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enfants, secouristes, journalistes ont été tués par balles,


et des milliers d’autres blessés. Et quelle tragédie faut-
Trump-Netanyahou: l’abjection et le
il redouter ce mardi, jour de la « Nakba », où les
danger Palestiniens vont à la fois enterrer les victimes de
PAR RENÉ BACKMANN
ARTICLE PUBLIÉ LE MARDI 15 MAI 2018 la tuerie de Gaza et manifester en souvenir de la «
catastrophe » de mai 1948, où près de 700 000 d’entre
eux ont été expulsés par la violence et la terreur de
leurs villages ?
Abjecte aussi était l’indécence de Benjamin
Netanyahou célébrant devant ses invités, pendant que
le massacre se déroulait à la frontière de Gaza, ce
« jour glorieux » où le président américain a, selon
À la frontière de la bande de Gaza, lundi 14 mai 2018. © Reuters
lui, « écrit l’histoire » en transférant l’ambassade des
La nouvelle tuerie perpétrée lundi par l’armée États-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem. Mais comment
israélienne à la frontière de Gaza, pendant que s’en étonner ? Conforté dans son mépris du droit,
Benjamin Netanyahou dédiait à Donald Trump ce son aventurisme armé et la certitude d’être impuni
« jour glorieux » où l’ambassade américaine était par les initiatives diplomatiques aussi insensées que
transférée à Jérusalem, confirme qu’un nouveau spectaculaires de son allié et protecteur américain,
désastre est en cours au Moyen-Orient. L’Iran en est pourquoi Netanyahou ne se sentirait-il pas les mains
le prétexte et les Palestiniens, les premières victimes. plus libres que jamais, pour agir comme il l’entend ?
Abjecte. C’est l’adjectif qu’a choisi lundi Amnesty Après avoir largement contribué à plonger dans un
International pour qualifier la violation sauvage des coma sans retour le « processus de paix » avec
droits humains et du droit international par l’armée les Palestiniens, appliqué en Cisjordanie un plan de
israélienne, à la frontière de la bande de Gaza. En colonisation à outrance qui a détruit, dans le silence
moins de quatre heures, les tireurs d’élite israéliens complice de la communauté internationale, tout espoir
ont tué 52 manifestants palestiniens venus protester, d’une solution à deux États, le voici en mesure de
parfois avec des cailloux, des bouteilles incendiaires réaliser grâce à Trump deux de ses projets les plus
ou des pneus enflammés, mais sans armes à feu, contre chers.
le transfert de l’ambassade des États-Unis de Tel-Aviv
À Jérusalem, qui l’empêchera désormais de mettre en
à Jérusalem, et les onze ans de blocus imposés à leur
œuvre son projet d’annexion à la « capitale » reconnue
territoire par Israël. Mardi matin, le bilan s'élevait à 58
par Trump des terres de Cisjordanie, déjà annexées
personnes tuées.
de fait par le mur de séparation ? Et cela, même si
la création de ce Grand Jérusalem s’accompagne
d’un véritable tri ethnique, pour préserver le ratio
de population juive de 60 %. Et même si ce n’est
qu’une étape vers l’annexion future d’une beaucoup
plus grande partie de la Cisjordanie.
Dans la région, où les monarchies arabes n’ont qu’un
À la frontière de la bande de Gaza, lundi 14 mai 2018. © Reuters véritable projet commun – redouter l’Iran –, qui fera
Depuis que les Palestiniens de Gaza ont décidé (le 30 désormais obstacle à sa vieille obsession, partagée
mars) de manifester chaque vendredi, au voisinage de avec Trump : déstabiliser et affaiblir la République
la frontière avec le territoire israélien, pour réclamer islamique ? Voire, c’est le rêve de deux des plus
leur « droit au retour », plus d’une centaine d’adultes, proches conseillers de Trump, provoquer la chute du

