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ACTES DE LA 7ème ASSEMBLÉE EUROPÉENNE DES FRATERNITÉS LAÏQUES DOMINICAINES

ANNEXE Vc

HOMÉLIE DU FR. DAVID KAMMLER


(Dt 11,18.26-28 / Ro 3,21-25.28 / Mt 7, 21-27)

Je ne sais pas si vous avez déjà pris le métro à Londres. A chaque fois qu’un train arrive ou repart
d’une station, une voix automatisée réclame l’attention des voyageurs à intervalles réguliers :
"ATTENTION A L’ESPACE EN BORDURE DU QUAI !", c’est-à-dire à l’écart entre le train et le quai.

La voix de Jésus dans l'évangile d’aujourd'hui réclame elle aussi notre attention, elle nous
demande d’être attentifs à l'écart entre ce que nous confessons dans les prières qui expriment
notre foi ("Seigneur, Seigneur") et ce que nous faisons quand nous mettons en pratique nos
convictions de fidèles croyants ("faire la volonté de Notre Père qui est dans les cieux"). Le
langage de la partie hébraïque de la Bible qualifie de "mensonge" cet écart, cette distance. En
hébreux, il n'y a donc qu'un seul terme pour traduire "parler" et "agir" : DAVAR. "L’action" est la
conséquence nécessaire de ce que nous exprimons et de ce que nous prêchons oralement,
tandis que la "parole" décrit le pourquoi de notre comportement.

Etablie sur les fondements de nos convictions et soutenue par nos actions, notre mission
dominicaine devient crédible et durable en dépit des soubresauts souvent terrifiants, des
ouragans et des tremblements de terre (cf. Mt 7, 25a) qui agitent notre société moderne à
l’évolution si rapide. Prêcher dans les tempêtes de notre monde séculier pourrait signifier "faire
la vérité", tendre vers l'unité entre nos paroles et nos actions; retrouver une stabilité nouvelle,
fondée sur le roc de la vérité de Dieu, incarnée en Jésus Christ le "Verbe de Dieu". En lui nous
constatons que la parole prononcée et l'action accomplie sont absolument identiques. Marcher
aujourd’hui à sa suite comme disciple ne veut pas dire d’atteindre la même perfection, mais
implique néanmoins d’essayer de réduire l'écart entre nos bonnes intentions et notre
comportement. Nous n'avons pas besoin d'employer ni même d'inventer de nouveaux mots
pour redire les expressions classiques du contenu essentiel de notre foi, mais de prêcher de
façon plus visible par l’action.

Comme les paroles "Seigneur, Seigneur" de l'Evangile, les termes de "SAUVEGARDE DE LA VIE
et de la CREATION DE DIEU et de "JUSTICE et PAIX" figurent dans nos messages écrits ou dans
les textes que nous prions. Mais comment peut-on prêcher ces paroles par notre "faire" ?
Dans nos rencontres régulières, ces mots devraient être un défi : prier ensemble et nous
encourager à faire ce que nous disons dans la prière, un peu comme un obstétricien devant
quelqu’un d’affaibli dont la vie est en danger, ou comme un avocat dans une situation
d'injustice ou de conflit. Parfois, nous tenons notre regard fixé sur les endroits en proie à des
troubles sur d’autres continents, sans voir ceux qui se trouvent autour de nous ni les liens
économiques et politiques qui existent parfois entre les deux. Un moyen typique de prêcher
dans notre monde sécularisé peut être de collaborer avec des organisations – qui ne
doivent pas nécessairement d’ailleurs avoir des racines chrétiennes – pour relever des défis
communs qui mettent en jeu la motivation des uns et des autres.

