni eûmes pris l’air et se lança dans un tangage très nous revînmes à la maison en volant à deux cents
des installations. désagréable. Je pus le stabiliser avec difficultés. mètres de la surface des flots, hors d’atteinte de
la DCA ».
Un Defiant du N° 264 Sq. signalera avoir
endommagé un Ju 88. Un Ju 88 C de la 3./NJG
2 non revenu aux Pays-Bas sera porté disparu
avec son équipage. Il aurait cependant été
probablement victime de la DCA côtière. Un autre
équipage est porté disparu, celui d’un He 111 du
II./KG 27. Enfin, un He 111 de la KG 53 doit se
poser en urgence en Artois, probablement à son
retour d’Angleterre. Il est détruit à 70% mais son
équipage est indemne.
Un nouveau Blenheim du N° 23 Sq. est perdu lors
d’une mission ‘intruder’ sur Poix et Beauvais. Deux
aviateurs sont faits prisonniers. L’Uffz Heinert
de la 7./KG 27 doit mentionner ce fait quand il
écrit : « Des avions ‘perturbateurs’ britanniques
affectionnaient les attaques de nuit de nos
aérodromes proches de la côte. Ils essayaient de
‘coincer’ nos bombardiers au retour. Pour ce faire,
ils se basaient sur les lumières des aérodromes.
Nous faisions de même sur l’Angleterre. Une
nuit, au retour, une bombe explosa près de notre
appareil. Un bimoteur ennemi passa au-desssus
de nous. Il fut pris dans le faisceau de plusieurs
projecteurs et abattu par des canons de 2 cm ».
Le 10 janvier, de jour, un Ju 88 est engagé par deux
Hurricane du N° 145 Sq sur Littlehampton. Il est
vu s’écraser en mer mais il semble que cet appareil
du III./KG 1 soit revenu, quoique endommagé, à
Arras. Un autre Ju 88, mais de la 2.(F)/123, le
4U+FK, aurait été abattu par la DCA tombant au
large de Newquay avec tout son équipage.
La nuit, Portsmouth, cible principale de la
Luftwaffe, est durement frappée. Trois Ju 88 du
I./KG 51 sont concomitamment envoyés sur des
usines d’aviation en ‘Störangriffe’ (le pendant
nocturne des ‘Einzel-Zerstörereinsätze’ de fin
1940); cela avec des fortunes diverses. Le P/O
Peter Dunning-White du N° 145 Sq. revendique un
Ju 88 devant être un appareil du I./KG 51 revenu
endommagé à Villaroche. Peut-être celui de l’Oblt
Küchle de l’Edelweissgeschwader qui a laissé un
rapport sur l’attaque d’un chasseur de nuit lors de
cette mission : « Déjà en approchant de Fécamp,
on apercevait au loin les incendies de Portsmouth.
L’attaque se fit du sud-est vers le nord-ouest. Après
avoir largué les bombes à 21h08, nous avons
viré vers la gauche pour reprendre la direction
de Fécamp. L’objectif était couvert de nuages à
mille mètres tandis que l’île de Wight était bien
Un équipage de Ju 88 se prépare pour une
mission sur l’Angleterre.
19
Comme le rappelait l’un des grands as du Fighter Command James ‘Johnnie’ Johnson, lors du bombardement nocturne de Coventry
le 14 novembre 1940, un unique Blenheim de chasse de nuit fut la seule riposte que la RAF put opposer à l’attaque massive de la
Luftwaffe. Comme la Nachtjagd de l’autre côté de la Manche, les nightfighters britanniques allaient devoir progressivement ‘se
former sur le tas’ en testant toutes les tactiques possibles. Selon Johnson : « Pour accroître l’efficacité de la défense nocturne, les
escadrilles de chasseurs diurnes furent chargés d’entraîner des pilotes au combat de nuit. En théorie, les Spitfire et Hurricane
devaient patrouiller à moyenne altitude au-dessus des objectifs de l’ennemi ». Comme on le sait, ces objectifs étaient le plus souvent
éventés grâce à Ultra. Ce qui, bien sûr, ne pouvait suffire. « La DCA avait pour instruction de tirer bien au-dessous de notre plus
basse altitude. De plus, les tours de contrôle devaient maintenir nos chasseurs bimoteurs engagés en mission nocturne tout à fait
en dehors des zones patrouillées par les Spitfire et Hurricane. En théorie, nous ne devions prendre l’air de nuit qu’au moment
où la lune nous permettait de repérer les bombardiers ennemis. Mais, dans la pratique, nous dûmes voler par des nuits noires
durant lesquelles nous étions loin d’être rassurés. Les chasseurs régulièrement affectés aux vols de nuit étaient équipés de radar et
emportaient des opérateurs habiles travaillant en liaison avec le contrôle. Leur technique était scientifique et présentait un contraste
marqué avec nos opérations à l’aveuglette. Nous eûmes quelquefois à participer à des missions alors que les bombardiers ennemis
avaient illuminé leurs objectifs et provoqué de vastes incendies. Il est arrivé que des pilotes régulièrement affectés aux vols de nuit
inscrivent des victoires à leur tableau de chasse mais aucun membre de notre 616e escadrille n’eut jamais la chance de remporter
une victoire nocturne et bien peu même eurent l‘occasion d’utiliser leurs mitrailleuses ». Et de raconter une confusion qui faillit
tourner à la catastrophe lorsqu’un Hurricane fut pris par un pilote britannique pour un… Heinkel 111. « Nous ne fûmes jamais au
point pour ce genre de travail qui était en totale opposition avec notre entraînement. Le jour, nous vivions et volions en équipe, en
escadrille et à l’échelon du groupe. Mais, la nuit, nous ressentions une étrange sensation d’isolement et avions conscience de la
limite de nos moyens ».
Ces réticences étaient largement partagées par un autre as, le F/Lt Kenneth McKenzie alors au N° 501 Sq. « Nos vols nocturnes
allaient débuter le 3 janvier dans des conditions de froid hivernal avec de la neige et une visibilité très réduite. Nous devions amener
nos appareils à Charmy Down, un aérodrome satellite de Colerne où était basé le N° 87 Sq. de chasse de nuit mené par le Sq/Ldr Ian
(Widge) Gleed. Nous avons gagné nos quartiers à Colerne qui étaient bien différents de ceux de Kenley. Ils étaient sales, étouffants
vu la fumée dégagée par des poêles et mal équipés. Nous nous asseyions en rond avec nos vestes Irvin ou nos combinaisons de vol,
discutant, jouant aux cartes ou tentant de glaner des informations auprès de pilotes de monomoteurs plus expérimentés que nous
dans la chasse de nuit : le Squadron Leader Gleed, le Flight Lieutenant Smallwood, Roddy Rayner, Roland Beamont et d’autres. La
perspective d’un succès était peu envisageable pour des pilotes habitués aux ciels clairs, à une multitude d’ennemis et des retours à
la base en se fiant à des repères au sol. Nous allions beaucoup apprendre des gars du 87e qui eux-mêmes avaient été jetés dans cette
bataille nocturne. Nous quittions des baraques illuminées pour entrer dans le noir le plus absolu et dans le froid, nos yeux ‘habitués’
à l’obscurité après avoir porté des lunettes spéciales pendant une demi-heure. Nous gagnions nos appareils dans l’humidité et la
boue et décollions isolés avec peu de fanaux pour nous guider lorsque nous prenions l’air. Notre direction devait être confirmée
par des lampes disposées au sol mais, ou bien elles n’étaient pas allumées, ou bien nous ne pouvions les apercevoir dans la brume.
Les zones devant être couvertes étaient Bristol, Portsmouth, Southampton d’un côté, et de l’autre Cardiff et Swansea. Les ports et
les usines d’aviation disposaient d’une défense renforcée avec projecteurs et batteries de DCA parfois renforcés par des barrages
de ballons montant à six mille cinq cents pieds. Nous étions censés opérer en accord avec ces défenses au sol. Mais en réalité, elle
laissa souvent à désirer. En pleine patrouille, engoncé dans un habitable étroit et non chauffé, avec un large pare-brise et un viseur
qui bloquait la vue vers l’avant, cela sans disposer d’un radar embarqué, distrait par des instruments mal éclairés et un inconfort
général, la chance de découvrir un ‘raider’ ennemi était minime. Grâce à la lueur de la lune, c’était parfois envisageable. Encore
fallait-il l’identifier et parvenir en bonne position. On allait découvrir que la ‘vue périphérique’ était plus importante de nuit que de
jour. Regarder devant soi avec une attention concentrée était souvent improductif. Il fallait scruter la nuit de manière plus détachée.
Lorsque les nuages dominaient, pour repérer un ennemi, il fallait profiter du rougeoiement des incendies au sol, des explosions de
bombes ou des faisceaux des projecteurs. De temps à autre, un contrôleur au sol nous guidait adéquatement vers un ennemi. Mais,
même ainsi, notre vision demeurait limitée ».
Le futur grand as de la chasse Johnnie Johnson entamera sa carrière Des pilotes du N° 85 Sq. (dont le Sq/Ldr Townsend) avec
dans la RAF par des missions de nuit. les lunettes spéciales censées renforcer la vision nocturne.
20 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Whirlwind du N°
263 Squadron dans la
neige, durant l’hiver
1940-1941.
Un membre
d’équipage d’un
Dornier 17 aux
aguets derrière sa
mitrailleuse.
21
détruits, je fis larguer la verrière de l’habitacle garde avec nos mae-west, prêts à prendre l’air
pour permettre une évacuation rapide. Mais tout au premier signal. (…) Le téléphoniste nous cria
se passa bien. L’avion dérapa mais s’arrêta en fin de décoller. Je me précipitai dans la carlingue.
de course et l’équipage put le quitter sans mal. Le décollage ne fut en rien facilité par un fort
On releva trente-huit impacts de projectiles. Le vent de côté. Nos instructions étaient de survoler
pneu droit avait été détruit. L’importance des l’étendue neigeuse des nuages pour trouver un
coups laissait penser à des obus explosifs. Le toit ciel dégagé au-dessus de la mer du Nord. Nous
blindé de l’habitacle avait correctement encaissé devions repérer un bombardier bimoteur isolé.
les coups. L’hélice de droite avait été atteinte à Très au-dessous de moi, j’aperçus son objectif, un
deux endroits ». convoi de vingt navires faisant route vers le sud.
Le 11 janvier, on ne relève aucun combat diurne. L’interception fut parfaite. Nous avions le soleil
Tout au plus, une poignée de chasseurs allemands se dans le dos et survolions le Dornier 17. Mais il
hasarde sur le Kent pour mitrailler des aérodromes. nous aperçut tandis que nous piquions sur lui
Le F/Lt John
Un Spitfire du N° 92 Sq. est endommagé à et il vira rapidement en direction des Pays-Bas.
Cunningham, du N°
Manston. Trois avions d’entraînement sont ‘Cocky’ se lança à sa poursuite et je le suivis. Je
604 Sq., volait sur
endommagés/détruits à Bramcote par des Bf 110. pensais que le Dornier était à ma portée et ouvris
Bristol Beaufighter.
Cela sans perte humaine. le feu de trop loin, l’erreur classique du débutant.
Il termina la guerre
De nuit, Londres est visée par quelque cent Le mitrailleur ennemi décocha de longues rafales.
avec 20 victoires dont
quarante-cinq bombardiers tandis qu’une poignée Les balles traçantes passèrent au-dessus de mon
16 remportées sur
d’autres appareils largue des mines à Bristol et Spitfire. Je décrochai et, lorsque je fus à deux cents
Beaufighter.
sur la côte occidentale. Le N° 65 Sq. revendique mètres, je virai pour lancer une nouvelle attaque.
une victoire. Probablement sur un Ju 88 du II./KG Je me rapprochai avant de déclencher mon tir car
51 revenu se ‘crasher’ à Arques (trois tués). Un j’avais remarqué que le train du Dornier avait été
He 111 de la KG 53 doit se poser en urgence à touché. Une fumée blanchâtre sortait du moteur
Zandvoorde, victime de la DCA. Le bimoteur est gauche et le mitrailleur avait cessé ses tirs. Cette
détruit à 80% (un blessé). fois, je m’en approchai davantage et le Spitfire fut
Le 12 janvier, près de Fair Isle (dans les Shetlands), violemment secoué dans le sillage du bombardier
un Do 17 est revendiqué par des Hurricane du N° tandis que je fonçais sur sa droite. Nous revînmes
3 Sq. basé dans le nord de l’Écosse. Cet appareil,
venant probablement de Scandinavie, ne dut être
qu’endommagé, même si des services d’écoute
britanniques affirmèrent qu’il tomba en mer. Deux
Whirlwind du N° 263 Sq. combattent pour leur part
un Ju 88 au sud-est de Scillies. Le bimoteur est vu
partir en vrille dans des nuages et sera revendiqué
comme ‘damaged’, première revendication
présentée par des pilotes de Whirlwind !
De nuit, Londres subit une nouvelle attaque menée
par environ cent cinquante bombardiers tandis que
des mines sont larguées aux alentours de ports
anglais. Le F/Lt John Cunningham (N° 604 Sq.)
volant sur Beaufighter signale avoir causé des
dommages à un ‘intruder’ au large de Beachy
Head. Peut-être le He 111 du III./KG 55 revenu se
poser à Bricy avec des dommages de 30% ?
Un Dornier 17 de sur l’appareil, sérieusement endommagé, pour -le He 111 H A1+JK de la 2./KG 53 tombe en mer
la KG 3 à Anvers- l’achever. Mais, à environ trois cents mètres, au large de l’île de Canvey après avoir percuté une
Deurne. il y avait une couche de nuages et le Dornier péniche. Un aviateur est tué. Ses trois camarades,
y disparut. Le regard tendu, nous survolâmes ayant sauté à temps, sont capturés. Selon le rapport
la mer en faisant du rase vagues, mais nous ne de combat de Stevens : « Guidé par Wittering,
revîmes pas notre proie. Nous revînmes à Kirton j’ai volé vers le sud et fus informé de l’arrivée
où nous relatâmes cet engagement. Nos services d’un bandit effectuant de nombreux virages. J’ai
d’écoute avaient intercepté le signal de détresse observé le bandit qui volait derrière moi au nord
d’un Dornier basé aux Pays-Bas et il paraissait de Londres. Toujours engagé dans ses virages,
douteux qu’il ait pu rallier la côte. Mais nous le bandit s’éloigna de moi mais fut pris dans le
ne l’avions pas vu plonger dans la mer, pas plus faisceau d’un projecteur. Je me plaçai derrière
que descendre en flammes. Si bien que nous ne le bandit un peu plus bas et m’approchant à une
pouvions prétendre l’avoir probablement détruit. trentaine de mètres, lui décochai une rafale. Le
C’est ainsi que mon tableau des chasse fut mitrailleur supérieur répliqua. Je m’éloignai puis
inauguré par un demi Dornier 17 endommagé ». revins et tirai une dizaine de rafales en venant des
Il aurait pu s’agir d’un Do 17 du II./KG 3 revenu deux côtés. Je vis de la fumée sortir de l’avion
endommagé à Anvers-Deurne. ennemi et une fumée blanche surgir de son moteur
De nuit, diverses attaques sont lancées sur gauche. Il perdait de l’altitude. Deux membres
l’Angleterre, la plus importante visant Derby. d’équipage du bandit avaient évacué lors des
Cette nuit-là, la Luftwaffe ne s’en tire pas sans deux premières attaques. J’ai suivi le bandit
mal, perdant deux appareils sous les coups du P/O jusqu’à deux mille pieds mais le perdis quand je
Le texte du souvenir
Richard Stevens opérant aux commandes d’un dus virer pour perdre de la vitesse. Sa position
pieux de l’Uffz
Hurricane du N° 151 Sq. : était près de Southend. Je signale que le contrôle
Schindler de la 4./
-le Do 17 Z 5K+DM de la 4./KG 3 s’écrase à de Wittering fut d’une grande assistance dans le
KG 3 confirme qu’il
Hartswood. Une fouille du site en 1982 permettra succès de cette interception. Deux de mes canons
fut bien membre de
d’exhumer une Spanienskreuz prouvant qu’un n’ont pas tiré. (s) P/O R. Stevens A Flight N° 151
la Legion Condor en
moins un des quatre membres d’équipage tués Sq. Wittering ».
Espagne. Mais, vu son
avait pris part à la guerre civile espagnole. Il Stevens était considéré comme un ‘enragé’.
âge, probablement pas
ne pouvait que s’agir du pilote, l’Uffz Mathias ‘Johnnie’ Johnson nous en donne la raison : « Un
comme pilote.
Schindler ; pilote de chasse diurne, le P/O Richard Stevens,
23
se distingua de nuit. Avant guerre, il volait sur une Manchester et il hurlait comme un dément à la vue Des militaires et
ligne commerciale et transportait des journaux de bombardiers ennemis se profilant à l’horizon. civils britanniques
londoniens à Paris. Il fut versé à la 151e au début Il les ‘débusquait’ en se basant sur les éclatements examinent l’épave
de 1941 et donna dès le début l’impression que des obus de notre DCA. On pouvait toujours le du Do 17 Z de la 4./
sa vie ne comptait guère pour lui tant étaient trouver dans la portion du ciel où la DCA était KG 3 codé 5K+DM,
grands les risques qu’il prenait. Pour lui, la la plus intense, volant à travers les éclats, prêt à descendu par le P/O
guerre était une affaire personnelle. Sa femme foncer sur l’ennemi qu’il haïssait. Il ne détruisit R.P. Stevens dans la
et ses enfants avaient été tués dans le Blitz de pas moins de quatorze avions ennemis mais nuit du 15 janvier
1941.
Le P/O Richard
Playne Stevens,
pilote de chasse
de nuit au N° 151
Squadron. Il remporta
quatorze victoires
aériennes mais fut
tué le 15 décembre
1941 en chassant un
bombardier allemand
au-dessus de Gilze-
Rijen.
24 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
disparut au cours d’une mission sur le territoire être la première machine. Le canal et les cours
ennemi ». Effectivement, Stevens fut bien crédité d’eau sont bien visibles et nous nous orientons en
de quatorze victoires et fut tué la nuit du 15/16 regardant le sol. Par de tir de DCA mais beaucoup
décembre 1941 lors d’un survol de l’aérodrome de projecteurs. Aussi des chasseurs de nuit !
néerlandais de Gilze-Rijen. Selon certains auteurs, Attention ! On distingue bien la ville ainsi que
Stevens disposait d’une grande expérience du vol l’usine à sa lisière sud-est. C’est notre objectif.
nocturne comme pilote civil, ses livraisons le Nous larguons les mines et revenons à la maison.
forçant à voler régulièrement de nuit. Mais, vu Décollage à 22h05 – Atterrissage à 1h20 ».
les nombreuses rumeurs infondées entourant sa Étonnamment, on signale cette même nuit un
carrière militaire, la mort de sa famille lors du bombardement … en piqué de Londres mené
Blitz est peut-être sujette à caution. par deux Ju 87 ! Un troisième aurait été engagé
Le Fw Stahl (6./KG 30) était engagé cette nuit- sur Douvres. Cela aurait été la première action
là pour effectuer un largage de mines : « Nuit de en 1941 de Ju 87 Stuka sur l’Angleterre depuis
pleine lune - opération sur Derby ! Pas de nuage leur retrait du front de la Manche en octobre de
dans le ciel. La côte anglaise se détache comme l’année précédente. Cet emploi nocturne constitua
en plein jour lorsque je vole à six mille mètres probablement une tentative du haut commandement
sur le Wash. En nous basant sur la carte, nous pour renforcer la pression sur les îles britanniques
volons vers l’objectif. Il est 23h00. Tout est calme avec des attaques de précision. Ces appareils,
lorsque nous arrivons. Nous devons probablement devant appartenir à la Stukageschwader 1, ne
25
‘Débauche’ de
projecteurs sur une
grande ville anglaise.
furent probablement engagés qu’en petit nombre. affirmant l’avoir abattu. Mais il doit lui-même
Aux petites heures du 16, l’Oblt Albert Schulze évacuer son Hurricane sur l’île de Hayling et sera
de la 2./NJG 2 vient rôder près de l’aérodrome sauvé (avec une jambe cassée) par le secours en
de Church Fenton, son équipage revendiquant mer. Comme il se serait agi là officiellement de
deux Blenheim abattus lors de leur atterrissage. Il la première victoire de nuit d’un aviateur polonais
s’agissait en fait de deux Defiant du N° 54 OTU. dans la RAF, Falkowski rédigera un rapport
Un est bien détruit, l’autre ne fut qu’endommagé. transmis à l’officier polonais de liaison près le QG
du Fighter Command : « Je dois dire tout d’abord
Le 16 janvier, deux combats distincts ont lieu : que ce combat de nuit fut angoissant car je ne
-de retour d’un raid sur le continent, des Spitfire disposais pas de lunettes spéciales facilitant le
du N° 234 Sq. interceptent près de Portsmouth un repérage de l’ennemi et que, de plus, je fus gêné par
Ju 88 de la 3.(F)/121. Le P/O George Rogers se le grand nombre de projecteurs qui se révélèrent
lance à l’attaque mais est abattu en mer par le tir fort peu utiles car ne pouvant que rarement suivre
des mitrailleurs ; l’avance de l’adversaire. Je patrouillais depuis
-en soirée, le F/O Jan Falkowski du N° 32 Sq. longtemps en vain quand un projecteur prit un
signale intercepter un He 111 près de Shoreham, avion ennemi dans son faisceau. Il était sur le
La population de
Londres prend
l’habitude de s’abriter
de nuit dans les
stations de métro.