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régime et son remplacement par un système à inventer sanctions ses cosignataires, vieux alliés ou non. Ce, en
dans lequel les émigrés iraniens de Californie auraient vertu de l’extraterritorialité extravagante de certaines
leur mot à dire. de ses lois, que le reste de la planète a, jusque-là,
Qu’importe si les expériences précédentes de benoîtement acceptées.
changement de régime les armes à la main par les Dans ce monde, le président des États-Unis peut
États-Unis n’ont pas fait le bonheur des peuples désigner à la tête de ses services de renseignements
intéressés. Et peu contribué à la stabilité de la planète. une femme, Gina Haspel, qui a dirigé en Thaïlande
Un nouvel équilibre, ou plutôt un nouveau une prison secrète où les détenus soupçonnés
déséquilibre est en train de se mettre en place, au d’appartenir à Al-Qaïda étaient torturés. Il peut
Moyen-Orient. Et il fait peur. Il repose sur la proximité aussi envoyer à Jérusalem pour célébrer le transfert
de Netanyahou et Trump et la porosité idéologique de l’Ambassade américaine son conseiller pour les
de leurs entourages. Sur la rencontre des évangélistes affaires évangéliques, Robert Jeffress, un pasteur
sionistes – parfois antisémites – qui ont porté l’un au baptiste qui estime que « les juifs doivent aller en enfer
pouvoir aux États-Unis et des sionistes nationalistes » comme une bonne partie des chrétiens non « born
ou messianiques qui soutiennent l’autre en Israël. again », et que les musulmans sont « le mal ».
Sur leur commun mépris du droit international, du Face aux deux séismes diplomatiques que sont la
multilatéralisme, des droits humains. Sur leur goût sortie unilatérale des États-Unis de l’accord de Vienne
partagé des faits accomplis et des coups d’éclat. Sur avec l’Iran et la reconnaissance par Washington de
leur conviction aussi que la force peut être utilisée à Jérusalem comme capitale d’Israël – deux événements
chaque instant comme outil de « négociation ». Et donc accueillis comme des victoires par Netanyahou –,
de coercition ou de punition. les réactions de la planète sont, pour le moment,
Il repose aussi sur la convergence inédite de la majorité modestes. À un point dérangeant. Face au massacre
du monde sunnite du Moyen-Orient, derrière le des manifestants gazaouis, elles sont tout aussi
nouveau maître de l’Arabie saoudite Mohammed ben timorées. Londres appelle Israël au « calme et à la
Salmane, avec Israël et les États-Unis. Convergence retenue ». Le secrétaire général de l’ONU se déclare
dont les premières victimes sont, une fois de plus les « particulièrement inquiet ». L’Union européenne
Palestiniens, désormais sommés, par leurs « frères » exhorte Israël à « la plus grande retenue ». À Paris,
arabes d’accepter un plan échafaudé dans leur dos le Quai d’Orsay a appelé à prévenir « un nouvel
par les conseillers de Trump et de Netanyahou. Plan embrasement » avant qu’Emmanuel Macron, dans la
dont les premières lignes connues ont été jugées soirée, « condamne les violences des forces armées
inacceptables à Ramallah. israéliennes contre les manifestants ».
Nous vivons désormais dans un monde déraisonnable L’idée, apparemment, n’est venue à personne de
et inquiétant où le premier ministre israélien peut se proposer, par exemple, la reconnaissance symbolique
livrer à un spectacle ridicule, accompagné d’un bric- de l’État palestinien. Ou de mettre enfin à l’étude un
à-brac documentaire qui ne prouve rien, pour nous régime de sanctions internationales – européennes ? –
livrer un secret qui n’en est pas un. Et où le président destinées à faire comprendre aux dirigeants israéliens
de la nation la plus puissante de la planète invoque ce qu’ils ne pourront pas toujours tuer impunément. En
faux secret pour bafouer la signature de son pays, et attendant de trouver le courage de dire aux dirigeants
les résolutions des Nations unies, tout en menaçant de américains qu’ils ne sont pas chargés de faire, avec
leurs alliés, la police du monde.

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