REDEMPTION, SALUT et RECONCILIATION sont des mots que nous employons souvent dans nos
textes liturgiques. Mais même s'ils sont gravés en or pur, ils doivent devenir chair, ils doivent
s’incarner dans nos expériences de vie. Vivons-nous vraiment une vie de communauté qui
puisse être considérée comme une prédication, où l’on est accepté non seulement avec les
côtés bons et agréables de son caractère, mais aussi avec ses côtés sombres et
problématiques ? Quelle est l’atmosphère de nos réunions? Y a-t-il un climat d'ouverture
permettant aux membres de respirer "l'oxygène" qui les libère des obligations qui alourdissent
de tant de façons notre vie dans le monde ? Acceptons-nous ceux dont l’histoire personnelle ne
leur permet pas de devenir membres à part entière, mais qui peuvent être nourris de la même
nourriture biblique et spirituelle en participant activement à notre vie de communauté ?

Nous nous disons FRERES et SŒURS, membres de la même FAMILLE, nous sommes fiers des
structures DEMOCRATIQUES de nos constitutions. Mais au sein des branches de notre Ordre,
les sœurs et les laïcs ne sont pas toujours considérés comme des compagnons de
prédication sur le même pied d’égalité et les femmes ne participent pas activement aux
équipes de prédication locales. Les apôtres eux-mêmes avaient du mal à accepter les
femmes comme témoins et prêcheurs de la résurrection de Notre Seigneur. Bien sûr, égalité
ne veut pas dire imitation exacte. Il y a des charismes différents mais un même Esprit. Il ne
suffit pas que les branches de notre Famille dominicaine se retrouvent pour la fête de St
Dominique ou pour les professions et les ordinations, bien que ce soit une bonne tradition.
Avant qu'une collaboration véritable puisse fonctionner toute l'année, il doit y avoir une
conversion complète du cœur et de l'âme, nous permettant de nous respecter mutuellement
comme frères et sœurs dans la prédication de défis communs.

Nous sommes tous prêcheurs de l'Amour incarné de Dieu en Jésus-Christ. Comme la


Parole de Dieu, la parole de notre prédication doit elle aussi s’incarner : "Ces paroles que je
vous dis, vous les mettrez sur votre cœur et dans votre âme, vous les attacherez comme un
signe sur votre main, comme un bandeau à votre front". Ces exhortations du livre du
Deutéronome dans la première lecture de la liturgie de ce dimanche sont à l'origine de la
coutume juive de porter des "tefillin", c’est-à-dire deux petites boîtes en cuir contenant des
rouleaux de la Torah et attachées aux bras gauche et au front afin de se souvenir de se
comporter selon les commandements de Dieu. L'intelligence, le cœur et les mains, la
pensée, la prière et l'action doivent travailler ensemble pour accomplir la volonté de Dieu.

Chers frères et sœurs, quand nous portons la croix noire et blanche de notre Ordre autour
du cou, ou l'écusson dominicain "VERITAS" sur notre blouse ou notre veste, on pourrait dire
que cette croix ou cet écusson est un "tefillah" chrétien, un rappel de la nécessité de
prêcher la Vérité – EN ACTES. C'est exactement le défi de l'évangile d’aujourd'hui, qui
constitue un message provocateur pour notre 7ème Assemblée européenne, ici en
Slovaquie. Il ne faut pas que les résultats de vos délibérations restent de simples piles
d’exemplaires imprimés sur du papier, mais qu’ils soient multipliés dans nos communautés
intellectuellement ("...avec l'âme"), émotionnellement ("...avec le cœur") et par-dessus tout
en les mettant en pratique ("...avec la main") ! Nous allons maintenant professer notre foi :
 Prions pour que l'écart entre nos paroles et nos actes soit aussi réduit que possible.
 Espérons que la main tendue de la miséricorde de Notre Seigneur nous permettra
d'oser faire le pas et de quitter pour de bon le "quai de nos convictions" (c’est-à-dire
ce qui doit être fait, nos bonnes paroles, nos résolutions et nos programmes
soigneusement formulés) pour monter dans le "train en marche" des actions
convaincantes, même si les débuts sont très lents.
 Confirmons mutuellement ici que notre "maison de foi" précaire est bien bâtie sur
les fondements de L'AMOUR de Dieu qui vient nous soutenir, offert à nous par notre
frère Jésus-Christ. A partir de ce "roc", prenons notre élan main dans la main, en
frères et sœurs dominicains, pour monter dans le train qui va dans la direction
d'une mission commune plus efficace !

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