26 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
chemin du retour. Je mis les gaz et volai vers lui. Je équipage (probablement par la DCA).
crus un temps le perdre car le projecteur le lâcha Cinq Blenheim ‘intruders’ du N° 23 Sq. sont
mais, finalement, je pus distinguer clairement sa envoyés sur des aérodromes français et l’un d’eux,
silhouette devant moi. Je m’approchai si près que en route vers le continent, revendique un Do 17
c’est à une douzaine de mètres de lui que j’ouvris près d’Orfordness. Il se serait agi d’un Bf 110 de
le feu. Le résultat fut immédiat : l’avion se mit la 3.(F)/123 ayant pu retraverser la Manche avant
à émettre de la fumée et tomba dans la Manche. de s’écraser à Vire avec ses deux aviateurs.
J’estime que c’était un Heinkel 111 mais ne fus Poix, base du III./KG 26 , est survolé pendant
jamais assez près pour l’identifier avec précision. trente-cinq minutes par un unique bimoteur du
Revenant vers mon aérodrome, mon moteur se mit 23e, les autres ayant dû revenir prématurément,
à chauffer et, malgré mes efforts, stoppa. Mon rebutés par le mauvais temps. Finalement, lassé
aérodrome étant éloigné et, comme je perdais d’attendre le retour des bombardiers, son équipage
beaucoup d’altitude, je dus sauter. Lors du saut, larguera quelques bombes sur les installations de
mon parachute se prit dans l’habitacle et lorsque l’aérodrome avant de regagner l’Angleterre.
je me dégageai, je heurtai la dérive du genou. Je Le F/Lt McKenzie du N° 501 Sq. décolle cette
fus emmené à l’hôpital où je fus plâtré. J’espère nuit-là pour sa première mission nocturne en
revenir dans quelques semaines pour continuer Hurricane : « Le 16 janvier, Bristol fut martelée.
mon glorieux combat contre l’ennemi. Pour la Nous n’avons pas ménagé nos efforts en orbitant
gloire de la Pologne ». On peut s’étonner qu’étant sur la ville, étant étagés de mille pieds dans les
arrivé à douze mètres de sa cible, Falkowski n’ait nuages. Je volais à douze mille pieds sur les
pu l’identifier. Au surplus, on ne trouve pas trace ballons qui plafonnaient à six mille cinq cents et
dans la liste de pertes allemandes de ce He 111 qui contemplais les explosions et les incendies tout en
aurait pourtant dû être mentionné suite à la perte tentant de repérer une silhouette se détachant sur
de son équipage. les flammes ou les pinceaux des projecteurs. Mais
Un Ju 88 lance ses La nuit, les docks d’Avonmouth (Bristol) sont je ne vis rien. Je pense que j’évitai de justesse un
moteurs avant un la cible de plus de cent bombardiers. Le He 111 autre Hurricane en apercevant soudain les flammes
décollage de nuit. H 6N+CL de la 3./K.Gr. 100 est abattu avec son surgissant de son moteur. C’était là une tension bien
supérieure à celle des combats de jour. Revenir à
Charmy Down fut une nouvelle expérience. C’était
toujours très hasardeux sauf quand la clarté de la
lune était suffisante. L’approche et l’atterrissage
étaient aussi problématiques car on ne disposait
pas des repères comme de jour et l’on ne savait
estimer parfaitement son altitude. Les collines
environnantes nous dissimulaient souvent les
lampes. Parfois on allumait la piste brièvement
pour nous aider mais le soudain éclat détruisait
notre vision nocturne et nous aveuglait ».
chasseur ne me suivit. Mais j’étais désorienté. Lehrgeschwader 1 sur l’Angleterre avant 1944. Un Do 17 volant très
(Deux de mes camarades étaient sérieusement De nuit, Swansea est soumise à une sévère bas sur l’Angleterre.
blessés). L’appareil était devenu une épave. Ne attaque des Kampfgeschwader tandis que d’autres Une position risquée
fonctionnaient plus que le compas magnétique, bombardements plus mineurs ont lieu sur deux en cas d’apparition
le badin et l’altimètre. J’espérais voler vers la ou trois autres villes. De nouveau, on signale d’appareils du Fighter
Norvège mais le second moteur se mit à fumer et un bombardement en piqué par une Kette (trois Command…
le train d’atterrissage lâchait. (Je choisis alors appareils) de Ju 87 sur l’aérodrome de Croydon et,
de me poser en catastrophe). L’appareil volant probablement, sur Londres par une autre Kette.
encore trop vite glissa sur le sol, percuta un muret La chasse de nuit britannique perd un Beaufighter
et prit feu. Dès l’arrêt, mon mécanicien de bord, du N° 604 Sq suite à un ennui moteur mais
blessé aux jambes, se traîna sur les coudes et put l’équipage peut évacuer la machine sur Stratford-
évacuer en traversant le plexiglas brisé. Le radio upon-Avon. Un Gladiator du N° 247 Sq. est
sauta par une brèche du fuselage apparue lors du endommagé par des tirs alors qu’il allait se poser
choc. L’avion brûlant furieusement, je détachai ma à St Eval.
ceinture et m’échappai par la trappe placée au- L’équipage du F/Lt D. Williams du N° 23 Sq., ayant
dessus de moi. Les munitions se mirent à exploser. revendiqué la veille un Do 17 ‘probable’, signale
Nous nous sommes tous trois rassemblés à distance avoir abattu un He 111 sur Poix. Effectivement, le
et avons réfléchi. Les corps du météorologue et du 1H+AD du III./KG 26 s’écrase à trois kilomètres
second radio furent retrouvés à deux cents mètres de l’aérodrome alors qu’il devait revenir
de l’épave. C’était regrettable pour le Dr Leo d’Angleterre. Également de retour d’Angleterre,
Gburek qui était indemne lors du choc et qui avait un He 111 du I./KG 28 s’endommage en se posant
Le 19 janvier 1941,
soigné les blessés. Le radio avait cependant été à Nantes.
l’Oblt Heinz Forgatsch
grièvement atteint par les balles et je doute qu’il Le 18 janvier, la neige présente sur les deux
du K.Gr. 806 ramène
aurait survécu longtemps à ses blessures ». côtés de la Manche cloue les appareils au sol. La
péniblement son Ju
Plus au sud, sur le Kent, deux Hurricane du N° 504 Luftwaffe en profite pour déplacer la 1.(F)/124.
88 très endommages à
Sq. interceptent un Ju 88 qu’ils poursuivent sur Cette unité, dotée de quatorze Do 215 et de deux Bf
Caen. Bien que blessé,
la mer, incendiant un de ses moteurs. Le Junkers 110, quitte Orly pour Aalborg (Danemark), étant
il reviendra à l’unité et
est vu disparaître dans la brume. Il se serait agi désormais soumise à la Luftflotte 5. L’escadrille,
recevra la Ritterkreuz
d’un appareil de la 2./LG 1 non revenu à Bricy qui va recevoir plusieurs Ju 88 D-2, va désormais
en juin de cette année.
avec son équipage. Ce fut là la dernière perte de la mener des opérations de reconnaissance sur
28 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Dégel sur un
aérodrome de la KG
1. Les mécaniciens se
débrouillent comme
ils peuvent. Les croix
de fuselage trop
visibles du ciel ont été
dissimulées sous des
bâches.
29
SKG 210, il se verra décerner la Ritterkreuz le 14 sur les radars et situé à une vingtaine de kilomètres.
juin 1941. Mais, devenu pilote d’essai, il sera tué C’était un Bf 110. Lorsque le pilote aperçut les
en testant le Me 210 le 23 septembre 1941. deux Spitfire se lançant à l’attaque, il vira pour
Enfin, un He 111 de la 4./KG 4 revient se ‘vomir’ revenir vers le continent. Sa vitesse était d’environ
à Haarlem aux Pays-Bas. Le bimoteur est détruit 320 km/h, soit une vingtaine de moins que celle
et l’équipage blessé. Le pilote, le Lt Dietrich des Spitfire à basse altitude. Une longue chasse de
Grassmann, demeurera plusieurs mois à l’hôpital dix minutes débuta. Fokes parvint à se maintenir
mais reviendra à la KG où il fera toute sa carrière à environ cinq cents mètres du Bf 110 et décocha
militaire et se verra décerner la Ritterkreuz in des rafales pour tenter de le stopper. Il n’y eut
extremis en mars 1945 ! aucun tir de réplique, ce qui laissait penser que le
mitrailleur avait été tué. Lloyd s’était également
Le 20 janvier, le P/O Tufnell du N° 43 Sq. combat rapproché et voulait attaquer de côté mais il était
un Ju 88 sur May Island. Le tir des mitrailleurs gêné par la présence d’huile sur son pare-brise.
allemands endommage le Hurricane qui reviendra
se ‘crasher’ sur le continent, son pilote étant
blessé. L’appareil réparé sera remis en service.
Des auteurs supputent que son opposant aurait pu
être un He 111 de la Wekusta 5, endommagé en se
posant à Vaernes. Ce qui semble fort douteux... On
relève au surplus de petits bombardements diurnes Sur Londres, un
menés par des appareils isolés. La nuit sera par Kriegsberichter
contre tranquille sur les îles britanniques. (correspondant de
Le 21 janvier ne voit que très peu d’intrusions de guerre) enregistre son
jour ou de nuit. En soirée, le He 111 A1+FM de reportage en regardant
la 4./KG 53 est signalé tomber en mer au large de le bombardement du
Douvres, probable victime de la DCA dispersée nez vitré d’un Heinkel
autour de Londres. L’équipage au complet périt 111.
dans ce ‘crash’.
Ce jour-là, le I./KG 1 quitte Montdidier pour
rejoindre le Stab/KG 1 à Glisy.
Le 22 janvier, le mauvais temps réduit toujours
l’activité aérienne. Pluie et visibilité médiocre
empêchent toute opération d’envergure.
Néanmoins, on note une petite amélioration,
ce qui permet de lancer des opérations plus
ambitieuses. Trois Hurricane du N° 91 Sq.
abattent sur Great Yarmouth le Ju 88 A-5 V4+HT
de la 9./KG 1 (équipage disparu). Cet appareil
devait opérer isolément en mouillage de mines
ou en reconnaissance. Un He 111 de la 6./KG
53 est légèrement endommagé par le N° 41
Sq. sur Bradwell Bay lors d’une mission vers
Southampton. D’autres bombardiers, dont des Ju
88, sont revendiqués abattus (un par le fameux
Sq/Ldr Douglas Bader) mais on n’en trouve pas
trace.
Il n’en décocha pas moins de longues rafales, urgence le bimoteur avarié dans des marais près
épuisant ses munitions pour voir simplement un de Great Yarmouth. L’équipage indemne sort de
Le 28 janvier 1941, le filet de fumée sortir d’un des moteurs. Le Bf 110 l’appareil et cherche vainement à fuir. Finalement,
Hptm Paul Claas (I./ dut être abandonné sur la Manche, les Spitfire les quatre aviateurs se rendront à deux civils ;
KG 28) doit poser son étant à bout de carburant ». Endommagé à 25%, -le 4D+GS s’écrase dans l’estuaire avec son
He 111 sur la mer au le bimoteur ira s’écraser à Zuidcoote, équipage ;
large de La Rochelle. ses deux occupants étant blessés (et -Idem pour le 4D+AS mais il y aura
Il sera sauvé avec non tués comme l’avaient pensé ici un survivant extrait de l’eau et
son équipage. Fin leurs opposants !). capturé.
1942, il mènera le I./ Un Ju 88 de la 3.(F)/122 revient se Le 27 janvier, nouvelle perte pour
KG 100 et recevra la poser à Schiphol avec des dégâts de ‘l’escadrille à l’aigle’ lorsque le Ju
Ritterkreuz le 14 mars 50%, suites probables d’un combat 88 4D+CT de l’équipage de l’Oblt
1943. Capturé après sur l’Angleterre. Un aviateur est Friedrich-Karl Rinck, menant la 9e
un amerrissage sur blessé. escadrille, est frappé par de la DCA
la mer d’Azov, il sera Le 24 janvier, la journée sera très alors qu’il bombardait l’usine de
abattu par des marins calme. On relève tout au plus un Ju Grantham. Le pilote pose le bimoteur
soviétiques le 19 juin 88 A-5 du III./KG 30 atteint par les près de Fishtoft (Lincolnshire) et les
1943. tirs de la DCA de trois navires alors aviateurs indemnes se rendent après
qu’il survolait la côte. Il serait revenu avoir incendié leur appareil.
se poser en urgence à Zandvoort, étant détruit à Le Fw Peter Stahl (6./KG 30) et son équipage
65% (équipage indemne). sont requis pour larguer des mines. Mais le temps
Le 25 janvier, un Anson du N° 217 (CC) Sq. est exécrable force à opérer de jour : « Le départ est
détruit par bombes lors d’un raid diurne sur St prévu pour 11h20. Nous devons d’abord estimer
Eval. s’il est possible de larguer de jour des mines dans
Le 26 janvier, comme on ne peut guère opérer sur la Tamise. Avec des sentiments mitigés, je décolle
la Grande-Bretagne, la 8./KG 30 part attaquer des sous un plafond de nuages à cents mètres. La vision
navires dans l’estuaire de la Tamise. Les équipages est quasiment nulle et cela ne s’améliore pas sur
de l’Adlergeschwader s’étaient spécialisés depuis la mer. Nous gardons un œil sur le sol et volons
septembre 1939 dans ce type d’attaque navale vers Margate. Nos montres et le badin exceptés,
mais, ce jour-là, elle joue de malchance car pas nous ne disposons pas d’autre aide pour estimer
Petit moment de moins de trois Ju 88 A-5 tombent sous les coups approximativement notre position. Le temps fixé
détente pour un de la DCA : est écoulé. Nous devrions atteindre la côte. Une
équipage revenu de -le 4D+LS vole si bas qu’il percute le mât du masse sombre apparaît. Nous y sommes ! Nous
mission. remorqueur Galvani. Son pilote peut poser en survolons les toits de Margate à quelques mètres.
Par ce temps, je ne peux me lancer dans des
manœuvres évasives et dois voler en ligne droite.
La DCA, remise de sa surprise, se met à tonner et
à nous entourer d’un réseau d’explosions. La ville
est petite et nous allons pouvoir nous éloigner
de cette DCA. Je ne peux entrer dans les nuages
par crainte de m’égarer totalement. À l’ouest de
Margate, un grand espace dégagé. Je vire alors
avec précaution puis repars vers le sud. Hans
corrige notre trajet avec des signes de la main.
Nous quittons Margate. La DCA légère tire très
bien. Maintenant, nous devons voler neuf minutes
et vingt secondes à 300°. Nous atteindrons alors
notre objectif. En dessous de nous, une mer
tranquille mais sombre. Au-dessus, un épais
plafond de nuages. Nous ne survolons aucun
navire mais ils ont tous été certainement prévenus,
ont fait monter leurs ballons et mis leur DCA en
alerte. Nous survolons une bouée puis une autre.
Nous y sommes ! Mines larguées ! Nous avons
encore à bord deux bombes de 250 kg pour une
chasse libre de navires. Une opération risquée
par un temps pareil ! Très bas sur la mer, je vole
vers l’est sur le secteur où la Tamise se jette dans
la mer. J’espère ne pas trouver de navire car
l’adversaire déjà prévenu dispose d’une bonne
défense. Je dois voler à quarante mètres sur la
mer tant la visibilité est réduite. Soudain, devant
moi, une masse sombre. Un navire de guerre ! Je
le survole, largue mes bombes et, dans un virage,
entre dans les nuages. Ils ont tiré de toutes leurs
31
armes et les traçantes nous poursuivent même là. Le 30 janvier, le Ju 88 4D+CK de la 2./KG 30 À la fin du mois de
Puis c’est le calme. Avons-nous été atteints ? Il y a tombe avec son équipage à Whyers Hall, victime janvier 1941, le I./KG
un trou dans l’aile droite mais aucun élément vital de la DCA de Clacton. 26 gagne la Norvège
n’a été touché comme l’indiquent les cadrans du Ce jour-là, le I./LG 1, seul Gruppe de l’escadre où fut photographié ce
tableau de bord. Et les moteurs ronronnent comme toujours présent en France, quitte Bricy, étant He 111 H entièrement
à l’ordinaire. Nous avons eu de la chance... Le vol appelé en Autriche pour se préparer à combattre peint en noir.
retour, avec givrage et un atterrissage difficile dans les Balkans.
par mauvais temps, ne fut rien après ce que nous Le 31 janvier, probablement pour maintenir la
avions vécu sur la Tamise ». pression alors que le mauvais temps empêche
Le 28 janvier voit très peu d’activité. Cependant, toute attaque nocturne depuis plusieurs jours,
trois des sept He 111 du I./KG 28 ayant bravé la Luftwaffe engage de jour une centaine de ses
le mauvais temps pour larguer des mines dans bombardiers sur des aérodromes aux alentours de
le détroit de Bristol sont détruits lors de leur vol Londres ainsi que sur quelques autres objectifs
retour vers Nantes. Par chance pour l’unité, on ne militaires. Ce qui lui coûtera au moins deux
comptera que quelques blessés. Un des appareils Heinkel 111 :
tombé au large de la Rochelle était piloté par le -le 1T+LH de la 1./KG 28 abattu par des tirs de
Hptm Paul Claas, futur Ritterkreuzträger, qui navires qu’il mitraillait s’écrase en mer au large
sera tué comme Kommodore de la KG 100. Un de la côte de Cornouailles avec son équipage.
avertissement de poids pour le commandement Son pilote, le Hptm Reinhold Gottschalck, était le
local ayant probablement engagé inconsidérément Staka ;
ses appareils dans une mission à risques. -le A1+GK de la 2./KG 53 s’écrase sur le champ
de courses de Plumpton alors que, volant fort bas
Le 29 janvier, si on ne relève aucun combat diurne, sous la couverture des nuages, il percute des câbles
Londres redevient l’objectif de la Luftwaffe la nuit antiaériens. L’équipage périt dans le ‘crash’.
du 29 au 30. Il n’y aura cependant aucune perte Un Do 17 de la 7./KG 3 endommagé à 10% par de
sur l’Angleterre au sein de la flotte de bombardiers la DCA sur Wattisham reviendra néanmoins à sa
engagée en deux vagues. Tout au plus, deux Ju 88 base belge de St Trond avec un blessé à bord.
sont détruits en revenant sur le continent mais leurs À la fin du mois de janvier, le I./KG 26 quitte
équipages semblent avoir été indemnes. Cette Beauvais et la France pour gagner Aalborg puis
attaque fut peut-être facilitée par l’action de deux Stavanger en Norvège. De là, ses He 111 iront
Ju 88 C du I./NJG 2 envoyés dans une mission attaquer les ports écossais ainsi que les navires
spéciale : détruire des ballons sur Londres. Sept cabotant plus librement dans le nord des îles
d’entre eux auraient été abattus dont six par le seul britanniques.
Fw Hermann Sommer.
32 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Junkers Ju 88 A-5 d’une unité non identifiée au début de 1941. Les deux lettres
« LP » sur la dérive correspondent certainement à la seconde partie du code
de l’appareil, la lettre P attribuant donc cet avion à la 6. Staffel (II. Gruppe).
33
Sous un Ju 88.
On remarque
l’appareil de visée de
bombardement.
Discussion d’un
équipage de He 111
avant un départ de
nuit.
34 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Le Ju 88 A-5 “3Z+DC” L’invasion de l’Angleterre ne fut qu’un mythe ayant programmée pour cette année. Néanmoins, il faut
du Stab II./KG 77 a servi à la propagande des deux camps - quoique continuer à abuser Staline confit dans la certitude
été soigneusement dans des buts opposés (pour galvaniser les troupes que la Wehrmacht clouée à l’ouest ne pourra avant
camouflé en bordure et/ou la population). Si le peuple britannique longtemps se retourner vers l’est. Et ces vols
du terrain d’As sous n’avait pas plié lors des bombardements massifs sur l’Angleterre ont également pour but
un filet. de la Battle of Britain, il n’allait - comme il se d’occuper et d’aguerrir les équipages.
doit - pas plus céder sous les attaques sporadiques Bref, des deux côtés de la Manche on est
et plus limitées (mais toujours meurtrières) de dans l’impasse et les pertes en hommes et en
la Luftwaffe. Le gouvernement de Londres matériel n’ont toujours aucun
refuse obstinément toute offre de impact décisif.
paix tandis que les pertes civiles
renforcent l’esprit de résistance
britannique (comme il en sera
dès 1943 dans le Reich). Il est
donc inutile de bombarder à
outrance d’autant plus que
l’invasion de l’URSS est
Junkers Ju 88 A-5 codé 3Z+DC du Stab II./KG 77, basé à As en janvier 1941.
35
Le Do 17 Z-7 ou 10 111 de la 6./KG 53, effectivement perdu avec ses sur le même secteur. Il n’y aura pas de survivant.
R4+ZK de la 2./NJG quatre occupants près de Southend. Probablement Comme le signale J. Vasco dans l’historique de
2 à Gilze-Rijen, aux l’un des rares appareils ayant opéré ce jour-là sur cette unité : « Les missions devant être menées par
Pays-Bas, au début de l’Angleterre, en dépit de conditions climatiques le Gruppe en 1941 différaient de celles de 1940
1941. particulièrement déplorables. car elles étaient lancées à la tombée de la nuit
De nuit, une quinzaine de bombardiers se charge sous couvert de l’obscurité et visaient des sites
surtout de missions de minage. militaires ou industriels, qu’ils soient côtiers ou
Le 4 février, l’activité de la Luftwaffe est plus situés dans le sud-est de l’Angleterre. L’unité allait
intense et des chasseurs sont même engagés en également être largement engagée dans des vols
Freie Jagd (chasse libre, le pendant allemand du météorologiques et des reconnaissances armées.
Sweep). À Hawkinge, un Spitfire du N° 91 Sq. est Elle était cependant bien close l’époque où en
détruit au sol par des Bf 109. 1940, on opérait avec tout le Gruppe souvent
Deux pilotes du N° 257 Sq. engagés en protection en collaboration avec d’autres importantes
d’aérodromes interceptent et abattent le Do formations allemandes. Désormais ces missions
17 Z U5+LM de la 4./KG 2 envoyé bombarder au crépuscule étaient effectuées par paires (Rotte)
Mildenhall. Le bombardier tombe en mer au large ou en formations de quatre (Schwarm) ».
de Corton. L’équipage évacue mais deux aviateurs De nuit, une attaque de moyenne importance vise
se tuent. Si les deux survivants sont repêchés, l’un Derby tandis que des mines sont larguées dans
d’eux décèdera à l’hôpital. divers secteurs portuaires. Un Do 17 de la 1./
Trois Hurricane du N° 249 Sq. patrouillent sur un KG 2 partant pour Derby s’écrase à Épinoy peu
convoi lorsqu’ils repèrent et abattent un Bf 110 après son décollage. Il est détruit par l’incendie
de l’Erpr.Gr. 210. Un second est perdu peu après et les bombes explosent mais l’équipage de l’Oblt
37
Le cockpit,
relativement spacieux
du Beaufighter Mk.1F.
38 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Le 8 février 1941, un Joachim Rücker est indemne. Les quatre aviateurs la clarté lunaire. Nous les survolons et larguons
Ar 196 de la 5./196 avaient déjà connu quelques frayeurs tout juste un notre cargaison avec précision. Les emplacements
est abattu près de la mois auparavant lors d’un atterrissage forcé. Ils sont alors indiqués sur la carte. Bien que je sois
côte anglaise par des volaient ce jour-là de même sur un appareil codé descendu à six cents mètres, le tir de la DCA fut
Whirlwind. U5+IK… mais avec un autre numéro de série. Sur très imprécis. L’excellente lueur dispensée par la
Cothwick Lodge, un Defiant du N° 151 Sq. abat lune lors du vol retour sur la mer du Nord fut un
le Do 17 Z U5+AR de la 7./KG 2 avec l’équipage plaisir ».
du Fw Horst Bahr. À Reims, un Ju 88 du II./KG Un Hampden partant vers le continent est attaqué
77 revient se poser avec 35% de dommages et à une quarantaine de kilomètres de Lowestoft par
un blessé à bord. Très probablement au retour le Do 17 Z R4+BK de la 2./NJG 2 piloté par l’Oblt
d’Angleterre. Otto-Heinrich Häuser. Un échange rapide de tirs
Le Fw Stahl (6./KG 30) procède cette nuit- débute au détriment du chasseur qui explose en
là à un largage de mines : « Cette fois, ce sera une boule de feu ne laissant aucune chance à son
dans l’embouchure de la Humber, en dessous de équipage de trois hommes.
Hull. Nous avons décollé à 22h30 pour être de
retour à peine trois heures et vingt minutes plus Le 5 février, les attaques diurnes vont
tard. Le port de Hull est un des plus importants principalement viser des navires cabotant près des
après Londres et, comme la Tamise, mérite notre côtes anglaises. C’est ainsi que le dernier Ju 87
attention. La vue sur l’objectif est très bonne. sera abattu en Angleterre. Un Stuka de la 2./St.G.
Sur Spurn Point, nous repérons huit ballons à 1 coule en effet le HMS Tourmaline mais le J9+BK
environ mille mètres d’altitude. Ils brillent sous est victime du P/O Robert ‘Toby’ Fokes du N° 92
39
Sq. Selon J. Foreman : « Quatre Spitfire du 92e principalement de jour.
effectuaient une patrouille maritime matinale sur En matinée, le P/O Kenneth Graham du N° 263 Sq.
l’estuaire de la Tamise. Comme ils s’en revenaient volant sur Whirlwind abat un Ar 196 de la 5./196
vers Manston, on leur signala par radio l’approche piloté par le Staka, l’Oblt Adolf Berger. Selon le
d’un ‘raider’ sur North Foreland. Ils virèrent pour journal de guerre du 263e : « Aujourd’hui, nous
retourner sur les lieux de la patrouille et aperçurent avons obtenu notre première victoire confirmée.
un Ju 87 B Stuka piquant sur des navires. Le pilote (…) Deux appareils de la Blue Section décollèrent
effectua sa ressource après avoir largué sa bombe d’Exeter à 8h40 pour un vol local d’exercice. À
sur le Tourmaline mais les Spitfire lui coupèrent 9h00, ils furent guidés vers un intrus. Alors qu’ils
toute retraite. L’Allemand tenta alors de gagner la orbitaient à une quinzaine de kilomètres au sud
côte anglaise, étant poursuivi par les chasseurs. de Start Point, un Arado 196 fut aperçu par le Sgt
Le Sq/Ldr John Kent, menant le N° 92 Sq., était Rudland qui piqua sur lui et se plaça dans sa queue.
à ce moment-là au volant de son véhicule roulant Mais, voyant des cocardes britanniques (sic !) sur
vers Manston. Il déclarera : ‘Le Stuka approcha de le fuselage, il arrêta son tir et vola quasiment en
l’aérodrome en effectuant des manœuvres évasives formation. L’ennemi entra alors dans des nuages
suivi par le P/O Toby Fokes aux commandes de et passa à proximité de Blue 1, le F/O Hughes.
mon QJ-J. Incidemment, nous avions évoqué la Celui-ci lança son attaque à peu près de face
veille le traitement des aviateurs capturés car ouvrant le feu de quatre cent cinquante puis de
nous avions appris que certains de nos pilotes de deux cent mètres mais cela sans résultat. Entre-
chasse avaient été bien reçus par les Allemands. temps, les F/Lt David Crooks et P/O Graham
Je leur ai dit que leur boulot était de défendre avaient décollé de St Eval et ordre fut donné à leur
l’Angleterre et de tuer les ennemis du Roi. Et rien arrivée à Dodman Point que Graham patrouille
d’autre. Ils avaient compris le message. Bien que en dessous de la couche nuageuse tandis que
le pilote allemand ait montré nettement sa volonté Crooks ferait de même au-dessus. Ayant effectué
de se rendre, Toby ne le voulut pas et, après un la manœuvre, Crooks contacta son équipier en
tir de ses canons, j’entendis le Stuka exploser et signalant qu’ils pourraient voler en formation
s’écraser près de la route. Je courus vers l’épave. mais n’obtint par de réponse. Soudain, il aperçut
Le pilote était toujours attaché à son siège, une un appareil traverser les nuages au nord-est,
main encore sur les commandes. Il avait été tué descendre puis percuter la mer. Crooks ne sut pas
sur le coup’ ». identifier l’appareil sur le moment mais aperçut
Un Do 17 de la 8./KG 2, le U5+BS, est abattu sur les flots un flotteur ainsi qu’une pièce d’aile
sur la Manche par le N° 74 Sq. Il est difficile de avec une croix noire. Le P/O Graham ne revint
préciser la nature de la mission de bombardier. On pas de cette patrouille. Un garde-côte signala que
le dit en effet engagé dans une escorte de convoi deux appareils s’étaient écrasés en flammes en
au large de Boulogne tandis qu’un rapport du 74e mer, cela vers 9h50 ». La victoire sera attribuée à
affirme que l’appareil « approchait de la côte titre posthume à Graham (un vétéran de la Battle
anglaise entre Douvres et Folkestone » ... Etait-ce of Britain) ‘posted missing, believed dead’. Les
ici une action offensive ? deux avions durent se percuter dans ou au sortir
De nuit, les installations de la Royal Navy à des nuages. La localisation du combat permet de
Chatham ainsi que quelques aérodromes reçoivent l’inclure dans les actions de la Luftwaffe sur le
la visite de la Luftwaffe. Royaume-Uni.
Un Ju 88 est intercepté au large de Clacton par des
Le 6 février, le II./KG 76 vient s’établir à appareils du N° 242 Sq. Il est signalé abattu mais
Châteaudun après sa reconversion sur Ju 88 dans on n’en trouve pas trace. Après cet engagement,
le Reich. le P/O Lawrence Crydermann semble s’être égaré
Ce jour-là, à Chartres, le II./KG 55 reçoit l’ordre et avoir survolé les Pays-Bas avant de tomber en
de se consacrer principalement à des opérations mer, probablement à bout de carburant…
navales : des attaques de navires entre les îles de Au sud de Warwell, un Spitfire du N° 234 Sq.
Wight et de Scilly ainsi que sur la mer d’Irlande. combat un Ju 88. Il doit s’agir d’un appareil de
Pour entraîner les équipages, des cibles sont la Wekusta ObdL revenu en France mais pour se
placées sur un terrain d’exercice sablonneux situé ‘crasher’ à Brest, tuant son équipage.
près de Chartres. Deux Jabos de la 5./LG 2 lancent une attaque
L’activité aérienne est extrêmement réduite que surprise sur Hawkinge. Le Lt Werner Schlether
ce soit de jour ou de nuit. Cependant, revenant de mitraille des Spitfire mais, lors de son second
patrouilles nocturnes, deux Beaufighter du N° 604 passage, son Bf 109 est frappé par un obus de DCA
Sq. s’écrasent à Middle Wallop, un équipage étant et va s’écraser avec son pilote à Arpinge Farm.
tué. De nuit, activité réduite dans les deux camps.
Il en est de même le 7 février. Tout au plus, une
attaque de navires a lieu au large de Dundee Le 9 février, trois chasseurs du N° 64 Sq.
et la DCA revendique un des bombardiers. interceptent le Ju 88 4D+FM de la 4./KG 30 près
Probablement le He 111 de la 2./KG 53 revenu de l’île de Mersea et l’abattent en mer avec son
se poser sur le ventre à Zeebrugge. L’appareil est équipage. Un Spitfire est détruit par le tir adverse,
détruit mais l’équipage est indemne. son pilote s’en tirant cependant sans mal.
Le 8 février, même si le mauvais temps De nuit, Birmingham et Plymouth sont deux des
se maintient, quelques opérations ont lieu, cibles subissant de faibles attaques allemandes.
40 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Boulton Paul Defiant NF Mk.1 N3315/EW-C du N° 307 (Polish) Squadron ; février-mars 1941.
Messerschmitt Bf 109 E-3 « 8 blanc » du I./LG 2 (l’insigne est celui de la 1. Staffel).
Un Emil du I./LG 2.
44 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Cette belle poliment, laissa l’homme sauter à terre et repartit triple ?) bévue au jeune pilote autrichien Hans
photographie de au plus vite. Mais il se serait ensuite posé à Feltwell Thurner, membre de la 9./KG 55, devenu un des
Londres durant le avant d’en rédécoller tout aussi rapidement. meilleurs spécialistes des opérations ‘Fledermaus’
Blitz nous montre Big On parle même d’un troisième atterrissage à (chauve-souris, les attaques contre les aérodromes
Ben et les bâtiments Tangmere mais il pourrait ne pas s’agir ici du britanniques) - cela bien qu’on la date du début
du Parlement ; on même équipage… On a attribué cette double (ou de la Bataille d’Angleterre. Cet épisode, s’il le
distingue, dans le ciel,
plusieurs ballons de
défense qui furent
bien souvent aussi
gênants pour la chasse
de la RAF que pour
les appareils de la
Luftwaffe.
Un des Ju 88 de prise Bournemouth pour entamer notre patrouille au- au-dessus de nos têtes. (…) Le puissant aboi de
de la RAF. Pour dessus de la mer dans un ciel de cristal (…). Nous nos canons ouvrit le concert. John ajusta le tir
entretenir ces avions n’eûmes pas à attendre longtemps. La voix du autrement (…) Les canons se turent, à bout de
en état de vol et les contrôleur grésilla dans nos écouteurs quelques munitions et le bombardier piqua légèrement du
tester face à la chasse minutes après : ‘Voilà le premier qui se présente. nez. Je courus réapprovisionner les armes. Mais
de la RAF, toute pièce Altitude trois mille six cents mètres. Vous êtes en le Heinkel avait disparu. John l’avait perdu de vue
récupérée sur les plein sur sa route’. John descendit vivement à lorsque le pilote ennemi avait piqué sous la ligne
épaves était utile. trois mille quatre cents mètres pour noyer notre d’horizon ». Guidé par le contrôleur, Cunningham
silhouette dans le fond brumeux de la côte tandis vire vers l’ouest mais ne retrouve pas son ‘gibier’.
que l’ennemi se détacherait sur le ciel. (…) Soudain, il le verra devant lui larguer ses bombes
Pendant dix longues minutes, nous avons suivi le en urgence peu avant de percuter le sol ‘dans une
Heinkel repéré. (…) Nous le pistâmes jusqu’au horrible lame de feu’.
moment où apparut la plage incurvée de Lyme .Le I./NJG 2 revendique cette nuit-là un Wellington
Bay. (…) ‘C’est le bon moment, je crois’ me dit près de Southend et un Oxford sur l’aérodrome
John. Il ouvrit les gaz en grand et le Beaufighter de Waddington. Il s’agissait respectivement d’un
grimpa comme un ascenseur vers la silhouette Hampden du N° 44 Sq. et d’un Oxford du FTS
du Heinkel qui prit des proportions démesurées qui, tous deux, ne furent qu’endommagés.
Bristol Beaufighter Mk.1F R2101/NG-R du N° 604 Squadron, piloté par le F/Lt John
Cunningham ; Middle Wallop, début 1941.
47
Un Blenheim du N° 53 Sq. est détruit par bombes rapide qui les laisse sur place. L’intrus aurait La troisième victoire
au sol sur l’aérodrome de Bircham Newton. probablement été touché et pourrait être l’appareil remportée par le F/
de la 4.(F)/122 posé en urgence à Melsbroek avec Lt John Cunningham
Le 16 février est calme de jour comme de nuit. 65% de dommages. Un Ju 88 du III./KG 77 doit fut le Heinkel He 111
De jour, néanmoins, le Fighter Command va être abandonné par son équipage sur Amiens mais 1G+FR de la 7./KG 27
perdre quelques belles occasions. Ainsi lorsque rien n’indique que ce fut des suites d’un combat. dont on voit les restes
deux pilotes du N° 616 Sq. (les F/Lt Colin McFie Un autre Ju 88, cette fois de la 8./KG 1, au retour à Luscombe Farm
et Sgt Arnold) interceptent un Ju 88 bien plus d’une mission sur Liverpool, se perd et doit se (Haberton) dans le
Devon.
Le 16 février, le F/
Lt Colin McFie du
N° 616 Sq. va rater
l’interception d’un Ju
88.
48 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Ju 88 de la (F)/122 poser à court de carburant. Son pilote le pose sur vétéran de la Battle of Britain) étant indemne.
dans son hangar. l’une des pistes du terrain de la RAF de Steeple On ne relève cependant aucune revendication
Morden (Cambridgeshire) ; l’équipage, ain et sauf, allemande…
est fait prisonnier. Un autre avion qui servira de En soirée, l’équipage de Stahl revenu au petit matin
réserve de pièces détachées aux machines servant repart sur l’Angleterre mener une reconnaissance
aux essais dans la RAF ! armée sur l’embouchure de la Tamise.
Le Fw Peter Stahl de la 6./KG 30 peut cette nuit- De nuit, Londres subit une attaque ‘modérée’, la
là bombarder enfin l’aérodrome de Linton upon Luftwaffe perdant le Do 17 Z 7T+JL de la 3./K.
Ouse, l’objectif de son choix. « Mes bombes Fl.Gr. 806 tombé près de Windsor après avoir
tombent sur le hangars et les bâtiments ». encaissé plusieurs rafales d’un Beaufighter du
N° 219 Sq. piloté par le compétent Sq/Ldr James
Le 17 février, le N° 222 Sq. revendique Little. Les quatre aviateurs peuvent sauter sans
deux victoires certaines et un troisième intrus mal et sont de suite capturés.
endommagé. Effectivement, un He 111 de la 8./ Le 18 février, la Luftwaffe se contente de
KG 1 et un Ju 88 de la 6./KG 76 (volant vers quelques intrusions de jour. On peut noter que ces
West Raynham) sont abattus sur la mer avec leurs raids limités et sporadiques ne se firent pas sans
équipages. mal pour la population puisque l’on dénombrera
Près de Hawkinge, un Spitfire du N° 91 Sq. est au moins sept tués et quarante blessés lorsque des
abattu par un Bf 109, le F/O James O’Meara (un bombes frapperont des échoppes à Newmarket.
D’autres aérodromes anglais sont les cibles de la Luftwaffe. Ainsi en est-il pour West-Raynham attaqué
par un He 111 de la 1./KG 55. Selon un des observateurs de l’unité, l’Ofw Alfred Sticht : « 16 février
1941. La 1./KG 53 est basée à Château Corbehem près de Douai. Mon pilote est le Lt Meyer. Nous
devons attaquer l’aérodrome de West-Raynham en profitant d’une météo favorable. À 13h40, on nous
communique les informations sur le temps. Notre machine, le He 111 A1+KH, a déjà été ravitaillée en
carburant, bombes et munitions. À 14h24, nous nous arrachons lourdement du sol. Nous suivons le cap
jusqu’à la station de Ruddervoorde puis nous quittons la côte en volant vers le nord. Nous grimpons vers
les nuages et les traversons. Au-dessus de la couche nuageuse, nous testons nos appareils et vérifions notre
vitesse. Nous apercevons au loin de petits points noirs et nous nous réfugions de suite dans les nuages.
Peu nous chaut qu’il s’agisse d’ennemis ou d’amis ! Nous jouons la sécurité. Il nous faut atteindre West-
Raynham pour détruire des avions sur la piste et bombarder les hangars. Nous progressons en suivant
les divers signaux reçus des stations. Nous franchissons la côte anglaise. Maintenant, c’est le boulot de
l’observateur. Notre altimètre indique deux mille cinq cents mètres. Nous évoluons entre deux couches
de nuages avec au-dessus de nous une importante couverture de stratus. La couche inférieure culmine
à deux mille quatre cent cinquante mètres. Mais qu’en est-il de sa base ? Nos météorologues nous ont
dit qu’elle se situait à une centaine de mètres du sol. Cependant, comme vétérans des opérations sur
l’Angleterre, nous savons que le temps sur les îles britanniques est extrêmement changeant. Après
quinze minutes de vol sur la terre ferme, nous entamons notre descente. Les soutes sont ouvertes et les
bombes amorcées. Les mitrailleurs sont derrière leur arme. Nous volons à deux cents mètres d’altitude
et les nuages s’épaississent. Soudain, nous apercevons le sol anglais. Je suis couché dans la baignoire
ventrale, une carte d’Angleterre en mains, et essaie de me repérer. Mes camarades m’aident comme
ils peuvent en me donnant divers points de repère (un ruisseau, un village,…) tant la visibilité est
mauvaise. J’aperçois une ligne de chemin de fer à l’est. Je m’oriente de suite et crie à mon pilote dans
l’intercom de la suivre. Il vire aussitôt et nous survolons bientôt une petite gare. Sur les quais, des gens
nous regardent et doivent ressentir la frayeur de leur vie en apercevant les croix noires sous nos ailes.
La défense ne nous a pas encore repérés mais, ici, on va lancer une alerte aérienne. Selon mes calculs,
nous devons nous retrouver dans une minute sur l’objectif. Nous traversons des bancs de nuages qui
nous font rentrer dans une obscurité temporaire. Soudain, l’aérodrome apparaît sur la gauche. Meier
vire de suite mais je lui dis de prendre de l’altitude car je ne peux larguer les bombes à cette hauteur.
Il fait alors grimper la machine dans les nuages et, après plusieurs virages, revient sur l’aérodrome.
Nous volons à cinquante mètres et nos bombes ont un retardateur car nous ne pouvons risquer d’être
atteints par des éclats. Nous dénombrons de cinquante à soixante appareils sur la piste. Quand je crie :
‘Achtung ! Bombe fällt’, nos mitrailleurs arrêtent leurs tirs pour ne pas risquer de toucher une bombe
et la faire exploser près de nous. Les bombes larguées frappent la piste tandis que nos mitrailleurs
tirent à qui mieux mieux. Il est 16h00. Nous rentrons dans les nuages et volons vers l’est. Mais après
dix minutes, notre protection s’effiloche et nous nous retrouvons dans un magnifique ciel bleu. Nous
devenons alors très prudents. Soudain, l’un de nous crie : ‘Attention des chasseurs à gauche grimpant
vers nous’. Lançant la machine en piqué après avoir mis plein gaz, notre pilote essaie de rejoindre un
autre banc de nuages C’est un excellent pilote en PSV (pilotage sans visibilité) et il se lance dans diverses
cabrioles. Les quatre Spitfire nous accrochent au moment où nous entrons dans des cumulus. Un rapide
échange de tirs a lieu. Dans les
nuages, Meyer effectue un virage
à 90° puis change de nouveau
de direction. Nous pouvons
ainsi semer l’ennemi quelque
peu désemparé. Nous revenons
ensuite nous poser à Vitry. Par
après, nous apprendrons que
nos services d’écoute avaient
entendu un message envoyé aux
quatre chasseurs : « Posez-vous
sur une autre piste. West-Rayham
a été sérieusement bombardé
à 16h04’’.Quelques jours plus
tard, le général Bruno Loerzer
vint à Vitry pour s’entretenir avec
nous. Il nous invita à manger
au mess des officiers et nous
reçûmes vingt-cinq bouteilles de
champagne ».
Le Ju 88 de la 8./ Près d’Ovington (Norfolk), le He 111 H A1+CM de ces lassantes reconnaissances en mer : « Le 18
KG 1 posé à Steeple de la 4./KG 53 volant à peine à cent pieds du sol février 1941, ‘briefing’ à 11h00. Notre mission :
Morden le 16 février est victime d’une arme originale : le ‘parachute une reconnaissance armée sur la mer d’Irlande.
1941. Des officiers and cable’, un câble tiré comme un obus par une Décollage à 12h35. Nous volons sur les Scillies
montrent l’appareil au pièce d’artillerie puis maintenu temporairement puis sur le canal St George dans la mer d’Irlande.
haut commissaire pour en l’air par un parachute. Le bombardier a une aile Le temps était mitigé. Brouillard et vision limitée
la Nouvelle-Zélande, prise dans cet obstacle et son pilote devra le poser mais c’était idéal pour mener une attaque surprise
Hon W.J. Jordan, en urgence. L’équipage est capturé, deux aviateurs de navire. Nous avons volé à deux cents mètres
venu rencontrer étant légèrement blessés. sur l’écume d’une mer couverte de vagues. Aucun
des personels néo- Le Fw Hengst, membre de la 3./KG 27 se navire ! À cette époque, la flotte de ravitaillement
zélandais sur la base ce spécialisant dans la ‘guerre navale’ a décrit une britannique se dissimulait. Nous avons alors coupé
jour-là.
Un officier de la RAF
examine les restes du
Do 17 Z 7T+JL de la
3./K.Fl.Gr. 806, tombé
non loin du château de
Windsor après avoir
été descendu par un
Beaufighter du N° 219
Sq.
tout contact radio pour nous 4D+CP larguer quelques bombes Werner Mölders,
rendre plus invisibles ; mais sur l’aérodrome de Linton-upon- vétéran d’Espagne,
en vain ! Nous avons volé six Ouse. Il y retournera les deux avait acquis une
heures et vingt-deux minutes nuits suivantes. grande renommée
sans voir ami ou ennemi. Nous Le 19 février, le mauvais temps dans le Reich et même
nous sommes reposés à Tours à bride toujours les actions. à l’extérieur des
18h57 ». Six He 111 du I./KG 26 quittent frontières allemandes
De nuit, les incursions ce jour-là Aalborg pour mener comme le prouve
habituelles ont lieu et un Ju 88 des attaques sur l’Écosse. L’un cette couverture du
du II./KG 30 revient à Gilze- d’eux tombe en mer pour une magazine ‘Signal’ de la
Rijen avec des dommages de cause inconnue en emportant fin de 1940.
20% imputables à la DCA. Le tout son équipage.
Fw Stahl repart dans son Ju 88
Le Heinkel He 111 H
A1+CM de la 4./KG
53 victime de cette
arme originale que
fut le “parachute and
cable” !
52 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Bf 109 F de la JG 51.
Dans son ouvrage autobiographique, le F/Lt Guy Gibson cite une anecdote qu’il ne date pas mais qui
dut se situer en février ou mars 1941 : « Une nuit, un Ju 88 isolé passa deux heures à sillonner le ciel
du Lincolnshire, effectuant des navettes entre Hemswell et Cranwell, larguant ici ou là une bombe et
recherchant les Oxford de cette école d’aviation renommée. A chaque fois, il survolait un aérodrome
dont le commandant fulminait. Perché sur le toit d’un des hangars, il vitupérait à la vue de cet intrus. Il
avait été pilote lors de la Grande Guerre, portait la DSO et la DFC et avait volé sur Camel en France.
La vision de ce Junkers se baladant impunément sur son aérodrome baigné dans un beau clair de lune
l’irritait profondément. Il ne put le supporter longtemps et ordonna qu’un Hurricane soit préparé. Il
s’installa dans l’habitacle, attendit le retour du Ju 88 et décolla à la vue du ‘Hun’. Il l’intercepta très
vite et, s’étant placé en position de tir, appuya sur le bouton poussoir de ses armes en se souvenant de
ses combats en 1917 sur Amiens. Mais rien ne se produisit. Il réessaya. Toujours rien ! Il se mit alors
à vitupérer dans la radio qui ne fonctionnait pas. Soudain, le ‘Hun’ vira vers la mer et le commandant
le suivit pendant vingt minutes essayant toujours de déclencher le tir de ses armes de bord. Toujours
en vain ! À regret, il vira vers sa base, concoctant déjà les châtiments les plus sévères à l’encontre
du personnel au sol. Plusieurs sur l’aérodrome affirmèrent qu’on l’entendait hurler alors qu’il était
toujours en l’air. D’autres qu’il mit tous les armuriers de la base aux arrêts de rigueur. Quoi qu’il
en soit, il fut fort ennuyé lorsque le commandant de l’escadrille arriva. ‘Avez-vous tourné l’anneau,
Sir ?’, demanda-t-il poliment. ‘Quel anneau ?’. ‘Mais l’anneau de sécurité du bouton, Sir. Les armes ne
peuvent tirer si vous n’avez pas fait pivoter l’anneau dans le sens contraire des aiguilles d’une montre’.
Le commandant de la base devint tout rouge. Il avait voulu tirer alors que l’armement était sur la
position ‘safe’. La suite de l’histoire ne peut être relatée ».
53
Un Ju 88 de la 3.(F)/121 se serait posé en urgence appareil de ce type appartenant au Kü.Fl.Gr. 106
à Morlaix avec trois blessés à son bord. Comme s’écrase avec son équipage aux Pays-Bas sans que
on ne relève aucune revendication, ces dommages l’on puisse cependant relier les deux faits avec
furent probablement le fait de la DCA. certitude).
De nuit, Swansea et Chatham sont soumises à La 3./KG 26 perd un He 111 lors d’une des attaques
de sérieuses attaques. Un He 111 du III./KG 27 routinières visant des navires cabotant le long de
revient à Avord mais pour se ‘crasher’ à six cents la côte d’Ecosse. Le 1H+KL tombe en mer mais il
mètres de l’aérodrome, tuant son équipage. Un He semble que son équipage fut capturé.
111 de la Stabsstafel/KG 27 regagne Vannes avec Un Hurricane du N° 501 Sq. est perdu près de
des dommages de 25%. Bristol, non du fait de l’ennemi mais en percutant
Le 20 février, le Bf 110 S9+PK de l’Erpr.Gr. 210 le câble d’un ballon. Selon le Sq/Ldr Peter
est abattu en mer du Nord avec son équipage lors Townsend, son pilote, le Sgt David Grimmett À Schiphol (Pays-Bas),
de l’attaque du HMS Bramble. Un Do 17 de la s’entraînait ce jour-là pour le vol de nuit. une bombe d’une
9./KG 3 parti bombarder Wattisham regagne le De nuit, Swansea subit une nouvelle attaque. tonne va être hissée
continent avec deux blessés à bord, le bimoteur L’Uffz Gerhard Baeker, passé du I. au III./KG 1, se sous un Ju 88 A-4 de la
ayant probablement été victime de la DCA. Un souvenait de sa grande frayeur cette nuit-là : « Lors 2./Kü.Fl.Gr. 106.
Ju 88 de la 5.(F)/122 reviendra de même se poser
en urgence à Jersey avec un blessé à bord et des
dommages de 25%.
Dans l’après-midi, cinq Spitfire du N° 41 Sq.
partent mener une patrouille. Ils sont alors surpris
par des Bf 109 du Stab/JG 51 mené par le Major
Werner Mölders qui, en un très court laps de
temps, abat deux adversaires en mer. L’un des
deux tués, le Sgt John McAdam, était un vétéran
de la Bataille d’Angleterre (où il avait été abattu à
trois reprises !).
De nuit, Swansea et Chatham sont de nouveau
attaquées avec précision. Si la défense aérienne
ne revendique aucune victoire sur l’Angleterre,
quatre appareils auraient été perdus au retour,
dont un He 111 du II./KG 27 abandonné par son
équipage sur Romans. Un équipage de la KG 77
se tue à Juvincourt.
Un Bf 110 de
reconnaissance de la
2.(F)/122.
54 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
À Gilze-Rijen, deux
aviateurs du I./NJG
2 discutent tactique
devant un Ju 88
‘Cäsar’.
de la dernière attaque sur Swansea le 21 février, Au retour, deux He 111 de la 6./KG 27 sont
j’eus à affronter la météo exécrable qui allait gêner perdus. Le 1G+FP s’écrase à Aunay-sur-Odon
les opérations en février/mars. Revenant de la côte suite à un problème moteur. Le pilote, le Lt Klaus
occidentale anglaise, j’entrai dans des nuages sur Fritzsche, ainsi que l’observateur sont tués, leurs
la Manche à cinq mille mètres. Brutalement, ma trois camarades étant blessés. Le 1G+CP aurait
vitesse se mit à chuter et je ne pus plus maintenir eu un moteur détruit par la DCA au-dessus de
mon appareil à son altitude normale. Les moteurs l’Angleterre et, sur le chemin du retour, aurait
ne répondaient pas. Je lançai alors mon Heinkel été achevé sur la Manche par un chasseur de
en piqué et sortis des nuages. Le givrage était total nuit. L’équipage évacue l’avion qui ira s’écraser
et la glace recouvrait les moteurs. Il fallait garder à Montebourg (près de Valognes). Le pilote,
tout son calme. J’avais les yeux totalement rivés l’Ofw Karl Riemschneider, resté aux commandes
sur le badin et l’altimètre dont les aiguilles ne pour permettre le saut de ses camarades, quitte
faisaient que descendre. Finalement, nous fûmes l’appareil à trop basse altitude et est blessé.
libérés à mille cinq cents mètres lorsque des blocs Un Defiant du N° 256 Sq. est détruit en se reposant
de glace se détachèrent de l’appareil. Je pus alors à Colerne.
le reprendre en mains et c’est à huit cents mètres Le 22 février, engagé dans une mission de
de hauteur que j’achevai de survoler la Manche surveillance d’un convoi britannique au nord-est
avant de poser la machine à Grévillers ». de Whistable, le Bf 110 F6+WK de la 2.(F)/122
Dernières vérifications
avant de lancer les
moteurs de ce He 111
P.
55
est abattu dans l’estuaire de la Tamise avec ses
deux aviateurs par des Spitfire du N° 74 Sq. Selon
le récit des deux pilotes impliqués, ils se lancèrent
initialement sur un Bf 110 qui leur échappa en
piqué grâce à sa vitesse supérieure. Un autre fut
alors aperçu un peu plus haut. « Les deux pilotes
allaient se succéder pour mitrailler le bimoteur. Le Lt Friedrich
Le P/O Wally Churches dut arrêter son tir quand il Geisshardt du I./
pénétra dans des nuages mais sa tâche fut reprise LG 2 qui remporta
par le Sgt Neill Morrisson qui signala par radio plusieurs victoires sur
que le 110 s’était écrasé en mer. Quand Churches l’Angleterre. La photo
put sortir des nuages, il aperçut l’épave sur les fut prise quelques
flots ainsi qu’une grande tache d’un liquide jaune mois plus tard alors
flottant à la surface. Cela à une quarantaine de que le Gruppe avait
kilomètres à l’est de Margate. En revenant se adopté comme
poser, Morrisson découvrit qu’une balle avait insigne un L (pour
détruit un de ses pneus ». La présence de deux Lehrgeschwader) ainsi
Bf 110 sur les lieux pourrait laisser penser à une que le profil des îles
action menée en Rotte. britanniques.
Des Hurricane du N° 111 Sq. revendiquent un He
115 endommagé lors d’une ‘Dusk Patrol’. Il fut en
fait détruit mais, comme cet engagement semble
avoir eu lieu près de la côte française, ce combat
se rattache plus aux intrusions de la RAF sur le
continent qu’à celles de la Luftwaffe dans l’espace
aérien britannique… Watton suite à un manque de carburant. Les deux
Dans l’après-midi, le He 111 H-3 1G+GM de la 4./ aviateurs l’évacuent mais le radio est tué lorsque sa
KG 27 parti attaquer Yate est abattu par de la DCA toile de parachute se coince dans le plan vertical.
dans l’estuaire de l’Avon. Le pilote, le Lt Bernhard
Rusche, peut sauter et est capturé mais ses quatre Le 24 février, au large de la côte d’East Anglia, un
coéquipiers seront portés disparus. En 1943, Ju 88 est pris à partie près d’un convoi par deux
Rusche bénéficiera d’un échange de prisonniers et Hurricane du N° 257 Sq. L’intrus serait revenu
reviendra dans le Reich. Sur Falmouth, la DCA sans mal mais un appareil du 257e sera porté
endommage à 20% un He 111 du I./KG 28 qui disparu avec son pilote, le P/O Earl Atkins.
reviendra à Nantes. Si les opérations nocturnes de la Luftwaffe
De nuit, Hull est modérément bombardée. Un He resteront limitées, un Blenheim de chasse de nuit
115 de la 3./Kü.Fl.Gr. 506 ne revient pas d’un vol du N° 600 Sq. est perdu lorsqu’il se prend dans
vers la côte orientale écossaise (probablement lors des câbles d’un barrage de ballons en décollant
d’une mission de mouillage de mines). Un autre de Prestwick. Deux Defiant sont détruits sur des
He 115 envoyé le lendemain à la recherche de aérodromes mais sans mal pour les équipages.
naufragés reviendra bredouille. Le 25 février, les Tagjäger doivent repousser une
intrusion de la RAF sur le secteur de Boulogne.
Le 23 février sera une journée quasiment sans Le I./LG 2 repart sur le sud de l’Angleterre, le
histoire. Cependant, lors d’une attaque de navires Lt Friedrich Geisshardt abattant sur Hawkinge le
de pêches près de Fastnet Rock, le He 111 1G+LS Spitfire P7675 du N° 91 Sq. piloté par le Sgt James
de la 8./KG 27 a un moteur détruit par les tirs de Gillies. Ce dernier, sain et sauf, pourra ‘vomir’
DCA de deux petits bâtiments escortant la flottille. son avion sur un aérodrome du Kent. Gillies se
Le pilote, le Fw Arnold Pütz, tente de poser son distinguera les années suivantes mais sera tué en
appareil en Irlande neutre malgré la brume qui 1944 en Extrême-Orient.
recouvre le secteur. L’avion sera vu survoler la Quelques bombardiers partent de nuit vers Hull
côte irlandaise et lancer des fusées mais s’abattra et Londres et le Sq/Ldr Peter Townsend menant
avec tout son équipage dans la baie de Kenmare le N° 85 Sq. abat près de Lavenham le Do 17 Z
près de la plage de Clonee. U5+PM de la 4./KG 2 (cf. encadré).
De nuit, quelques intrusions allemandes ont lieu Revenant d’une attaque de Düsseldorf, un
mais sans engagement dans le ciel britannique. Wellington du N° 218 Sq. est victime du Fw Ernst
Deux bombardiers s’en reviennent cependant Ziebarth du I./NJG 2 sur l’aérodrome de Marham
endommagés sur le continent. L’un d’eux ramène (un membre d’équipage tué).
un tué, victime de la DCA. Le I./KG 27 qui effectuait déjà de nombreuses
Aux Pays-Bas, un Ju 88 C-4 de la 3./NJG 2 missions en mer va voir ce type d’opérations se
s’écrase à Gut Valkenburg alors que le Fw Johann multiplier. Selon R. Hengst (3./KG 27) : « Nous
Schuster revenait se poser à Gilze-Rijen après une avions eu une visite du Feldmarschall Hugo
mission sur l’Angleterre. Les trois aviateurs sont Sperrle et devinions que quelque chose se tramait
tués. Cet équipage, qualifié de ‘peu expérimenté’, car pareil passage d’une haute personnalité devait
devait avoir été versé récemment à l’unité. nécessairement avoir un but. Bientôt, nous avons
Un Defiant du N° 151 Sq. doit être abandonné sur appris que, le 24 février, une partie de notre 3e
56 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Le Hptm Hermann- Staffel devrait gagner Brest-Morgat sur la côte de la directement sur la mer. Du balcon, nous pouvions
Friedrich Joppien Manche. Nos pertes en sous-marins augmentaient cracher dans les flots. Des camions venaient nous
se prépare. Étoile à cette époque et la visite du maréchal visait à chercher pour nous amener à l’aérodrome puis
montante de la assister la Kriegsmarine. Le transfert à Brest nous ramenaient ».
Tagjagd au cours impliquait plus de reconnaissances armées sur
des premiers mois la mer mais également des attaques de convois et Le 26 février, en matinée près de Douvres, six
du conflit, Joppien autres bâtiments. Nous ne savions comment faire Hurricane du N° 56 Sq. effectuaient une patrouille
reçut la Ritterkreuz et manquions totalement d’expérience pour mener lorsqu’ils sont surpris par des Bf 109 du IV./JG
le 16 septembre 1940 des attaques à basse altitude sur des navires. 51. L’un d’eux est abattu dans la Manche avec
mais sa carrière allait Nous avons donc suivi un stage de trois jours de son pilote par le Kommandeur, l’Oblt Hans-Karl
brutalement prendre navigation ainsi que des cours de navigation aux Keitel.
fin lors d’un combat astres, d’emploi du sextant, d’étude des cartes Dans l’après-midi, la JG 51 repart sur le Kent pour
mortel sur l’URSS le marines, de sauvetage en mer, etc. Un une chasse libre et tombe sur six appareils du N°
25 août 1941. lieutenant de marine versé en ces 615 Sq. ayant décollé de Kenley. Trois Hurricane
matières fut notre instructeur. sont abattus et un pilote tué. Il ne s’agissait
L’aérodrome se situait quelque pas moins que du W/C Raymond Holmwood,
peu au nord-est de Brest. Nous, le C.O. du Squadron et premier Australien à
les aviateurs, étions cantonnés mener une escadrille britannique. Holmwood
à Camaret de l’autre côté de évacue son appareil mais, comme le relatera
la baie. Nous logions dans un René Mouchotte : « Il a sauté de son avion en
hôtel ou une pension donnant flammes et, son parachute ayant pris feu, il s’est
Le N° 85 Sq., équipé de Hurricane, avait été basé à Debden pour prendre part aux opérations de nuit
sur monomoteur monoplace. Comme la plupart de ses collègues, son leader, le Sq/Ldr Peter Townsend,
n’appréciait guère ce type de mission imposé mais dut, à l’instar de ses camarades, faire contre mauvaise
fortune bon cœur. Le 25 février, il remporta son unique victoire nocturne : « Le 25, je partis en patrouille
de nuit. Après avoir décollé de Debden, je grimpai vers la voûte sombre du ciel sans lune. La visibilité
était bonne. Le contrôleur du secteur m’indiqua mon cap : 90°, plein est. Il me dit de me brancher sur le
canal B ; la fréquence du radar d’interception au sol. (…) On me mit sur orbite à trois mille cinq cents
mètres au-dessus du barrage de ballons de Harwich. Un quart d’heure avant mon décollage, le Do 17
U5+PM de la 4./KG 2 avait quitté Merville qui, en mai 1940, avait été la base de la 85e escadrille. Aux
commandes se trouvait le plus jeune membre de l’équipage, le Lt Hans Patscheider (21 ans). (…) Pour
cette mission, le Dornier transportait seize bombes explosives et une quantité de bombes incendiaires.
L’équipage devait attaquer nos terrains d’aviation. Le bombardier traversa la côte française à deux
mille mètres. Il poursuivit son escalade au-dessus de la mer du Nord jusqu’à quatre mille mètres. Il
arriva en vue des côtes anglaises, juste au-dessus de Harwich où je tournais patiemment depuis une
demi-heure. Tout à coup, le contrôleur me dit : ‘Cap au 210, sud sud-ouest.(…) L’avion avait atteint la
côte. Les projecteurs essayèrent de le rattraper. Ils le perdirent et s’éteignirent, me laissant seul dans
le noir et maudissant le sort qui semblait nous poursuivre, nous les chasseurs de nuit. Mais, désireux
de tromper l’adversaire et de se faire passer pour un avion ‘ami’, l’équipage allemand alluma deux
feux de position. Soupçonnant un traquenard, je virai sur l‘aile. (...) Je me rapprochai en prenant
garde de rester caché. (...) Pour disposer d’une meilleure vision, j’ouvris ma verrière. (...) Je voulais
être certain que cet avion n’était pas un des nôtres. (...) Je me déplaçai vers la gauche et reconnus
Le Squadron Leader alors, sans erreur possible, peinte sur le côté du fuselage la croix noire de l’aviation allemande. (…)
Peter Townsend Tout se passa très vite. Arrivant sur la gauche du bombardier, un peu au-dessus de lui, toujours caché
(accroupi avec la des projecteurs s’étant rallumé, je restai silencieux jusqu’au dernier moment. Puis j’ouvris le feu. Un
mascotte) et quelques- tir bref – une salve de trente coups – et tout fut consommé. Les terribles mitrailleuses De Wilde firent
uns de ses camarades leur effet. Les commandes du Dornier furent touchées, ses bombes incendiaires s’enflammèrent. Le
du N° 85 Squadron. bombardier plongea en spirale vers l’est en laissant derrière lui une traînée de fumée et des étincelles
auxquelles se mêlaient les balles traçantes du mitrailleur qui tirait encore.
Le Dornier se redressa et sembla un instant planer. Trois hommes sautèrent
en parachute. Le radio, l’Uffz Paul Schmidt, fit de même mais la toile de
son parachute se prit dans le plan stabilisateur qui la réduisit en lambeaux.
Le Dornier piqua du nez de nouveau. Ses feux toujours allumés, sa soute
pleine de bombes, il s’écrasa près de Sudbury dans le Suffolk. J’aperçus
très loin la lueur d’une gigantesque explosion. Puis, à ma grande surprise,
d’autres bombes éclatèrent à l’endroit de l’impact : un autre bombardier
allemand qui suivait celui que je venais d’abattre l’avait confondu avec un
objectif britannique en flammes. La Home Guard ne tarda pas à capturer
l’équipage du Dornier. Patscheider avait une jambe cassée, ses deux
équipiers étaient indemnes. Le corps de Schmidt fut découvert non loin
de là. Ce combat constitua la première et seule victoire de nuit de la 85e
escadrille sur Hurricane ».
Mars 1941
Le 1er mars, la Luftwaffe n’opère que peu pendant aviateurs vont entrer en captivité (cf. encadré). Le
la journée. Un Ju 88 de la 7./KG 77 codé 3Z+DR I./KG 26 opérait comme on le sait, au départ de
volant vers Cardiff est néanmoins intercepté par Stavanger, ayant quitté la France (et Beauvais) à
trois Spitfire du N° 145 Sq. et abattu en mer au la fin janvier. Une lourde bombe est
large de St Catherine’s Point. L’équipage périt au De nuit, quelques opérations sont menées sur Hull, attachée sous le ventre
complet Bristol, Southampton et Cardiff avec une centaine d’un He 111. La tâche
En Écosse, le He 111 1H+BK de la 2./KG 26, d’appareils. Le Do 17 Z 3Z+DR de la 7./KG 77 est des mécaniciens était
victime de la DCA de Banff, doit être posé sur abattu avec son équipage pour une cause inconnue ardue, surtout lorsque
la mer au large de Melrose Head. Les quatre (DCA ?) près de Cardiff. la boue s’en mêlait.
60 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Ayant subi des En dépit de l’importante brume couvrant abattu un Do 17 lors d’une patrouille effectuée au
dommages au cours l’Angleterre (ce qui entraînera la perte de nombreux large de Cromer. Il pourrait s’agir d’un Do 215
de sa mission sur appareils du Bomber Command revenant de de la 2.(F)/ObdL ‘crashé’ et détruit près d’Evreux
l’Angleterre, ce Ju 88 Cologne), des Ju 88 C Nachtjäger viennent ‘rôder’ (équipage blessé). Mais ce n’est pas certain…
C-4 s’est posé sur le autour des aérodromes de la RAF. Un équipage de Seule une poignée d’appareils du I./KG 28 aurait
ventre à son retour à la 4./NJG 2 revendique ainsi un ‘Blenheim’ que procédé à des mouillages de mines au cours de la
Gilze-Rijen l’on ne peut identifier mais qui pourrait être un des nuit.
sept appareils (Wellington, Whitley,…) perdus Le 3 mars voit quelques engagements de
sur l’Angleterre au retour d’Allemagne. Deux Ju chasseurs. Le I./JG 51 couvre une attaque de
88 C s’endommagent légèrement en revenant à Jabos (chasseurs-bombardiers) sur Manston. Le
Gilze-Rijen. Lt Martin Ottmer de la 3./JG 51 est abattu par le
P/O Alan Campbell du N° 54 Sq. (un vétéran de
Le 2 mars on note une ‘negligible activity’. Le la Bataille d’Angleterre). Ottmer saute mais son
Sq/Ldr Stanford Tuck du N° 257 Sq. signale avoir parachute ne se déploie pas et il s’écrase à Brenzett.
Un Bf 109 de la JG 51
à Mardyck.
61
Selon l’Oblt Hatto Kuhn, pilote à la 2./KG 26 : « Notre équipage décolla le 1er mars 1941 tard dans
l’après-midi pour attaquer un convoi qui avait été signalé longeant la côte écossaise. Au rase des
vagues, pour éviter toute détection, nous avons atteint les lieux au coucher du soleil et avons aperçu ce
convoi. Dans l’obscurité croissante et venant bas sur l’horizon, nous avons entamé notre attaque. Nous
avons survolé le plus gros cargo et largué deux bombes de deux cent cinquante kilos. Malheureusement,
ce fut juste à côté. Nous dûmes dès lors effectuer un second passage et avons de suite été pris dans des
faisceaux de balles traçantes. Le radio cria : ‘Moteur gauche en feu !’. J’essayai de juguler l’incendie
mais il se développa en dépit de mes efforts. L’eau et le ciel se confondaient. Nous étions à quelques
mètres au-dessus des flots et l’horizon n’était plus visible. Il fallait gagner de l’altitude. Avec difficultés,
je pus soulever l’avion mais, à cent mètres de hauteur, il avait déjà tellement perdu de puissance que
je ne parvenais plus à le maîtriser. Je tentai tout ce qui était possible de faire mais ne pouvais même
pas virer pour gagner de la vitesse car, avec le moteur gauche détruit, nous risquions de nous écraser
en mer. J’envisageai de gagner la côte mais les falaises étaient bien trop hautes. Il ne nous restait plus
qu’à amerrir. Je donnai l’ordre à l’équipage de préparer le canot pneumatique. Je volai vers l’ouest
pour me rapprocher de la côte. Nous ricochâmes trois ou quatre fois sur la mer avant que tout se
calme. Un silence s’installa lorsque j’eus coupé les gaz. Nous ne perdîmes pas de temps. Le radio et
le mécanicien de bord avaient largué le canot et le maintenaient. Je m’extirpai de mon siège et, avec
l’observateur, sautai à l’eau puis grimpai dans le canot. Nous avons alors énergiquement pagayé pour
nous éloigner de l’épave en train de sombrer. Notre radio puisa dans les provisions de secours pour
boire un petit coup mais ses mains étaient si glacées que la bouteille de cognac lui échappa, tombant
en mer. Nous avons tous regardé cela avec consternation. Nous avons finalement atteint une plage de
galets. Tout ce que nous avions et qui pouvait intéresser l’ennemi avait été jeté par-dessus bord. Nous
avions hésité à jeter nos pistolets mais finalement ils y sont également passés. De loin, nous avions
aperçu des silhouettes sur la falaise. Il s’agissait de la garde côtière. Le Chief Constable nous cria d’en
haut : ‘Avez-vous des armes ?’. Nous lui avons répondu que non et il nous a dit de grimper. Quand ce
fut fait, nous fûmes amenés au poste de police de Banff. On nous donna des vêtements secs ainsi que
du thé et des sandwichs. Notre capture avait déjà été annoncée à l’autorité supérieure. La même nuit,
nous avons été interrogés par des officiers de la RAF qui voulaient exploiter notre fatigue et notre
tension. Le lendemain, nous avons été séparés et amenés par camion à Aberdeen. Puis nous avons été
répartis dans des centres d’interrogatoire. Ce fut un bien pour nous de ne pas encore savoir que nous
allions passer six années derrières les barbelés. En 1976, j’appris d’officiers de la RAF que l’on avait
voulu récupérer notre avion. Mais, alors qu’on la sortait de l’eau, une tempête se déclencha et l’épave
retomba en mer. En 1975, une équipe de chercheurs repêcha un des moteurs actuellement exposé au Un He 111 de la KG 26
musée de Glasgow ». sur la Norvège.
62 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Le P/O Joseph Lockwood est alors victime du équipage, un aviateur étant blessé dans le saut.
Hptm Joppien qui allait revendiquer deux Spitfire. Les Blenheim du N° 23 Sq. repartent sur le
Son appareil ira s’écraser près de Maidstone avec continent pour tenter d’abattre des bombardiers.
le corps du pilote. Une victoire sera revendiquée sur Merville et une
Profitant du retour d’un temps plus favorable, autre près de Lille. Mais un Blenheim est perdu
la Luftwaffe intensifie ses intrusions. La 3./KG corps et biens à Guînes (DCA, ennui technique
27 perd deux He 111 mais dans des missions ou faute de pilotage ?). L’apppreil de Merville
probablement plus navales que terrestres : était un He 111 du I./KG 53 qui put se poser sans
-le 1G+AL se pose en urgence sur l’île de Lundy trop de mal avec deux blessés à bord et cinquante
vers 15h00, ayant eu un moteur détruit par la DCA impacts.
(même si le radio avait envoyé un dernier message
signalant la présence de chasseurs). Les aviateurs Le 4 mars, le temps qui s’améliore progressivement
vont tenir la population locale à distance en pousse la Luftwaffe à multiplier les intrusions
brandissant leurs armes, cela pour leur permettre en tous genres dont plusieurs missions de
d’incendier leur appareil. Puis ils se rendront. reconnaissance.
On relèvera cependant qu’un autre aviateur de la En matinée près de l’île de Wight, un Ju 88 de la
KG 27 affirmera que l’avion tomba en mer près 3.(F)/121 est pris en chasse par des Spitfire du N°
de l’île et qu’il lança du matériel de survie aux 152 Sq. appuyés peu après par des Hurricane du
cinq aviateurs ayant pu grimper dans le canot N° 302 Sq. Le bimoteur pourra, en multipliant les
pneumatique… ; manœuvres évasives, échapper à ses poursuivants
-le 1G+HL est endommagé par des chasseurs sur bien qu’étant mitraillé de toutes parts. Il ira se
la mer d’Irlande et ira se ‘vomir’ dans le comté poser à Dinard avec des dommages de 30% - ce
de Wexford en Irlande neutre. Un aviateur a été qui est finalement fort peu avec six chasseurs aux
tué. Les quatre autres seront internés et finiront la trousses…
guerre au camp de Curragh. Un Ju 88 A-4 codé A6+LH de la 1.(F)/120 est
Le 1G+HL de la 3./ De nuit, Cardiff est sérieusement bombardé et abattu sur les îles Orkney (Westray Island) par
KG 27 posé en Irlande plusieurs aérodromes sont mitraillés. Le He trois Hurricane du N° 253 Sq. lors d’une mission
du sud (Comté de 111 1H+GR de la 7./KG 26 est perdu. Victime de reconnaissance visant la grande base navale
Wexford) le 3 mars probable de la DCA, il serait tombé en mer avec de Scapa Flow. Ses trois occupants seront portés
1941. On distingue son équipage au large de la côte du Pays de Galles. disparus.
tout juste l’insigne du Un He 111 de la KG 53 est endommagé de même De nuit, un raid plus important que les précédents
Gruppe sur la paroi de par la DCA sur Newcastle et, sur Eindhoven, un est dirigé contre Cardiff. Trois appareils allemands
l’habitacle. Ju 88 de la 2./KG 30 sera abandonné par son sont perdus :
63
-un Do 17 de la 8./KG 77 qui doit tomber en I./KG 27. Le 1G+EK de la 2e escadrille est en
mer ; effet abattu en mer près de la côte d’Irlande du sud
-deux He 111 de la 1./KG 28 ne reviendront pas lors d’un rare et assez exceptionnel duel avec un
en France. Le 1T+BH Sunderland du N° 10 Sq.
est victime d’un Mais, de nouveau, cet
Beaufighter du N° 604 engagement relève plus
Sq. piloté par le Sq/ de la guerre aéronavale
Ldr Michael Anderson que des actions dirigées
et plonge en mer au contre le territoire
large de Beer Head ; le britannique proprement
1T+AH, emportant le dit. Toujours sur ce
Staffelkapitän, le Major secteur, un Blenheim du
Dr Roman Auernig, est N° 236 Sq. endommage
abattu à Barry lorsque un He 111 du I./KG 27, Faire part de décès du
la DCA de Cardiff blessant trois de ses Fw Willi Ernst, pilote
frappe de plein fouet aviateurs. du He 111 1T+BH du
la mine chargée dans I./KG 28 abattu au
la soute. Dans les deux Le 6 mars, quelques large de Beer Head la
cas, l’équipage au ‘raiders’ allemands nuit du 4 au 5 mars
complet périt. Le major opèrent de jour, étant 1941.
autrichien Auernig était combattus par les
officier dans l’armée Spitfire du N° 91 Sq.
de son pays. Après qui revendiquent un
l’Anschluss, entré dans appareil endommagé.
la Luftwaffe, il avait Au moins un Do 17 du
suivi une formation III./KG 3 revient à sa
d’observateur. En trois base avec un tué à bord.
années, il avait servi La nuit voit surtout
dans diverses unités l’intrusion d’appareils
(dont la KG 4) ainsi venus mouiller des
qu’au sein de plusieurs mines.
écoles. Le 7 mars, le temps
Le 5 mars ne voit que des opérations très étant toujours mauvais, des Defiant sont envoyés
sporadiques. La seule perte allemande à proximité en patrouille de jour et combattent un bombardier He 111 de la KG 55
de la Grande-Bretagne est un nouvel appareil du ennemi sur la côte anglaise. avec sa bombe.
64 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un équipage du I./KG La 2./Erpr.Gr. 210 perd un nouveau Bf 110 abattu De nuit, peu d’appareils allemands pénètrent dans
30 embarque dans son sur Harwich par les tirs de la DCA du HMS l’espace aérien des îles britanniques. Néanmoins,
Ju 88 à Eindhoven. Guillemot (ancré dans le port) puis posé en mer. la 5./KG 30 perd un appareil et son équipage, le
Comme ces appareils opéraient souvent par paire, 4D+DN de l’équipage du Lt Franz Steinacker
l’équipage du second Bf 110 larguera un canot (victime présumée de la DCA). Selon P. Stahl :
pneumatique aux deux naufragés mais il tombera « ‘Micky’ Steinacker n’est pas revenu d’un vol
trop loin et les infortunés aviateurs, probablement à l’ennemi lors d’une attaque de navires devant
engoncés dans leur lourde combinaison de vol la Humber. Nous l’avons longuement cherché
imbibée d’eau, seront portés disparus. jusqu’à ce que nos réservoirs soient vides. Rien ! Il
En matinée, le Do 17 5K+MK de la 2./KG 3 s’écrase y en a peu en vie. J’ai été fier de l’avoir eu comme
en mer à Gorleston près de Great Yarmouth, ayant ami ainsi que les trois gars de son équipage.
probablement été de même touché par la DCA de Maintenant, je suis le plus ancien à l’unité ».
Hopton. Un aviateur est tué ; les trois autres sont
capturés. Le 8 mars, le Ju 88 F6+BM de la 4.(F)/122
Des Seeräubeangriff ont lieu cependant survolait le secteur de Skegness au cours d’une
quotidiennement. Ainsi, à 12h30, les Canadiens mission de reconnaissance lorsqu’il est intercepté
du N° 401 Sq. basés depuis peu à Digby voient par deux Spitfire du N° 266 Sq. qui le prennent en
un appareil allemand larguer cinq bombes sur chasse sur la mer. Le bimoteur s’y écrase avec son
l’aérodrome. L’une d’elles, munie d’un système de équipage mais la dernière rafale d’un mitrailleur
retardement, devra être détruite par les démineurs. abat de même le F/O Frederick Ferris.
Les dommages furent minimes et se résumèrent à De nuit, et en dépit de l’importante couverture
des vitres brisés et des uniformes salis lorsque les de nuages, la Luftwaffe repart principalement
hommes coururent se mettre à l’abri. sur Londres ainsi que sur quelques autres
Un équipage du I./KG 4 (Lt Rudolph) et un autre objectifs secondaires. La DCA de Newcastle
du II./KG 4 (Oblt Knauth) sont envoyés mener abat le Ju 88 A-5 4D+FM de la 4./KG 30 piloté
une mission spéciale sur une importante usine par le Staffelkapitän, le Hptm Karl-Ferdinand
de munitions à Newark-upon-Brent. Elle sera Schneider. L’appareil serait tombé en mer au large
attaquée d’environ quatre-vingts mètres d’altitude de Lowestoft emportant ses quatre occupants.
et des coups au but auraient été observés ; ce qui Selon P. Stahl : « Son dernier message radio fut :
vaudra aux deux équipages d’être cités dans le ‘Un moteur en feu !’. Nous n’avons plus eu de ses
communiqué officiel de la Luftwaffe. nouvelles. Son équipage m’était inconnu ».
Plus au nord, le I./KG 26 poursuit ses opérations Les Blenheim de chasse de nuit du N° 23 Sq.
sur le secteur écossais en prenant parfois bien trop repartis sur le continent revendiquent deux
de risques. Le He 111 1H+HH de la 1e escadrille bombardiers endommagés sur le secteur de
vole ainsi si bas lors de l’attaque d’un navire qu’il Beauvais. Un Defiant du N° 264 Sq. percute un
percute son mât et s’écrase dans la Tay. L’équipage autre appareil près de Biggin Hill, étant détruit
complet est tué. dans la collision.
65
Le He 111 1G+FN du II./KG 27 revient vers où le bombardier vire, tire une rafale de trois à
Chartres mais s’écrase peu avant à deux quatre secondes et dégage à cent mètres. Green
kilomètres de Houville, son équipage étant tué. Le 2 attaque à son tour et, pendant cette attaque en
bombardier avait probablement été endommagé trois-quarts arrière, le feu défensif du bombardier
sur l’Angleterre. Un Ju 88 de la 6./KG 30 revient cesse. Le Ju 88 continue sa course vers le sud
endommagé à Gilze-Rijen et un He 111 de la KG et, finalement, sort du piqué à mille cinq cents
1 à Glisy. A Châteaudun, c’est un Ju 88 du II./KG pieds pour voler horizontalement. Le mitrailleur
76 qui peut revenir quoique avarié. a certainement été tué et le bombardier allemand
Le 9 mars, si la journée semble avoir été tranquille, ne peut riposter et se défendre. (…) Les deux
Londres subit de nuit un nouveau bombardement premiers Spitfire se sont remis en formation
d’importance. derrière le bombardier, plus haut. de Hemptinne
Les « objectifs d’opportunité » étaient cependant appelle :‘Green 3, attaque ! Poursuis ton attaque
toujours d’actualité comme s’en souvenait G. très près et tire quand tu seras certain de l’avoir.
Baeke (I./KG 1) : « Le 9 mars, nous repartions N’aie pas peur. Il ne peut plus tirer’. Le jeune
vers Londres. Comme T.O. (officier technique), exécute un battement d’ailes et se laisse glisser
je devais décoller en dernier puisque j’étais dans une magnifique courbe de poursuite qui
chargé de vérifier si tous les appareils étaient bien finit dans la queue du Ju 88. Il tire une longue
partis et n’avaient pas de problèmes techniques. rafale, trop longue… Il fait son break tellement
J’attendais donc au QG mon ordre de départ près de l’empennage qu’il manque d’aller
lorsqu’un message fut reçu. Le Lt Erich Taeger l’emboutir et, comme il dégage vers le bas, il se
avait repéré un convoi près de Hastings faisant retrouve seulement à cinquante pieds au-dessus
route vers Douvres. Je décidai de l’attaquer. de l’eau. À ce moment du combat qui n’a duré
Après le décollage, je mis le cap sur un point entre que quelques secondes, le Ju 88 entre dans des
Hastings et Douvres Comme je devais voler à nuages qui annoncent la côte, reparaît un peu
environ cinq cents mètres de hauteur pour larguer plus bas et se fracasse sur la mer ». Malgré la Deux aviateurs de la
mes bombes, je me maintins à cette altitude. A description très précise de ce combat, l’appareil KG 76 viennent de
hauteur de Douvres, je fus pris sous le feu d’une serait revenu se poser à Caen avec des dommages recevoir l’EK II (croix
DCA intense. Mais je ne vis aucun navire. Je virai de 40%. de fer de 2e classe).
alors vers Hastings puis revins vers Douvres. Où
était donc ce convoi ? Il n’avait tout de même
pas disparu… Devant Douvres, la brume cachait
la mer mais je repérai le signal lumineux d’un
navire dirigé vers le port. J’avais trouvé ma cible.
Je volai sur le navire le plus important et larguai
successivement six bombes de deux cent cinquante
kilos (quatre dans la soute et une sous chaque aile).
D’importants tirs de DCA débutèrent et je virai
sur le convoi. Le navire que j’avais visé explosa
et le puissant souffle secoua ma machine. Mon
mitrailleur me signala que deux bombes avaient
frappé de plein fouet le navire qui avait alors
explosé. Il devait être chargé de munitions ».
Deux bombardiers sont légèrement endommagés
mais ce dut être de jour et sans que l’on puisse
rattacher ces incidents à des combats.
La Grand Street de
Birmingham après les
bombardements subis
en 1940 et 1941.
69
Un Junkers Ju 88 au roulage sur la piste bétonnée d’un aérodrome français lors du Blitz. La peinture noire de quasiment tous les
marquages rend l’appareil anonyme, seule la lettre individuelle “D” du code ayant été conservée.
2147/W - probablement près des côtes françaises G1+OP à Witness sous les tirs d’un Hurricane du
puisque le radio est signalé décédé à Cherbourg N° 151 Sq. De l’équipage de cinq hommes, trois
De nuit, Birkenhead (Liverpool) est sévèrement peuvent sauter et sont capturés. Parmi les tués,
bombardé. Lors de cette attaque, la Luftwaffe perd le Staka, l’Oblt Wolfgang Berlin, volant comme
plusieurs appareils. observateur.
-Le premier, le Ju 88 F1+BT de la 9./KG 76, sera -Le 1G+DM, un He 111 de la 4./KG 27, s’écrase
l’élément central d’un épisode très confus. Bien en mer au large de Hastings, ayant probablement
que l’on signale le retour en France en avril 1941 été abattu par un Defiant du N° 264 Sq. Les quatre
du III./KG 76 après avoir été rééquipé et entraîné aviateurs sont tués.
sur Ju 88, il semble que des éléments de ce Gruppe -Un He 111 du Stab III./KG 26, le 1H+CD, est Un équipage tchèque.
parvinrent déjà à Cormeilles-en-Vexin vers le 10 perdu avec son équipage, ayant été probablement Le F/O Valstimil
mars. Atteint par la DCA sur Liverpool, le pilote abattu par le F/Lt John Cunningham du N° 604 Sq. Vesely (à g.), ex-pilote
de ce Junkers, le Fw Günther Unger, donne l’ordre qui revendiqua une victoire sur Middle Wallop. de l’Armée de l’Air,
d’évacuation. Il saute alors lui-même sur la mer Cet appareil est également cité comme étant de la est vu ici alors qu’il
d’Irlande et, en dépit de son plongeon dans l’eau Schulstfaffel, l’escadrille d’écolage. volait en Beaufighter
glaciale, réussira à atteindre la côte après avoir nagé -Un He 111 du Stab/KG 27 est contraint d’amerrir avec son radio, le Sgt
deux heures. Il sera de suite capturé tout comme au large de Cherbourg (équipage sauvé). Zbyzek Nevas. La
l’avaient été peu avant ses quatre camarades. Une -Enfin un He 111du III./KG 26 revient se poser en nuit du 12 au 13 mars,
demi-heure plus tard, un Defiant du N° 307 Sq. urgence à Saint Malo, ses quatre aviateurs étant Vesely fut abattu en
piloté par le Sgt Kazimierz Jankowiak intercepte un blessés. Defiant par un He 111.
‘He 111’ qu’il tire à bout portant
mais qui continue néanmoins
sa route. Il se serait agi du Ju
88 F1+BT qui, abandonné et
allégé, avait viré vers l’ouest.
Finalement, l’appareil fantôme
sera pris pour cible par la DCA
de Birmingham, s’abîmant à
Wichbold…
-Le Heinkel 111 G1+GN de la
5./KG 55, victime d’un Defiant
du N° 264 Sq. tombe près de
Ockley (Surrey). Deux aviateurs
peuvent sauter mais l’un d’eux
se tue, parachute non déployé.
-La 6./KG 76, engagée sur
Portsmouth, perd le Ju 88 F1+OP
abattu à Kingston Deverill par
un Beaufighter du N° 604 Sq.
Il n’y aura qu’un survivant de
l’équipage.
-La 6./KG 55 perd le He 111
70 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Arrivée en unité
Le Leutnant pilote Heinz Wollschläger fut versé vers mars 1941 à la 6./KG 55. Son arrivée en unité allait
lui rester en mémoire : « À Chartres, mon nouveau Kapitän, l’Oblt Wolfgang Berlin (un observateur),
me demanda d’emblée si je savais voler. Ce qui m’a naturellement ‘réjoui’ ! Mais le Spiess (sous-officier
chargé de la discipline) qui était présent me dit : ‘Herr Leutnant, vous avez l’honneur d’entrer dans
une escadrille de la mort (Todesstaffel). Nous avons été reformés trois fois’. Ce n’était pas de nature
à me rassurer. Nos quartiers étaient à la Revaudière à Lèves, au nord de Chartres. Le ravitaillement y
était fort bon. Avec deux autres sous-lieutenants, je formais une sous-section au sein de l’unité. Tous les
officiers arboraient des décorations. Nous, nous n’en avions aucune. Tous les soirs, nous préparions
les vols de la nuit. Un jour que je prenais mon petit-déjeuner, je demandai où étaient les autres. Il me
fut répondu qu’ils n’étaient pas encore revenus de mission. Cela me ‘sonna’ car ils auraient dû être
de retour depuis longtemps. Un coup de fil à l’état-major nous apprit qu’effectivement ils n’étaient
pas revenus, y compris le Staka Berlin. Je me remémorai alors les paroles de ‘bienvenue’ du Spiess
et cela doucha mon enthousiasme. Il ne restait à l’escadrille qu’une machine alors en réparation aux
Werft (ateliers). Je devais la prendre le soir même pour mener ma première mission de guerre. Je
dus auparavant effectuer un vol d’essai. Je ne sais plus qui était dans mon équipage mais un Prüfer
(ingénieur) monta à bord pour tester la machine. Nous ne relevâmes qu’un défaut à la dérive, défaut
qui devait être vite corrigé après un bref passage aux ateliers. Entre-temps, la nuit était tombée et on ne
voyait plus rien au sol. Je m’orientai en me basant sur une petite lampe rouge brillant dans le clocher
de la cathédrale puis pus retrouver les vagues lueurs de la piste d’atterrissage. Je me posai avec de
Un He 111 de la KG 55 la chance et j’étais en train de rouler vers les bâtiments de l’aérodrome lorsqu’un choc violent se
lors d’un vol diurne. produisit. Je venais de percuter un autre appareil chargé de bombes qui avait dû faire un atterrissage
L’insigne de l’escadre d’urgence suite à la perte de puissance d’un de ses moteurs. Les deux avions étaient imbriqués l’un
n’a pas été recouvert dans l’autre mais, heureusement, les bombes ne détonnèrent pas et, de plus, on ne déplora aucun blessé
de peinture noire. parmi les deux équipages ».
71
L’avant du Boulton
Paul Defiant NF
Mk.1 N1801/PS-B de
l’équipage du F/O
Frederick Hughes et
du Sgt Fred Gash du
N° 264 Squadron. Le
He 111 G1+GN de la
5./KG 55, abattu dans
la nuit du 12 au 13
mars 1941, leur fut
attribué.
Ces sérieuses pertes confirment la recrudescence Le Fw Peter Stahl de la 6./KG 30 allait opérer
des opérations sur l’Angleterre ainsi que le cette nuit-là : « Deux missions sur l’Angleterre ce
renforcement de la défense tant en chasse qu’en jour-ci. Nous allons partir de nuit vers Liverpool/
DCA. Birkenhead. Ce qui nous fera un aller et retour
Le N° 96 Sq. a un Defiant fortement endommagé, sur toute la largeur de l’île. Nous effectuons un
son pilote étant sérieusement blessé. Il s’agissait vol peu agréable. Lentement, nous grimpons sur
du F/O Vlastimil Vesely qui avait déjà derrière le Wash. Des projecteurs nous traquent mais il n’y
lui une longue carrière. Pilote dans l’aviation a aucun tir de DCA. Nous gagnons les six puis les
militaire tchèque, il avait fui son pays en 1939 sept mille mètres. Nous montons dans un tunnel
pour rejoindre la France. Pilote à l’Armée de l’Air, de lumière. À gauche et à droite, des tirs de DCA
il avait été crédité d’un SM.79 le 17 juin 1940, sur Nottingham/Derby et Sheffield/Manchester.
seul pilote tchèque à avoir abattu un avion de la (…) Nous arrivons sur l’objectif. Les installations
Regia Aeronautica lors de la campagne de mai/ portuaires qui s’étalent sur des kilomètres sont la
juin. Ayant gagné la Grande-Bretagne, il servait à proie des flammes. Des navires sont en feu. Nous
la chasse de nuit. Cette nuit-là, alors qu’il attaquait larguons les bombes comme si c’était une routine,
un He 111, son mitrailleur canadien sembla perdre la DCA ayant tellement à faire qu’elle ne nous gêne
les pédales et ne tira pas. Un mitrailleur allemand pas. Le retour a lieu rapidement sous la menace
en profita pour envoyer le Defiant au tapis, Vesely de tirs de canons antiaériens. Après quatre heures
étant grièvement blessé. Il reviendra au combat en et vingt minutes, nous nous reposons à Gilze-
1942, remportera une ou deux victoires puis, en Rijen et notre appareil gagne son emplacement
1945, reviendra en Tchécoslovaquie. Persécuté par habituel. Le Lt Arno Hick a connu bien des
le pouvoir communiste, il regagnera le Royaume- frayeurs lors de cette nuit. Il a été intercepté lors
Uni, redeviendra pilote à la RAF et décédera en du survol du Wash par un chasseur qui a détruit
Australie. un des moteurs du Ju 88 et sérieusement blessé
Boulton Paul Defiant NF Mk.1 N1801/PS-B servant au N° 264 Squadron. Cet appareil était la monture du
F/O Frederick Hughes et du Sgt Fred Gash. Hughes remporta 5 victoires sur cet avion. L’appareil était
baptisé « Coimbatore II » du nom de la ville de la province de Madras dont le gouverneur
avait financé l’achat d’avions. L’insigne est la « main de l’Ulster ».
72 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Hick à une jambe. Hick a pu larguer les bombes en mer avec son équipage de trois hommes.
en urgence et a volé avec un seul moteur à quatre Un peu plus à l’ouest, un autre Ju 88 de la même
cents mètres d’altitude sur la mer du Nord dans escadrille de reconnaissance est pris à partie par
une nuit noire. Il a alors posé son appareil sur le deux chasseurs du N° 504 Sq. Le bimoteur est
ventre à proximité de l’aérodrome. L’équipage endommagé à 15% mais reviendra sur le continent
était composé de néophytes qui ont vécu une avec son pilote blessé. Un des poursuivants
expérience éprouvante ». Hick aurait été victime est sérieusement atteint par le tir défensif des
du N° 151 Sq. sur Orfordness mais son appareil mitrailleurs.
ne sera endommagé qu’à 15%, lui-même ayant été En soirée, nouvelle chasse libre sur le Kent contrée
légèrement blessé. par le N° 92 Sq. L’appareil du F/Lt (adjudant)
Trois pilotes du I./NJG 2 revendiquent chacun une FFL Xavier de Montbron est endommagé mais le
Le Sgt Jack Mann victoire cette nuit-là. Il devait s’agir respectivement Français s’en tire sans mal. On ne peut cependant
du N° 91 Sq. manqua d’un Wellington du N° 311 Sq., d’un Blenheim identifier ses adversaires.
de périr le 12 mars du N° 21 Sq. et d’un autre d’OTU, tous trois Glasgow et Clydeside subissent leurs premières
1941 face au Major endommagés. attaques majeures de nuit et, une fois de plus les
Mölders. Il sera pertes allemandes seront proportionnelles aux
cependant grièvement Le 13 mars, un Ju 88 A-4 de la 4.(F)/121 est effectifs engagés :
blessé le 4 avril de la intercepté sur la Manche par trois Hurricane du -le He 111 G1+MR de la 7./KG 55 est abattu par
même année. N° 302 Sq. patrouillant sur Worthing et s’écrase un Beaufighter du N° 219 Sq. et s’écrase à Wood
Farm peu après son évacuation réussie par deux de
ses occupants ;
-le Do 17 Z U5+DA du Stab/KG 2 tombe en mer
au large de Skegness Pier suite à l’attaque d’un
Beaufighter du N° 29 Sq. piloté par un futur as, le
F/O John Braham L’équipage de quatre hommes
est tué. Selon les souvenirs de Braham : « C’était
une belle nuit froide éclairée par la lune. Ross et
moi-même avions décollé en urgence pour être
dirigés vers la côte près de Skegness. Lors de la
montée, Ross vérifia son équipement radar. Nous
avions atteint les quinze mille pieds et, pleins gaz,
avons volé vers l’est. Le contrôle nous informa :
‘Il est à cinq kilomètres devant vous’ ; ‘Vous
devriez avoir un contact dans une minute’. Je
demandai à Ross s’il avait capté quelque chose.
‘Rien jusqu’à présent’. La tension croissait. Avec
cette clarté, on devait pourtant le repérer à cinq
cents mètres. Nous devions alors échafauder une
tactique pour le ‘tuer’ avec certitude. Soudain,
Ross me signala par l’intercom : ‘Contact. Deux
mille mètres et 20° au-dessus. Vire gentiment à
gauche’. (Ross me guida calmement en se basant
sur les informations de son écran). ‘Où veux-
tu te placer, Bob ?’. ‘Dans son angle mort, cent
pieds plus bas que lui’. Cette position allait nous
donner un avantage. Ses mitrailleurs scrutaient le
ciel mais pas un appareil venant de plus bas et se
confondant avec un arrière-plan sombre. Tandis
que lui se détacherait sur le fond plus lumineux
du ciel. (…) Maintenant, je pouvais nettement
distinguer l’ennemi et l’identifiai comme étant
un Dornier. Il ne semblait pas m’avoir vu. (…) Le
Dornier venait tout juste de traverser la côte près
de Skegness et devait se diriger vers les villes des
Midlands. Ross me pressait de tirer. J’appuyai sur
le bouton. Les quatre canons rugirent une seconde
puis stoppèrent. ‘Damnation ! Ils se sont enrayés’.
J’aperçus un éclair sur le fuselage du Dornier là
où un de mes obus l’avait frappé. Le bombardier
vira calmement vers la direction dont je venais.
Je le suivis et, comme il n’y avait toujours pas
Un Beaufighter du N°
600 Sq.
de riposte, je tentai de nouveau de tirer mais une aperçûmes l’épave tomber en feu puis percuter
fois de plus en vain. Ross avait quitté son siège la mer. À peine étions-nous arrivés à la base que
et tentait de résoudre le problème. ‘OK, essaie nos mécaniciens s’empressèrent de peindre un
encore une fois, Boss. J’ai changé les chargeurs de svastika sur le fuselage pour officialiser notre
munitions’. J’encadrai de nouveau le bombardier victoire. Je m’entretins avec le chef mécanicien
dans mon viseur. Il avait retraversé la côte, qui étudia l’appareil et me déclara que l’huile des
espérant probablement revenir chez lui ». Braham canons avait gelé. Des modifications furent alors
tente pour la troisième fois de décocher une rafale apportées ».
mais les canons restent silencieux. Il ordonne alors -le N° 600 Sq. revendique une victoire près de
à Ross de bien s’attacher car il pense éperonner Dundee sur le He 111 6N+AH de la 1./K.Gr.
le bombardier et tous devront alors évacuer leur 100 tombé à Dunure. Ici, l’équipage de l’Oblt
appareil. Ross procède à une nouvelle et hâtive Wilhelm Schultz peut sauter. Il sera interrogé par les
réparation. « De nouveau, je réduisis la distance de services de la RAF qui donneront les informations
nos deux avions à cinquante mètres et tirai. Cette suivantes : « Le 13 mars, cet équipage décolla, le
fois, le Beaufighter tressaillit sous les rafales et le dernier de quatre appareils en route vers Glasgow.
Dornier 17 explosa en plein ciel. J’étais heureux Il avait le choix de bombarder les usines Royce ou
tout comme Ross de ne pas avoir eu à me jeter sur deux importants croisements de voies ferroviaires.
l’ennemi. Comme nous virions pour revenir, nous Le « X »-Gerät’ ne fut pas employé car l’attaque
Un Heinkel 111 H du
K.Gr. 100 reçoit son
revêtement de couleur
noire dans un hangar
de Meucon.
74 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Placement d’une pouvait parfaitement être effectuée visuellement. Ce faisant, je perdis beaucoup d’altitude et ne
bombe sous un He 111. Lors de l’approche, le bombardier fut attaqué par l’aperçus plus. Mais avant que je m’éloigne,
un chasseur qui effectua deux passages. Le pilote je savais qu’une aile était en feu et qu’il n’irait
put poser en urgence l’appareil mais ce dernier pas très loin. Par la suite, des observateurs ont
s’embrasa rapidement ». confirmé cette victoire. Je crois que mon tir initial
-la 3./Kü.Fl.Gr 106 engagée sur Glasgow perd le dut tuer les mitrailleurs car je n’encaissai aucun
Ju 88 M2+JL, victoire attribuée au F/Lt Desmond tir défensif. Le ‘Hun’ tomba comme une torche et
Sheen du N° 72 Sq. Seul le corps d’un des quatre explosa au contact de la mer » ;
aviateurs portés disparus au large d’Amble (près -le He 111 1H+IR de la 7./KG 26 engagé sur
de Coquet Island) sera rejeté sur une plage. Le 17 Southampton est pour sa part victime d’un
avril, Sheen décrira son combat au micro de la Beaufighter du N° 219 Sq. et s’écrase avec son
BBC : « C’était une nuit éclairée par un brillant équipage à Shipley.
clair de lune et je pouvais apercevoir la côte sur Outre ces pertes :
des kilomètres dans toutes les directions. Les -un He 111 de la KG 55 doit se poser dans la
conditions étaient idéales pour une mission de Manche. Un aviateur se noie, ses camarades étant
chasse nocturne en Spitfire. Lorsque j’ai aperçu sauvés par le Seenot ;
le ‘raider’, il était à un millier de pieds au-dessus -un He 111 de la 6./KG 27 est signalé perdu en un
de moi. J’ai donc mis les gaz et grimpé. Quand je lieu inconnu au retour de Glasgow ;
me suis retrouvé à une centaine de mètres derrière -un He 111 du K.Gr. 100 revient s’écraser sur le
lui, je l’ai identifié comme étant un Junkers 88. continent ainsi qu’un Ju 88 de la 5./KG 30, un
Lorsque j’ouvris le feu, je vis mes traçantes Do 17 Z du I./KG 2 et trois Heinkel de la KG 55.
pénétrer dans le Junkers comme s’il s’agissait de Plusieurs aviateurs périssent lors de ces ‘crashes‘.
feux d’artifice. De la fumée noire fut émise par Au moins quatre appareils furent ainsi détruits ou
le ‘raider’. De l’huile recouvrit alors mon pare- seront ferraillés.
brise, me forçant à rompre le combat. Comme je Vu la distance séparant Glasgow des bases
virais pour revenir à l’attaque, je constatai qu’un allemandes en France, l’Uffz Baeker (III./KG 1)
moteur du ‘Hun’ était en feu. Pour faire bonne se vit contraint d’opèrer au départ de l’aérodrome
mesure, je lui décochai une nouvelle rafale mais néerlandais de Schiphol : « Le 13 mars 1941,
dus virer brutalement pour ne pas le percuter. je dus partir pour Schiphol avec tous les Ju 88
75
du Gruppe équipés du Rüstzustand B, soit les à 20 h 10 et étions déjà de retour à minuit. Nous
machines dépourvues de réservoir avant mais étions heureux de ne pas faire les six heures sur
disposant d’un appareillage permettant de Glasgow bien que nous savions que Sheffield
larguer dix bombes de cinquante kilos. Ce qui leur était défendu par une puissante DCA. Sur la côte,
donnait une heure de moins d’autonomie que les nous avons pu éviter les chasseurs de nuit. (…)
Rüstzustand C. Sur cet aérodrome néerlandais se Sur l’objectif, le nombre de projecteurs semblait
rassemblèrent des avions de toutes les unités et il plus important que lors des vols antérieurs. (…)
fallut un certain temps avant que je ne décolle à La DCA se mit à tirer mais mes nombreux virages
1 h 45, les appareils partant à la queue leu leu. durent la désorienter. (…) Nous avons perdu
Les installations portuaires, les docks et les dépôts l’équipage de l’Ofw Hermann Koch. Il s’abattit
de carburant de Glasgow étaient nos objectifs. Vu en revenant se poser. C’était son premier vol de
la consommation en carburant, le vol allait se guerre et tous les quatre furent tués ».
faire en ligne droite et l’on devait survoler la mer Le Fw Hans Hahn de la 3./NJG 2 venu rôder
d’Amsterdam jusqu’à Newcastle-upon-Tyne. Le avec son équipage autour de l’aérodrome de
ronron des moteurs avait un pouvoir soporifique Waddington revendique un Hudson. Il s’agissait
mais mon équipage avait pour instruction de me d’un Manchester du N° 207 Sq. surpris en plein
tenir éveillé car j’étais debout depuis le matin décollage vers Hambourg. La 4./NJG 2 perd un de
et avais veillé à ce que le transfert se fasse sans ses équipages lorsque le Ju 88 C R4+GM, surpris
encombre. Quand nous traversâmes la côte, la sur Dovendale par un Beaufighter du N° 29 Sq., se
DCA et les projecteurs entrèrent dans la danse. désintègre en plein ciel, ne laissant aucune chance
Sur Glasgow, la lune brillait et l’on distinguait à ses trois occupants. Un Beaufighter du N° 600
parfaitement la cible près de l’embouchure de la Sq. aurait été également victime d’un ‘intruder’.
Clyde. Nous avons évité la DCA et les phares et
avons bombardé avant de revenir vers l’est. Nous Le 14 mars, en matinée, trois pilotes du N° 610
nous sommes reposés à 6h20 à Amsterdam. Le Sq. signalent avoir endommagé un Ju 88 sur la
même jour, nous revenions à Grévillers » Manche. Certains l’identifient comme étant le He
Des missions plus ‘spéciales’ ont lieu comme à 111 du I./KG 28 revenu se poser à Nantes avec des
l’habitude. Selon Peter Stahl : « Le Gruppe au dommages encourus en combat…
complet ‘avec tout ce qui vole’ est engagé dans Vers midi, deux aviateurs tchèques du N° 312 Sq.
une important attaque de Glasgow. Je n’en serai abattent le Ju 88 VB+KJ de la 2.(F)/ObdL près de
pas car mon ‘Cäsar’ n’a pas assez d’autonomie. Bardsley Island. Il n’y aura aucun survivant de cet
Il a en effet été récemment transformé en appareil de reconnaissance lointaine.
‘illuminateur’ et a un réservoir de moins dans le Enfin, en soirée, au sud de Portland un pilote du
fuselage. J’ai donc reçu pour mission de mener N° 152 Sq. endommage le Ju 88 4U+EL de la Des He 111 P sur un
une attaque isolée sur Sheffield avec un ‘bleu’ de 3.(F)/123 qui s’écrasera près de l’île de Jersey. aérodrome français
la 5. Staffel, l’Oblt Flechner. Nous avons décollé Son équipage aurait été sauvé par le Seenot. non identifié.
76 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Do 17 Z de la KG La nuit revoit des bombardiers sur Glasgow et « Cette nuit-là près de Skegness, je vis un gros
2 dont seule la lettre Clydeside ainsi que sur Sheffield. Heinkel volant vers le nord. Il ne m’aperçut pas
d’identification au -En route vers Glasgow, le He 111 G1+IP de la 6./ et je me fondis derrière lui dans l’obscurité de la
sein de l’escadrille KG 55 est intercepté par un Beaufighter du N° 604 terre ferme. Je savais qu’il ne pouvait me repérer
apparaît encore avec Sq. et s’écrase à Falfield. Les quatre aviateurs sont alors que lui était nettement visible à la lueur des
la bande sur le nez ; les tués dont le Staffelführer, étoiles. Je vérifiai si mes
autres marques ont été l’Oblt Eckhart Henschke, ceintures étaient bien
surpeintes en noir. qui n’avait ainsi exercé ajustées puis virai dans
ce poste que deux jours sa direction. J’attendis le
depuis le décès de son moment où il s’encadra
prédécesseur, l’Oblt parfaitement dans mon
Berlin. Le Spiess de viseur. Je pressai sur le
l’unité n’avait pas eu tort bouton de déclenchement
en parlant d’« escadrille des armes... Mais rien
de la mort »… ne se passa. Je réduisis
Le F/Lt Guy Gibson -un autre Beaufighter mais ma vitesse pour ne pas
entama sa carrière ici du N° 219 Sq. met fin le dépasser. Ce faisant,
dans la RAF comme à la carrière du M7+EH, des flammes jaillirent de
chasseur de nuit. un Ju 88 A-5 du I./K.Gr. mes moteurs et j’espérai
806 tombé en mer avec qu’elles n’avaient pas été
ses occupants au large de aperçues ce qui aurait
Beachy Head ; incité ma proie à piquer.
-le He 111 V4+HK de la 2./KG 1 est abattu avec Je me replaçai en position et appuyai de nouveau
tout son équipage au large de Skegness par un sur le bouton poussoir mais un seul canon répondit.
Beaufighter du N° 29 Sq. dont le pilote n’était autre Je n’encaissai aucun tir défensif car j’avais peut-
que le F/Lt Guy Gibson qui allait en 1943 gagner être mis son mitrailleur arrière hors de combat.
la célébrité en menant le raid des ‘Dambusters’, Je refis une troisième tentative mais aucune de
les ‘Briseurs de barrages’. Selon ses souvenirs : mes armes à nouveau ne tira. J’implorai mon
Un He 111 H de la KG
55 revenu de justesse
sur le continent.
77
Dans ses mémoires rédigées en 1942, le F/Lt Ian Gleed du N° 87 Sq. écrit : « La panique de l’invasion
était toujours présente. Le groupe devait voler le plus possible de nuit. Les gars me pressaient de lancer
des actions contre des aérodromes dans le nord de la France. Les responsables étudièrent favorablement
ces suggestions et promirent de les réaliser lorsque la lune serait pleine. (…) La lune se leva. Un
après-midi, un officier me téléphona, me demandant de mettre sur pied une patrouille offensive. Nous
devions être à 18 h 00 à X, un aérodrome proche de la côte où nous recevrions des instructions ainsi
que des cartes ». X devait être Warwell et Gleed prit comme ailier le P/O Roland Beamont. À Warwell,
les deux pilotes apprirent que leur objectif était l’aérodrome de Carpiquet. « Nous devions au cours de Sur chacun de ses
ce raid détruire les avions venant se poser ainsi que ceux parqués sur la piste. Comme les Allemands Hurricane, le F/Lt Ian
employaient cette base pour recueillir leurs avions sur le retour, nous trouverions bien de quoi nous Gleed fera peindre son
occuper ». Gleed décrit longuement l’attente et la préparation. « Nous grimpâmes dans nos machines. Je insigne personnel, le
regardai celle de Robbie. Son moteur fut lancé. OK ! Je vérifiai le compas. J’enfilai mes gants, vérifiai chat Figaro (du film
si j’avais bien mon pistolet et si les fusées étaient en place. Je soufflai rapidement dans la mae-west ‘Pinocchio’ de Walt
pour voir si tout était en ordre. C’était le cas. Le moteur se mit à chauffer. Je lançai les gaz et le moteur Disney).
répondit. Je les réduisis puis achevai ma check list. J’aperçus la silhouette de Robbie dans son appareil.
Je levai le pouce. Il me répondit. Nous décollâmes ». Selon E. Lanchberry, biographe de Beamont : « Ils
volèrent à l’économie, la durée du trajet étant de cinquante minutes. Comme l’autonomie du Hurricane
était de deux heures et demie, ils avaient le temps d’exécuter leur mission. Passant sous les nuages et
volant à deux cents pieds, ils traversèrent la côte normande avec leurs armes prêtes à tirer. Ils trouvèrent
le canal qu’ils devaient suivre pour atteindre l’aérodrome. Mais il était inutile de le chercher puisque
l’objectif se présentait de lui-même. Quatre puissants projecteurs s’allumèrent et deux les prirent dans
leur faisceau. Comme convenu avant le départ, Beamont piqua sur l’un d’eux et le mitrailla. L’obscurité
revint ». Les ‘intruders’ furent alors pris sous un feu nourri de Flak. À très basse altitude (« qui nous
aurait valu de passer devant une cour martiale si nous avions fait de même sur la Grande-Bretagne »),
les deux pilotes mitraillèrent à qui mieux mieux
mais n’eurent guère l’envie de refaire un second
passage. Volant vers l’ouest, Beamont tomba sur
une voie ferrée et mitrailla un convoi ferroviaire
sur toute sa longueur, épuisant le reste de ses
munitions. « Il essuya la sueur sur son visage
et revint vers la côte. Finalement, cela avait
été une bonne nuit. On avait eu l’impression de
faire quelque chose et connu l’excitation d’avoir
été offensif, cela en lieu et place de la frustrante
monotonie des infructueuses patrouilles de nuit
sur l’Angleterre ». Les deux pilotes se retrouvèrent
à Warwell avant de revenir à leur aérodrome.
Cette opération eut probablement lieu la nuit du
14 au 15 mars 1941, Gleed ayant été crédité à
Roland Beamont qui
cette occasion d’une moitié de Do 17 détruit ainsi
opèrera de nuit sur
que d’un Ju 88 et d’un Do 17 endommagés. On
Carpiquet.
peut émettre de sérieux doutes quant à la réalité
de ces ‘victoires’ et finalement quant à l’efficacité
de ces missions risquées. Le 87e en effectuera
cependant ultérieurement quelques autres mais
elles ne durent guère être encouragées par les
autorités de la RAF. Elles étaient inutilement
dangereuses et surtout aléatoires car, ayant une
faible autonomie, les chasseurs ne pouvaient guère
s’attarder sur l’objectif et attendre patiemment
le retour des bombardiers. Elles permettaient
cependant aux pilotes de chasse diurne astreints
à ces vols nocturnes de se ‘défouler’ dans des
actions offensives semblant plus efficaces que les
vols défensifs. Néanmoins, les seuls réels succès
furent remportés (même parcimonieusement)
par les Blenheim (et bientôt les Havoc) du N° 23
Sq. volant sur le continent avec des équipages
spécialement formés pour ces opérations de nuit
et disposant d’assez d’autonomie pour ‘visiter’
plusieurs aérodromes au cours de la même nuit.
78 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Des mécaniciens équipier, le Sgt James, de faire quelque chose car mission de bombardement. Finalement, James put
placent une bombe il me fallait achever cet appareil. Ce dernier avait remettre un canon en service et je visai le moteur
sous un Bf 109 E pour viré vers la mer et commençait à entamer son gauche. Les obus se succédèrent et des flammes
une proche mission piqué vers le continent. Tout était calme et éthéré, apparurent. Le moteur stoppa. Je m’attaquai
Jabo. un combat homme contre homme. Je n’aurais alors au moteur droit qui fut de même détruit. Le
pas échangé ma place contre tout autre chose grand Heinkel piqua vers le sol à cent cinquante
au monde. C’était finalement bien mieux qu’une kilomètres/heure. Je vis quelqu’un l’évacuer mais
Le Lt Ekkehart von
Höslin, pilote du He
111 1G+DL, perdu
avec son équipage la
nuit du 15 au 16 mars
1941.
79
nous étions déjà fort loin sur la mer. Nous suivîmes l’a déjà piquée. Ainsi que sa montre. De fameux Résultat des
le Heinkel et le vîmes se poser sur la terre ferme vautours... J’ai mis quelques gars là-dessus pour bombardements
près du Pier de Skegness. Mais je n’ai jamais su retrouver l’auteur. Mais nous avons un canot allemands dans
si, aux commandes, il y avait un pilote blessé ou pneumatique. Si cela vous intéresse…’. ‘Merci !’. le secteur de la
non. Nous étions tellement excités par ce combat J’ai toujours ce canot et, lorsque je l’emploie cathédrale Saint Paul.
qui dura vingt minutes que nous pour naviguer dans les criques
avons signalé avec exubérance ensoleillées de Cornouailles,
notre victoire par radio et que je me demande toujours si un
nous avons totalement cochonné aviateur allemand mourant
l’interception suivante. L’après- espéra sauver sa vie en
midi, nous sommes allés l’employant ». Il va de soi
chercher la queue du He 111 qu’aucun Hauptmann ne
Le 16 mars, en soirée,
à titre de trophée. Nous avons figurait parmi cet équipage
un Ju 88 du I./KG 51
gagné Skegness et rencontré le semblant être principalement
s’écrase au départ
commissaire de police local. composé de néophytes ;
de Villaroche vers
‘Vous cherchez votre Heinkel ?’ -deux He 111 du Stab et de
l’Angleterre. Le pilote,
nous demanda-t-il. ‘Oui ! Il y la 7./KG 55 ne reviennent
l’Uffz Karl Lindemeier,
a des corps ?’, demanda Sam. pas d’Angleterre étant perdus
est tué ainsi que ses
‘Un, un Hauptmann portant avec leurs équipages pour une
trois coéquipiers.
la croix de fer. Il est à la raison inconnue.
morgue, la tête emportée par Au surplus, un He 111 de la 6./
un obus. Vous voulez le voir ?’. KG 55 est endommagé tandis
J’avais le coeur au bord des que deux Ju 88 de la KG 30
lèvres mais désirais obtenir s’en reviennent à Eindhoven
la croix pour la renvoyer à la avec des avaries diverses (un
famille. ‘Je regrette mais on sera déclassé).
80
Sur Merville, un pilote du N° 23 Sq. revendique une Le 16 mars ne semble voir que peu d’activité
victoire. Un Bf 110 de l’Erpr.Gr. 210 se repose sur aérienne diurne.
cet aérodrome avec 10% de dommages mais sans De nuit, Bristol encaisse tout le poids du
que l’on sache s’il y eut ou non combat. Un Do 17 bombardement.
Z de la 7./KG 2 engagé sur Hull s’endommage à Le Ju 88 9K+AK de la 2./KG 51 engagé dans
25% en se posant à Cambrai. une attaque de l’aérodrome RAF de Chilmark est
victime de la DCA qui détruit un de ses moteurs. À la JG 51 à Mardyck.
Le 15 mars, lors d’une escorte de convoi au large L’équipage évacue. Trois hommes sont capturés Les pilotes sont réunis
de Dungeness, trois Hurricane du N° 615 Sq. voient de suite, le quatrième l’étant deux jours plus tard. pour un ‘briefing’
survenir une demi-douzaine de Bf 109 Jabos de la 5./ Au décollage de Villaroche, un Ju 88 du I./KG 51 devant préparer leur
LG 2 (venus de Calais-Marck). L’adjudant Lafont, s’écrase tuant l’Uffz Karl Lindemeier ainsi que ses prochaine mission.
d’un tir rapide, abat le ‘L noir’ de l’Ofw Albert
Seidel tombé en mer avec son pilote (il sera inhumé à
Margate). C’est la seconde victoire de ce pilote FFL.
De nuit, deux pilotes du N° 87 Sq. seraient repartis
sur Caen. Beamont aurait été de la partie et aurait
revendiqué un bombardier détruit au sol mais on ne
retrouve pas ce ‘claim’ dans sa liste de victoires.
La Luftwaffe revient sur Londres qui sera très
sérieusement bombardée tandis que d’autres
appareils volent vers Southampton.
-Un Do 17 Z de la 1./KG 2 revient endommagé à
Merville après avoir encaissé un obus de DCA ;
-le He 111 1G+DL du I./KG 27 est abattu en mer
au large de Bognor Regis par le N° 219 Sq. Tout
l’équipage périt ;
-au Bourget, un He 111 du III./KG 26 revient se
crasher avec un blessé à bord, étant endommagé
à 50%.
Deux He 111 des I. et II./KG 1 sont endommagés
(respectivement à Amiens et Rosières) mais on
ne peut certifier que ce furent là des suites de
combats…
82 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
larguons peu à peu les autres bombes. Quand surpris sur la Manche par des Bf 109 du II./JG 53,
toutes sont hors de la soute, nous pouvons nous le Hptm Bretnütz abattant à Hailsham l’appareil
débarrasser de nos deux mines. La DCA se met du Sgt Hale (blessé).
soudain à tirer furieusement de l’autre côté de Vers 17h30, la Red Section du N° 609 Sq. est
la ville, signe tangible de l’arrivée du reste du envoyée patrouiller sur un convoi au large de
Gruppe. Nous nous éloignons, mission accomplie, Dungeness. Selon le P/O Keith Ogilvie, chef de
et revenons à la maison ». section : « Nous étions depuis une demi-heure sur
Des appareils sont endommagés cette nuit lors le convoi et allions le ‘céder’ à trois Hurricane
d’atterrissages en France mais on ne peut confirmer reprenant notre tâche. Nous volions à neuf mille
que ce fut le résultat de combats. pieds. J’aperçus soudain un Bf 109 piquer et
attaquer le Hurricane de queue qui de suite prit
Le 19 mars, des combats ont encore lieu de jour feu et tomba en mer. Nous avons cru apercevoir
sur le Kent et la côte sud de l’Angleterre. une tache blanche qui aurait été le parachute. Un
En fin d’après-midi, des Spitfire du N° 610 Sq. sont navire s’est dirigé vers lui. (…) Nous avons piqué
Le Bf 110 S9+LK de
l’Uffz Balthazar Aretz
(Erpr. Gr. 210) près de
Dieppe (Coll. J. Vasco).
85
Messerschmitt Bf 110 D S9+LK de l’Erpr. Gr. 210 piloté par l’Uffz Balthazar Aretz en mars 1941.
de même mais, vu notre faible vitesse initiale, nous Ce jour-là, quelques Ju 88 sont endommagés sur
n’avons pu que le tirer de loin et probablement le continent mais on ne peut relier ces avaries à
toucher son réservoir de glycol qui émit une fumée des combats.
blanche. Près de la côte française, il fut rejoint De nuit, un He 111 du III./KG 55 et un Ju 88 du I./
par un second Bf 109 et nous avons continué à KG 77 sont endommagés à 30% au décollage sans
les suivre mais ils volaient trop vite et nous avons que l’on puisse affirmer qu’ils étaient engagés
été contraints d’abandonner ». Cette formation dans la grande attaque de Londres qui rassemblera
de trois Hurricane du N° 1 Sq. fut surprise près environ quatre cent quatre-vingts appareils. Un
de Dungeness par des Bf 109 du I./LG 2 ayant pilote de Spitfire du N° 257 Sq., le réputé F/Lt
surgi du soleil. Ce furent en fait deux Hurricane Howard ‘Cow-boy’ Blatchford, revendique la
qui tombèrent sous les tirs rapides et précis du seule victoire de la nuit mais aucun bombardier
Hptm Herbert Ihlefeld, le nouveau Kommandeur ne serait tombé sur le sol britannique ou dans la
de l’unité venu ‘chercher’ l’adversaire. Un pilote Manche. On trouve par contre :
put ‘crasher’ sa machine mais le second fut tué -un He 111 du I./KG 1 endommagé à 35% à
en évacuant la sienne. Le dernier Hurricane fut Amiens ;
probablement sauvé par l’intervention des Spitfire -un Ju 88 du II./KG 51 ‘crashé’ avec son équipage
du 609e. près de Villacoublay ;
En soirée, un Bf 110 E-1 de la 1./Erpr.Gr. 210 Ces deux appareils devaient très probablement
revient très endommagé après un combat sur revenir de mission sur l’Angleterre.
l’Angleterre ou la Manche. Il vient se ‘vomir’ à Un Ju 88 de la 5./KG 54 est victime d’un ennui
Wallon-Cappel avec le corps du radio/mitrailleur. moteur au décollage d’Évreux alors qu’il partait
Le pilote, grièvement blessé, décèdera peu après vers Londres. On le dit cependant tombé près de
à l’hôpital. Lisieux (deux tués, deux blessés).
Des marins
britanniques aident à
déblayer les décombres
à Plymouth après le
bombardement de la
nuit du 21 mars.
Un Ju 88 qui ne
reviendra pas à
Reims… L’épave du
3Z+DM abattu le 23 Le 20 mars, de jour, les chasseurs allemands sera revendiquée par la chasse mais deux Ju 88
mars sera exposée demeurent sur le continent. On relève cependant du K.Gr. 806 sont perdus avec leurs équipages,
quelques jours plus quelques intrusions de l’Erpr.Gr. 210 entre autres probablement victimes de la DCA. L’un tombe
tard à Brighton pour sur l’aérodrome de Ford. en mer et l’autre près d’Argentan. Un troisième
lever des fonds en revient endommagé à Caen.
faveur de l’effort de De nuit, Plymouth et Londres concentrent toute Peter Stahl (6./KG 30) : « Aujourd’hui, dernier
guerre britannique. l’attention de la Luftwaffe. Aucune victoire ne vol à l’ennemi avant notre permission : une
87
rapide mission sur Londres. Les valises sont déjà avarié qu’à 10%. Le lendemain, le jour levé, Un Bf 110 de la ZG 76.
prêtes. (…) Sur Londres, la DCA est toujours très le pilote revenu sur les lieux découvrira avec Un appareil de ce type
active. Les incendies sont nombreux. Les docks de une frayeur rétrospective qu’il avait manqué fut abattu le 23 mars
la Tamise constituent l’objectif principal. Nous de peu se jeter dans une toute proche ligne à sur la base navale de
n’avons jamais vécu cela : de grands incendies haute tension… Sullom Voe.
au sol mais également de puissants tirs de DCA Un He 111 du I./KG 27 piloté par l’Uffz Fritz
dans les airs. En dépit de tout cela, nous ne Kukoreit est perdu dans des circonstances
faisons que penser à notre congé. Il occupe notre spéciales. Selon un de ses camarades, l’Uffz
esprit. Saurons-nous prendre à temps le train des Georg Bergmann : « Notre charge devenait de
permissionnaires ? Nous revenons calmement sur plus en plus lourde à supporter. De nuit sur
la mer du Nord en jouissant à l’avance de ces trois l’Angleterre et de jour sur le canal de Bristol.
semaines en famille ». Les équipages s’amenuisaient mais étaient
Un Beaufighter du N° 219 Sq. est perdu sur continuellement engagés. Parfois, ils étaient
accident (équipage tué). Un Blenheim (du N° 23 perdus lors de leur première opération alors que
Sq ?) détruit un He 111 de l’E.St./KG 26 - soit un l’on n’avait pas encore appris à les connaître.
appareil d’écolage - au Tréport. Tragique fut le sort le 21 mars d’un équipage
Le 21 mars est une journée ‘classique’ qui était déjà à l’unité bien avant la campagne à
avec ses incursions furtives de bombardiers l’ouest. Il avait attaqué dans le canal de Bristol
allemands isolés profitant des nuages bas pour un imposant cargo disposant d’un bon armement
bombarder ainsi que ses mortelles ‘parties de défensif. Un de ses moteurs avait été atteint et
cache-cache’ avec les chasseurs de la RAF. l’observateur avait reçu une balle mais sans
En soirée, un Bf 110 D de la 2./Erpr.Gr. 210 mettre sa vie en danger. L’Uffz Kukoreit avait
revient en urgence sur le continent après que mis le second moteur en drapeau conformément
son équipage ait pu placer une bombe sur un aux instructions et nous l’escortions depuis
vapeur cabotant le long de la côte anglaise et les Cornouailles, volant à huit cents mètres
se pose en catastrophe au sud-est de Dieppe. au-dessus de la mer. À environ cinquante
L’équipage est indemne et l’appareil n’est kilomètres de la côte française, nous l’avons
88 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Une Rotte de He 111 précédé pour nous poser à Brest et y préparer sur l’atterrissage. D’où la catastrophe ».
au-dessus des nuages. son atterrissage en urgence. Ambulances et De nuit, Plymouth est de nouveau bombardée. Un
pompiers étaient prêts. Nous avons alors vu bombardier de la KG 77 reviendra endommagé
arriver le Heinkel éclopé très bas. Il sauta une à Juvincourt tandis qu’un Beaufighter est détruit
petite colline puis se posa sur la piste. Nous sans mal pour son équipage.
avions tous repris notre respiration lorsque nous
vîmes l’avion continuer sa course, percuter un Le 22 mars est relativement calme de jour
petit bois proche et exploser. Le radio, le Fw comme de nuit. La Luftwaffe ne subit qu’une
Arno Bönicke, avait été éjecté et fut le seul perte : un He 111 P de la 5./KG 4 pris dans un
survivant. Il était blessé, fut soigné mais ne put barrage de ballons lors d’un raid sur l’aérodrome
jamais redevenir opérationnel. À sa sortie de militaire de Leeming. Un aviateur saute mais se
l’hôpital, il revint à Tours et nous raconta qu’un tue. Le pilote pourra poser l’appareil en urgence
membre de l’équipage, suite à la vue du sang, à à Immingham. Un second aviateur est tué dans
la tension et au choc, avait soudainement perdu ce ‘crash’ tandis que les deux survivants du
la tête. Il avait dû être maîtrisé et tout ce remue- 5J+KN sont capturés. Un second Heinkel, ici de
ménage avait empêché le pilote de se concentrer la 4./KG 4, reviendra se poser très endommagé
Préparation d’un
nouveau vol de nuit à
la KG 55.
L’épave encore
fumante du Junkers Ju
88 A-5 de la 4./KG 77
abattu peu après midi
le 23 mars 1941 par
deux Hurricane du N°
238 Squadron ;
les deux appareils
étaient pilotés par le
à Soesterberg victime de la DCA. Un Ju 88 avec ses deux occupants. F/Lt Edward Morris
du I./KG 51 est abandonné sans mal par son Au sud, les opérations sporadiques se (Sud-Africain) et le
équipage sur Orléans mais on ne peut préciser poursuivent. Deux Hurricane du N° 238 Sq. Sgt Frantisek Bernard
s’il s’agissait d’une mission de guerre et/ou revendiquent une victoire sur un Ju 88 A-5 (Tchécoslovaque).
d’un vol de la nuit précédente… de la 4./KG 77 opérant probablement en Trois des quatre
Le 23 mars, un Bf 110 E-2 isolé du Stab/ZG 76 Seeräubeangriff. Le pilote du 3Z+DM semble hommes de l’équipage
venu de Scandinavie vient survoler l’hydrobase vouloir poser sa machine à Poling mais elle furent fait prisonniers,
de Sullom Voe (Shetlands). Le M8+WE est percute un obstacle et est détruite. Un aviateur le dernier ayant été tué
abattu par des canons Bofors et tombe en mer est tué, ses trois camarades étant capturés. au cours du combat.
90 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Près de l’île de Wight, le N° 234 Sq. combat un que deux Hurricane du N° 87 Sq. et un Defiant
L’aviso HMS Leith, qui Ju 88 et affirme l’avoir endommagé. Il devait sont endommagés/détruits à l’atterrissage sans
eut une longue carrière s’agir d’un appareil de la 1.(F)/123 ‘crashé’ mal pour leurs occupants.
mouvementée, fut au Havre (un autre appareil de le même unité
utilisé pour l’escorte reviendra de même endommagé à Schiphol mais Le 24 mars, le mauvais temps qui perdure
des convois. on ne sait si ce fut en combat). limite toute opération d’envergure et quelques
Toutes les opérations de nuit de la Luftwaffe escarmouches ont lieu de jour. Des Bf 110 de
sont annulées au vu de la météo. Il n’empêche l’Erprobungsgruppe 210 viennent bombarder
Le Junkers Ju 88
A-5 9K+ED du Stab
III./KG 51 survole la
France au début de
1941.
91
Le 28 mars 1941 à
Tours, l’équipage de
l’Oblt Wilhelm Werlin
pose devant la dérive
de son He 111 arborant
son tableau de chasse.
Le I./KG 27 avait dû
en effet se ‘spécialiser’
dans l’attaque de
navires. Werlin
recevra par la suite la
Ritterkreuz.
Martlesham Heath en même temps que des Bf est détruit mais ici de même, ses occupants sont
109 du II./LG 2 engagés sur Lympne. indemnes.
Des vagues de chasseurs allemands survolent le Le 25 mars, le mauvais temps persistant, les
sud de l’Angleterre, une ou deux victoires étant opérations sur les îles britanniques n’auront lieu
revendiquées par la RAF. Un Bf 109 de la JG 53 que de jour. Des ‘hit and run raids’ continuent
reviendra se poser endommagé à Saint Inglevert et quelques ‘raiders’ sont interceptés par des
mais on ne peut confirmer que ce fut une suite chasseurs mais sans grand résultat. Le I./
de ces engagements. LG 2 repart sur le Kent et se heurte à deux
La nuit sera calme vu le très mauvais temps. Hurricane du N° 17 Sq. engagés en escorte de
Tout au plus deux Defiant du N° 255 Sq. se convoi. Le réputé F/Lt Count Manfred Czernin
percutent au sol au roulage sur un aérodrome peut repousser les assauts et même sauver son
non précisé. Cela sans mal pour les équipages. camarade, le Sq/Ldr Woodhouse, soumis aux Méditation
À Carew Cheriton, un Blenheim du N° 246 Sq. tirs nourris du Hptm Ihlefeld. sur une SC 250.
92 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Un Do 17 Z-2 du IV./ Le 26 mars, ressemble fort à la veille. Au HMS Leith1. L’équipage est capturé. Il s’agissait
KG 3. large d’Orfordness, deux pilotes du N° 605 cependant ici plus d’une mission navale
Sq. interceptent un Do 17 Z de la 2./KG 2. Il (coutumière au I./KG 27) que d’une attaque
sera revendiqué comme abattu. En réalité, ce proprement dite des îles britanniques. Selon
bimoteur regagnera le continent avec 10% de le pilote, le Lt Joachim Krenz : « Après avoir
dommages. Son pilote, l’Ofw Karl Fischer, a été attaqué un cargo, nous avons été pris sous son
1. Aviso de la classe « Grims-
blessé. Les ‘vantardises’ ne sont pas l’apanage feu défensif. Les deux moteurs furent détruits
by » utilisé pour l’escorte des des seuls aviateurs de la RAF puisque l’équipage et notre mitrailleur ne fut, par chance, que
convois. allemand revendiquera pour sa part ‘deux des légèrement blessé. Je ne pouvais plus maîtriser
cinq Spitfire les ayant attaqués’ ! À noter que mon appareil et notre sort était scellé. Je posai
l’observateur de cet équipage, le Lt Heinrich le He 111 sur l’eau qui heureusement était très
Meyer, allait en 1942 recevoir la Ritterkreuz. calme. J’avais ouvert la trappe au-dessus de
Quelques raids diurnes plus audacieux ont lieu ma tête pour être guidé par l’observateur. Nous
comme celui de ce Ju 88 A-5 F1+FP de la 6./ avons mis le canot à la mer puis nous nous
KG 76 parti attaquer Andover en vol rasant sommes éloignés de l’épave en train de sombrer.
mais abattu par la DCA de l’aérodrome avec ses Nous avons eu de la chance car, une demi-
quatre occupants. heure plus tard, un petit navire de garde-côtes
La nuit voit de nouveau l’annulation de toute britannique s’approcha de nous et nous prit à
attaque sur l’Angleterre. bord. Nous avons été bien traités. Après avoir
Le 27 mars, la Luftwaffe repart dans des Freie été débarqués, on nous soumit un organigramme
Jagd. Deux pilotes du N° 74 Sq. opérant en de notre unité vieux déjà de neuf mois. Je pus
patrouille sur Dungeness sont surpris par des Bf seulement dire que des douze équipages qui y
109 (unité inconnue), l’un d’eux étant abattu et figuraient, seuls deux étaient encore présents à
tué. l’unité, le reste ayant été tué, capturé et surtout
Peu après, le F/Lt Colin McFie du N° 616 Sq. blessé ».
combat un Bf 110 sur Littlehampton. L’appareil On ne relève aucune attaque nocturne sur la
de la 5.(F)/122 reviendra se ‘crasher’ sur Grande-Bretagne cette nuit-là.
l’aérodrome de Théville, étant entièrement Le 28 mars, en matinée, la DCA frappe un
détruit. Son pilote, l’Uffz Alfons Munz, blessé, He 111 du I./KG 28 qui regagnera Nantes si
part au Lazarett (hôpital) mais reviendra au endommagé qu’il y sera déclassé (équipage
combat puisqu’il sera tué en 1944 à la NJG 1. indemne).
Le I./LG 2 vient rôder et contre avec vigueur Trois Spitfire du N° 302 (Polish) Sq. interceptent
des chasseurs du N° 609 Sq. ayant décollé pour et abattent un Ju 88 sur la Manche, le 3Z+EN
les repousser. Un Spitfire est abattu en feu avec du II./KG 77. L’appareil se pose en mer. Dans
son pilote près de Dungeness. la chronique de l’escadrille, le P/O Wladislaw
Le Heinkel 111 1G+EL de la 3./KG 27 est abattu Kaminski décrit sans la moindre gêne comment
près de Milford Haven alors qu’il attaquait le avec ses ailiers, il mitrailla posément et
93
Un Ju 88 de la 1.(F)/124. Bien qu’opérant désormais de Norvège, l’escadrille avait conservé son insigne de 1940 (La Tour
Eiffel et un aigle) rappelant qu’elle fut l’une des premières unités de la Luftwaffe à avoir été basée à Orly.
Un Ju 88 du I./NJG 2 à Gilze-Rijen.
94 la luftwaffe sur les îles britanniques : le « blitz » (1e partie : du 1er janvier au 31 mars 1941)
Vérification du
mécanisme des trappes
de train sur un Ju 88
A-1 ou A-5 avant le
départ en mission de
nuit. Les bombes sont
déjà en place sous la
voilure.
consciencieusement l’équipage allemand qui -le I./KG 76 (Hptm Robert von Sichart) arrivé à
avait pu se regrouper sur une aile. Il n’y aura Châteaudun (où il retrouve le II./KG 76) après
bien sûr pas de survivant. son rééquipement en Ju 88 ;
Ce jour-là est quelque peu fatidique puisque, -le II./KG 1 revient également en France avec
pour préparer l’opération ‘Marita’ (l’attaque des Ju 88 flambant neufs et s’établit à Rosières-
dans les Balkans), la Luftwaffe retire plusieurs en-Santerre ;
unités de bombardement opérant sur la Manche : -le IV./KG 53 d’écolage vient s’établir avec ses
toute la KG 2, les Stab/KG 51, I. et III./KG 51 He 111 à Lille où il rejoint son Stab et le second
ainsi que le III./KG 3. Partent également vers Gruppe.
l’est quelques unités de chasse (JG 54, JG 77, ..) Des rédénominations ont lieu :
y compris ce I./LG 2 basé à Marck dont les Bf -le I./KG 1 devient III./KG 40 et quitte Glisy
109 avaient donné souvent du fil à retordre au pour Lanvéoc où il est soumis, comme les deux
Fighter Command. autres Gruppe de la KG 40, au Fliegerführer
La Luftwaffe locale reçoit néanmoins quelques Atlantik et va désormais principalement mener
maigres renforts : des opérations visant le trafic maritime. Selon
95
G. Baeker, de janvier à mars 1941, le I./KG 1 est abattu à Wilton Moor par le F/Lt Tony
avait perdu pas moins de vingt-cinq appareils et Lovell du N° 41 Sq. Les quatre aviateurs sont
quinze équipages (en combat et sur accident) ; tués. L’un d’eux avait bien tenté de sauter mais
- l’Erg. St./KG 3 quitte Le Culot pour Chièvres sera retrouvé criblé de balles.
et devient IV./KG 3 - ce qui ne modifie cependant La nuit sera calme sur la Grande-Bretagne à
en rien les missions de cette unité d’écolage. part quelques intrusions du I./NJG 2. Deux
Des déménagements ont également lieu : Wellington sont attaqués mais un seul fut
-le III./KG 26 part au Bourget ; légèrement endommagé. Le Ju 88 C R4+HM
-le II./KG 27 passe de Dinard à Bourges et du I./NJG 2 ne revient pas aux Pays-Bas étant
-le Stab KG 76 de Cormeilles à Creil. perdu (probablement en mer) avec ses trois
Le I./KG 77 qui doit se sentir à l’étroit à Reims hommes d’équipage..
demeure trois semaines en mars à Beauvais Le mois se termine le 31 mars avec une activité
avant de rejoindre Juvincourt et d’y retrouver le minime de jour comme de nuit. Néanmoins,
troisième Gruppe. le Ju 88 G2+OH de la 1.(F)/124 engagé en
Le 28, aucune attaque de nuit n’est lancée sur la reconnaissance sur Peterhead ne revient pas
Grande-Bretagne. en Norvège et sera porté disparu avec son
équipage. Des sources allemandes le signalent
Le 29 mars ne voit que quelques intrusions de victime de chasseurs mais on ne relève aucune
jour et, de nuit, Bristol et Avonmouth subissent revendication.
des bombardements de relativement peu Un Bf 110 de la 4.(F)/122 revient se ‘crasher’
d’importance. Un Beaufighter et un bombardier à Deurne avec des dégâts de 65%. L’équipage,
du I./KG 27 sont endommagés. Idem pour un Ju blessé, dut être victime de tirs de navires sur la
88 de la KG 77 à Châteaudun mais on ne sait si Manche.
ce fut la suite de cette attaque. En cette fin de mois, les He 111 du II./KG 4
Le 30 mars, engagé dans une reconnaissance quittent les Pays-Bas pour gagner l’Autriche et
sur Manchester, le Ju 88 4U+GH de la 1.(F)/123 opérer sous peu à l’est.
Dans le nez vitré d’un Essai de synthèse pour le mois de mars 1941
He 111, un observateur
scrute l’horizon avec
ses jumelles pour Le retour d’un temps plus clément permet deux cent cinquante aviateurs. Si on y ajoute
repérer d’éventuels à la Luftwaffe de lancer des raids de plus un inévitable quota de blessés, le chiffre
chasseurs adverses. grande envergure sur Londres et autres villes avoisinerait les deux cent soixante-dix. C’est
Surtout que les bancs anglaises. De même, les Jagdgeschwader un résultat imputable au renforcement de
de nuages semblent peuvent mener des Freie Jagd sur l’Angleterre, l’offensive allemande sur les îles britanniques
être rares… intrusions délaissées quasiment depuis le début mais également à un durcissement de la
de l’hiver. Mais le temps demeure variable et défense britannique - que ce soit au sol ou
ne permet pas d’opérer tous les jours. dans les airs - qui gagne en efficacité. On aura
Les pertes continuent à être élevées que ce relevé que les Ju 88 commencent à supplanter
soit au sein de la Luftwaffe ou au sol. Malgré numériquement les autres bombardiers tandis
leurs efforts, la RAF et la DCA ne peuvent que la reconnaissance s’appuie de plus en plus
juguler les bombardements massifs. sur des Bf 110.
Le départ vers l’est de nombreuses unités
opérant précédemment sur la Manche va À suivre…
commencer à modifier la donne en faveur de
la RAF. Celle-ci admet avoir perdu en mars La seconde partie de ce travail consacré au
(accidents inclus) : 21 Spitfire, 1 Whirlwind, 1 « Blitz » paraîtra dans le n° 82 de Batailles
Havoc, 21 Blenheim, 2 Beaufighter, 7 Defiant Aériennes, qui sera en kiosque le 20 octobre
et 32 Hurricane. Trente-cinq aviateurs ont été 2017.
tués ; dix-neuf sont portés disparus et quatre
pilotes sont blessés. Ces chiffres couvrent
tant les pertes en Grande-Bretagne que sur le
continent lors des (souvent inutiles) missions
d’intrusion.
De son côté, la Luftwaffe est amputée de
quatre-vingt deux appareils (39 He 111, 2 Do
17, 43 Ju 88, 1 Bf 109 et 8 Bf 110), chiffre
que l’on pourrait porter à quatre-vingt-
dix, soit le double des pertes du mois de
février. Il en est de même pour les pertes
en personnel (tués, disparus ou capturés), soit
97